Bonsoir,
Non, ce canon est bien une construction originale.
Cordialement,
Guy François.
Encore un quizz d'été!
Re: Encore un quizz d'été!
Bonjour,
À partir de l'indice :
… qui a peut-être loupé l'épisode des essais des canons en question à Calais ?
Cordialement,
loloastre
À partir de l'indice :
J'ai trouvé la mention de canons de 155 envisagés par le colonel de Reffye en 1875 : La source (voir ici) est une histoire technique de l'artillerie rédigée par le général J. Challéat…ALVF a écrit :la bonne réponse mettra en difficulté rien moins que le général Challéat
… qui a peut-être loupé l'épisode des essais des canons en question à Calais ?
Cordialement,
loloastre
Re: Encore un quizz d'été!
Bonsoir,
Bravo à Loloastre qui a apporté la bonne réponse!
Il s'agit donc du canon de 155 mis au point par le colonel de Reffye dont les essais ont eu lieu devant la Commission de Calais lors des années 1878-1880.
Le général Challéat n'a donc pas trouvé la trace de la réalisation de ce matériel lors de la préparation de son ouvrage de référence relatif à l'histoire technique l'artillerie de terre en France de 1816 à 1919 (ouvrage demeuré inachevé et dont les deux volumes parus décrivent la période de 1816 à 1910).
De fait, les archives de l'artillerie montrent que les pièces relatives à ce matériel ont été reléguées dans l'interminable liste des réalisations des inventeurs où une masse de projets, parfois farfelus, côtoie quelques projets d'illustres artilleurs. Ainsi, le premier répertoire sérieux des archives de l'artillerie, établi par l'adjudant Loisier-Veron en 1989, évoque en une ligne les pièces d'archives concernant ce canon de 155 de Reffye à la page 490 de son 2e tome, pièces datant de 1875 à 1877. Un inventaire plus récent des archives de la Commission de Calais évoque des rapports de tirs effectués au cours des années 1878 à 1880.
Ce canon était pourtant ambitieux car il est beaucoup plus puissant que les canons de 155 L proposés à la même époque (dont celui du colonel de Bange adopté en 1877).
La photographie montre un tube beaucoup plus imposant et l'affût est un affût de place à pivot avant et frein hydraulique du type mis au point par le colonel de Reffye pour les canons de côte de 19 cm et de 24 cm.
Ce canon n'avait pas vocation à servir dans l'artillerie de côte car les projectiles lourds de l'époque n'étaient chargés qu'en poudre noire et il fallait des calibres beaucoup plus gros pour combattre les navires de guerre.
Quelle était donc l'idée directrice du colonel de Reffye en construisant un "gros" canon de 155 ? Sous réserve de consultation de documents, il est possible d'envisager que cet officier visionnaire pensait à l'établissement d'une pièce d'action lointaine visant à interdire à un assaillant de disposer des canons lourds à bonne portée des forts et batteries d'une place forte. Dans cette optique, on comprend mieux l'utilisation d'un affût à grand champ de tir horizontal instantané permettant de battre une très large bande de terrain susceptible d'être employée par un assiégeant.
On sait que ce genre de matériel nous a manqué jusqu'en 1914 rendant la fortification permanente vulnérable à l'action de pièces à longue portée.
On peut expliquer aussi ce mutisme tant des décideurs que des historiens par quelques facteurs qui mériteraient de plus amples développements:
En effet, la réputation de de Reffye a sérieusement pâli à partir des années 1877-1879:
-"on" ne pardonne pas à cet officier d'avoir été officier d'ordonnance de Napoléon III et d'avoir administré à grand frais les ateliers de Meudon en dehors des règles administratives usuelles jusqu'en 1870.
-de Reffye a été longtemps soutenu par Thiers compte-tenu de son action pendant la guerre de 1870-1871 où il a fait surgir du néant des ateliers de construction de son excellent canon de 7 et ayant ensuite assuré une construction rapide de ces mêmes matériels au cours des années 1871 à 1876.
-de Reffye n'a pas proposé de nouveaux canons de campagne durant la période de 1872 à 1877 où il s'agissait de créer un nouveau système d'artillerie de campagne.
