Bonsoir,
Merci à Franck et Daniel pour ces nouvelles précisions.
Grâce à vous tous j'aurai des "biscuits" lorsque je rencontrerai le responsable de JAKINTZA !
Bien cordialement.
Jean RIOTTE.
VERDUN - Navire auxiliaire
- Jean RIOTTE
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Re: VERDUN - Navire auxiliaire
Bonjour Jean,
Le livre de Paul Chack se trouve dans les librairies de livres d'occasion en ligne, entre autres à la librairie Chapitre.com au prix de 17 euros.
Mais le passage sur la Marne et le Verdun se résume au paragraphe cité plus haut.
Bien cordialement,
Alain
Re: VERDUN - Navire auxiliaire
Bonjour Jean,
Bonjour à tous,
Nouveaux éléments factuels, à utiliser néanmoins avec toutes les précautions historiques d'usage.
• Le Temps, n° 20.395, Mercredi 9 mai 1917, p. 1.
« SUR MER.
UN SOUS-MARIN DANS LE PORT DE BILBAO
On télégraphie de Madrid que le journal El Pais annonce que le sous-marin qui coula les chaloupes à vapeur Verdun et Marne, ainsi que deux bateaux de pêche espagnols, près de Saint-Sébastien, pénétra ensuite dans le port de Bilbao, où il coula un navire grec et un navire norvégien
M. Garcia Prieto, interrogé à ce sujet, a déclaré n’avoir pas confirmation du bruit qui a circulé relativement au torpillage dans le port de Bilbao. Le président du conseil pense qu’il doit y avoir confusion avec le combat livré dans les eaux de Saint-Sébastien.
Nous ne savons pas si, de notre côté, il a été confirmé qu’un sous-marin allemand ait pénétré dans le port de Bilbao, mais il paraît admis que le combat du Verdun et de la Marne contre le pirate a bien eu lieu dans les eaux territoriales espagnoles, dans lesquelles le sous-marin ne pouvait pénétrer pour y combattre sans violer la neutralité.
Les eaux territoriales neutres doivent être respectées des belligérants, et pas plus que le sous-marin n’a le droit d’y aller couler des bateaux, nous ne pouvons y protéger les navires français qui les traversent. La neutralité des eaux territoriales doit être garantie par le gouvernement auquel elles appartiennent, et nous sommes persuadés par avance que le gouvernement espagnol saura prendre les mesures nécessaires pour en assurer la tranquillité et la sécurité. »
• Le Temps, n° 20.396, Jeudi 10 mai 1917, p. 1.
« SUR MER
Les torpillages dans les eaux espagnoles
Les renseignements reçus en France, outre ceux donnés par les journaux espagnols, permettent de situer plus exactement le combat entre les deux bateaux pêcheurs français Marne et Verdun. D’après les déclarations d’un Espagnol qui a assisté à l’attaque du sous-marin allemand, le Verdun se trouvait vers huit heures du matin, le 4 mai, à environ 27 à 30 milles au large de Saint-Sébastien. Le bateau pêchait en dehors des eaux territoriales espagnoles, et si M. Garcia Prieto, ainsi que le disait le télégramme de Madrid à propos de l’entrée du sous-marin à Bilbao, pensait qu’il y avait confusion avec le combat livré dans les eaux de Saint-Sébastien, c’est qu’évidemment il y a eu dans ces eaux une autre affaire que celle du Verdun et de la Marne.
Sur cette autre affaire, le gouvernement fait une enquête. Ainsi que l’annonce une dépêche de Madrid, le ministre de la Marine a déclaré que cette enquête, qui a lieu au sujet du torpillage par un sous-marin de barques de pêche au large de Saint-Sébastien, n’est point encore terminée. C’est la raison qui retarde l’envoi d’une protestation à l’Allemagne. »
• Le Temps, n° 20.397, Vendredi 11 mai 1917, p. 1.
« SUR MER
La Marne et le Verdun
Dans l’affaire de la Marne et du Verdun, deux bateaux espagnols ont été coulés avec les deux bateaux pêcheurs français. Quatorze hommes ont disparu, laissant cinquante orphelins. »
____________________________
Bien amicalement à vous,
Daniel.
Re: VERDUN - Navire auxiliaire
Bonjour Daniel,
Bonjour à tous,
Ce même jour, outre les Marne et Verdun, l'UC-72 (OL Ernst Voigt) coulera au canon les bateaux de pêche espagnols Mamelina IX (115 t) et Mamelina XII (111 t). Le 5 mai, il coule le cargo norvégien de 1 900 t Nydal qui fait route sur Bordeaux en provenance de New-York, à 25 miles dans le WSW de La Coubre. Le 6 mai, il envoie par le fond le vapeur italien de 3 430 t Francesco qui coule aussi au large de la Coubre.
Sauf erreur, le seul bateau grec impliqué dans la zone est le vapeur de 3 150 t Ioannis P. Goulandris, coulé par le sous-marin UC-69 le 4 mai également, à 23 milles dans l'Est d'Estaca Point (au NE de La Corogne et le NW de Bilbao).
Sources :
www.uboat.net
Amicalement,
Franck
Bonjour à tous,
Ce même jour, outre les Marne et Verdun, l'UC-72 (OL Ernst Voigt) coulera au canon les bateaux de pêche espagnols Mamelina IX (115 t) et Mamelina XII (111 t). Le 5 mai, il coule le cargo norvégien de 1 900 t Nydal qui fait route sur Bordeaux en provenance de New-York, à 25 miles dans le WSW de La Coubre. Le 6 mai, il envoie par le fond le vapeur italien de 3 430 t Francesco qui coule aussi au large de la Coubre.
Sauf erreur, le seul bateau grec impliqué dans la zone est le vapeur de 3 150 t Ioannis P. Goulandris, coulé par le sous-marin UC-69 le 4 mai également, à 23 milles dans l'Est d'Estaca Point (au NE de La Corogne et le NW de Bilbao).
