2 "fusillés pour l'exemple"

[Gerard Laurence]

Bonjour à toutes et tous,
Cela pourra peut-être intéresser quelqu'un(e) : rencontré à la lecture du JMO du 265e RI l'évocation de 2" fusillés pour l'exemple".

"27 juin(1915)- À 4h30 exécution à Saint-Léger-au(?)-Bois et en présence des (illisible; mais ce n'est pas troupes) cantonnées dans ce village du soldat Pierret de la 22e compagnie condamné à mort par le Conseil de guerre de la 61e DI pour désertion en présence de l'ennemi"

L'exemple n'a pas semblé très dissuasif puisque 2 semaines après :

" 13-14 juillet - Le soldat Rolland de la 17e compagnie condamné à mort par le XConseil de guerre de la 61 e Division est exécuté le 13 à 5h30 du matin, sans incident"

Je suis en train de lire l'ouvrage du Général André Bach : "Fusillés pour l'exemple ,19141-1915 " Paris : Tallandier, 2003, 617p. qui traite de cette question très douloureuse. En tout cas le sort de ces hommes me touche infiniment. Le soldat Rolland faisait partie de la même compagnie que mon GP. Sans doute se connaissaient-ils.
À remarquer: l'heure très matinale de ces exécutions. Si on donne un chef d'accusation pour Pierret, aucune mention pour Rolland.Le "sans incident" est intéressant . Il y en eut donc ailleurs . Est-ce pour cela que l'on opère au petit jour ? Mais on semble le faire en présence des troupes ...justifiée par la nécessité de l'exemple! Mais commment pouvait-on demander à des hommes de fusiller leurs compagnons de misère ? Il y aurait mille questions !.
Salut à toutes et tous.
Gérard.

[marie-france ganansia]

Bonsoir,

Voici un lien intéressant (hélas, pour ceux qui lisent l'anglais),sur ce qui se passe chez nos voisins Anglais au niveau des fusillés de la "Grande Guerre".

http://www.bullyonline.org/stress/ww1.htm

Cordialement

MFG

[marie-france ganansia]

Bonsoir,

Ce lien rapelle comment 306 soldats britanniques et du Commonwealth, beaucoup adolescents qui s'étaient enrôlés volontairement, ont été passés par les armes pendant la première guerre mondiale après un simulacre de jugement.
Le pardon et la réhabilitation de ces soldats ont toujours été refusés et ce n'est qu'en 2000 que pour la première fois leurs descendants ont eu l'autorisation de défiler à côté des anciens combattants pendant la Fête du Souvenir de 1914-1918.
Il est demandé aux familles de ces soldats d'écrire au Prmier Ministre Tony Blair pour obtenir cette réhabilitation.

Le rôle traumatisant du conflit sur le psychisme des troupes est souligné ainsi que la folie meurtrière de chefs comme le général Haig.

Cordialement

MFG

[Bruno Tardy]

Bonjour,
Une simple remarque à propos de l'heure des exécutions que vous relatez. La coutume était de se lever très tôt, et ces exécutions ont eu lieu à cette heure là , voir un peu après pour la seconde. La coutume n'était-elle pas à cette époque d'exécuter les condamnés au lever du jour, qu'ils soient civils ou militaires. Et puis sur le front ce n'était pas possible dans la journée si le commandement voulait que la troupe puisse y assister.
cordialement
Bruno

[Frederic Avenel]

Bonjour à tous,

Les exécutions ont lieu tôt le matin, parfois trop tôt...
Voici l'histoire de l'exécution de 4 soldats du 96e RI qui a eu lieu à Roucy le 22 mai 1916; ils avaient été condamné par le tribunal de guerre de la 55e DI (2 des bataillons du 96e RI étaient alors "prêtés" à cette DI) pour avoir mené (?) un petit mouvement de révolte un mois plus tôt, alors que leur bataillon était de nouveau désigné pour remonter en ligne le soir même du jour où ils venaient d'être relevés. Le mouvement n'avait pas duré plus d'une heure...
Le peloton d'exécution était composé de soldats du 246e RI, mais les soldats du 96e RI assistaient également à l'exécution.
On dispose d'une relation de cet évènement dans le livre "Emile et Léa", rédigé par Michel Mauny à partir de 1235 lettres et notes léguées par son grand-père incorporé dans ce régiment:

Emile MAUNY, lettre du 23 mai 1916 (page 114/115)
« Il s’est passé hier une séance bien peu intéressante. 4 soldats du 96e ayant été condamnés à mort, les compagnies du 5e bataillon du 246e ont été chargées de fournir les 4 pelotons d’exécution. A ma compagnie, il fallait 5 soldats, 4 caporaux, 5 sergents. Par bonheur, je n’ai pas été désigné pour cette horrible besogne. Les camarades nous ont raconté la scène. C’était lugubre, poignant. Tous étaient hébétés d’avoir participé à cette exécution. Peut-être ces 4 malheureux avaient-ils mérité leur sort (je ne sais pas), mais on devrait bien trouver un autre moyen d’exécuter la loi au siècle où nous sommes. L’un d’eux avait paraît-il 18 à 19 ans. Il me semble que moi qui ai l’habitude de vivre avec les enfants et les jeunes gens, je serais devenu fou si on m’avait obligé à participer à ce drame. Je te raconterai ces choses que je n’ai pourtant pas vues mais qui ont hanté mon esprit toute la journée hier. »

Cité également par Michel Mauny :
« Paul Tuffrau, alors capitaine placé à la tête d’une compagnie de mitrailleuses du régiment d’Emile, rapporte qu’un homme a été frappé de folie à la suite de ce drame. Il se sentait compromis, ayant inclus dans une lettre à ses proches la phrase : « Au bout de vingt mois de campagne, il fallait que les chefs soient vraiment cruels pour mettre quatre de nos camarades au poteau ». obsédé par l’idée d’être lui-même fusillé, il sombra dans une démence suffisamment grave pour justifier son évacuation. »

M. MAUNY dispose d’un autre témoignage du capitaine TUFFRAU (246e):
" Concevreux, le 30 mai 1916.
….Dans les premiers jours de la semaine, il y a eu un matin quatre soldats du 96 fusillés près de ROUCY, par le 5ème bataillon de chez nous. La veille, on avait commandé de service une Companie, cantonnée à Concevreux pour 3 heures du matin ; on n’avait pas dit pourquoi, mais les hommes se doutaient, et des groupes nombreux discutaient. Je n’ai pas entendu la salve, mais j’ai su par BOURGEOIS et par GEOFFROY qu’on avait emmené les condamnés une heure trop tôt avant les troupes ; qu’un d’eux, un fort gaillard de dix-neuf ans, engagé pour la guerre, vitalité de taureau, hurlait d’une voie profonde et puissante : « me tuer, moi ? allons donc ! C’est impossible ! » BAYON dirigeait l’exécution ; il avait fait préparer quatre poteaux, apporter des cordes car il devinait qu’ils se débattraient ; cela a été vite fait, chacun ayant hâte d’en finir ; aussitôt attaché, les quatre pelotons ont fait en ligne face à gauche, visé, et sans même qu’il y ait eu commandement, le premier coup de feu a entraîné les autres.[...]"

Trop tôt encore pour ce MdL:
"[...]Après quoi BAYON a infligé huit jours d’arrêt à un Maréchal des Logis qui devait représenter la Division et qui est arrivé avec quatre minutes de retard : ‘vous faites mourir ces hommes deux fois, vous‘ ".

à bien...tôt,

Frédéric Avenel

[michel mauny]

Ravi de constater que mon ouvrage vous a intéressé. Je signale que je suis en mesure de proposer la tenue de conférences sur la vision du conflit par mes grands-parents. Contact par courriel [email protected]

Michel Mauny

[CCA_ESAG]

Bonjour à tous...
Artcle 1er : je ne veux pas polémiquer !!! Qu'on se le dise !!!

Les fusillés...Au delà du geste, j'aimerai comprendre le "Pourquoi". Que reste t-il d'autre à cette époque pour ne pas que le rempart cède ?...
Chacun d'entre nous a vu un jour un reportage TV sur les ravages post-traumatiques du stress au combat des soldats américains actuellement
engagés en Irak. Dans les années 2002, Arte avait diffusé un TV Film sur les traumastismes psychiques des soldats anglais en Bosnie.
L'Armée israelienne a été la première en 1978 à publier une étude sur le stress au combat et les dépressions nerveuses et leurs conséquences.
Dans la même veine, qui n'a pas vu "les révoltés du Bounty" ?...

