Destruction de tubes de gaz en rade d'Hyères en 1919

[Yans83]

Bonjour
Ayant découvert des courriers des autorités compétentes d'époque ainsi que des courriers de citoyens incommodés, j'ai rédigé un petit texte sur cette pratique de destruction de tubes de gaz qui a eu lieu en 1919 aux Salins d'Hyères. Il permet de résumer mes découvertes. Je sollicite donc vos connaissances dans une question à la fin du texte.

Courant 1919, les Salinois commencent à trouver d’étranges objets que la mer rejette chaque mois. Très vite, le lien est fait avec l’activité croissante de la Marine qui au large procède à la destruction de tubes de gaz asphyxiants. Un après-midi, les clients du Café restaurant de la Gare aux Salins, en majorité des marins faisant escale à Port-Pothuau, sont incommodés et se dispersent. Un matin, la famille Beauchière à la Capte est intoxiquée : une mère et son enfant de deux ans se sentent mal et doivent immédiatement être évacués. Plus tard, une lettre du brigadier des Douanes relate la découverte d’ampoules de gaz asphyxiants venant s’échouer à la Capte, à la Plage et aux Pesquiers. Puis Mr Passalacqua adresse au maire la lettre suivante : La corporation des pêcheurs me prie de bien vouloir solliciter de votre bienveillance pour que vous adressiez d’urgence une réclamation au Préfet Maritime, contre ceux qui sont chargés de noyer les gaz asphyxiants, qui persistent à en jeter dans les lieux de pêches, malgré les avertissements des pêcheurs.
Ces faits sont relatés, expliqués et transmis aux autorités mises en cause et l’information remonte jusqu’au ministère de la guerre qui via le préfet puis le sous-préfet donne une réponse en septembre 1919: Je vous prie de faire connaître à Mr le maire de la commune d’Hyères et au Conseil Municipal que leurs craintes ne sont pas justifiées et qu’il n’y a aucunement lieu de redouter l’anéantissement des poissons par les gaz. Les substances asphyxiantes qui sont à l’état liquide dans les récipients qui les contiennent sont immédiatement détruites par l’eau de mer à mesure qu’elles se mélangent avec elle et comme leur noyage s’effectue par des fonds d’un millier de mètres, il n’est pas à craindre que les poissons aient à souffrir de leur présence ni de celle des produits résiduels dilués. C’est du reste l’existence de ces fonds qui, jointe à la proximité du port de Toulon et des ressources matérielles qu’il présente, a conduit l’autorité maritime à choisir la rade d’Hyères pour l’exécution de ces noyages (…). Je suis certain que la population des Salins d’Hyères, mieux informée, saura s’affranchir d’appréhensions injustifiées et qu’elle se prêtera de bonne grâce à une opération d’assainissement absolument indispensable.


Question : avez-vous connaissance de ces opérations et étaient-elles, comme le prétend le ministère, sans risque pour les poissons et sans risque pour les hommes ?

Merci
Cordialement
Yannis

[Yves D]

Bonjour Yannis
Je vis sur place et je n'avais jamais entendu parler de cela. Ces fonds supérieurs à 1000m. se trouvent effectivement à environ 4-5 milles dans le SSE de Porquerolles soit une dizaine de milles au large de Port Pothuau donc relativement proches de la côte. Je n'ai pas qualité pour donner un avis sur l'absence de dangerosité du produit dont on ne précise d'ailleurs pas la nature chimique.
On notera quand même au passage le discours lénifiant des autorités. La mer poubelle est un concept vieux comme les hommes.
Cdlt
Yves

[IM Louis Jean]

Bonjour à toutes et à tous,

Le noyage de gaz asphyxiants a commencé en mars 1919. Le remorqueur "Travailleur" emportait les fûts à 10 milles environ du cap Sicie.


Le temps du 24 mars 1919 sur Gallica

Comme l'écrit l'auteur de l'article, l'opération n'était pas sans danger :

le remorquer "La Valette" en a été victime


La presse du 13 août 1919 sur Gallica


La Lanterne du 7 octobre 1919 sur Gallica

L'opération se faisant au grand jour, vous devriez trouvez plus d'informations dans les archives locales.

Cordialement
Étienne

[Yans83]

Bonjour

Merci à vous deux pour vos interventions. J'avais consulté la presse locale d'époque mais celle-ci s'avéra moins prolixe en renseignements que les autres périodiques, néanmoins j'en ferai une relecture. Si un "chimiste"passe par là, l'eau de mer avait-elle vraiment la propriété de détruire les substances asphyxiantes ?
Bonne journée à tous.
Yannis

[IM Louis Jean]

Bonsoir à toutes et à tous,

La question que je me pose est de savoir si les conteneurs ont tous succombé à la pression et à la corrosion, après 95 ans et à 1 000 mètres de profondeur.

L'écologie en 1919 ....

Cordialement
Étienne

[pierreth1]

Bonjour,
Je tombe sur ce post seulement maintenant la question écologique est interessante
en effet dans le cas de l'yperite il s'agit d'un liquide qui par évaporation à partir de 6° donne un gaz mais son point d'ébullition est bien plus élevé d el'ordre de 214°, ce liquide est plus dense que l'eau(1,27g/cm3) et tres peu soluble de l'ordre de 0, 7g/litre d'eau autrement dit pour5 litres (7kg) d'yperite il faudrait 10m3 d'eau (a 25°). Bien entendu l'yperite est moins soluble dans de l'eau salée.
Mais là les containers sont immergés à 1000m (approximativement) donc à 4° sous une pression de 100bars ce produit se trouvera donc sous une forme liquide plutot epaisse et une forme très visqueuse (type cire) la solubilité sera très faible d'autant plus que les fonds ne sont pas aussi agites que les eaux de surface, que les sediments se deposeront et fixeront le produit et que l'yperite dans ces conditions est excessivement peu dégradable. Par ailleurs les liquides n'etant pas compressibles tant que le contenant ne sera pas percé par l'érosion il gardera le liquide. et même percé l'expérience de la Baltique montre que le liquide a tendance a rester à proximité en se mélangeant aux sediments et aux sables. il faut imaginer à cette pression et temperature un produit de la viscosite du goudron liquide, si on faisait couler ce goudron dans de l'eau chaude (sinon il fige) il resterait en amas
Il y a donc toutes les chances pour que les cargaisons d'yperite aient 1 siecle plus tard encore un potentiel letal

Donc si on a réellement immergé de l'yperite dans cette zone l'absence d'accident n'est du qu'au fait que les fonds sont trop grand pour pecher au chalut! car il ya eu en mer du nord et baltique des accidents dont de smorts parmi des equipages de chalutiers
Cordialement
Pierre