Entre les lignes...

A Malinowski
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Gendarmerie nationale
Prévôté des Etapes
2ème armée
Procès verbal constatant:
Renseignements à l’autorité militaire de Creil, sur une dissipation de vin commise par des militaires du 163ème régiment d’infanterie de passage en gare de Creil.
2 janvier 1915 à 10 heures 30
Nous, soussignés, Robert Antoine et Ormancey Albert, gendarmes à pied, prévôté des Etapes de la 2ème armée à Creil ( Oise) revêtus de notre uniforme et conformément aux ordres de nos chefs, étant de service à la gare de Creil, nous avons été prévenus par le capitaine adjoint au Commissaire militaire de la gare, que des soldats du 163ème régiment d’infanterie de passage à Creil, étaient montés sur un wagon chargé de fûts pleins de vin à environ 300 mètres de la gare.
Nous nous sommes rendus sur les lieux immédiatement et avons constaté en effet qu’une trentaine de ces militaires, porteurs de bidons et de quarts, étaient montés sur un wagon isolé. Autour d’eux, plus de la moitié du détachement se trouvait rassemblé. Trois sous-officiers du 163ème régiment se trouvaient présents et trois sentinelles, baïonnette au canon, avaient été placées à cet endroit.
A notre vue, les militaires qui se trouvaient sur ou à proximité du wagon ont pris la fuite et ont gagné en toute hâte leur train garé juste en face. A ce moment, le capitaine adjoint au commissaire de la gare nous a rejoints et nous a donné l’ordre d’aller chercher le commandant du détachement.
Nous avons obéi immédaitement à cet officier et avons prévenu le lieutenant du 163ème qui se trouvait dans un compartiment en tête du train que le commissaire militaire de gare désirait lui parler. Le lieutenant, qui ignorait totalement ce qui venait de se passer, nous a suivis ainsi que les trois sous-officiers, mais nous avons constaté que le commissaire militaire adjoint avait quitté les lieux. Nous avons alors invité le lieutenant à venir trouver le commissaire de la gare à son bureau, mais cet officier nous a répondu :”Il m’est impossible de me rendre jusqu’à la gare, c’est trop loin et mon train va partir, je ne puis le manquer.” En effet à peine cet officier fut-il remonté dans son compartiment que le train se mettait en marche.
Dans ces conditions, il nous a été impossible de prendre sa déclaration, ni celle des sous-officiers du même régiment qui se trouvaient présents.
Nous avons constaté que le wagon chargé de fûts avait été tamponné. Ce wagon était à moitié brisé. D’après les dires de plusieurs employés du chemin de fer et notamment de Monsieur Cavignaux Luc, aiguilleur, dont le poste se trouve proche du lieu où l’incident s’est produit, il résulte qu’un des tonneaux répandait le vin par suite du tamponnement du wagon, ce vin répandu a excité la convoitise des militaires du 163ème.
A notre arrivée à la gare nous n’avons reçu aucune consigne concernant le wagon endommagé et comme il se trouvait à 300 mètres au moins de la gare où nous étions occupés à visiter le train partant pour Compiègne, il nous a été impossible de prévenir les faits ci-dessus rapportés. En foi de quoi nous avons rédigé le présent en simple expédition adressée au commandant d’Etapes. Fait et clos, les jour, mois et an que dessus.
Signés : Robert et Ormancey.

Creil le 2 janvier 115
Le Commissaire militaire de la gare de Creil à monsieur le chef de Bataillon Commissaire Régulateur.
Aujourd’hui, vers 10 heures 25 le sous-chef de gare, Monsieur Heuls, aperçut un groupe de militaires descendus d’un train en stationnement qui entouraient un wagon portant des fûts de vins et recueillaient, à l’aide d’un plat de campement, le liquide qui s’écoulait par la bonde avariée de l’un de ces fûts. Le sous-chef fit descendre ces soldats et avant de s’éloigner prescrivit à un homme d’équipe de placer le fût de manière à l’empêcher de perdre son contenu. Quelques secondes après, il aperçut une foule de soldats qui, montés sur le wagon, avaient défoncé le fût et puisaient le vin avec des ustensiles de campement; il intervint aussitôt mais ne pouvant se faire écouter il gagna la cabine téléphonique, peu éloignée de là, afin de faire prévenir le commissaire de gare. Le capitaine Marchadier prévenu, prescrivit aux gendarmes de service à la gare de dire au chef de détachement de venir le trouver, de faire cesser le pillage et de prendre les noms des délinquants. Quelques instants après, je fis chercher le gendarme et je lui demandai ce qu’il avait fait; il me répondit :”Le chef de détachement est venu au devant du capitaine Marchadier mais ne l’ayant pas trouvé, il est reparti pour ne pas manquer son train; je n’ai pu prendre aucun nom, les hommes en faute s’étant enfuis.”
Le chef de détachement qui était fort contrarié, m’a dit Monsieur Heuls, était le sous-lieutenant Salier du 163ème régiment d’infanterie, mais il y avait certainement d’autres détachements, dont je n’ai pu avoir le signalement. Le sous-chef de gare dit cependant avoir reconnu la présence d’un fusillier marin.

CCM le 16 mars 2007
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