Questions sur un dossier médical

[appoline]

Bonjour à toutes et à tous,

Il y a quelques temps j'avais demandé à MDH la fiche de mon arrière grand-oncle, il était indiqué comme cause du décès : bronchite spécifique. Voulant en savoir plus j'ai écrit à la SAMHA de Limoges, par chance ils avaient conservés son dossier médical. N'étant pas dans ce milieu je sollicite l'avis des experts de ce forum pour en savoir un peu plus.

Il a été reconnu malade le 14 février 1916 à Courtemont pour bronchite et laryngite. Evacué sur Vitry le François jusqu'au 4 avril, puis dirigé sur Auch à l'hôpital Ble (bénévole ?) N° 59bis ; entré le 14 avril 1916 à l'hôpital complémentaire N° 13 de Toulouse.

1ère feuille d'observation : Diagnostic : Bronchite spécifique des sommets (?) ; Marche de la maladie : Bronchite sommet gauche ; traitemet au Thiscol (?).
Les températures 39° le matin et 37.4° le soir, le medecin précise à côté "le voir", je suppose qu'une température élevée le matin est grave ?

2nde feuille d'observation à son arrivée à Toulouse : symptomes à l'entrée : légère " sulmatite " (?) sommet droit (le medecin a mis un point d'interrogation, moi aussi), expiration soufflante aux deux sommets "scutons ou sutons" ?? droit en arrière. Infiltration sommet gauche. Tachycardie.

Voilà pour les descriptions, tous les termes que je ne comprends pas sont suivis d'un point d'interrogation. Que pensez vous du diagnostic et du médicament employé (thiscol)? pensez vous qu'aujourd'hui la medecine moderne l'aurait sauvé ?

Enfin d'autres questions peuvent être soulevées, comme la localisation de ces hôpitaux (je connais pour Toulouse la salle n° 4 et même le numéro du lit n° 57), il y a également un numéro d'ambulance, peut être peut-on trouvé des documents sur cette ambulance ? enfin le nom du medecin peut être une piste de recherches : Dr Lamacey ?

je m'excuse pour le nombre de questions posées, mais s'en m'attendre à ce que vous répondiez à toutes ces questions, il me semblait intérressant de traiter ce thème.

Merci d'avance pour votre intérêt.
Emmanuel.

[rohmer]

Bonjour Emmanuel,
Bonjour à tous,

Pour les termes médicaux, notre spécialiste Mireille ne devrait pas tarder à vous répondre.
Les anti biotiques et la penicilline surtout, ne sont arrivés qu'avec le second conflit mondial.

En 1916, l'hôpital n° 13 se trouvait au 19 rue St Hilaire à Toulouse.
Bien cordialement.
Evelyne.

[appoline]

Merci pour votre réponse Evelyne, c'est très gentil.
Pour l'hôpital, je vais essayer de trouver des éléments et pourquoi pas des photos. Peut être sur Delcampe ou des ouvrages de cartes postales anciennes notamment dans les éditions Alan sutton.

Emmanuel.

[marcel clement]

Bonjour,

Votre A GO souffrait d'une forte infection bronchique des deux poumons avec atteinte de la sphère ORL ( gorge, larynx ), et de manière particulièrement importante du sommet des dômes pulmonaires ( la partie haute des poumons ) forte fièvre et accélération du rythme cardiaque liée à la fièvre et au mauvais fonctionnement de sa ventilation pulmonaire.
Avec les examens modernes l'auscultation des poumons n'a plus la même importance maintenant pour établir le diagnostic ou surveiller la progression de la maladie.

Je ne connais pas la plupart des termes qui à mon avis ne sont plus employés de nos jours. A cette époque là une bronchite pouvait se compliquer considérablement et aboutir à la mort du patient, ce qui n'est plus que tout à fait exceptionnellement le cas aujourd'hui.

Mireille en saura sûrement plus que moi sur ce sujet.

Bien cordialement,
M C

[appoline]

Merci beaucoup Marcel pour ces informations, je ne pensais pas que son état était aussi désespéré, bien qu'il ne résista pas longtemps, il est décédé le 29 avril 1916 soit 2 mois et demi après avoir été déclaré malade.

Encore merci.
Emmanuel.

