Bonjour à tous,
Comme promis dans le fil sur le J.M.O. de l'Ambulance 1/44, voici les extraits les plus significatifs du J.M.O. du G.B.D. 27.
Bonne lecture !
Bien cordialement,
Eric Mansuy
"J.M.O. du G.B.D. de la 27e Division
10 août 1914
Quelques aéroplanes allemands commencent à nous survoler, on entend l’écho des premiers coups de canon. Le soir, vers 7 heures, ordre de porter le G.B.D. à Vienville. A 8 heures, nous sommes prêts à partir, mais à ce moment, une immense colonne d’artillerie et d’infanterie entre en marche. Elle met près de 3 heures pour s’écouler. Tout le long de la route, nous sommes gênés dans notre marche. Nous ne pouvons arriver à Vienville qu’à 10 heures du matin. Plus de 10 heures pour 14 kilomètres…
16 août 1914
Les nouvelles sont bonnes : c’est l’écho du « Gaudeamus » d’hier. Les Allemands reculent. Des prisonniers défilent devant nous. J’admire la tenue du troupier français qui, heureux, assiste à leur passage mais ne profère pas un mot d’insulte à leur adresse.
Et successivement les troupes marchent en avant. Les Allemands ont fui. Sainte-Marie-aux-Mines – Markirch – nous est rendue. Vive l’Alsace française !
A 6 heures du soir, nous quittons notre bivouac et allons cantonner dans les hôtels au sommet du col.
21 août 1914
De Saâles, nous partons vers 4 heures ½ du matin pour Saulxures, Saint-Blaise, Plaine. De Plaine, le G.B.D. fonctionne pour les soins aux blessés. Il se porte jusqu’à Salm, 6 kilomètres plus haut. Nombreux blessés que nous portons sur des brancards, ou traînons sur des brouettes. Il y a en tout 82 blessés dont 3 ou 4 Allemands. Nos voitures de transport ne suffisent pas ; nous réquisitionnons toutes les voitures disponibles et ce n’est pas encore suffisant. Trois par trois, les brancardiers s’attellent aux brouettes. Partis à 9 heures du soir, nous marchons toute la nuit, sans une étoile au ciel, dans une immense forêt de sapins, pour traverser le col de Anz [Hantz]. Tous nous sommes exténués. Et les pauvres blessés, combien ils doivent souffrir d’être ainsi cahotés, malgré toutes nos précautions mais on dirait qu’ils compatissent à nos fatigues : sauf un blessé allemand qui gémit, pas un seul blessé ne se plaint).
Nous arrivons à Le Saulcy à 3 heures du matin. Quelques brancardiers s’y arrêtent, la plupart filent sur Senones pour y conduire les blessés.
22 août 1914
Le Saulcy (Vosges). Repos.
23 août 1914
Une section monte au col de Anz [Hantz] et y recueille une vingtaine de blessés qu’elle évacue sur Senones.
24 août 1914
Les 2 sections fonctionnent au col de Anz [Hantz]. Nous évacuons 52 blessés sur Senones, et dans la nuit nous allons cantonner à Clairefontaine, dans une fabrique de papier.
26 août 1914
A minuit, nous arrivons à Moyenmoutier. Vers 5 heures du matin, M. le Médecin Chef groupe les blessés pouvant marcher, et sous la conduite de plusieurs gradés, les fait évacuer par la forêt d’Hurbache. Nous disposons nos brouettes dans la cour de l’Eglise, tout près de l’Hôpital. Mais les obus commencent à pleuvoir sur la ville. Nous mettons les malades en lieu sûr et attendons une accalmie. De 50 à 100 obus éclatent tout près de nous. Vers 8 heures les canons se taisent. Nous constatons que trois brancardiers ont été blessés, dont 1 assez grièvement au bras. D’autres brancardiers envoyés sur différents points pour y recueillir des blessés n’ont pas encore rejoint le groupe.
Nous profitons de l’accalmie pour mettre en lieu plus sûr les malades que nous pouvons transporter. Nous les mettons dans nos voitures et sur nos brouettes et nous dirigeons sur Saint-Dié par la forêt d’Hurbache.
A Hurbache, les obus éclatent de nouveau tout près de nous. A Saint-Dié, nous ne pouvons plus entrer : la ville est bombardée. Nous devons nous replier sur Saint-Michel-sur-Meurthe. Ce n’est qu’à la nuit que nous pouvons entrer à Saint-Dié avec nos malades.
