Baron DESAVENELLE

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jacques didier
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Re: Baron DESAVENELLE

Message par jacques didier »

Bonjour à toutes et à tous,

Dans le cimetière militaire de Metz-Chambière se trouve une tombe et un monument sur lequel on lit :
ICI REPOSE JEAN HENRI MAX BARON DESAVENELLE DE GRANDMAISON
Capitaine au 125e R.I.
Tombé au champ d'honneur le 23 août 1914.
Mort des suites de ses blessures à Morhange ?
Le régiment de Poitiers dépendait du 9e C.A., 17e Division.

Je cherche à savoir de façon précise à quel endroit se trouvait la compagnie de ce capitaine et où il a été blessé. Je suppose qu'il a été ramassé par les Allemands et envoyé dans un lazarett du secteur.

Avec mes remerciements et cordialement.
J.Didier

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Rutilius
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Re: Baron DESAVENELLE

Message par Rutilius »

Je suppose qu'il a été ramassé par les Allemands et envoyé dans un lazaret du secteur.
Bonsoir Jacques
Bonsoir à tous,

Deux témoignages sur le fonctionnement des hôpitaux militaires messins ayant accueilli des prisonniers de guerre français :


1°) Charles HENNEBOIS : « Journal d'un grand blessé. Aux mains de l'Allemagne. », Plon-Nourrit et Cie, Paris, 2e éd., 1916, préface d' Ernest DAUDET :

« AU LEHRERSEMINAR DE MONTIGNY-LES-METZ. [...]

2 novembre [1914]. - Vie calme, régulière... Montigny est très près de Metz. Deux lazarets sont là : l'un, celui où nous sommes, le Lehrerseminar (école catholique d'instituteurs lorrains), et pouvant recevoir six cents blessés ; le second (j'ignore le nom), placé un peu plus loin et plus important s'il se peut. Mais tous les français sont ici. Les hôpitaux messins - ils sont trente-deux, pour la guerre - en reçoivent parfois ; mais après quelques jours ils sont dirigés, et d'urgence, sur Montigny-les-Metz. Je tiens ces détails de l'abbé.

J'ai dit : vie calme, régulière. Voici l'emploi du temps : matin, à 7 heures, réveil. Pour nous débarbouiller, nous avons des cuvettes, que les plus valides de nous emplissent d'eau chaque matin. Soins divers de toilette. Repas, café au lait. A 9 heures, bouillon, laitage pour certains. Vers 10 heures, visite ; après laquelle, pansements. A 11 heures, repas : un bol de bouillon, et le même à peu près invariablement ; du rata, pas très bon ; un peu de viande de conserve, ou bien du lard fumé. Sieste jusqu'à 3 heures. A 3 heures, café au lait, laitage pour certains. Vers 5 heures du soir, visite. A 6 heures, repas : potage, même observation. Le pain n'est pas fameux. On nous a prévenus qu'il contiendra bientôt des matières diverses : pommes de terre, son. Pour l'heure, il est mangeable. Et nous en touchons une livre.

Arrivé d'hier seulement, il est beaucoup trop tôt pour consigner déjà mon impression première. Cette impression me paraît bonne. On nous laisse tranquilles. L'organisation générale est de tout premier ordre. Passivité des infirmiers, régularité des services, invariabilité des choses, des heures et des gens. »
(p. 65 et 66). [...]

3 décembre. - La fièvre est toujours forte. Je ne puis faire un mouvement. Nouvelle qui m'attriste et me réjouit à la fois : le Lehrerseminar est évacué aujourd'hui. Adieu, Herr Orth [le cheffartz du lazaret] ! Le lazaret de guerre serait réservé aux typhiques... Je crains l'automobile. Dans l'état où je suis, et si tôt maintenant !... Je me confie à Dieu. » (p. 88 et 89). [...]

LES HEURES PENIBLES. SAN-KLEMENS.

Même jour. - Installé San-Klémens depuis quelques minutes.
[...] (p. 88 à 93). [...]