Sources :
www.uboat.net
Amicalement,
Franck
www.navires-14-18.com
Le cœur des vivants doit être le tombeau des morts. André Malraux.
Le cœur des vivants doit être le tombeau des morts. André Malraux.
- Jean RIOTTE
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- Inscription : sam. nov. 05, 2005 1:00 am
Re: VERDUN - Navire auxiliaire
Bonjour à toutes et à tous,
Merci pour ces nouvelles précisions.
Suite à ma rencontre avec le responsable éditorial de JAKINTZA il y a de fortes chances que je sois invité à participer à la prochaine réunion du comité de rédaction. Il y sera fait le point sur ces 2 chalutiers canonnés en vue d'un article à paraître dans la revue.
Il semblerait que côté espagnol existent aussi des sources intéressantes.
Quoi qu'il en résulte je vous tiens au courant.
Cordialement,
Jean RIOTTE
Merci pour ces nouvelles précisions.
Suite à ma rencontre avec le responsable éditorial de JAKINTZA il y a de fortes chances que je sois invité à participer à la prochaine réunion du comité de rédaction. Il y sera fait le point sur ces 2 chalutiers canonnés en vue d'un article à paraître dans la revue.
Il semblerait que côté espagnol existent aussi des sources intéressantes.
Quoi qu'il en résulte je vous tiens au courant.
Cordialement,
Jean RIOTTE
- Terraillon Marc
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- Inscription : mer. oct. 20, 2004 2:00 am
Re: VERDUN - Navire auxiliaire
Bonsoir
En l'absence d'élement sur la réquisition du navire comme garde peche ou patrouilleur auxiliaire (les récits montrent plutot un navire en pêche) je reclasse le navire (indice 1)
A bientot
En l'absence d'élement sur la réquisition du navire comme garde peche ou patrouilleur auxiliaire (les récits montrent plutot un navire en pêche) je reclasse le navire (indice 1)
A bientot
Cordialement
Marc TERRAILLON
A la recherche du 17e RIT, des 166/366e RI et du 12e Hussards.
Marc TERRAILLON
A la recherche du 17e RIT, des 166/366e RI et du 12e Hussards.
Re: VERDUN - Navire auxiliaire
Bonjour,
Ci-dessous la citation des chalutiers "Marne" et "Verdun" et l'extrait des rapports officiels des évènements du 4 mai 1917 avec la liste des victimes militaires :
1 citation à l’Ordre de l’Armée
Les deux chalutiers de pêche MARNE et VERDUN appartenaient à M. ELISSALT, armateur à Saint-Jean-de-Luz. Ils avaient une machine de 65 chevaux.
Texte de la citation à l’Ordre de l’Armée
(Journal officiel du 7 mai 1917)
« Sont cités à l’Ordre de l’Armée les chalutiers MARNE et VERDUN pour l’énergie et les qualités militaires dont leurs équipages ont fait preuve en luttant pendant plus d’une heure, le 4 mai 1917, contre un sous-marin dont l’armement était très supérieur au leur ».
Extraits des rapports officiels
Le 4 mai 1917, les vapeurs de pêche MARNE et VERDUN, tous deux armés d’un canon de 37 pêchaient à environ 25 milles par le travers de Cap Breton avec six chalutiers espagnols.
Vers 8 heures, un sous-marin allemand émergea près d’un pêcheur espagnol, lui demandant sa nationalité et où étaient les pêcheurs français.
Les patrons de MARNE et VERDUN l’ayant aperçu coupèrent les remorques de leurs filets et manœuvrèrent pour mettre les Espagnols entre eux et le sous-marin qui tira 3 coups à blanc, puis un 4ème coup qui atteignit un bateau espagnol. La MARNE riposte à bout portant, forçant le sous-marin à plonger. Celui-ci s’éloigne, puis reprend son tir, la MARNE s’abritant derrière les Espagnols et continuant son tir.
Le VERDUN ayant reçu un projectile à l’avant a le feu à bord.
La lutte se poursuit dans des conditions très défavorables pour les Français faiblement armés.
MARNE et VERDUN s’efforcent alors de regagner Saint-Jean-de-Luz, le VERDUN continuant à brûler.
La MARNE a combattu pendant une heure avant de couler. Le VERDUN a été coulé probablement une demi-heure plus tard.
L’équipage de la MARNE se composait de 3 pêcheurs français et un matelot mobilisé, POULOU Julie, 8.811, Bayonne ; l’équipage du VERDUN de 3 pêcheurs français dont le patron ECHAVE, ancien canonnier. En plus, 10 Espagnols. Les 7 Français ont disparu. Trois Espagnols seuls ont été sauvés et ramenés à Saint-Sébastien par un chalutier espagnol.
Patrons et marins français ont soutenu la lutte pendant plus d’une heure avec de faibles moyens et ont tenu tête jusqu’à la mort à un ennemi beaucoup plus fortement armé. Voici leurs noms :
- ECHAVE Joseph, Manuel, de Socos, pêcheur, Bayonne, n° 8.576
- OYHANART Arnaud, de Saint-Jean-de-Luz, pêcheur, Bayonne, n° 9.135
- MARTIARENA Saturnin, de Ciboure, pêcheur, 8.303, H.S.
- HEGUILEIN Louis, Jean, de Saint-Jean-de-Luz, pêcheur, 9.270, I.P.
- CAZABON Paulin, de Guéthary, pêcheur, 8.289, H.S.
- MUGABURE Pierre, de Guéthary, pêcheur, 8.306, H.S
- POULOU Julien, matelot sans spécialité mobilisé sur la MARNE, de Ciboure, réserviste, Bayonne, n° 8.811.
(source : livre d'or de la Marine - guerre 14/18)
Cordialement,
Gilbert.
