Rassemblement articulé ?

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HT62
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Re: Rassemblement articulé ?

Message par HT62 »

Bonsoir,

Je viens de lire dans un historique que :
"le régiment se met en formation de rassemblement articulé".
Je n'ai rien trouvé dans le manuel d'infanterie, qui peut me renseigner là-dessus ?
Merci, cordialement, Hervé.
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patrick corbon
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Re: Rassemblement articulé ?

Message par patrick corbon »

Bonsoir à tous, bonsoir Hervé,

Pas simple à expliquer et je n’ai que le modèle en vigueur fin 1905 à vous exposer. Celui-ci a du forcément évoluer car la menace mitrailleuse n’était pas vraiment prise en compte mais le principe général reste le même.

Cette formation de rassemblement prépare le régiment à exécuter une marche articulée (Je dirais la marche au combat) telle que définie ci-dessous. Elle nécessite de déployer et d’échelonner les unités préalablement à son exécution.

Pour le bataillon (unité tactique de l'infanterie de ligne),

But de la marche articulée :
1- Ne pas solliciter le tir d'artillerie ennemi, rendre le réglage de tir très difficile, incertain et long par conséquent
2- Ne présenter que le minimum de monde aux coups d'où limitation des pertes et surconsommation de l'artillerie ennemie.

Procédé d'exécution pour le bataillon :

1- La marche du bataillon se fait par bonds successifs de couverts en couverts
2- L'amplitude de chaque bond varie de 600 m (mini) à 1500 m (maxi) en terrain coupé, couvert ou accidenté
3- Le bataillon marche soit en lignes successives de huit sections, les sections étant séparées par des intervalles de 150 m, soit par lignes successives de quatre sections ou exceptionnellement de quatre demi-sections (intervalles sont alors portés à 300m). Le front d’un bataillon est de 1000 m)
Les lignes successives de sections, ou de demi sections sont séparées de 600m.
4- Chacune des sections ou demi sections marchent en colonne par quatre, franchit le glacis en se dirigeant droit devant elle et en conservant les intervalles et les distances.
5- A l'issue de chaque bond, la première ligne du bataillon s'arrête dans le couvert désigné, les lignes subordonnées serrent dans le couvert sur cette première ligne
6- A l'abri du couvert, suivant les nécessités du moment, la marche entamée par huit section est poursuit par quatre sections ou exceptionnellement par quatre demi sections. Inversement la marche par quatre demi sections peut passer à la marche à huit sections ou à quatre sections. (variante : ligne de sections échelonnées par 2 sections)
7- Le bond est réglé par le chef de bataillon qui indique la formation à prendre, le couvert à atteindre, donne ou fait donner le signal de départ.

Procédé pour le Régiment :

Même principe pour les bataillons. A l’issue de chaque bond le 1er bataillon s’arrête dans le couvert et serre sur sa tête et ne part pour entamer un nouveau bond que lorsque le 3ème bataillon atteindra se même couvert. Chacun des bataillons subordonnés entrerait dans le couvert, serrerait sur sa tête et chacune de ses lignes sortirait du couvert lorsque la ligne qui la précède aura gagné les 600 m voulus. Généralement une couverture est assurée par une unité assez forte lancée en avant du mouvement qui progresse selon le même principe et pousse des patrouilles devant elle.


Pourquoi les sections marchent groupées : C’est un compromis vitesse et protection. Cette progression groupée est adopté pendant la marche sur la zone susceptible d’être battue par l’artillerie. Tout simplement elle permet facilement d’adopter la formation du bouclier (la tortue) lors de tirs de shrapnells ennemis. Cf le mode de progression, le minimum de monde est offert aux coups de l’artillerie soit une section (Rappel sur un front de 1000m, 600m séparent les lignes et les sections ont un intervalle de 150 m entre elles). Pour un tir rapide d'emblée d’une batterie la section cible est étalée sur 40m2. Elle recevrait de 2 à 4 balles de shrapnells (en gros entre 0.2 et 0.4 au m2). En formant le bouclier couché, la surface offerte n’est plus que de 20m2 soit 1 ou 2 balles (Les sacs des hommes arrêtent les balles dans une forte proportion).

A noter que la zone la plus propice à l’artillerie ennemie placée en général à 500 m derrière son infanterie est située entre 1300 et 1800 m. Pour l’infanterie, elle tire de 1300 à 800 m mais est encore peu efficace. Un déploiement prématuré des sections attaquantes sur un rang (front de 50 à 60m par section) serait plus vulnérable au feux d’artillerie et d’infanterie. Ce déploiement dépend uniquement du degré d’efficacité des feux d’infanterie adverses (premières pertes). Les chefs de section sur le front de marche sans se régler aux autres adoptent la formation de marche imposée par la nécessité du moment. L’ordre d’ouvrir le premier feu est donné le plus tard possible. Les sections arrêtées préparent leur bond par le feux ou appuient les autres sections. Contre l’infanterie, l’arrêt de la progression ne se fait que lorsque les pertes l’oblige. Le feu devient l’unique moyen de reprendre la progression. L’assaut proprement dit est un autre procédé qui sort de ce sujet.

Finalement on voit ici que l’on est loin de la charge irraisonnée à la baïonnette si décriée. En changeant de formation à chaque couvert ( lignes de 8 sections puis ligne de 4 sections puis ligne de 2 sections échelonnées puis ligne de 4 escouades par exemple) on peut faire varier la densité de la cible offerte à l’ennemi tant en profondeur qu’en largeur. Néanmoins en lisant bien ce texte de fin 1905, on s’aperçoit que la menace « mitrailleuse » n’est pas prise en considération d’autant qu’à sa hausse de combat la zone dangereuse doit se chevaucher largement avec celle de l’artillerie). Toutefois un front d’une section par 4 à 1000 m n’offre qu’une cible vue sous un angle de 4 à 5 millièmes, ce qui est très peu. Il faudrait tirer sur chevalet ou sur affût fixe. La cible en vaut elle la peine. Le même principe a du être employé mais les sections devaient sans doute s’égayer plus tôt ayant des pertes plus tôt. De plus l’ensemble du principe repose sur la condition qu’un appui d’artillerie est disponible pour contrebattre le plus tôt possible l’artillerie ennemie qui se dévoile et pour fixer l’infanterie. En 14 cela n’a pas toujours été le cas. Cette manière de faire est quand même relativement complexe à exécuter. Les cadres supérieurs ont-ils eu le temps de s’en imprégner ?? C’est pas certain d'autant que l'on s'aperçoit que pas mal d'unité ont été surprise en colonne de marche. Que dire des unités de réserve manquant de cohésion qui n’avaient pas du s’entraîner en conséquence.

Cordialement
Patrick
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HT62
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Re: Rassemblement articulé ?

Message par HT62 »

Bonjour Patrick,

Voilà une bonne surprise car je ne m'attendais plus à recevoir une réponse ! :D Alors merci de ces informations sur le fonctionnement de l'infanterie.
Bonnes fêtes en ce nouvel an tout proche.
Bien cordialement, Hervé.
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