Je poursuit mes messages sur les chasseurs de Baccarat avec cette photo peu commune:

On aperçoit sur ce document des chasseurs à cheval du 4ème régiment (escadron basé à Baccarat), ainsi que des chasseurs à pied du 20ème BCP. Ces deux unités de Baccarat ce sont portées, dès la mobilisation, dans le secteur d'Ancerviller, afin de mener des reconnaissances dans la zone de sécurité de 8km placée en avant de la frontière. Les soldats français encadrent un sous-officier allemand de chevaux-légers Bavarois, qui tourne le dos à l'objectif.
Ce cliché pourrait avoir été pris le 5 août 1914 à proximité de Blamont par Mr Renard, photographe à Baccarat. Ce dernier semblait avoir beaucoups de relations avec les chasseurs et prenait la plupart des photos officielles. Sa boutique sera détruite 20 jours plus tard dans l'incendie de la rue des Ponts, anéantissant par la même occasion, tout son fond photographique. Ce dernier nous aurait sans nul doute éclairé sur cette période de la bataille des frontières où les clichés pris sur le vif sont relativement rares.
Le récit du Sergent Major Emile Maline du 20ème BCP * permet peut être de mettre une légende sur cette scène.
Le 5 août au matin, au cours d'une reconnaissance à Barbas, des chasseurs à cheval rencontrent des chevaux-légers allemands. Après un rapide combat, un chasseur français est blessé et achevé par les Allemands qui quittent le village. Les chasseurs de Baccarat ont à cœur de venger la mort de leur camarade et lancent des nombreuses patrouilles afin de faire des prisonniers.
« Le vœu des chasseurs à cheval est bientôt exaucé car une de leurs patrouilles, commandée par un sous-lieutenant, surprend dans un village, un officier allemand, pied à terre, interrogeant un habitant et prenant des notes. Son cheval est tenu par son ordonnance qui est en selle et qui, à la vue de nos chasseurs s'enfuit au galop emmenant avec lui le cheval de son officier. Le sous-lieutenant de chasseurs le fait prisonnier, ce qu'il n'accepte pas de bonne grâce en refusant de marcher. Voyant cela, notre officier lui fait lier les mains avec une corde à fourrage, dont l'autre extrémité est attachée à la selle de son cheval. Il lui fait comprendre que s'il ne veut pas marcher, il sera traîné. Un homme marche derrière, revolver au poing. L'officier allemand est arrogant ».
Avec l'éclairage de ce témoignage, on comprend mieux pourquoi le cavalier allemand ne fait pas face à l'objectif du photographe. Il semble que ce dernier a essayé de dissimuler la corde qui retient le prisonnier en la noircissant.
*Ce récit ainsi que d'autres carnets de chasseurs figure dans l'ouvrage « Képis bleus de Lorraine, carnets de chasseurs à pieds lorrains de la bataille des frontières à l'Artois », publié sous l'égide de la Société Philomatique Vosgienne.
Coincidence photo - récit ou témoignage pris sur le vif, en tout cas rien ne transparaît sur la capture de cet officier dans les JMO du 20e BCP.
Cordialement Sébastien