Voici une bien triste histoire parmi tant d'autres...
Cet épisode est tiré du livre d'or de l'Ecole Nationale des Mines de Saint-Etienne (Saint-Etienne, Société Amicale des Anciens Elèves de l'Ecole Nationale des Mines de Saint-Etienne, 1921) Au cours de nos lectures cela nous arrive de nous arrêter sur des faits curieux parfois, tristes souvent. Les lignes qui suivent m'ont ému, je voulais vous conter cette histoire.

Le portrait ci-dessus est celui de deux frères, Albert et Louis Comte. Voici quelle est leur triste histoire. Mais tout d'abord, une présentation de ces deux officiers.
- Albert Comte, né le 21 mars 1887 à Thonon-les-Bains en Haute-Savoie, ingénieur aux mines de l'Escarpelle fut mobilisé le 2 août 1914 comme lieutenant, chef d'une section de mitrailleuse au 341e régiment d'infanterie. Il prit part à la bataille de la Marne où, le 10 septembre 1914, il se signala particulièrement ; puis aux actions de Chauvoncourt, du Mort-Homme. Il est nommé capitaine en 1916. Combat à Verdun et à Saint-Mihiel où il est blessé (octobre 1918) Passé au 2e régiment de génie, il contribua à la construction du premier pont de bateaux sur le Rhin, à Oppenheim. Après avoir passé quatre ans au front et avoir échappé aux si nombreux dangers qu'il a courus, Albert Comte vient en permission à Paris (fin janvier 1919)
- Louis Comte, né le 11 septembre 1885, frère aîné d'Albert, ingénieur aux mines de Liévin, est mobilisé le 2 août 1914 comme lieutenant, chef d'une section de mitrailleuses au 364e régiment d'infanterie. Il prend part aux actions d'Etain (24-25 août 1914) de Trésauvaux (22-23 septembre 1914) de Marcheville (6-7 avril 1915) d'Hennemont-Ville (24-25 février 1916), où il se distingue par sa belle attitude, de Ronvaux (28 février 1916), de Lihons (12 juillet 1916). Nommé capitaine le 2 août 1916, il passe au 303e régiment d'infanterie le 24 août 1916, et se bat à Vermandovillers (Somme) du 4 au 9 septembre 1916, et à Avocourt les 29-30 juin 1917. En juillet 1917, il est désigné pour suivre les cours de l'Ecole d'état-major de Senlis, et, comme capitaine d'état-major, prend part aux actions de Champagne (février 1918), de Villers-Cotteret (mars 1918), de Moreuil, plateau de Rouvrel (4 avril 1918)
- Albert, cité à l'ordre de la division : "sur la brêche depuis le début de la guerre, a particulièrement montré sa valeur dans le combat de nuit du 10 septembre 1914 (bataille de la Marne) et ensuite dans les situations les plus exposées comme lieutenant chef de section de mitrailleuses. En qualité de capitaine commandant la compagnie de mitrailleuses a fait preuve de beaucoup d'intelligence et de qualité d'organisation."
- Louis, cité à l'ordre de la division, le 10 août 1915 : "commandant une section de mitrailleuses à l'attaque de nuit d'Hennemont (combat des Eparges) a porté sa section à la barricade la plus avancée sous un feu violent à moins de 200 mètres, a contribué dans une large mesure à repousser l'ennemi, en lui infligeant de lourdes pertes."
Albert Comte vient en permission à Paris (fin janvier 1919). Il meurt le 3 février 1919, en trois jours à l'hôpital militaire de Saint-Cloud, d'une grippe dont il avait ressenti les premiers symptômes en chemin de fer. Louis apprenant la mort de son frère Albert décide de regagner Paris au plus vite... Comme son frère Albert, et marqué aussi, semble-t-il, du sceau de la fatalité, Louis Comte, après ces quatre années de vaillance au front, contracte la grippe en venant à Paris aux obsèques de son frère, et meurt quelques jours après, le 1er mars 1919, à l'hôpital du Lycée Buffon, à Paris...
Il n'était vraiment pas prudent de prendre le train en cet hiver 1919...
Je n'ose imaginer la tristesse de la famille, des parents notamment. Leurs fils, mobilisés de la première heure avaient survécu aux quatres années de guerre et étaient frappés par la grande faucheuse à quelques jours d'intervalles... quelques semaines seulement après les joies de l'armistice.
Sombre période...
Connaissez-vous des histoires aussi curieuses que celle-ci, mêlant fatalité, tristesse, destins cruels et étonnants ?
Bien cordialement
Guilhem LAURENT