Ci-dessous la citation des chalutiers "Marne" et "Verdun" et l'extrait des rapports officiels des évènements du 4 mai 1917 avec la liste des victimes militaires :
1 citation à l’Ordre de l’Armée
Les deux chalutiers de pêche MARNE et VERDUN appartenaient à M. ELISSALT, armateur à Saint-Jean-de-Luz. Ils avaient une machine de 65 chevaux.
Texte de la citation à l’Ordre de l’Armée
(Journal officiel du 7 mai 1917)
« Sont cités à l’Ordre de l’Armée les chalutiers MARNE et VERDUN pour l’énergie et les qualités militaires dont leurs équipages ont fait preuve en luttant pendant plus d’une heure, le 4 mai 1917, contre un sous-marin dont l’armement était très supérieur au leur ».
Extraits des rapports officiels
Le 4 mai 1917, les vapeurs de pêche MARNE et VERDUN, tous deux armés d’un canon de 37 pêchaient à environ 25 milles par le travers de Cap Breton avec six chalutiers espagnols.
Vers 8 heures, un sous-marin allemand émergea près d’un pêcheur espagnol, lui demandant sa nationalité et où étaient les pêcheurs français.
Les patrons de MARNE et VERDUN l’ayant aperçu coupèrent les remorques de leurs filets et manœuvrèrent pour mettre les Espagnols entre eux et le sous-marin qui tira 3 coups à blanc, puis un 4ème coup qui atteignit un bateau espagnol. La MARNE riposte à bout portant, forçant le sous-marin à plonger. Celui-ci s’éloigne, puis reprend son tir, la MARNE s’abritant derrière les Espagnols et continuant son tir.
Le VERDUN ayant reçu un projectile à l’avant a le feu à bord.
La lutte se poursuit dans des conditions très défavorables pour les Français faiblement armés.
MARNE et VERDUN s’efforcent alors de regagner Saint-Jean-de-Luz, le VERDUN continuant à brûler.
La MARNE a combattu pendant une heure avant de couler. Le VERDUN a été coulé probablement une demi-heure plus tard.
L’équipage de la MARNE se composait de 3 pêcheurs français et un matelot mobilisé, POULOU Julie, 8.811, Bayonne ; l’équipage du VERDUN de 3 pêcheurs français dont le patron ECHAVE, ancien canonnier. En plus, 10 Espagnols. Les 7 Français ont disparu. Trois Espagnols seuls ont été sauvés et ramenés à Saint-Sébastien par un chalutier espagnol.
Patrons et marins français ont soutenu la lutte pendant plus d’une heure avec de faibles moyens et ont tenu tête jusqu’à la mort à un ennemi beaucoup plus fortement armé. Voici leurs noms :
- ECHAVE Joseph, Manuel, de Socos, pêcheur, Bayonne, n° 8.576
- OYHANART Arnaud, de Saint-Jean-de-Luz, pêcheur, Bayonne, n° 9.135
- MARTIARENA Saturnin, de Ciboure, pêcheur, 8.303, H.S.
- HEGUILEIN Louis, Jean, de Saint-Jean-de-Luz, pêcheur, 9.270, I.P.
- CAZABON Paulin, de Guéthary, pêcheur, 8.289, H.S.
- MUGABURE Pierre, de Guéthary, pêcheur, 8.306, H.S
- POULOU Julien, matelot sans spécialité mobilisé sur la MARNE, de Ciboure, réserviste, Bayonne, n° 8.811.
(source : livre d'or de la Marine - guerre 14/18)
Cordialement,
Gilbert.
Excès de peur enhardit.
- Terraillon Marc
- Messages : 3875
- Inscription : mer. oct. 20, 2004 2:00 am
Re: VERDUN - Navire auxiliaire
Bonjour
Un lien complémentaire (avec des erreurs mais des informations interessantes)
pages1418/Forum-Pages-d-Histoire-aviati ... _383_1.htm
A bientot
Un lien complémentaire (avec des erreurs mais des informations interessantes)
pages1418/Forum-Pages-d-Histoire-aviati ... _383_1.htm
A bientot

Cordialement
Marc TERRAILLON
A la recherche du 17e RIT, des 166/366e RI et du 12e Hussards.
Marc TERRAILLON
A la recherche du 17e RIT, des 166/366e RI et du 12e Hussards.
Re: VERDUN - Navire auxiliaire
Bonsoir à tous,
■ Récompenses.
• Journal officiel du 7 mai 1917, p. 3.647.

• Journal officiel du 2 juin 1917, p. 4.300.


• Journal officiel du 3 juin 1917, p. 4.330.

• Journal officiel du 4 novembre 1919, p. 12.328.

[...]

Bien amicalement à vous,
Daniel.
Daniel.
-
- Messages : 4029
- Inscription : ven. oct. 12, 2007 2:00 am
Re: VERDUN - Navire auxiliaire
Bonjour à tous,
Il n'y a qu'un seul dossier aux archives de Vincennes concernant MARNE et VERDUN.
Voici donc la retranscription de tout ce qui a été mis sur la fiche MARNE.
MARNE et VERDUN
Chalutiers de Saint Jean de Luz
Armateurs des chalutiers
MARNE : Elissalt Pascal, de Saint Jean de Luz
VERDUN : Mr. Badouix armateur à Marseille
Rapport du Consul de France à Saint Sébastien au Ministre des Affaires Etrangères. 5 Mai 1917
Renseignements recueillis après une minutieuse enquête :
Les chalutiers français MARNE et VERDUN pêchaient à 30 milles environ du Cap Breton auprès de deux vapeurs espagnols de la Compagnie Mamelena, les n° 9 et 12. Vers 09h00 du matin, un sous-marin a surgi soudain et après s’être informé de la présence des bateaux français, a commencé à les canonner. Les deux chalutiers ont manœuvré de manière à s’abriter derrière les chalutiers espagnols qui furent les premiers atteints. MARNE se serait servi de son seul canon de 35 mm mais sa situation était difficile. Le sous-marin tirait avec un canon de 105 mm. Les chalutiers espagnols ont été atteints les premiers : 4 morts et 3 blessés. L’un est perdu et l’autre presque inutilisable.
