Le 7 juin 1916, les Allemands s’emparent du fort de Vaux, à l’est de Verdun. Dans les heures qui suivent, l’état-major français lance des contre-attaques aussi sanglantes qu’inutiles. De nombreux Axonais mobilisés notamment aux 245e, 347e et 348e régiments d'infanterie périssent lors des terribles contre-attaques françaises.. Voici leur histoire, cent ans après, jour pour jour.

Des officiers et soldats du 347 régiment d'infanterie particulièrement décimé par les combats du Fort de Vaux
7 juin 1916
Albert Alfred ACCADEBLED
Lieu : Vadelaincourt (Meuse)
87e régiment d’infanterie
Né à : Proisy
Âge : 30 ans
À Proisy, près de Guise, les trois frères Accadebled (ou accadeblé selon les sources) ont épousé les trois sœurs Godelle. Tisseur de métier, Alfred est l’un des produits de ces amours villageois. Nombre de ses cousins tomberont au champ d’honneur. Lui a épousé Émilienne Hélène Warret en 1911 à Proisy.
Blessé aux combats du Mort-Homme le 3 mai 1916, il est inscrit au tableau spécial de la Médaille militaire le 20 mai. Il s’éteint à l’hôpital nº12 de Vadelaincourt le 6 juin, son état l’ayant sûrement classé parmi les non transportables.
Eugène Honoré GENDRE
Lieu : Verdun (Meuse)
15e régiment d’infanterie territoriale
Né à : Barenton-Cel
Âge : 45 ans
Aîné d’une famille de sept enfants, dont cinq garçons, Eugène Honoré aurait pu passer entre les obus. Affecté à un régiment de territoriaux, d’abord considérés comme « planqués », il est pourtant victime d’un de ces 700 projectiles que les Allemands font pleuvoir sur Verdun ce 7 juin 1916. Lesquels font trois morts et dix blessés.
Marié en 1893 à Barenton-Cel, il fit deux enfants, dont un fils né en 1896, et qui échappa de justesse au conflit. Deux de ses frères, en revanche, eurent également à souffrir de l’enfer de Verdun. Alfred Honoré, membre lui aussi du 15e RIT, fut blessé à l’auriculaire droit dès le 21 février, puis le 24 septembre 1917, à chaque fois aux alentours de la citadelle. Décoré pour plusieurs actes de bravoures, il sortira de la guerre avec un handicap à la mâchoire, séquelle d’une fracture occasionnée par une balle de schrapnell.
Soldat du 151e RI, Narcisse Claude, quant à lui, a été blessé à Verdun le 23 mars 1916, des éclats d’obus lui ayant endommagé le front, le nez et le bras gauche.
Albert Ferdinand HENNEQUIERE
Lieu : Vaux-devant-Damloup (Meuse)
245e régiment d’infanterie
Né à : Sissonne
Âge : 25 ans
Cordonnier à Laon, Albert Hennequière s’est marié en 1911. Le 5 juin 1916, sa compagnie de mitrailleuses relève la 6e division dans le secteur de Vaux-Chapître, que les Allemands harcèlent de leur artillerie jusqu’à faire disparaître toute espèce de tranchée.
Le 7 juin, les Français repoussent une nouvelle offensive allemande mais Albert Hennequière est tué à son poste de mitrailleur en compagnie de son compagnon Henri Queva, un Nordiste. On le décorera de la Croix de guerre avec étoile de bronze.
En 1930, sa mère, contremaîtresse dans la maison Rinieri à Sissonne, recevra la médaille d’argent du travail attribuée « à des ouvriers ou employés qui se sont distingués en des circonstances critiques résultat de l’état de guerre pour leur initiative, leur sang-froid ou leur dévouement, dans l’exercice de leur profession ».
Gustave Edouard LEBLON
Lieu : Vaux-devant-Damloup (Meuse)
245e régiment d’infanterie
Né à : Froidmont-Cohartille
Âge : 30 ans
Les réservistes du régiment laonnois (245e) sont au cœur de la bataille de Verdun. Sergent au sein de la 18e compagnie du 5e bataillon du 245e, Gustave Leblon tombe au cours d’une journée marquée par la prise du Fort de Vaux par les Allemands.