-pire, après l'adoption des canons de campagne de Bange de 80 et 90 mm, le colonel de Reffye a mis en cause l'emploi des charges de ces matériels en gargousses. Le colonel de Reffye était partisan de l'emploi des charges dans un "étui" ou une "douille" métalliques, seules capables d'assurer la bonne conservation des poudres dans les pires conditions de la guerre de campagne.
-de Reffye est alors ouvertement accusé par le directeurs de l'artillerie et du comité de l'artillerie de mettre en péril l’œuvre accomplie en remettant en cause la fiabilité des matériels adoptés. Il est alors assez facile de laisser croire que les réactions de de Reffye sont causées par la déception de voir son œuvre remise en cause (canons de 5 et de 7 de Reffye adoptés provisoirement à l'issue de la guerre).
Il faut noter que tous les adversaires de de Reffye sont des "républicains avancés" appartenant aux mêmes cercles de pensée qui voient de potentiels "maréchal de Saint-Arnaud" en tout officier ayant connu la faveur sous le second-empire.
Bref, la nomination au généralat de de Reffye permet de confier à l'intéressé le commandement de l'artillerie d'un corps d'Armée.
On sait, malheureusement, que le général de Reffye meurt dès 1880 après une chute de cheval.
Il est alors facile de mettre un terme à toutes les audaces de l'inventeur et ensuite de passer volontiers sous silence ses réalisations. Il devient d'usage de se moquer du canon à balles de Reffye, "l'arme secrète" de l'empire, de minimiser la création et la construction du canon de 7 de Reffye, largement supérieur aux matériels prussiens tant vantés. Le général Challéat n'aborde curieusement pas dans son ouvrage la genèse des matériels d'artillerie de côte des années 1870-1880 et semble donner raison à de Bange pour l'emploi des gargousses et non pas des douilles dans l'artillerie de terre.
A noter que les prussiens, qui ont subi l'action mortelle des canons à balles en 1870 et vu à l’œuvre les premiers matériels de canons de 7 à la fin de la guerre, sont beaucoup moins critiques des inventions de de Reffye.
Dans ces conditions, évoquer le canon de 155 de De Reffye nous a au moins permis d'occuper les temps de canicule de cet été 2025!
Merci à tous les participants,
Cordialement,
Guy François.
Bravo à Loloastre qui a apporté la bonne réponse!
Il s'agit donc du canon de 155 mis au point par le colonel de Reffye dont les essais ont eu lieu devant la Commission de Calais lors des années 1878-1880.
Le général Challéat n'a donc pas trouvé la trace de la réalisation de ce matériel lors de la préparation de son ouvrage de référence relatif à l'histoire technique l'artillerie de terre en France de 1816 à 1919 (ouvrage demeuré inachevé et dont les deux volumes parus décrivent la période de 1816 à 1910).
De fait, les archives de l'artillerie montrent que les pièces relatives à ce matériel ont été reléguées dans l'interminable liste des réalisations des inventeurs où une masse de projets, parfois farfelus, côtoie quelques projets d'illustres artilleurs. Ainsi, le premier répertoire sérieux des archives de l'artillerie, établi par l'adjudant Loisier-Veron en 1989, évoque en une ligne les pièces d'archives concernant ce canon de 155 de Reffye à la page 490 de son 2e tome, pièces datant de 1875 à 1877. Un inventaire plus récent des archives de la Commission de Calais évoque des rapports de tirs effectués au cours des années 1878 à 1880.
Ce canon était pourtant ambitieux car il est beaucoup plus puissant que les canons de 155 L proposés à la même époque (dont celui du colonel de Bange adopté en 1877).
La photographie montre un tube beaucoup plus imposant et l'affût est un affût de place à pivot avant et frein hydraulique du type mis au point par le colonel de Reffye pour les canons de côte de 19 cm et de 24 cm.
Ce canon n'avait pas vocation à servir dans l'artillerie de côte car les projectiles lourds de l'époque n'étaient chargés qu'en poudre noire et il fallait des calibres beaucoup plus gros pour combattre les navires de guerre.