MARNE et VERDUN ont alors tenté de s’enfuir poursuivis par le sous-marin. On ignore leur sort.
Ces faits ont produit une vive sensation à Saint Sébastien. Les commentaires nous sont favorables ou défavorables suivant les individus. Il se dégage de l’opinion générale que les germanophiles reprochent à nos marins de s’être abrités derrière les chalutiers espagnols et les graves pertes subies par les équipages de ces derniers ne trouvent pas grâce devant l’inqualifiable partialité des pro-germains.
« Tant pis pour les Français », disent-ils, « s’ils ont été imprudents. Ils ne devaient pas aller pêcher dans la zone dangereuse » »
Telle est la mentalité de ces partisans des Boches. Nos trop rares amis s’indignent naturellement de cet acte de piraterie, mais si certains pensent comme eux, ils n’osent le dire qu’à voix basse.
J’ai informé l’Ambassade et le Ministère de la Marine de ces évènements.
Des informations imprécises m’autorisent à croire que le sous-marin se trouvait dans nos eaux depuis quelques jours. Des signaux auraient été faits depuis le mont Igueldo au cours de ces dernières nuits. Seule une énergique intervention du Gouvernement espagnol pourrait faire cesser l’espionnage boche et ces pratiques dangereuses pour notre navigation.
(Nota : on remarque que ce rapport « d’enquête minutieuse » du Consul est particulièrement imprécis et incomplet et surtout fait de ragots recueillis çà et là.)
Note de Mr. Geoffray, Ambassadeur de la République française à Madrid, à Mr. Ribot, Président du Conseil, Ministre des Affaires Etrangères 6 Mai 1917.
Votre Excellence aura été informée par les télégrammes de presse du combat survenu à 30 milles de Saint Sébastien entre un sous-marin allemand et des bateaux de pêche français. Un de ceux-ci se serait abrité derrière un espagnol, et le sous-marin, ouvrant le feu, l’a coulé et tué ou blessé plusieurs hommes.
C’est la version officielle que nous donne le gouverneur civil de la province de Guipuzcoa. La presse germanophile saisit cette occasion pour insister sur le fait inqualifiable que des pêcheurs français armés en guerre se soient réfugiés derrière des bateaux espagnols pacifiques au cours d’une opération de guerre, au lieu de se rendre, de se défendre ou de fuir. C’est ainsi que s’exprime en particulier le journal A.B.C. qui ajoute que la première version officielle de cette grave affaire ne permet pas de dire quelle attitude adoptera le gouvernement espagnol, et s’il fera une seule, ou deux réclamations, et à qui.
Version allemande de l’affaire, donnée par un télégramme de Nauen (station radio de la Marine près de Berlin) le 12 Mai 1917
Nauen, 12 Mai 12h30
Le 4 Mai, un sous-marin a aperçu dans la zone interdite du golfe de Biscaye, à 25 milles au Nord de Bayonne, des pêcheurs qui naviguaient ensemble vers le Nord. Le commandant du sous-marin a décidé d’arraisonner les barques supposées espagnoles, pensant que désorientées dans leur navigation, elles étaient sorties de la zone prohibée sans le savoir.
Au signal du sous-marin, une partie des bateaux s’est tournée vers le sous-marin, pendant que l’autre tentait de s’échapper. Parmi les premiers, deux pêcheurs ne portaient ni pavillon, ni signe distinctif. Un 3e avait un signe de nationalité espagnole mais sans pavillon, et un 4e un pavillon qu’on ne pouvait reconnaître.
Le sous-marin leur a barré le passage en tirant un coup de semonce. Immédiatement, les pêcheurs ont ouvert le feu sur le sous-marin. Au cours du duel d’artillerie, un pêcheur fut détruit et les 3 autres furent ensuite coulés par des charges explosives. Ils portaient deux canons français de 35 mm avec munitions.
Les pêcheurs qui portaient pavillon et signe distinctif nettement visible de neutralité espagnole ont pu s’échapper. L’incident montre que les Français, pour combattre les sous-marins allemands, n’hésitent pas à compromettre gravement les pêcheurs espagnols en s’unissant à eux pour qu’ils leur servent de secours contre les sous-marins.
Récit des naufragés recueillis par les autorités espagnoles
Ces naufragés sont Antonio Santa Maria, mécanicien du vapeur VERDUN, de Saint Jean de Luz, et Antonio Santiago, chauffeur du MAMELENA IX, de notre port.
A 01h00 du matin, les chalutiers à vapeur MAMELENA IX et MAMELENA XII sont sortis pour se livrer à leurs occupations habituelles. A 02h30, VERDUN et MARNE, de Saint Jean de Luz, sont sortis à leur tour pour pêcher au chalut.
A 36 milles au Nord de notre port, les deux couples de vapeurs ont été rejoints par deux autres bateaux appartenant à Mr. Ciriza, également de Bilbao, NUEVA PROVIDENCIA et NUEVA MARCELA.
Comme nous nous livrions à notre travail, un sous-marin est apparu, qui s’est contenté pendant un moment de surveiller les barques françaises, certainement avec l’intention de les attaquer. Les bateaux français se sont rendus compte de la manœuvre du sous-marin et se sont réfugiés à l’abri des Espagnols. Le sous-marin a alors tiré trois coups d’avertissement qui donnèrent le signal du combat.
MAMELENA IX reçut 3 projectiles ; un dans le châssis de la chambre des machines qui obstrua l’accès au pont. Les chauffeurs et le mécanicien se sauvèrent en escaladant les cylindres. Le 2e tomba dans la machine et la détruisit et le 3e brisa le mât. Le bateau coula un quart d’heure plus tard.
Le 2e bateau coulé fut MAMELENA XII et le 3e, VERDUN. MARNE put s’échapper, mais fut poursuivi par le sous-marin et également coulé. Tous ceux qui étaient dessus périrent.
