Nivelle

[Denis Rolland]

Bonsoir,
Je relance ici une discussion que l'ai lancé sur le forum témoignage et qui m'a un peu laissé sur ma faim.
Le général Nivelle est régulièrement présenté comme ayant été peu économe de la vie de ses hommes. Pourtant, en 1921 un sondage de popularité est organisé par « Le journal » pour mesurer la popularité des généraux qui n'ont pas été élevé à la dignité de maréchal. Le palmarès de tête est le suivant :
de Castelnau 431281 voix
Gouraud 410066 voix
Mangin 371932 voix
Maunoury 354794 voix
Nivelle 327496 voix
de Goutte 321339 voix
A la fin, avec environ 100000 voix, on trouve Lanrezac, Mazel, Ruffey à 100000.
En 1924 Nivelle a des funérailles nationale, en 1931 ses restes sont transférés aux Invalides, dans le caveau des gouverneurs avec ceux des autres généraux ayant eu des grandes responsabilités.
La mauvaise image de Nivelle semble apparaître après la dernière guerre. Ce serait donc un phénomène récent.
Ma question est la suivante: avez vous des témoignages de combattant sur Nivelle avec la date de publication qui infirment ou confirment cette hypothèse. Je précise bien qu'il s'agit de témoignages de combattants et pas du vôtre.
Merci d'avance,
Cordialement
Denis Rolland

[Denis Rolland]

Bonsoir,
Merci, dans l'almanach du combattant Nivelle devient "l'abominable " en 1957
Cordialement
Denis Rolland

[mireille salvini]

bonjour à tous,bonjour Denis,


pour rappel,je mets ici le lien que vous avez lancé sur la rubrique "témoignages"
pages1418/Pagesvecuesrecitstemoignages/ ... _432_1.htm


pour répondre à votre demande,voici toutes les allusions à Nivelle par un combattant,un des 6 frères Saint-Pierre,dont un des petit-fils a édité toute la correspondance,journaux intimes et photos dans 2 gros volumes intitulés La Grande Guerre entre les lignes ICI


ces allusions sont brèves,parfois énigmatiques,mais se dessine en filigrane un certain portrait de ce général.

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26 octobre 1916 (page 833)

Amand journal

Cette nuit q.q obus tout près de nous.Pluie,c'est navrant ! Pour l'attaque nous avons tiré rien qu'en 75: 18000 obus et beaucoup d'asphyxiants.Contrordre pour l'attaque sur Hardaumont;le général Nivelle veut la préparer plus complètement par artillerie.C'est à mon humble avis,dommage,car ça leur laisse le temps de s'organiser.(aux Allemands)



27 octobre 1916 (page 834)

Amand journal

Mauvais temps.travail beaucoup.Une seule contre-attaque,on va retaper pour prendre,le général Nivelle s'y oppose dans l'après-midi,voulant faire une préparation méthodique d'artillerie.Pourtant les prisonniers le disent et en outre "on sent" qu'il n'y a rien devant nous et le général Passaga ne risquerait pas ses hommes dans une aventure ! Enfin le soir tard,une vingtaine de gros obus sur le PC.Tout est éclaboussé de terre d'abord.




13 décembre 1916 (page 868)

Amand journal

A 3 heures nous apprenons que "notre" général Nivelle est nommé général en chef sur le front français,sûr que le Gal Passaga va nous échapper !!


Amand à Marguerite

Nous avons su ce soir la nomination du général Nivelle:j'en demeure tout surpris et me demande ce qu'il peut bien y avoir là-dessous,car ça me parait extraordinaire.Mon camarade F...reçoit ces jours-ci de drôles de nouvelles de Paris,au sujet de la mentalité qui règne là-bas et de la fin de la guerre:pourvu qu'on n'y fasse pas de bêtises...Comme bien des gens qui sont à Paris maintenant seraient mieux en première ligne dans la boue des tranchées ! Peut-être après un bon stage là-bas s'occuperaient-ils mieux de la guerre que de leurs petites affaires et de politique plus ou moins propre! Et je ne parle pas de la noce....



15 avril 1917 (page 1008)

Amand journal

Vers 5 heures ordre du jour du général en chef: "Grand quartier général le 15 avril 1917- Ordre général n°75- aux officiers,sous-officiers et soldats de l'Armée française.
"L'heure est venue-confiance et courage.Vive la France,général R.Nivelle".
C'est donc le grand coup,puisse-t'il réussir ! A la nuit pluie:comble de guigne.Le bombardement fait rage.Que sera-ce demain.



16 mai 1917 (page 1045)

Amand journal

Je ne reviens pas sur notre offensive.Tu vois que je n'avais pas tort puisque le général Nivelle lui-même est débarqué.Je sais bien que c'est un peu pour aller au-devant du résultat des futures interpellations.....