Quelle était donc l'idée directrice du colonel de Reffye en construisant un "gros" canon de 155 ? Sous réserve de consultation de documents, il est possible d'envisager que cet officier visionnaire pensait à l'établissement d'une pièce d'action lointaine visant à interdire à un assaillant de disposer des canons lourds à bonne portée des forts et batteries d'une place forte. Dans cette optique, on comprend mieux l'utilisation d'un affût à grand champ de tir horizontal instantané permettant de battre une très large bande de terrain susceptible d'être employée par un assiégeant.
On sait que ce genre de matériel nous a manqué jusqu'en 1914 rendant la fortification permanente vulnérable à l'action de pièces à longue portée.
On peut expliquer aussi ce mutisme tant des décideurs que des historiens par quelques facteurs qui mériteraient de plus amples développements:
En effet, la réputation de de Reffye a sérieusement pâli à partir des années 1877-1879:
-"on" ne pardonne pas à cet officier d'avoir été officier d'ordonnance de Napoléon III et d'avoir administré à grand frais les ateliers de Meudon en dehors des règles administratives usuelles jusqu'en 1870.
-de Reffye a été longtemps soutenu par Thiers compte-tenu de son action pendant la guerre de 1870-1871 où il a fait surgir du néant des ateliers de construction de son excellent canon de 7 et ayant ensuite assuré une construction rapide de ces mêmes matériels au cours des années 1871 à 1876.
-de Reffye n'a pas proposé de nouveaux canons de campagne durant la période de 1872 à 1877 où il s'agissait de créer un nouveau système d'artillerie de campagne.
-pire, après l'adoption des canons de campagne de Bange de 80 et 90 mm, le colonel de Reffye a mis en cause l'emploi des charges de ces matériels en gargousses. Le colonel de Reffye était partisan de l'emploi des charges dans un "étui" ou une "douille" métalliques, seules capables d'assurer la bonne conservation des poudres dans les pires conditions de la guerre de campagne.
-de Reffye est alors ouvertement accusé par le directeurs de l'artillerie et du comité de l'artillerie de mettre en péril l’œuvre accomplie en remettant en cause la fiabilité des matériels adoptés. Il est alors assez facile de laisser croire que les réactions de de Reffye sont causées par la déception de voir son œuvre remise en cause (canons de 5 et de 7 de Reffye adoptés provisoirement à l'issue de la guerre).
Il faut noter que tous les adversaires de de Reffye sont des "républicains avancés" appartenant aux mêmes cercles de pensée qui voient de potentiels "maréchal de Saint-Arnaud" en tout officier ayant connu la faveur sous le second-empire.
Bref, la nomination au généralat de de Reffye permet de confier à l'intéressé le commandement de l'artillerie d'un corps d'Armée.
On sait, malheureusement, que le général de Reffye meurt dès 1880 après une chute de cheval.
Il est alors facile de mettre un terme à toutes les audaces de l'inventeur et ensuite de passer volontiers sous silence ses réalisations. Il devient d'usage de se moquer du canon à balles de Reffye, "l'arme secrète" de l'empire, de minimiser la création et la construction du canon de 7 de Reffye, largement supérieur aux matériels prussiens tant vantés. Le général Challéat n'aborde curieusement pas dans son ouvrage la genèse des matériels d'artillerie de côte des années 1870-1880 et semble donner raison à de Bange pour l'emploi des gargousses et non pas des douilles dans l'artillerie de terre.
A noter que les prussiens, qui ont subi l'action mortelle des canons à balles en 1870 et vu à l’œuvre les premiers matériels de canons de 7 à la fin de la guerre, sont beaucoup moins critiques des inventions de de Reffye.
Dans ces conditions, évoquer le canon de 155 de De Reffye nous a au moins permis d'occuper les temps de canicule de cet été 2025!
Merci à tous les participants,
Cordialement,
Guy François.
Re: Encore un quizz d'été!
Bonjour
J'aurai suivi ce quizz intéressant et pas facile ... à l'affût de la conclusion... J'aurai bien apprécié ce partage de connaissances de Guy-François. Merci
J'aurai suivi ce quizz intéressant et pas facile ... à l'affût de la conclusion... J'aurai bien apprécié ce partage de connaissances de Guy-François. Merci
Salutations
Michel
Michel
Re: Encore un quizz d'été!
Bonjour,
Merci, Guy François, de nous avoir proposé ce quizz.