Les bateaux français étaient munis d’un canon de 35 mm, mais seul MARNE put s’en servir. VERDUN n’avait pas d’artilleur pour servir la pièce et sombra sans tirer un coup de canon. Voyant que notre canon ne tirait pas, m’a dit le mécanicien de VERDUN, le chauffeur et moi avons sauté à la mer et nagé au hasard sans prendre garde à ce qui se passait autour de nous. Un projectile est tombé tout près, dont l’explosion m’a aveuglé. Je me suis laissé couler. Je suis revenu à la surface épuisé. J’ai été recueilli par l’embarcation de MAMELENA XII et transporté sur NUEVA PROVIDENCIA, qui m’a ramené au port. De VERDUN, seuls le chauffeur et moi avons été sauvés.
Ces deux marins, comme beaucoup d’autres sont Espagnols et vont travailler quelque temps en France car on y est mieux payé. Le mécanicien et le chauffeur de MARNE, qui ont péri, étaient aussi Espagnols. Le patron et le mécanicien de MAMELENA IX et le patron de MAMELENA XII se sont noyés. Un marin de ce dernier navire, nommé Domingo, a été frappé par un obus et son corps mis en morceaux.
Il y avait 10 hommes sur chaque bateau espagnol et 9 sur chaque français. Les bateaux espagnols portaient le pavillon espagnol.
Le chauffeur espagnol rescapé de VERDUN est Elias Mendizabal. Il a déclaré que les navires les plus proches de terre étaient les deux navires de Ciriza, puis venaient les deux Français, et enfin les deux Mamelena.
Le sous-marin est d’abord venu sur les navires de Ciriza et leur a demandé s’il y avait des Français dans le groupe. Un Allemand a alors regardé avec ses jumelles et le sous-marin est aussitôt venu sur les deux bateaux français. Le sous-marin a d’abord tiré 3 coups à blanc, puis un avec projectile, qui a touché MAMELENA IX. Les Français ont alors répondu au feu du sous-marin qui s’est aussitôt immergé. Il est passé derrière MAMELENA XII et a ré-ouvert le feu sur VERDUN qui a commencé à brûler. C’est alors que Mendizabal et le mécanicien se sont jetés à l’eau. Ils ont compté 73 coups de canon.
Le sous-marin portait un pavillon blanc avec une croix noire et dans un coin un sigle noir. Il faisait environ 40 m de long et portait un canon de 105 mm.
Mr. Ciriza dit que MARNE a été aperçu pour la dernière fois en flamme, poursuivi par le sous-marin.
Rapport de la commission d’enquête française
Les trois seuls rescapés Espagnols, Elias Mendizabal, Antonio Santa Maria et Iviondo Sidillo ont été interrogés. Devant la précision des questions posées, ils sont restés muets. Il ne pouvait d’ailleurs en être autrement puisqu’au premier coup de canon ils se sont jetés à la mer où ils sont restés une heure et demie avant d’être recueillis par le canot d’un chalutier espagnol.
Mis en demeure de dire au moins ce qu’ils savaient, soit pour l’avoir vu, soit pour l’avoir entendu sur le chalutier qui les a ramenés à Saint Sébastien et qui avait assisté au combat, le plus dégourdi du trio, Elias Mendizabal, a pris la parole et rapporté ce qu’il avait déjà dit au Consulat de France :
« Le 4 mai vers 08h00 du matin, quatre chalutiers espagnols dont les n° 9 et 12 de la Cie Mercader, et deux chalutiers français, MARNE et VERDUN pêchaient à 30 milles dans le NNW de Saint Jean de Luz quand un sous-marin fit son apparition. Il accosta d’abord les deux chalutiers les plus à terre qui arboraient le pavillon espagnol. Sans doute renseigné par eux, il se dirigea sur les chalutiers français qui l’avaient aperçu et avaient coupé les remorques des filets pour se mettre au large des deux chalutiers de la Cie Mercader. Le sous-marin a d’abord tiré 3 coups à blanc, puis un 4e qui a atteint le chalutier n° 9 qui a coulé en peu de temps.
MARNE et VERDUN ont manœuvré pour garder entre eux et l’ennemi les 9 et 12. Ils auraient vigoureusement riposté aux coups du sous-marin. Puis VERDUN, l’avant en flamme, aurait abandonné la partie laissant MARNE continuer la lutte jusqu’à ce qu’il soit coulé corps et biens. Le sous-marin se serait alors mis à la poursuite de VERDUN qu’il aurait achevé.
Ce récit paraît vraisemblable, mais n’explique malheureusement pas la retraite de VERDUN et ne précise rien pour MARNE qui semble s’être courageusement conduit. NUEVA PROVIDENCIA, le chalutier qui a ramené les rescapés à Saint Sébastien a compté 70 coups tirés par le sous-marin.
Patrons et marins français ont soutenu la lutte pendant plus d’une heure et la commission pense que la Croix de Guerre serait une juste récompense pour ces braves qui avec de faibles moyens ont tenu tête jusqu’à la mort à un ennemi beaucoup plus fortement armé.
Liste des morts
Français
ECHAVE Joseph 40 ans Marié 8 enfants de 14 à 1 an Socoa / Ciboure
OYHANART Armand 34 ans Marié 8 enfants de 15 à 1 an St Jean de Luz
MARTIARENA Saturnin 61 ans Veuf 4 enfants de 19 à 11 ans rue du Chai Ciboure
HEGUILEN Louis 16 ans Célibataire (Mère veuve) 37 rue Sopite St Jean de Luz
CAZABON Paulin 52 ans marié 6 enfants de 25 à 14 ans Guéthary
MUGABURE Pierre 53 ans marié 3 enfants 16,14,10 ans Guéthary (Pont de Bidart)
POULOU Julien 34 ans marié 2 enfants 6 et 4 ans Place de la Mairie Ciboure (détaché comme canonnier sur MARNE)
Espagnols
OTAZO José 26 ans marié 5 enfants (ainé 8 ans) Saint Jean de Luz
TEILLERIA Andres 35 ans marié 2 enfants 9 et 3 ans Saint Jean de Luz
AMADO Manuel 32 ans marié 4 enfants 7, 5, 3 et 1an Saint Jean de Luz
BASURTO Pedro 40 ans marié 3 enfants 4, 2 et 1 an Ciboure
ARISMENDI Jose 48 ans célibataire Saint Jean de Luz
ORBEGOZO Eusebio 25 ans célibataire Saint Jean de Luz
BASURCO Martin
On note que les familles françaises recevront un secours de 300 francs + 100 francs par enfant de moins de 16 ans.