28 février. - L'organisation matérielle de l'hôpital est bonne. Couchage suffisant. Le matelas est mince, dur par suite, mais propre. Le service est fait par stations, une station représentant la valeur d'un étage. Dans la nôtre, trois infirmiers avec un caporal assurent ce service. Les soins sont donnés par les soeurs. Celles-ci sont très dures. J'en ai présenté une, au cours de ces feuillets [ soeur Erizia, de la congrégation Krankenhaus, établie en Westphalie]. A peu d'exceptions près, - soeur Célesta, pourtant très bonne et très aimable, - les autres lui ressemblent. Ce sont des Westphaliennes très hautes en couleur, au parler rude, aux forts biceps. Pour arranger un lit, elles n'ont besoin de personne. Le blessé se voit soulevé, " jeté " sur un brancard, et l'opération se répète, losque le lit est prêt. Se plaindre serait inutile. Ce sont les mêmes soeurs qui passent dans les chambres. La méthode est toujours la même : lavage à la benzine, application de gaze, coton par dessus, bande en fil. Elles font aussi les piqûres, d'opium ou morphine, et l'emploi qu'elle font, sans l'intervention du docteur, de ce dernier produit me paraît abusif. Je pourrais citer sans conteste des blessés de ma salle qui ont reçu jusqu'à présent plus de cent dix piqûres, à raison d'une par soirée, et parfois une autre à minuit.

Les docteurs désignés plus hauts s'ajoutent au service, le dirigeant, le complétant. C'est à eux qu'incombe le soin de panser les blessés dont l'état est le plus grave. L'opération a lieu dans une salle claire, pourvue de tous les ustensiles, et chaque station a sa salle. La méthode employée est celle de nos Soeurs : benzine et eau oxygénée ; jamais de teinture d'iode. Ils en ont cependant. Gaze stérilisée ou pansement humide ; ce dernier rarement. Lorsque la plaie se ferme, on applique sur elle une pommade rouge dont j'ignore le nom, ou bien une crème jaunâtre contenue dans des tubes ; celle-ci se nomme " borsalb ". A noter que toutes les jambes qui ne sont pas coupées sont très laides à voir. Les os se sont croisés. D'ou raccourcissement de plusieurs centimètres. Ajoutez à cela les expériences journalières tentées par les docteurs : greffes ou sutures de nerfs, sans résultats d'ailleurs, les docteurs étant jeunes, peu expérimentés, et voilà dressé le tableau des soins que reçoivent ici les blessés prisonniers. »
(p. 143 à 145). [...]


2°) Robert d'HARCOURT : « Souvenirs de captivité et d'évasion. 1915-1918.», Payot, Paris, éd. définitive, 1936 - Robert d'Harcourt appartenait à la 21e compagnie du 325e régiment d'infanterie ; il fut blessé dans la nuit du 13 au 14 février 1915, en montant à l'assaut du Xon, à partir de la lisière du bois du Juré - : V. Chapitre premier, « Metz. - L'hôpital Saint-Clément. » , p. 9 à 54.

« ..., je fus ramassé comme une loque par les Allemands. Je ne pouvais absolument pas me tenir sur mes pieds. L'un me prit par les jambes, l'autre par la tête. Je fus emporté ainsi. Quelques secondes plus tard, je m'évanouis. Quand je repris connaissance, je me trouvais couché dans une toile de tente et porté par quatre hommes qui, avec deux fusils, avaient improvisé une civière. J'étais couché en rond au fond de cette toile, comme un sanglier ou un chevreuil qu'on apporte d'une battue. Au-dessus de moi il y avait le ciel et soleil, à côté de moi les petits calots ronds en forme de tourte, de quatre brancardiers bavarois qui marchaient d'un pas balancé.

Je fus transporté dans une sorte de palanquin improvisé pendant deux ou trois kilomètres. Le terme du trajet fut le village de la Bouxière. Je fus déposé par des brancardiers dans la cave d'une maison de paysan qui servait d'ambulance improvisée, pansé et adossé à un matelas appuyé au mur de la cave. Je me sentais très faible et " tournais de l'oeil " toute les demi-heures.