Je me suis prise au jeu de mener l'enquête, grâce à vos indices livrés petit à petit. Je viens encore d''en découvrir que je n'avais pas vus en première approche !
Merci aussi pour toute votre pédagogie déployée pour rendre simple des sujets plutôt complexes à la base pour tous les non spécialistes de l'artillerie.
En particulier vos explications finales qui complètent l'historique du général Challéat, et permettent de mieux comprendre tous les enjeux, stratégies, jeux de pouvoir, arbitrages … pour mettre au point les nouveaux matériels d'artillerie après la guerre de 1870.
Cordialement,
loloastre
Merci, Guy François, de nous avoir proposé ce quizz.
Je me suis prise au jeu de mener l'enquête, grâce à vos indices livrés petit à petit. Je viens encore d''en découvrir que je n'avais pas vus en première approche !
Merci aussi pour toute votre pédagogie déployée pour rendre simple des sujets plutôt complexes à la base pour tous les non spécialistes de l'artillerie.
En particulier vos explications finales qui complètent l'historique du général Challéat, et permettent de mieux comprendre tous les enjeux, stratégies, jeux de pouvoir, arbitrages … pour mettre au point les nouveaux matériels d'artillerie après la guerre de 1870.
Cordialement,
loloastre
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- Messages : 3333
- Inscription : dim. oct. 24, 2004 2:00 am
Re: Encore un quizz d'été!
Bonsoir à tous,
j'ai suivi l'avancée des diverses hypothèses jusqu'au résultat final.
Peut-être que les jours de forte chaleur m'éloignèrent ils de l'écran, me faisant sauter des étapes?
Bravo pour ce sujet difficile et bravo à ceux qui approchèrent puis réussirent à trouver les solutions.
Bonne soirée
cordialement BB
j'ai suivi l'avancée des diverses hypothèses jusqu'au résultat final.
Peut-être que les jours de forte chaleur m'éloignèrent ils de l'écran, me faisant sauter des étapes?
Bravo pour ce sujet difficile et bravo à ceux qui approchèrent puis réussirent à trouver les solutions.
Bonne soirée
cordialement BB
- Août 1914 dans le département des Ardennes : du début août avec l'arrivée et le passage des troupes se concentrant en se dirigeant vers la Belgique, au repli de fin août vers la Marne en résistant sur la Semoy, La Chiers, la Meuse, l'Aisne, la Retourne.
- Diable Noir
- Messages : 196
- Inscription : dim. janv. 14, 2024 10:37 am
Re: Encore un quizz d'été!
bonjour à tous,
merci M.Guy François pour vos quizzs toujours très intéressants, celui ci était un peu difficile pour moi j'ai jeté l'éponge
cette période de l'artillerie était un peu méconnue pour moi, mais grâce à vous à ceux et ceux qui ont trouvés j'ai beaucoup appris encore Bravo
cordialement
diable Noir
merci M.Guy François pour vos quizzs toujours très intéressants, celui ci était un peu difficile pour moi j'ai jeté l'éponge


cordialement
diable Noir
La devise du 61éme R.A.C! " 61 en Avant !
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- Messages : 79
- Inscription : lun. déc. 29, 2014 1:00 am
Re: Encore un quizz d'été!
Merci beaucoup pour ce cour d'histoire de l'artillerie sous couvert de quizz!
C'est une période que je connais mal et lire ce post était d'autant plus intéressant!
C'est une période que je connais mal et lire ce post était d'autant plus intéressant!
Re: Encore un quizz d'été!
Bonjour,
Merci également pour ce quiz instructif (j'ai aussi tenté quelques recherches mais vite reconnu la difficulté !). Ceci m'a amené également à m'intéresser à la biographie du général de Reffye et découvrir son rôle dans la création du musée d'archéologie de Saint-Germain-en-Laye.
Cordialement,
Régis R.
Merci également pour ce quiz instructif (j'ai aussi tenté quelques recherches mais vite reconnu la difficulté !). Ceci m'a amené également à m'intéresser à la biographie du général de Reffye et découvrir son rôle dans la création du musée d'archéologie de Saint-Germain-en-Laye.
Cordialement,
Régis R.