Lycée Chevalier : commémoration de la Grande Guerre

[chevalier]

Bonsoir,

Dans ce même post, je vais vous livrer le fruit de nos recherches sur les 33 anciens du lycée. Nous les avons honorés dans l’ordre chronologique de leur décès. Je vais les présenter en trois parties : le texte lu par les élèves, les sources et des photos et un commentaire sur le parcours du soldat. Cette dernière partie n’a pas été évoquée lors de la cérémonie pour des raisons de timing.

Notre lycée est l’un des plus vieux de Normandie puisqu’il a été créé en 1689, il y a 325 ans. Il borde l’ancien champ de foire.


Pendant la Grande Guerre, il a été réquisitionné comme hôpital complémentaire HC n° 8 Domfront - Collège municipal, place du Champ-de-Foire - 50 lits, Annexes: Ecole municipale de filles, rue Godras - 44 lits (Jean Riotte) malheureusement le SAMHA n’a pas d’archives sur le lycée. Un autre hôpital, HA n° 24 Domfront - Institution libre de jeunes filles l'Ange gardien, rue d'Alençon - 40 lits et l’hôpital civil près de la gare complète le service de santé à Domfront.


Sources des cartes postales anciennes : Delcampe

Serge Ridard

[RichardEllis]

Bonsoir M Ridard et bonsoir à tous
Bravo aux profs et aux élèves. Les photos sont très impressionnantes.
Bien cordialement
Richard

[chevalier]

Bonsoir,

juste la photo finale de la cérémonie. avant le poiré (cidre de poires spécialité du domfrontais) d'honneur

Dans quelques instants je publie le premier de nos anciens.
Photo L Letendre.
Serge Ridard

[chevalier]

1- Le caporal Charles BULON est né le 20 octobre 1892 à Domfront, habite St Bomer-les-Forges, commune du département de l’Orne au nord de Domfront. Ses parents Auguste Eugène Bulon et Lesellier Marceline tiennent un magasin de vêtements où leur fils est employé.
Charles s’engage le 19 mars 1913 pour 3 ans et est incorporé au 130ème RI. Charles Bulon est nommé caporal le 10 novembre 1913. Il participe donc aux premières batailles dans lesquelles le 130ème RI avec le 124ème RI, 15ème brigade de la 8ème DI, est soumis à rudes épreuves : Magiennes le 10 août 1914 et surtout Virton (Belgique) le 22 août. Ce matin là, le 130ème RI, avant-garde de la division, est anéanti et Charles BULON est l’un des 2000 morts, il avait 22 ans. L’avis officiel de sa mort date du 15 mars 1915, sans doute après que les listes des prisonniers de guerre n’aient pas révélé son nom. Il repose vraisemblablement parmi les 2139 soldats inconnus du cimetière de Virton.

Texte lu par Léa élève de terminale scientifique.
Sur la photo ci-dessous, Charles au second rang et ses parents au dessus.
Photo de famille, collection A. Hairie arrière petit cousin de Charles
Sources : AD Orne cote R1222 image 456,
Commentaires : Comme son nom l’indique, une mine de fer et ses forges ont longtemps fait la prospérité de St Bomer-les-Forges. Le 130ème RI est partagé entre deux casernements : le 1er bataillon à la caserne de La Harpe à Domfront et les deux autres bataillons à Mayenne (53), caserne Meyran.




Par contre le JMO est très bref sur cette sanglante journée. Pour plus de précision voir :
pages1418/forum-pages-histoire/aout-191 ... 6225_1.htm
pages1418/forum-pages-histoire/virton-a ... 0665_1.htm
http://www.sambre-marne-yser.be/article ... article=94
Serge Ridard

[chevalier]

2- Le soldat Louis DELAUNAY est né le 5 novembre 1889 à Domfront. Ses parents, Lucien Delaunay et Bonhomme Louise exercent, à Domfront, la profession de plâtrier et leur fils travaille avec eux. Il fait son service militaire du 5 octobre 1910 au 21 septembre 1912 dans le 104ème RI.. Au combat d’Ethe (Belgique), le 22 août 1914, Louis DELAUNAY, mobilisé depuis le 3 août, est mort de ses blessures à l’âge de 25 ans. L’avis officiel de sa mort date du 15 mars 1915. Il est décoré de la médaille militaire par décret du 1 octobre 1918, loi du 15 juin 1920, JO du 19 février 1922. Il repose au cimetière français de Laclaireau tombe n° 336.
https://www.youtube.com/watch?v=AkRtr5W3IZo : 3:09 la photo de la tombe :
Texte lu par Morgane, élève de seconde.