1er août 1917 (page 1133)

Amand à Marguerite

Tu me parlais,d'après les communiqués,de la préparation de l'artillerie pour l'attaque que cette pluie maudite arrête.Or je trouve dans un journal anglais confirmation de ce que tu me dis;en voici l'idée très exacte:les pertes que les troupes françaises ont subies sous le commandement du général Nivelle ont confirmé le général Pétain dans la façon d'opérer avec des préparations très soignées.Et l'auteur terminait qu'on en était revenu à l'ancienne méthode d'usure:donc patience !



21 juillet 1918 (page 1493)

Amand à Marguerite

citant un communiqué (Wolff) de propagande des Allemands,lors de la 2ème bataille de la Marne:

"Plus le saillant de Reims,qui n'est défendu que pour l'honneur et que nous n'avons pas besoin d'attaquer,sera menacé,plus la situation des Français deviendra intenable.Lorsque Reims sera à la veille de sa chute,que les divisions ne pourront plus en être retirées sans être anéanties,le peuple français donnera à l'homme qui a donné l'ordre de tenir la place ce surnom de "buveur de sang" comme il l'a fait pour Nivelle à la suite de l'offensive sur l'Aisne en avril 1917.Les méthodes du Commandement français sont cruelles,inhumaines,dépourvues de toute intelligence,indignes des principes d'humanité et de civilisation dont l'Entente se glorifie d'être le défenseur"


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amicalement,
Mireille

[Denis Rolland]

Bonjour,
Voici enfin un peu de grain à moudre. Merci beaucoup
Cordialement
Denis Rolland

[LABARBE Bernard]

Bonjour à toutezétous,
Ah Nivelle... Le revoilou. Et oui...
Je crois me souvenir d'une lecture, le général Serrigny (?) aurait dit de Nivelle: "Parlant peu, on croyait qu'il pensait beaucoup"... Et oui certains parlent peu mais n'en pensent pas moins, d'autres parlent peu aussi mais... Passons, Nivelle n'était certainement pas un neuneu mais il s'est obstiné je pense, vu l'énorme préparation de l'affaire, une fois la rupture faite et le grand mouvement en avant fait, il prévoyait même d'évacuer les blessés sur Laon !
Ciel couvert, donc avions d'observation aveugles, ça fait rien on bombarde et on attaque. Ajoutons que cette préparation était bien entendu connue car observée par les allemands les jours et semaines précédentes. Résultat, abris bétonnés intacts, et les germains se remettent à leurs postes aux mitrailleuses quand les gaulois attaquent (et les sénégalais aussi).
Je possède un document publié je ne sais quand juste après la guerre sans doute, de Paul Painlevé ministre de la guerre en 17:
Au maréchal Foch, au maréchal Pétain que, le 15 mai 1917 j'ai eu l'honneur de placer à la tête des armées françaises
Désolé mais pas d'offre de mise en ligne ici (ni ailleurs) car format 25 x 31 cm et 106 pages....
Mais ce que je peux dire c'est qu'il est accablant pour celui qui parlait peu... Accablant !
Oui un obstiné borgne pour ne pas dire aveugle je crois, après toute cette préparation, cette ambition, être celui qui va rompre le front et en finir. Ce n'est tout de même pas le mauvais temps qui va le faire reculer ! Et bien oui il aurait du... Il aurait du penser.
Allez ouste ! Viré par Pétain, envoyé en "congé illimité", il s'en est bien sorti, lui, Nivelle...
Cordialement,
Bernard

[Denis Rolland]

Bonsoir,
Désolé ce sont les témoignages de combattants qui m'intéressent. Je suppose que votre document est "La vérité sur l'offensive du 16 avril 1917" publié dans "la Renaissance" de novembre 1919 ?
Cordialement
Denis Rolland

[ddumont]

Et si son "affaire" avait marché,tout le monde aurait crié au génie,malgrès les pertes énormes............Les aléas de l'histoire,certainement..........

[LABARBE Bernard]

Effectivement Denis, pas vu de date sur le doc mais "La Renaissance politique, littéraire, économique".
ddumont, dès le début de l'offensive et vu la météo, il était clair que l'affaire ne pouvait pas marcher mais je comprends que reporter une telle offensive (qui l'avait déjà été je crois) était chose délicate pour un Nivelle. (Ah la météo, parenthèse hors sujet, le débarquement en Normandie 44)
Mais il s'est entêté le bougre ! le 57ème R.I. et combien d'autres se sont épuisés dans des combats terribles les 5 et 6 mai pour grapiller quelques centaines de mètres, fallait pas rester sur un échec, il le fut pourtant, sur toute la ligne mais c'était certain.
Cordialement,
Bernard

[saintchamond]

Bonsoir Denis et Bernard,

De ce point de vue, le livre sur Mangin, écrit par Louis-Eugène Mangin, éd. Sorlot, est un autre son de cloche, de l'autre côté de la barricade évidemment, sur cette période. Je peux transmettre des images au besoin.

Bonne soirée,

Jérôme

[Denis Rolland]

Bonsoir,
Je connais ce livre, qui donne effectivement un autre son de cloche. En tout cas, un livre intéressant et bien documenté.
Cordialement
Denis Rolland