Libérées du joug de leurs écluses, les eaux de l'Yser et de la mer du Nord se mélangent en une potion saumâtre
qui sauva l' armée belge de l' amertume de la défaite. En quelques jours de lente montée des eaux,
l' inondation naturelle éteint le raz-de-marée de feu de l' offensive allemande
La course à la mer terminée, les armées se décident enfin à s' enterrer. Mais comment s'enterrer dans la plaine de Flandre:
Le Westhoek est une gigantesque éponge. Le moins profond des coups de pelle se remplit d' eau comme le sable en bord de plage.
Le petit peuple des soldats belges construit son arche sur un lac, un fragile rempart de sacs de boue érigé sur les berges des canaux,
le long des talus, au flanc des routes et des voies ferrées. Le règne des passerelles glissantes et des caillebottis gluants
commence pour quatre ans. Les transhumances nocturnes y sont des promenades périlleuses.
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Malheur à l' imprudent qui, dans le noir de la nuit sans lune, dérape et valse au jus profond, sous le poids de ses trente kilos de barda.
Les corvées de menuisiers pour l' entretien des sentiers de planchettes ne manquent jamais d' ouvrage.
L'arrivée à bon port des relèves est à ce prix.
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