Vers la tombée de la nuit, nous fûmes, moi et les autres camarades gravement atteints, chargés dans une automobile et emportés vers une destination inconnue. Après deux heures de trajet environ, l'auto pénétra dans une ville, roula le long de nombreuses rues, puis stoppa définitivement devant une porte cochère : nous étions à Metz devant l'hôpital Saint-Clément.

Je fus transporté sur une civière dans une salle toute blanche, éclairée d'une façon éblouissante à l'électricité. Cette débauche de lumière, succédant à l'obscurité dans laquelle j'avais été plongé pendant plusieurs heures durant le trajet de Bouxière à Metz, m'étourdit, mais en même temps me réveilla. Je suivis d'une façon parfaitement lucide les opérations rapides, et d'ailleurs méthodiques, auxquelles on se livrait sur ma personne.

Je fus en un clin d'oeil débarassé par des infirmiers en tunique blanche, de mon pansement, de ma capote couverte de boue et de sang séchés, de mes gros souliers, dont les lacets de cuir furent coupés pour aller plus vite, de nombreux gilets et tricots dont quelques uns furent fendus du haut en bas pour accélérer le démaillotage du patient. L'ensemble de l'opération, exécuté par un personnel nombreux et exercé, - l'un s'occupant des pieds, l'autre de la tête, l'autre du tronc, - ne dura sûrement pas une minute. Une fois nu comme un ver, je fus porté sur une table d'opération en verre ; deux soeurs, en costume blanc, s'approchèrent de moi avec des éponges et des cuvettes et, l'une à droite, l'autre à gauche, procédèrent à un débarbouillage intégral à l'eau tiède. La salle d'opération étant très chauffée, je ne souffrais nullement du froid.

Cette seconde opération, succédant au déshabillage, fut ausi rondement et méthodiquement menée que la première. Je n'éprouvais aucune douleur. J'abandonnais passivement ma personne à l'eau chaude et aux éponges des infirmières. Deux médecins s'approchèrent de la table et examinèrent ma blessure : l'un était, comme je l'appris plus tard, le médecin-chef de l'hôpital ; l'autre le médecin qui devait me soigner pendant toute la durée de mon séjour à Metz, le Dr Willy Cohn. Mon pansement fut refait soigneusement ; on me posa quelques questions en allemand, que je comprenais parfaitement, mais auxquelles j'étais, vu l'état de ma gorge, dans l'impossibilité de répondre.
[...]

Ma blessure pansée, je fus revêtu d'une chemise militaire d'hôpital - ridiculeusement courte, selon l'usage de tous les lazarets allemands par lesquels j'ai passé. Je fus chargé sur une civière et transporté dans la salle 112 de l'hôpital, où un lit me fut affecté. Je conserve un souvenir extrêmement net de ma première nuit d'hôpital.

La salle dans laquelle j'arrivais, était faiblement éclairée par une lampe électrique centrale dont l'ampoule était voilée par un abat-jour vert ; sous cette lampe se trouvait une table en bois blanc devant laquelle était assis l'infirmier de garde. Le service de garde était, comme je devais l'apprendre plus tard, partagé pendant la nuit en deux fractions (la première s'étendant de sept heures à minuit, la seconde de minuit à sept heures du matin) ; il était assuré par un seul infirmier qui, son tour achevé, était relevé à minuit par un camarade. Les observations auxquelles avaient pu donner lieu les blessés pendant les heures de garde (fièvre, plaintes, hémorragies, etc...), étaient consignées au crayon par l'infirmier sur un registre qui, le lendemain matin, au moment de la visite des salles, était soumis au médecin de service.»
(p. 14 à 17).


Modeste contribution à l'histoire des lazarets messins, qui, sauf erreur de ma part, demeure à écrire...

Bien à vous,

Rutilius.
Rutilius
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Re: Baron DESAVENELLE

Message par Rutilius »

Bonsoir à tous,

Réponse transférée ce jour sur le Forum Santé, afin d'en faire un sujet spécifique.

Bonne soirée,
Rutilius.
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