Bonjour,
Bon retour à Florian!
Je ne suis toutefois pas d'accord avec son analyse concernant la fusée "débouchée à zéro" car le fonctionnement de l'obus à balles dont la fusée est débouchée à zéro est marqué par un éclatement du projectile dans un délai de 3/10e de seconde, ce qui correspond à une distance de la bouche d'environ 160 mètres à la vitesse de 535 m/s.Ce qui n'empêche pas une meilleure efficacité des "boîtes à mitraille" à courte distance mais le déroulement "théorique" d'un assaut d'infanterie sur l'artillerie laisse rarement le temps de changer de projectiles à l'instant "crucial" des "derniers mètres", d'où l'importance du tir d'obus à balles à fusées débouchées à zéro.
Cette caractéristique est rappelée par une note du "Manuel à l'usage des candidats au grade de sous-chef mécanicien ou de sous-chef artificier et des ouvriers de batterie de l'Artillerie de Campagne" édition 1909 dont voici la copie:

Pour ce qui concerne vos questions sur la distance à laquelle ont été tirées les fusées débouchées à différentes graduations, il faut consulter les "Tables de tir du canon de 75 modèle 1897".Il y en a beaucoup car elles ont été constamment améliorées en fonction des études balistiques et de l'introduction de nouveaux obus.Les plus importantes sont celles des dates suivantes:
-8 septembre 1904.
-31 août 1915.
-12 août 1916.
-25 août 1917.
Il faut pour les lire bien connaître le tir du 75.Je ne peux que conseiller un livre remarquable de clarté pour comprendre toutes les subtilités du tir de cette pièce: Capitaine H.Morlière "Notes sur le canon de 75 et son règlement à l'usage des officiers de toutes armes.Matériel-Manoeuvre-Tir"-Berger-Levrault (nombreuses éditions, la mienne est de 1913).
En effet, les tables de tir sont établies pour une surface plane, une température de 15°, un poids théorique de l'obus, des fusées remplissant les conditions théoriques de fonctionnement et une vitesse initiale donnée, ce qui n'est jamais réalisé dans la réalité.Ainsi, les tables de 1904 étaient établies pour la vitesse initiale de 529 m/s pour l'obus à balles, à partir de 1915, cette vitesse "type" est de 535 m/s pour l'obus à balles de 7,240 kg.
Il est donc nécessaire d'apporter des corrections, la plus importante, pour un obus à balles, étant la différence d'altitude du canon et celle du but (qui peut être très importante en montagne mais qui est tout aussi cruciale en région de plaine ou de collines).Je passe sur l'influence du vent, des tempétatures, basses ou hautes, etc...Il faut aussi tenir compte de la dérivation qui devient très importante aux moyennes et grandes distances de tir.
Le correcteur du débouchoir joue donc un grand rôle dans la science du tir.Il permet au capitaine de batterie de régler rapidement son tir.
Il est rarement traité des possibilités de réglage rapide du tir par l'artillerie de campagne française par rapport à son homologue germanique.En effet, les artilleurs allemands ont un bon matériel et de bonnes fusées (mais des projectiles médiocres en poids d'explosif) mais le réglage des fusées s'effectue à la main avec une clé, source d'errreurs, de tâtonnements et de temps perdu, quelle que soit la discipline bien connue des allemands.L'excellence des moyens d'observation et de transmission des ordres de l'artillerie de campagne allemande ne compense pas la souplesse d'emploi du véritable "système d'arme" constitué par le 75 (je ne remets pas en cause l'écrasante supériorité de l'artillerie lourde allemande en 1914, je n'évoque que l'artillerie de campagne).
Pour répondre en détail à vos questions, je joins des extraits "choisis" des tables de tir du 75.Je ne publie que ce qui concerne le tir de l'obus à balles équipé de fusées à double effet de 22/31 ou de 24/31 (à durée de 24 secondes), l'obus à balles le plus couramment utilisé pendant la guerre et le plus efficace contre l'infanterie en terrain libre et non retranchée, donc dans les conditions d'emploi d'une artillerie sérieusement menacée par une attaque ou un assaut d'infanterie (conditions d'août 1914 ou du retour à la guerre de mouvement au printemps 1918 surtout).
Vous pouvez constater que les distances inférieures à 500 mètres sont bien prévues dans la première colonne.
Pour être complet, j'ai mis toutes les distances usuelles du tir avec obus à balles jusqu'à 6900 mètres.
N'oublions tout de même pas que le tir percutant ou fusant de l'obus explosif a pris une importance formidable dès septembre 1914, le tir de l'obus à balles devenant peu important en cours de guerre (ce qui, parfois, était d'ailleurs regrettable car dans les Flandres en 1917, les allemands quittaient leurs abris bétonnés rendus inhabitables par l'artillerie lourde pour se réfugier dans des trous d'obus et faire le coup de feu contre nos troupes, des tirs massifs d'obus à balles auraient été dans ce cas souhaitables et auraient forcé l'ennemi au repli...ou à la mort).
Voici donc les correspondances THEORIQUES évent/distance pour le tir fusant de l'obus à balles de 75:







Cordialement,
Guy François.