Les familles espagnoles recevront un secours 360 francs plus 50 francs par enfant de moins de 16 ans.
Récompenses
Citation à l’Ordre de l’Armée
Chalutiers MARNE et VERDUN et l’ensemble des marins français et espagnols cités ci-dessus.
Pour l’énergie et le courage dont ils ont fait preuve en se défendant jusqu’à la mort sur un chalutier attaqué par un sous-marin.
L’Etat Major de la Marine avait bien précisé qu’il n’y avait pas lieu d’accorder une distinction quelconque aux survivants espagnols suivants : Iviondo Sidillo, Mendizabal et Santa Maria.
Note du 2 Février 1918 pour le cabinet civil du Ministre
Suite à la lettre du député Lachaud, je ne peux que me référer aux deux notes déjà remises en Décembre 1917 et Janvier 1918 au sujet de cette affaire.
Les chalutiers MARNE et VERDUN n’ont pas été réquisitionnés par le Département et leurs propriétaires ne peuvent solliciter éventuellement une subvention à titre de dommage de guerre que sur les fonds alloués à cet effet au Ministère de l’Intérieur.
Je propose de remettre le dossier de cette affaire au Sous Secrétaire d’Etat à la Marine Marchande.
Signé : Commissaire Général Fontaine, chef du Service Central de l’Inscription Maritime
Le sous-marin attaquant
C’était l’UC 72 de l’Oblt Ernst VOIGT.
Voigt disparaîtra avec tout son équipage le 25 Août suivant en rentrant à sa base par le Pas de Calais. UC 72 heurtera une mine. L’épave a été retrouvée et identifiée en 2013.
Cdlt
Il n'y a qu'un seul dossier aux archives de Vincennes concernant MARNE et VERDUN.
Voici donc la retranscription de tout ce qui a été mis sur la fiche MARNE.
MARNE et VERDUN
Chalutiers de Saint Jean de Luz
Armateurs des chalutiers
MARNE : Elissalt Pascal, de Saint Jean de Luz
VERDUN : Mr. Badouix armateur à Marseille
Rapport du Consul de France à Saint Sébastien au Ministre des Affaires Etrangères. 5 Mai 1917
Renseignements recueillis après une minutieuse enquête :
Les chalutiers français MARNE et VERDUN pêchaient à 30 milles environ du Cap Breton auprès de deux vapeurs espagnols de la Compagnie Mamelena, les n° 9 et 12. Vers 09h00 du matin, un sous-marin a surgi soudain et après s’être informé de la présence des bateaux français, a commencé à les canonner. Les deux chalutiers ont manœuvré de manière à s’abriter derrière les chalutiers espagnols qui furent les premiers atteints. MARNE se serait servi de son seul canon de 35 mm mais sa situation était difficile. Le sous-marin tirait avec un canon de 105 mm. Les chalutiers espagnols ont été atteints les premiers : 4 morts et 3 blessés. L’un est perdu et l’autre presque inutilisable.
MARNE et VERDUN ont alors tenté de s’enfuir poursuivis par le sous-marin. On ignore leur sort.
Ces faits ont produit une vive sensation à Saint Sébastien. Les commentaires nous sont favorables ou défavorables suivant les individus. Il se dégage de l’opinion générale que les germanophiles reprochent à nos marins de s’être abrités derrière les chalutiers espagnols et les graves pertes subies par les équipages de ces derniers ne trouvent pas grâce devant l’inqualifiable partialité des pro-germains.
« Tant pis pour les Français », disent-ils, « s’ils ont été imprudents. Ils ne devaient pas aller pêcher dans la zone dangereuse » »
Telle est la mentalité de ces partisans des Boches. Nos trop rares amis s’indignent naturellement de cet acte de piraterie, mais si certains pensent comme eux, ils n’osent le dire qu’à voix basse.
J’ai informé l’Ambassade et le Ministère de la Marine de ces évènements.
Des informations imprécises m’autorisent à croire que le sous-marin se trouvait dans nos eaux depuis quelques jours. Des signaux auraient été faits depuis le mont Igueldo au cours de ces dernières nuits. Seule une énergique intervention du Gouvernement espagnol pourrait faire cesser l’espionnage boche et ces pratiques dangereuses pour notre navigation.
(Nota : on remarque que ce rapport « d’enquête minutieuse » du Consul est particulièrement imprécis et incomplet et surtout fait de ragots recueillis çà et là.)
Note de Mr. Geoffray, Ambassadeur de la République française à Madrid, à Mr. Ribot, Président du Conseil, Ministre des Affaires Etrangères 6 Mai 1917.
Votre Excellence aura été informée par les télégrammes de presse du combat survenu à 30 milles de Saint Sébastien entre un sous-marin allemand et des bateaux de pêche français. Un de ceux-ci se serait abrité derrière un espagnol, et le sous-marin, ouvrant le feu, l’a coulé et tué ou blessé plusieurs hommes.