Domestique de ferme, né d’un père Belge, il s’est marié à Chambry en 1905 et laisse un enfant orphelin né deux mois plus tard. Particularité, ses trois frères, nés plus tard dans le village de Chambry, portent un D final à leur nom de famille. Brancardier au sein du 132e RI, Alphonse a été blessé aux Éparges en février 1915 mais il survivra au conflit pour se marier en 1919 à Chambry. Agent de liaison de quatre régiments successifs, Henri a obtenu, comme lui, la Croix de guerre avec étoile de bronze. Il aura huit enfants après la guerre. Lucien, âgé de 17 ans en 1914, a échappé aux tranchées et sera incorporé au 11e régiment de hussards en 1919.
Henri LECOMTE
Lieu : Verdun (Meuse)
22e section d’infirmiers militaires
Né à : Cessières
Âge : 23 ans
Fils de cultivateur, Henri Lecomte était peintre avant d’être happé par la guerre dans sa 21e année. Brancardier rattaché à la 151e division d’infanterie, il décède à Verdun, sans plus de précision. Son nom figure parmi les douze inscrits sur le monument aux morts de Cessières, dans le canton d’Anizy-le-Château.
8 juin 1916
Paul Albert BERTRAND
Lieu : Douaumont (Meuse)
348e régiment d’infanterie
Né à : Grandlup-et-Faye
Âge : 33 ans
Le 348e RI débarque sur le front de Verdun le 1er juin. Le 8, il est anéanti par une formidable offensive allemande. 491 soldats sont portés disparus. Certains d’entre eux seront faits prisonniers. Paul Bertrand, lui, sera finalement déclaré mort à cette date, suite à ses blessures de guerre.
Manouvrier à Froidmont-Cohartille, dans le canton de Marle, il a perdu ses deux parents le même jour, alors qu’il n’avait que cinq ans… Sur le monument aux morts de Grandlup-et-Faye, où il est né, figure également son neveu, Marcel, mort dès le 21 août 1914 en Meurthe-et-Moselle.
Auguste César, dit Albert BOCQUET
Lieu : Vaux-Chapître (Meuse)
348e régiment d’infanterie
Né à : Hirson
Âge : 28 ans
Lui aussi membre du 348e, le sergent Bocquet reçoit la déferlante allemande dans le bois de la Caillette. Porté disparu, on le déclarera mort à cette date par un jugement déclaratif du tribunal civil de la Seine du 18 septembre 1919. Fils de facteur, d’abord employé de bureau à Origny-en-Thiérache, où il se marie en octobre 1913, il exerçait à Paris au moment de la mobilisation. Inhumé initialement au ravin de la Caillette, ses restes (« non individualisables »), seront transférés à la nécropole nationale de Douaumont.
Alfred Augustin BURONFOSSE
Lieu : Vaux-Chapître (Meuse)
348e régiment d’infanterie
Né à : Origny-Sainte-Benoîte
Âge : 33 ans
Comme tous ses camarades du 348e tombés ce jour-là, Alfred Buronfosse sera décoré à titre posthume de la Croix de guerre. Cantonnier auxiliaire du chemin de fer à Essigny-le-Grand, où son père est garçon boulanger, il démissionne après son service militaire, en 1907, pour aller exercer un autre métier à Domont, dans le Val-d’Oise. Son épouse y reçoit une aide de 150 francs le 5 janvier 1917.
Jules Victor FREJEAN
Lieu : Vaux-Chapître (Meuse)
348e régiment d’infanterie
Né à : Crécy-sur-Serre
Âge : 33 ans
Ayant perdu son père alors qu’il n’avait que 13 ans, Jules Fréjean est d’abord dispensé de service militaire. Le tribunal de Laon le condamne à deux mois de prison en décembre 1904 pour violences volontaires. Quelques mois plus tard, il s’installe à Erlon, au sud de Laon, où il épouse Marie Méline Culpin en 1911. Lui aussi est emporté par le terrible combat de ce 8 juin 1916 près du fort de Douaumont.
Jean-Baptiste Emile LANOIS
Lieu : Vaux-Chapître (Meuse)
348e régiment d’infanterie
Né à : Sissonne
Âge : 30 ans
Issu d’un régiment de chasseurs, puis muté dans la cavalerie, Jean-Baptiste Lanois passe au 348e par mesure disciplinaire en avril 1915. Il disparaît dans les combats du bois de la Caillette tandis que son épouse, avec qui il a convolé en 1901 à Cormicy, dans la Marne, est décédée le 26 septembre 1914 à Reims.