Une demi-heure de repos, et sous une pluie battante nous allons cantonner à Herbaville.
Dans cette journée, M. le lieutenant du Train Faure a fait preuve du plus grand courage. Il a fait 11 voyages en automobile entre Moyenmoutier et Saint-Dié pour évacuer des blessés à travers les balles et les obus. L’auto a été criblée de projectiles. Il a réussi à transporter de la sorte 72 blessés.
27 août 1914
De Nompatelize, nous allons cantonner à La Bourgonce.
Nous constatons que M. Duquerrois, officier gestionnaire, 2 Médecins Auxiliaires, 1 sergent, 2 caporaux, et une douzaine d’hommes manquent à l’appel. Il est probable qu’ils ont été faits prisonniers à Moyenmoutier.
29 août 1914
Le G.B.D. stationne 3 heures à Rouges-Eaux, puis remonte à l’entrée du col, à la Passée du Renard. La fusillade crépite sans cesse, le canon gronde. La bataille a dû être rude. Nous évacuons près de 200 blessés, à l’aide de camions automobiles, voitures lorraines réquisitionnées, nos voitures de transport, les cacolets portés par les mulets, nos brouettes porte-brancards. Et les brancardiers qui n’étaient pas attelés à une brouette soutenaient des blessés qui n’auraient pu marcher seuls. Toute la nuit, le G.B.D. fonctionne.
31 août 1914
Les 2 sections sont à La Bourgonce, à la Passée du Renard. Peu de blessés durant la journée.
Tel est en résumé l’emploi du temps du G.B.D. de la 27e Division durant le mois d’août, 1er mois de combat. On peut dire, sans aucune flatterie, que tous ont soigné les blessés, non pas avec autant de délicatesse – ils ne le pouvaient – mais avec autant de dévouement que l’auraient fait leurs Mères ou leurs Epouses.
Le 1er septembre 1914
Le Médecin-Major de 1re classe
Médecin Chef du Groupe
Merz"
Le G.B.D. 27 dans les Vosges (août 1914)
- Eric Mansuy
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- Inscription : mer. oct. 27, 2004 2:00 am
Re: Le G.B.D. 27 dans les Vosges (août 1914)
"Un pauvre diable a toujours eu pitié de son semblable, et rien ne ressemble plus à un soldat allemand dans sa tranchée que le soldat français dans la sienne. Ce sont deux pauvres bougres, voilà tout." Capitaine Paul Rimbault.
- Jean RIOTTE
- Messages : 5774
- Inscription : sam. nov. 05, 2005 1:00 am
Re: Le G.B.D. 27 dans les Vosges (août 1914)
Bonjour Eric,
Bonjour à toutes et à tous,
Encore merci pour ces "bonnes feuilles".
Cordialement.
Jean RIOTTE.
Bonjour à toutes et à tous,
Encore merci pour ces "bonnes feuilles".
Cordialement.
Jean RIOTTE.
Re: Le G.B.D. 27 dans les Vosges (août 1914)
Bonjour à tous,
La panique du début de guerre... ou comment était gérée l'organisation de l'évacuation des blessés...
C'est terrible de penser, que des hommes sont aussi morts, faute d'avoir obtenu des soins.
Heureusement qu'il y avait des actes de courage, pour sauver les camarades.
Merci aussi pour cette lecture, Eric.
Amicalement,
Carole
La panique du début de guerre... ou comment était gérée l'organisation de l'évacuation des blessés...
C'est terrible de penser, que des hommes sont aussi morts, faute d'avoir obtenu des soins.
Heureusement qu'il y avait des actes de courage, pour sauver les camarades.
Merci aussi pour cette lecture, Eric.
Amicalement,
Carole
- Stephan @gosto
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Re: Le G.B.D. 27 dans les Vosges (août 1914)
Bonjour,
Amicalement,
Stéphan
Oui... et malheureusement, en avril 17, beaucoup ne survécurent pas plus à leurs blessures que leurs aînés de 14... Et pourtant, que je sache, la G.O.P. (Grande Offensive du Printemps) ne fut pas une surprise pour l'E.-M. français !!!La panique du début de guerre... ou comment était gérée l'organisation de l'évacuation des blessés...
C'est terrible de penser, que des hommes sont aussi morts, faute d'avoir obtenu des soins.
Amicalement,
Stéphan