C’est la version officielle que nous donne le gouverneur civil de la province de Guipuzcoa. La presse germanophile saisit cette occasion pour insister sur le fait inqualifiable que des pêcheurs français armés en guerre se soient réfugiés derrière des bateaux espagnols pacifiques au cours d’une opération de guerre, au lieu de se rendre, de se défendre ou de fuir. C’est ainsi que s’exprime en particulier le journal A.B.C. qui ajoute que la première version officielle de cette grave affaire ne permet pas de dire quelle attitude adoptera le gouvernement espagnol, et s’il fera une seule, ou deux réclamations, et à qui.
Version allemande de l’affaire, donnée par un télégramme de Nauen (station radio de la Marine près de Berlin) le 12 Mai 1917
Nauen, 12 Mai 12h30
Le 4 Mai, un sous-marin a aperçu dans la zone interdite du golfe de Biscaye, à 25 milles au Nord de Bayonne, des pêcheurs qui naviguaient ensemble vers le Nord. Le commandant du sous-marin a décidé d’arraisonner les barques supposées espagnoles, pensant que désorientées dans leur navigation, elles étaient sorties de la zone prohibée sans le savoir.
Au signal du sous-marin, une partie des bateaux s’est tournée vers le sous-marin, pendant que l’autre tentait de s’échapper. Parmi les premiers, deux pêcheurs ne portaient ni pavillon, ni signe distinctif. Un 3e avait un signe de nationalité espagnole mais sans pavillon, et un 4e un pavillon qu’on ne pouvait reconnaître.
Le sous-marin leur a barré le passage en tirant un coup de semonce. Immédiatement, les pêcheurs ont ouvert le feu sur le sous-marin. Au cours du duel d’artillerie, un pêcheur fut détruit et les 3 autres furent ensuite coulés par des charges explosives. Ils portaient deux canons français de 35 mm avec munitions.
Les pêcheurs qui portaient pavillon et signe distinctif nettement visible de neutralité espagnole ont pu s’échapper. L’incident montre que les Français, pour combattre les sous-marins allemands, n’hésitent pas à compromettre gravement les pêcheurs espagnols en s’unissant à eux pour qu’ils leur servent de secours contre les sous-marins.
Récit des naufragés recueillis par les autorités espagnoles
Ces naufragés sont Antonio Santa Maria, mécanicien du vapeur VERDUN, de Saint Jean de Luz, et Antonio Santiago, chauffeur du MAMELENA IX, de notre port.
A 01h00 du matin, les chalutiers à vapeur MAMELENA IX et MAMELENA XII sont sortis pour se livrer à leurs occupations habituelles. A 02h30, VERDUN et MARNE, de Saint Jean de Luz, sont sortis à leur tour pour pêcher au chalut.
A 36 milles au Nord de notre port, les deux couples de vapeurs ont été rejoints par deux autres bateaux appartenant à Mr. Ciriza, également de Bilbao, NUEVA PROVIDENCIA et NUEVA MARCELA.
Comme nous nous livrions à notre travail, un sous-marin est apparu, qui s’est contenté pendant un moment de surveiller les barques françaises, certainement avec l’intention de les attaquer. Les bateaux français se sont rendus compte de la manœuvre du sous-marin et se sont réfugiés à l’abri des Espagnols. Le sous-marin a alors tiré trois coups d’avertissement qui donnèrent le signal du combat.
MAMELENA IX reçut 3 projectiles ; un dans le châssis de la chambre des machines qui obstrua l’accès au pont. Les chauffeurs et le mécanicien se sauvèrent en escaladant les cylindres. Le 2e tomba dans la machine et la détruisit et le 3e brisa le mât. Le bateau coula un quart d’heure plus tard.
Le 2e bateau coulé fut MAMELENA XII et le 3e, VERDUN. MARNE put s’échapper, mais fut poursuivi par le sous-marin et également coulé. Tous ceux qui étaient dessus périrent.
Les bateaux français étaient munis d’un canon de 35 mm, mais seul MARNE put s’en servir. VERDUN n’avait pas d’artilleur pour servir la pièce et sombra sans tirer un coup de canon. Voyant que notre canon ne tirait pas, m’a dit le mécanicien de VERDUN, le chauffeur et moi avons sauté à la mer et nagé au hasard sans prendre garde à ce qui se passait autour de nous. Un projectile est tombé tout près, dont l’explosion m’a aveuglé. Je me suis laissé couler. Je suis revenu à la surface épuisé. J’ai été recueilli par l’embarcation de MAMELENA XII et transporté sur NUEVA PROVIDENCIA, qui m’a ramené au port. De VERDUN, seuls le chauffeur et moi avons été sauvés.
Ces deux marins, comme beaucoup d’autres sont Espagnols et vont travailler quelque temps en France car on y est mieux payé. Le mécanicien et le chauffeur de MARNE, qui ont péri, étaient aussi Espagnols. Le patron et le mécanicien de MAMELENA IX et le patron de MAMELENA XII se sont noyés. Un marin de ce dernier navire, nommé Domingo, a été frappé par un obus et son corps mis en morceaux.
Il y avait 10 hommes sur chaque bateau espagnol et 9 sur chaque français. Les bateaux espagnols portaient le pavillon espagnol.
Le chauffeur espagnol rescapé de VERDUN est Elias Mendizabal. Il a déclaré que les navires les plus proches de terre étaient les deux navires de Ciriza, puis venaient les deux Français, et enfin les deux Mamelena.
Le sous-marin est d’abord venu sur les navires de Ciriza et leur a demandé s’il y avait des Français dans le groupe. Un Allemand a alors regardé avec ses jumelles et le sous-marin est aussitôt venu sur les deux bateaux français. Le sous-marin a d’abord tiré 3 coups à blanc, puis un avec projectile, qui a touché MAMELENA IX. Les Français ont alors répondu au feu du sous-marin qui s’est aussitôt immergé. Il est passé derrière MAMELENA XII et a ré-ouvert le feu sur VERDUN qui a commencé à brûler. C’est alors que Mendizabal et le mécanicien se sont jetés à l’eau. Ils ont compté 73 coups de canon.
Le sous-marin portait un pavillon blanc avec une croix noire et dans un coin un sigle noir. Il faisait environ 40 m de long et portait un canon de 105 mm.