Edouard Hector Gaston COUTANT
Lieu : Douaumont (Meuse)
348e régiment d’infanterie
Né à : Roupy
Âge : 32 ans
Né de père inconnu, Édouard Coutant a quatre frères et sœurs nés à Roupy d’un premier mariage de sa mère, veuve. Mais il a surtout un jumeau. Lui non plus ne rentrera pas de la guerre. René Eugène est tombé le 16 juin 1915 à Moulin-sous-Touvent, un village situé juste derrière les limites de l’Aisne et de l’Oise. Marié à une Saint-Quentinoise, il est inhumé à la nécropole nationale de Tracy-le-Mont.
Édouard, voiturier saint-quentinois résidant 15 rue des Oiselets, s’est marié en 1907. Il disparaît dans les combats terribles du 8 juin 1916 sur les contre-pentes du fort de Douaumont.
Gaston WAFLART
Lieu : Vaux-devant-Damloup (Meuse)
348e régiment d’infanterie
Né à : Couvron-et-Aumencourt
Âge : 33 ans
Comme ses camarades du 348e ce jour-là, Gaston Waflart disparaît au combat avant d’être déclaré mort le 8 juin par un jugement déclaratif, en l’occurrence le 21 mars 1921. Orphelin de père très tôt, il aura trois demi-frères et sœurs suite au remariage de sa mère à Couvron avec Paul Toussaint. Manouvrier dans le civil, il avait été nommé caporal le 19 mai 1915.
Fernand Ernest BOCQUET
Lieu : Douaumont (Meuse)
347e régiment d’infanterie
Né à : Fourdrain
Âge : 31 ans
Difficile de lire la trajectoire de Fernand Bocquet à la seule lueur des documents administratifs, tant ils multiplient les virages à 180 degrés. Né à Fourdrain, entre La Fère et Laon, fils de jardinier, il a grandi à Montaigu, avant d’effectuer son service militaire au 45e RI de Laon. Il s’est ensuite marié à Gernelle, dans les Ardennes. Deux enfants sont nés de cette union, morts successivement à l’âge d’une semaine et trois ans… La petite dernière, née en mai 1915, est décédée quelques jours avant l’armistice de 1918 dans les Ardennes.
Envoyé au front avec le 147e RI, un régiment sedanais, Fernand a sûrement passé ses derniers jours sous les couleurs du 347e, le régiment de réserve du 147e, puisque ce dernier, le 8 juin, était au repos à l’arrière du front. C’est du reste une terrible journée pour le 347e, confronté à une poussée allemande sur la ferme de Thiaumont. Il perd ici son commandant, le lieutenant-colonel de Lamirault, mais aussi 30 officiers et 767 hommes de troupe, morts, blessés ou disparus. Le 347e sera dissous deux semaines plus tard.
Milcent Louis COLZY
Lieu : Douaumont (Meuse)
347e régiment d’infanterie
Né à : Crépy-en-Laonnois
Âge : 32 ans
Arraché à son quartier de Semilly, à Laon, où il exerce le métier de manouvrier, Milcent Colzy abandonne Mathilde Poulet, son épouse depuis 1910, pour affronter les tranchées. Son frère cadet, Henri Lucien, chasseur de 1re classe au 19e BCP, est blessé très tôt après l’invasion allemande. Il meurt à l’hôpital de Montauban dès le 27 septembre 1914.
Le 8 juin 1916, Milcent disparaît dans les combats de la ferme de Thiaumont, à l’est de Verdun. On l’y déclarera mort à cette date en 1920.
Charles Julien Clotaire LEFEVRE
Lieu : Douaumont (Meuse)
347e régiment d’infanterie
Né à : Trosly-Loire
Âge : 33 ans
Manouvrier agricole sans instruction, Charles Lefèvre réside à Trosly-Loire mais s’est marié à Jumencourt en 1908, avec Lucie Isoline Cauchy. Disparu au combat de Thiaumont en même temps qu’une grande partie du 347e RI, il est, fait rarissime pour un soldat de 2e classe, cité à l’ordre du 2e corps d’armée. Et pour cause : « Malgré un feu violent, est monté sur le parapet de la tranchée ennemie qu’il s’agissait de prendre, a par son tir infligé des pertes sérieuses à l’ennemi qu’il a ainsi obligé à évacuer la tranchée ». On lui décerne la Croix de guerre avec palme.
