YVONNE
Construit en 1900 par le chantier Hans-Ditlev Bendixsen, Californie, sous le nom de JOHN PALMER,
Schooner en bois de 1120 tonnes
Longueur de 68,30m Largeur de 13m Tirant d’eau de 5,20m
Les Anglais appellent « barquentine » des voiliers ayant au moins trois mâts dont le premier porte un gréement carré et les autres des voiles latines. Les Scandinaves les appellent « schooner ». Ces trois-mâts ou quatre-mâts étaient nombreux en Baltique et en mer du Nord. Un certain nombre de cinq-mâts furent aussi construits et même, aux USA des schooners à six mâts.
En Mai 1919, le quatre-mâts, qui appartient à l’armement Van Hemelryck, 50 rue La Boétie à Paris, et qui est immatriculé à Marseille, est confié au Capitaine au Long Cours Jean Le Gal.

Mais celui-ci décède à La Praia, île Santiago du Cap Vert le 20 Octobre 1919. Il semblerait d’ailleurs qu’une grande partie de l’équipage, atteint par une épidémie de fièvre jaune, soit décédée en même temps que le capitaine (exception faite du mousse selon les récits de source familiale). On peut d’ailleurs se demander s’il ne s’agissait pas plutôt de la grippe espagnole.
Ce navire sous pavillon français est alors confié au capitaine norvégien Gerhard Tannessan.
Il appareille de la Jamaïque le 8 août 1920 avec une cargaison de bois de campêche à destination du Havre. L’équipage est composé de 19 marins de sept nationalités différentes plus un clandestin, garçon jamaïcain de 16 ans, découvert dans une soute à charbon au troisième jour de navigation. Pendant deux mois YVONNE va rencontrer une succession de dépressions et de tempêtes, et le dimanche 3 octobre il atteignit la Manche par fort coup de vent d’Ouest.
Les vagues étaient énormes et permettaient à peine de gouverner et l’obscurité arrivait. Le capitaine essaya de rejoindre rapidement la baie de Plymouth pour se mettre à l’abri. Tandis qu’YVONNE approche du port, le vent tourne au Sud, le navire est à peine sous contrôle. Le capitaine demande un pilote et tente de rejoindre l’abri de la baie de Plymouth en empruntant la passe Ouest du brise lames.


Mais YVONNE manque cette large passe Ouest. Il est drossé sur la pointe Est du brise-lames, poupe pointée vers l’Ouest. Il se couche et les vagues le pilonnent et le submergent.
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L’ensemble de l’équipage est rassemblé sur le pont dunette, sauf l’opérateur radio qui lance des appels de détresse jusqu’à ce que sa radio soit détruite par la mer. Des fusées de détresse sont tirées en espérant que leurs lumières attirent l’attention. Trop exposé sur le pont dunette, l’équipage se réfugie alors sur le gaillard. Les hommes y restent quatre heures, serrés les uns contre les autres, transis de froid, trempés et s’attendant à tout moment à être emportés par les vagues.
Les feux de détresse sonnt aperçus à 20h45 par la vigie du fort du brise-lames et aussitôt l’alarme est donnée. Les projecteurs des forts les plus proches sont allumé afin d’éclairer l’épave échouée sur le brise-lames, permettant à l’équipage de savoir que les secours s’organisaient. A minuit le remorqueur ROVER et le capitaine de port mettent à l’eau le canot de sauvetage ELIZA AVINS, le prennent en remorque et tentent d’atteindre l’YVONNE. Le ROVER est sous le commandement du capitaine de port Geoffrey Freyberg et le canot de sauvetage sous le commandement du patron du canot Frederick Eagles. Tôt dans la journée, le canot avait été endommagé. L’eau avait envahi son compartiment machine. La remorque fut passée au remorqueur.
Vers 10h45 les bateaux de sauvetage atteignent le brise-lames où ils voient des vagues de 10 mètres de hauteur se briser au dessus de l’YVONNE. Il est sur le sommet du brise-lames, droit sur sa quille à 50 mètres à l’Ouest de la balise Est du brise-lames. Le patron du canot de sauvetage dira qu’il n’avait jamais vu de vagues aussi grosses. Ils ne peuvent passer la remorque dans cette grosse mer et décident de mouiller derrière le brise-lames.
Le Cdt Freyberg décide de monter à bord du canot de sauvetage, les voiles sont établies et ils essayent de naviguer au large de l’entrée Est à travers les coups de vent de Sud. Mais les conditions sont épouvantables et ils ne peuvent accoster le voilier sans être mis en pièces. Ils battent donc en retraite et se mettent à l’abri sous le vent du brise-lames. Ni le remorqueur, ni le canot de sauvetage ne peuvent atteindre le navire chahuté par les vagues, la seule solution est de recueillir l’équipage dans la mer.
Le canot de sauvetage signale son intention par signaux lumineux, L’équipage capelle les ceintures de sauvetage, grimpe sur le brise-lames et saute à l’eau. Le jeune Jamaïcain ne sachant pas nager, le capitaine Tannessan le prend sur ses épaules et tous deux nagent vers le canot de sauvetage. Dix huit marins sont repêchés par le canot de sauvetage et un par le remorqueur mais le cuisinier âgé de 60 ans est manquant. Le capitaine Freyberg remonte sur le brise-lames pour le rechercher, mais en vain. Ils supposent que le cuisinier a été emporté au large de l’entrée Est avec le jusant et le remorqueur part à sa recherche Malheureusement il ne sera jamais retrouvé. Le canot de sauvetage avec à son bord l’équipage de l’YVONNE grelottant de froid est remorqué jusqu’aux docks de Millbay où ils arrivent à 2h15 du matin.
Peu de temps après, l’Amiral de la Flotte présente ses félicitations à l’équipage du canot de sauvetage pour leur vaillant sauvetage et le capitaine de l’YVONNE remercie publiquement les équipages du canot de sauvetage et du remorqueur dans un article du Western Daily Mercury. Le RNIS (Royal National Lifeboat Institution) délivra un diplôme de remerciement à Freyberg, au patron du canot William et au chef mécanicien J.Harvey, ces deux derniers recevant en plus une prime de 20 shillings. Le capitaine du ROVER fut récompensé par une lettre de félicitations et une prime de 2 £. Les hommes du canot de sauvetage et du remorqueur reçurent chacun une prime de 20 shillings.
L’YVONNE resta quelques mois sur le brise-lames. Durant cette période tout l’équipement du navire ainsi que les matériels utiles furent sauvés. Par la suite la mer démantela le navire qui s’enfonça sous l’eau pour reposer sur les fonds marins au Sud du brise-lames.


Au fil des ans, des blocs de pierre furent immergés pour renforcer les bases du brise-lames.
Les restes de l’épave du YVONNE reposent au milieu des blocs de pierres à une profondeur de 9 mètres. Les débris disparaissent peu à peu, attaqués l’été par le varech. Une des ancres est encore visible.
Cdlt