Sources : AD Orne cote R1197 image 128,
Commentaires : Le 104ème régiment d'infanterie a lui aussi deux casernements : Argentan (1er bataillon à la caserne Molitor) dans l’Orne et Paris (les deux autres bataillons (Caserne de Latour-Maubourg dans le 7ème arrondissement).


Le 104ème RI est le régiment dans lequel les jeunes du canton de Domfront sont incorporés. Avec le 103ème RI (Paris Alençon) il forme la 14ème brigade de la 7ème DI. Lors de la bataille de la Marne le 104ème RI avec le 103ème a été transporté par les taxis parisiens qui ont donc transporté des anciens élèves de notre lycée.
Pour le 104ème RI, le JMO est lui aussi bref pour le combat d'Ethe. Lire :
pages1418/forum-pages-histoire/Rregimen ... 3041_1.htm
http://www.sambre-marne-yser.be/article ... rticle=100
Paul Pastiel, contributeur de ce site a écrit : "Pour le soldat Louis DELAUNAY du 104e RI, tombé à Ethe le 22/08/1914, il repose toujours au cimetière français de Laclaireau tombe n° 336. Les tombes de ce cimetière ont été particulièrement honorées le 22 août dernier, par les habitants d'Ethe, lors des commémorations du centième anniversaire de cette sanglante bataille! " A proximité de la commune belge de Ethe, ce cimetière est le lieu de repos de 304 soldats français tués lors des combats de août 1914.

[chevalier]

3-Le soldat Gustave Michel Gabriel (prénom d’usage) TAPHOREL est né le 20 octobre 1885 à St Denis-sur-Sarthon (Orne), commune située sur la route nationale 12 (Paris-Brest). Ses parents Gustave Taphorel et Vaugon Oséa exercent la profession d’aubergiste. Il fait son service militaire du 7 octobre 1906 au 25 septembre 1908 au 103ème RI, car St Denis-sur-Sarthon est dans le canton d’Alençon. Il est alors répétiteur au collège de Vire (Calvados). Mobilisé le 4 août 1914, il rejoint le 1 RIC à Cherbourg. Il participe aux combats de Rossignol en Belgique, le 22 août 1914. Le 1 RIC a 2 000 morts. Il est blessé et meurt le 30 août 1914 à Châlons-sur-Marne à l’âge de 29 ans. On ne sait pas où il est enterré.

Texte lu par Aurélie élève de terminale santé social (ST2S)
Photo L Letendre.
Sources : AD Orne, cote R1164, image 408

Commentaires : St Denis-sur-Sarthon est sur la ligne de chemin de fer Alençon-Domfront, ce qui explique sa scolarité au Collège de Domfront, à cette époque les internes ne rentrant que trois fois par an : Noël, Pâques et les grandes vacances.


Il fait de brillantes études dans notre lycée puisqu’il est répétiteur au collège de Bernay (Eure) en 1906 lors du conseil de révision.
Je n’ai pas pu déterminer quel jour il a été blessé, ni à quel hôpital il est décédé. Si quelqu’un a une idée, merci.

pages1418/forum-pages-histoire/autre/ao ... 3644_1.htm

[chevalier]

4- Le caporal Marcel PLESSIS est né le 22 juin 1885 à St Bomer-les-Forges. Ses parents Henri Plessis et Roussel Marie étaient cultivateurs à Dompierre (Orne). Marcel Plessis a repris la ferme des parents qui sont décédés avant 1905. Il fait son service du 8 octobre 1907 au 21 septembre 1909 au 104ème RI. Le 5 août 1914, il rejoint son régiment, le 304ème RI (54ème DIR), régiment de réserve du 104ème RI. Il meurt le 2 septembre 1914 à l’ambulance n° 3 de la 72ème DIR à Dombasle-en-Argonne, à l’âge de 29 ans. Il est enterré au carré militaire de Dombasle-en-Argonne, tombe collective 1.