Georges Eugène LHOTTE
Lieu : Douaumont (Meuse)
347e régiment d’infanterie
Né à : Landricourt
Âge : 33 ans
Cultivateur à Landricourt, marié dans ce même village en 1908 avec la fille d’un chimiste parisien, père depuis de deux enfants, Georges Eugène Lhotte disparaît comme ses camarades dans une contre-offensive avortée sur la ferme de Thiaumont.
Victor Emile CARRÉ
Lieu : Fleury-devant-Douaumont (Meuse)
291e régiment d’infanterie
Né à : Vendhuile
Âge : 22 ans
Né de père inconnu et orphelin de mère dès l’âge de dix mois, c’est à Fresnoy-le-Grand, chez sa grand-mère, que Victor Carré grandit. Incorporé le 25 août 1914, il est blessé et évacué du front une première fois le 26 avril 1915. Il arrive à Verdun le 5 juin 1916 avec le 291e RI, régiment ardennais.
Le 8, son régiment tente d’enrayer une attaque allemande sur la ligne de chemin de fer qui relie Fleury à Vaux. Elle y parvient au prix d’une hécatombe, puisque 68 soldats meurent, 105 sont blessés et 483 disparaissent, la plupart broyés par un bombardement préalable à l’attaque ennemie, et qui a duré toute la journée et toute la nuit.
Charles Emile LEFEVRE
Lieu : Fleury-devant-Douaumont (Meuse)
291e régiment d’infanterie
Né à : Laon
Âge : 29 ans
Fils d’un cordonnier du faubourg de Vaux, à Laon, Charles Emile Lefèvre était un facteur des Postes, non affecté, au moment où éclate le conflit. Il vivait alors à Amiens, 227 rue Jules-Barni. Il avait choisi cette profession après avoir été militaire engagé au titre du 45e RI, mais aussi après son mariage à Laon en 1911.
Caporal, il disparaît dans les mêmes terribles conditions que Victor Émile Carré.
Raymond Ernest DUMONT
Lieu : Vaux-devant-Damloup (Meuse)
Régiment d’infanterie coloniale du Maroc
Né à : Chauny
Âge : 24 ans
Afin de reconquérir le Fort de Vaux, pris par les Allemands dans la nuit du 6 au 7 juin, le général Nivelle ordonne une attaque française. Menée successivement par le 2e Zouaves et le Régiment d’infanterie coloniale du Maroc, qui débarquent sur un terrain qu’ils ne connaissent pas, elle échoue lamentablement. Le RICM est décimé, il se replie avec une vingtaine de soldats par compagnie, commandé par un sous-lieutenant.
Raymond Dumont compte parmi les victimes. Il a grandi à Chauny, où son père était l’un des 1400 employés de La Soudière, usine dynamitée par les Allemands en 1917 et jamais reconstruite.
Julien Alexis HARBOUX
Lieu : Vaux-devant-Damloup (Meuse)
245e régiment d’infanterie
Né à : Sainte-Croix
Âge : 31 ans
Les Allemands attaquent à Thiaumont ce 8 juin et s’infiltrent dans le ravin de Chambitoux. Julien Harboux tente de couper leur effort par le boyau de la Caillette avec la 22e compagnie du 6e bataillon du 254e. Six soldats de la compagnie sont tués à l’ennemi.
Né à Sainte-Croix, dans le canton de Craonne, Julien s’était marié en 1913 à La Neuville-en-Beine et vivait à Festieux.
Albert Jules MARDIGRAS
Lieu : Vaux-devant-Damloup (Meuse)
245e régiment d’infanterie
Né à : Laon
Âge : 29 ans
Une citation à l’ordre du régiment explique comment est mort Albert Mardigras, soldat mitrailleur du 245e RI coincé dans les combats du ravin de Chambitoux. « Enseveli dans un abri par un obus de gros calibre, a fait preuve de patriotisme et d’abnégation pendant tout le temps qu’ont duré les travaux de déblaiement. Est mort courageusement en adressant des paroles d’encouragement à ses camarades ».
Manouvrier à Saint-Gobain, fils aîné d’une famille de sept enfants, il a perdu son frère Moïse le 3 juillet 1914, ce dernier étant décédé à l’hôpital militaire M’çoun, alors qu’il servait dans la compagnie de train des équipages du Maroc oriental.
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Bien a vous