La Grande Guerre, la "Der des Der"...dure 4 ans. Je ne suis pas une historien fameux, mais de mémoire, il faut remonter à la Guerre de Troyes
(et ce n'était qu'un siège...) pour voir des combattants face à face pendant plusieurs années.

Certes, je connais les Grands Classiques : les chefs sanguinaires, les chefs incompétents, les planqués de l'arrière etc.
Alors, comment faire ? Comment empêcher la débandade ? Comment empêcher les mutilations volontaires ? les suicides ? les mutineries ?
Surtout ici, sur ce Forum, nous ne sommes plus des perdreaux de l'année. On fusille ici, mais chez "le Boche" également. Et nos Alliès pratiquent eux aussi.
Nous savons tous qu'aprés la dernière offensive allemande de juillet 1918, les combattants allemands se rendent par centaines. Vous avez tous lus, comme moi, que les troupes française emploient des Prisonniers de Guerre sur les arrières. Dans le Génie, j'ai des compte-rendu de Cdts d'Unités qui avouent utiliser des pionniers allemands pour construire des ponts lourds, parce que le Teuton était un technicien respecté pour ses qualités et sa valeur. Imaginez les conséquences si on multiplie ce type "d'entre-aide", ces "fraternisations" ? Les tribunaux militaires d'exceptions sont-ils une spécialité de l'armée française ?

On fusille. Certes, Mais pourquoi faire ? Dans quel but ? A t'on d'autres moyens ?

Parce qu'on manque de psy ? Parce que le pinard ne remplace pas le Gardenal ? Pour faire la différence entre les "Mort au Champ d'Honneur" et eux ?

Plus simplement. Les animaux qui souffrent s'auto-mutilent.
Et une socièté qui soufre, elle fait quoi, elle ?

C'est sous cet angle, que j'ai plein de questions sans réponse.
Qui d'entre-nous a connaisance de thèses ou de publications relatant l'état psychique de la société française de 1910 à 1944 et les implications et conséquences pendant ces deux conflits ?

Rappelant l'article 1er, je souhaite à tout le monde un excellent week-end.
Cordialement.
B. Giudicelli

[belge]

Bonne nuit à tous,
Je dirai d'abord comme notre Ami Forumeur B.Giudicelli : Article 1 !
J'ajouterai : Article 2 : plusieurs autres fils de ce magnifique Forum qui est le nôtre traitent déjà de ce sujet. Je ne redirai donc point ce que j'y ai déjà donné comme avis ( sous peine de me faire condamner ...pour ...bla - bla ).
Article 3 et dernier : l'Exemple ! Même s'il y a, à mon avis, une différence entre le 'tiré au sort ", le " shoké / perdu / traumatisé/ épuisé" , le pacifiste, le révolutionaire, le fraternisateur et le traître qui s'en va...il y a toujours l'Exemple du traitement que la Hiérarchie leur réserve à tous...aux yeux des autres ( "Avis aux amateurs ). C'est peut-être triste, regrettable, mais, c'est comme ça et...ça marche ....toujours autant...lorsque le schnaps, le maitrank, la gnôle, le "pot belge" , le gin, le petit rosé bien frais ...et, avant tout, l'exemple à donner par les ...supérieurs eux -mêmes et le discours idéologique...ne marchent pas ...
Beaucoup ont cru à une guerre fraîche et joyeuse...beaucoup, malheureusement, n'en sont point revenus...dans tous les sens de ces termes....
Que le repos vous soit doux...
Cordialement

[piou-spad]

comment... les copains ...ils ont pu faire ça ?
moi j'aurai tiré à coté .....Mais bon ,fallait le faire.
j'aurais fait de tout sens ...à coté.
ma vision en ....2007.

En guerre ,j'aurai visé la cible ,en fermant mes yeux,et prier pour lui,
le doigt sur la gachette,mais cela m'aurai pourri la vie.
un brave tombe... sous nos balles
Dommage!

[Chasseur]

Peut-être qui si un général battu avait subit le même sort la "pilule" serait mieux passée pour les autres et l'Histoire ?