Texte lu par Victor élève de seconde.

Sources : AD Orne, cote R1168, image 533, JMO du 304 RI, JMO service de santé 72 DI.


Commentaires : Dompierre est une commune voisine de St Bomer et qui possède elle-aussi des forges et des mines de fer. C’est un grand filon de fer exploité dans la région depuis le Moyen-Age.

Je suppose qu’il est blessé le 31 août au combat de la ferme de Vaux-Marie à Béthincourt (Meuse). Ce combat a permis d’éviter l’encerclement de Verdun au moment où le Général Joffre transfert des troupes de cette région vers le camp retranché de Paris et en particulier le régiment d’active correspondant au 304ème RI, le 104èmè RI. Le soir du combat, 450 hommes sur 1200 répondent à l’appel. Voir Rable n°5

L’ambulance n° 3 a reçu mission, le 2 septembre, d’évacuer les blessés du combat, tout régiment confondu (cf. JMO)

[chevalier]

5- Le soldat Gaston RABLE est né le 2 décembre 1884 à Domfront. Son père Paul Rable est décédé jeune et sa mère Breillot Léontine vit de ses rentes. Gaston est clerc d’huissier à Domfront. Il fait son service du 8 octobre 1906 au 10 septembre 1907 au 104ème RI. Le 5 août 1914, il rejoint son régiment, le 304ème RI (54ème DIR), régiment de réserve du 104ème RI. Blessé, il meurt le 20 septembre 1914 à l’hôpital auxiliaire 202 de Neufchâteau dans les Vosges, à l’âge de 30 ans. Il repose à la nécropole nationale de Neufchâteau, tombe individuelle n° 802.

Texte lu par Maël élève de seconde.

Sources : AD Orne, cote R1161, image 362, JMO du 304 RI

Commentaires : Domfront, ancienne vicomté du duché de Normandie, est une ville avec un tribunal et donc elle compte de nombreux notaires, avocats et huissiers.
La fiche matricule de Gaston, porte la date du décès le 27 septembre et les deux autres sources MPLF et sépulture la date du 20 septembre. Je n'ai pas vérifié le registre de décès de Domfront de 1914 car il n'est pas en ligne.

Du 14 au 17 septembre, le régiment creuse des fosses et enterre les cadavres des soldats tués aux combats de Vaux-Marie et Chaumont-sur-Aire (7 septembre).


Sachant le temps nécessaire pour rejoindre l'hôpital (il y a au moins 100 km, peut-être plus par le train), je pense qu’il est parmi les 202 blessés du combat de Vaux-Marie au cours duquel 13 officiers, 9 sous-officiers et 31 soldats sont morts et 643 sont portés disparus.




L’hôpital 202 : HA n° 202 Neufchâteau - Collège de Garçons, 30 rue Sainte-Marie -201 lits – ADF (Jean-Riotte)

[chevalier]

6- Le soldat Albert THOMAS est né le 3 août 1882 à Domfront. Son père Albert Thomas est greffier de justice (cf. Rable n°5) et sa mère Ernestine Mallet est sans profession. Albert est employé au greffe tribunal civil de Domfront. Il est appelé à l’activité le 16 novembre 1904 au 104ème RI. Il est réformé par la commission spéciale de Paris le 17 décembre 1904 pour « faiblesse de constitution ». Le 11 août 1914, il rejoint cependant son régiment le 104ème RI. Il est tué à l’ennemi le 2 octobre 1914 à Laucourt au combat de Beuvraignes à l’âge de 32 ans. Il repose au cimetière de Domfront, face au carré militaire.


Photos L Letendre. On remarquera le mauvais état de la tombe.
Texte lu par Kenza élève de seconde.