[marcel clement]

Re,

Et oui, nous ne pensons pas assez souvent à la chance que nous avons de vivre à notre époque avec la médecine de maintenant. Lorsque les premiers essais cliniques de la pénicilline ont été fait sur un être humain , il s'agissait d'un policeman Anglais qui s'était piqué avec une tige de rosier au doigt et qui a fini par mourir d'une infection généralisée .... Les temps ont changés.


Bien cordialement,

M C

[bibicat59]

Bonjour
Pouvez-vous photographié ce document et le mettre en ligne?
Il y a peut-être des mots mal déchiffrés?
Cordialement

Cath

[Alain Jehan]

Bonjour.
A mon avis, l'adjectif "spécifique" est à interpréter comme "tuberculeuse". La tuberculose a été depuis la nuit des temps un fléau pour l'humanité (on en trouve les séquelles osseuses - mal de Pott - sur les momies égyptiennes). On sait qu'elle est toujours allée de pair avec les conditions d'hygiène désastreuses, ce qui était le cas pour les soldats des deux bords pendant la Grande Guerre.
Cette infection a une prédiction particulière pour les sommets des poumons, comme dans le cas présent, où on note sur une radio une image d'infiltrat. A la percussion manuelle du thorax, on relève une submatité (et non pas la sonorité rendue normalement par un poumon bien aéré). A l'auscultation, je suppose qu'il s'agit de "sous-crépitants" (éventuellement en abréviation ce qui vous fait restituer cette lecture bizarre), en plus du souffle expiratoire. Tout cela trahit une condensation des sommets pulmonaires, tout à fait compatible avec ce diagnostic de tuberculose pulmonaire bilatérale. La toux (qui a fait parler de "bronchite") est un signe essentiel également.
L'atteinte laryngée n'est pas fréquente de nos jours, mais classique.
La température est en revanche habituellement plus élevée le soir que le matin, mais cela ne remet pas en cause le diagnostic que je vous propose.
Je n'ai aucune idée de ce qu'est le "Thiskol".
S'il s'agit bien d'une tuberculose évoluée, l'évolution fatale au bout de 2 mois et demi n'a rien de surprenant pour l'époque. Pour info, le premier anti-tuberculeux efficace (la Streptomycine) a été découvert par Waksman (Prix Nobel de médecine en 1952) aux Etats-Unis en 1944. Du jour au lendemain, il a permis de guérir (au prix d'une surdité séquellaire) la méningite tuberculeuse, responsable de 100% de mort jusque là. Par la suite sont apparus d'autres médicaments de plus en plus efficaces (avant tout Rimifon en 1952, puis Rifampicine dans les années 60) et la Streptomycine n'est plus disponible depuis plusieurs années. Mais en dépit de l'absence de médicaments efficaces dans la première moitié du XXème siècle, on a pu guérir des milliers de malades en tirant profit du fait que le bacille de Koch responsable de la tuberculose a besoin d'oxygène pour proliférer. Pour l'en priver, on décollait le poumon (pneumothorax thérapeutique, qu'on entretenait régulièrement pendant des années, le poumon ayant une tendance spontanée à se recoller). Ce décollement du poumon de la paroi entraînait son affaissement et son manque d'aération, mettant le bacille dans de mauvaises conditions de prolifération. De nos jours, on guérit la grande majorité des cas de tuberculose en 6 mois sous réserve d'avoir accès aux médicaments les plus efficaces et d'une prise quotidienne scrupuleuse chaque matin à jeun.
Je rejoins l'intervenant précédent suggérant de mettre en ligne le document pour mieux le lire.
Tous les Poilus ne sont pas morts de traumatismes balistiques... Et, comme vous le savez, la grippe espagnole de 1918 a fait plus de victimes que la Grande Guerre.
Bien sincèrement.
AJ

[Jean RIOTTE]

Bonsoir Alain,
Bienvenue sur notre Forum où je vous souhaite de trouver ce que vous recherchez.
Et surtout n'hésitez pas à nous éclairer sur tel ou tel point vous paraissant intéressant... sachant que la plupart des inscrit(e)s n'ont pas fait d'études médicales!!
Merci pour l'intervention ci-dessus.
Cordialement.
Jean RIOTTE.

[appoline]

Pardon pour la réponse tardive,
Un grand merci à tous les intervenants pour l'intérêt porté à mes questions et pour la grande qualité de vos réponses. Je vais scanner prochainement la feuille d'observation, le temps pour moi de réparer mon scanner.
Encore merci, à très bientôt.
Emmanuel