Mr. Ciriza dit que MARNE a été aperçu pour la dernière fois en flamme, poursuivi par le sous-marin.
Rapport de la commission d’enquête française
Les trois seuls rescapés Espagnols, Elias Mendizabal, Antonio Santa Maria et Iviondo Sidillo ont été interrogés. Devant la précision des questions posées, ils sont restés muets. Il ne pouvait d’ailleurs en être autrement puisqu’au premier coup de canon ils se sont jetés à la mer où ils sont restés une heure et demie avant d’être recueillis par le canot d’un chalutier espagnol.
Mis en demeure de dire au moins ce qu’ils savaient, soit pour l’avoir vu, soit pour l’avoir entendu sur le chalutier qui les a ramenés à Saint Sébastien et qui avait assisté au combat, le plus dégourdi du trio, Elias Mendizabal, a pris la parole et rapporté ce qu’il avait déjà dit au Consulat de France :
« Le 4 mai vers 08h00 du matin, quatre chalutiers espagnols dont les n° 9 et 12 de la Cie Mercader, et deux chalutiers français, MARNE et VERDUN pêchaient à 30 milles dans le NNW de Saint Jean de Luz quand un sous-marin fit son apparition. Il accosta d’abord les deux chalutiers les plus à terre qui arboraient le pavillon espagnol. Sans doute renseigné par eux, il se dirigea sur les chalutiers français qui l’avaient aperçu et avaient coupé les remorques des filets pour se mettre au large des deux chalutiers de la Cie Mercader. Le sous-marin a d’abord tiré 3 coups à blanc, puis un 4e qui a atteint le chalutier n° 9 qui a coulé en peu de temps.
MARNE et VERDUN ont manœuvré pour garder entre eux et l’ennemi les 9 et 12. Ils auraient vigoureusement riposté aux coups du sous-marin. Puis VERDUN, l’avant en flamme, aurait abandonné la partie laissant MARNE continuer la lutte jusqu’à ce qu’il soit coulé corps et biens. Le sous-marin se serait alors mis à la poursuite de VERDUN qu’il aurait achevé.
Ce récit paraît vraisemblable, mais n’explique malheureusement pas la retraite de VERDUN et ne précise rien pour MARNE qui semble s’être courageusement conduit. NUEVA PROVIDENCIA, le chalutier qui a ramené les rescapés à Saint Sébastien a compté 70 coups tirés par le sous-marin.
Patrons et marins français ont soutenu la lutte pendant plus d’une heure et la commission pense que la Croix de Guerre serait une juste récompense pour ces braves qui avec de faibles moyens ont tenu tête jusqu’à la mort à un ennemi beaucoup plus fortement armé.
Liste des morts
Français
ECHAVE Joseph 40 ans Marié 8 enfants de 14 à 1 an Socoa / Ciboure
OYHANART Armand 34 ans Marié 8 enfants de 15 à 1 an St Jean de Luz
MARTIARENA Saturnin 61 ans Veuf 4 enfants de 19 à 11 ans rue du Chai Ciboure
HEGUILEN Louis 16 ans Célibataire (Mère veuve) 37 rue Sopite St Jean de Luz
CAZABON Paulin 52 ans marié 6 enfants de 25 à 14 ans Guéthary
MUGABURE Pierre 53 ans marié 3 enfants 16,14,10 ans Guéthary (Pont de Bidart)
POULOU Julien 34 ans marié 2 enfants 6 et 4 ans Place de la Mairie Ciboure (détaché comme canonnier sur MARNE)
Espagnols
OTAZO José 26 ans marié 5 enfants (ainé 8 ans) Saint Jean de Luz
TEILLERIA Andres 35 ans marié 2 enfants 9 et 3 ans Saint Jean de Luz
AMADO Manuel 32 ans marié 4 enfants 7, 5, 3 et 1an Saint Jean de Luz
BASURTO Pedro 40 ans marié 3 enfants 4, 2 et 1 an Ciboure
ARISMENDI Jose 48 ans célibataire Saint Jean de Luz
ORBEGOZO Eusebio 25 ans célibataire Saint Jean de Luz
BASURCO Martin
On note que les familles françaises recevront un secours de 300 francs + 100 francs par enfant de moins de 16 ans.
Les familles espagnoles recevront un secours 360 francs plus 50 francs par enfant de moins de 16 ans.
Récompenses
Citation à l’Ordre de l’Armée
Chalutiers MARNE et VERDUN et l’ensemble des marins français et espagnols cités ci-dessus.
Pour l’énergie et le courage dont ils ont fait preuve en se défendant jusqu’à la mort sur un chalutier attaqué par un sous-marin.
L’Etat Major de la Marine avait bien précisé qu’il n’y avait pas lieu d’accorder une distinction quelconque aux survivants espagnols suivants : Iviondo Sidillo, Mendizabal et Santa Maria.
Note du 2 Février 1918 pour le cabinet civil du Ministre
Suite à la lettre du député Lachaud, je ne peux que me référer aux deux notes déjà remises en Décembre 1917 et Janvier 1918 au sujet de cette affaire.
Les chalutiers MARNE et VERDUN n’ont pas été réquisitionnés par le Département et leurs propriétaires ne peuvent solliciter éventuellement une subvention à titre de dommage de guerre que sur les fonds alloués à cet effet au Ministère de l’Intérieur.
Je propose de remettre le dossier de cette affaire au Sous Secrétaire d’Etat à la Marine Marchande.
Signé : Commissaire Général Fontaine, chef du Service Central de l’Inscription Maritime
Le sous-marin attaquant
C’était l’UC 72 de l’Oblt Ernst VOIGT.
Voigt disparaîtra avec tout son équipage le 25 Août suivant en rentrant à sa base par le Pas de Calais. UC 72 heurtera une mine. L’épave a été retrouvée et identifiée en 2013.
Cdlt
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