Sources : AD Orne cote R1146 image 219, JMO du 104 RI

Commentaires : Le congé de réforme sera renouvelé par la commission spéciale de Mayenne le 11 décembre 1905 pour les mêmes raisons. Le 3 décembre 1906, il est cependant reconnu apte par la même commission et versé dans la réserve. C’est assez surprenant. Un passe-droit ???

Au vu de la date de son arrivée au régiment, je pense qu’il n’a pas dû participer au combat d’Ethe et arriva en renfort les jours suivants. A-t-il participé à la bataille de la Marne, je ne puis l’affirmer.
Lors de la course à la mer, le 104ème RI est envoyé dans la région de Roye (Somme) le 20 septembre et combat le 18ème CA allemand. Le 1er octobre 1914, « le troisième bataillon occupe les tranchées entre Laumont et Beuvraignes. Cantonnement à Beuvraignes pour 2 compagnies, les 2 autres compagnies restent dans les tranchées ». Le 2 octobre, « le troisième bataillon est attaqué à 6h. L’engagement dure toute la journée. Le bataillon est obligé de se replier sur les tranchées au nord de Tilloloy ». Je suppose qu’Albert était au 3ème bataillon. Contrairement aux autres jours, le nom des tués n’est pas mentionné en raison d’un rapport du chef de bataillon non joint, hélas, au JMO.

[chevalier]

7- Le soldat Georges CHAUVIN est né le 6 mai 1882 à Domfront. Son père Auguste Chauvin est conducteur de voiture et sa mère Elise Amiard est tient un café. Georges travaille avec son père. Il fait son service du 16 novembre 1903 au 18 septembre 1906 au 14ème hussard d’Alençon. Le 12 août 1914, il rejoint son régiment, le 304ème RI. Il est mort de maladie contracté en service (fièvre typhoïde), le 20 octobre 1914, à l’hôpital temporaire 10 à Thierville, près de Verdun. Il avait 32 ans. Il repose à la Nécropole Nationale de Dugny-sur-Meuse, tombe individuelle 1485 bis.

Texte lu par Laure élève de seconde.

Sources : AD Orne, cote R1146, image 415, JMO du 304 RI
Commentaires : Le café Chauvin est situé au grand carrefour de Domfront sur la route Paris-Le-Mont-St-Michel, au pied de la ville médiévale. Les remises des voitures de location du père et du fils Chauvin sont situé rue des Fossés-Plisson juste à côté du café. (Voir photos). Ces maisons ont été détruites en juin 1944 lors de la bataille de Normandie http://chevalier.etab.ac-caen.fr/spip.php?article358 Le frère aîné de Georges, Auguste sera tué le premier jour de la bataille de Verdun.

Au vu de sa date d’incorporation, je pense qu’il a dû rejoindre son régiment après les premières batailles.
Le régiment a été décimé au combat de la ferme de Vaux-Marie (cf. Rable n°4 et Plessis n°5). Le 28 septembre, le régiment est réorganisé grâce à 1000 hommes de renfort.
Mi-octobre 1914, le régiment est à Maizey près du fort de Troyon, sur les côtes de Meuse. Il travaille à la construction de nouvelles parallèles reliées par des boyaux autour de la côte 322 en vue de l’investir. (JMO) Le 15 octobre, le régiment reçoit un autre renfort de 3 officiers et 303 hommes. En fait-il partie de ces deux vagues de renforts ?


L’incubation de la bactérie qui occasionne cette fièvre, est d’une à trois semaines, ce qui entraine une hospitalisation vers le début octobre. Comme c’est le manque d’hygiène qui est la principale cause de cette maladie, je pense que Georges est arrivé sur le front au moment de la bataille de Vaux-Marie. A-t-il été contaminé lors des journées du 14 et 15 septembre lorsque les survivants du combat de Vaux-Marie ont en terré leurs morts ? (cf. Rable n°5)

L’hôpital temporaire 10 à Thierville, près de Verdun est le HC n° 10 Verdun - Ecole, cinéma, maisons particulières, rue de Jardin-Fontaine, commune de Thierville (Jean Riotte).