Origine du "fusillé pour l'exemple"

[Charraud Jerome]

Bonsoir
Quand eue lieu la première apparition de l’appellation "Fusillé pour l'Exemple"? son origine?
Je n'ai jamais vu cette appellation pendant la période du conflit, à chaque fois, le vocable "fusillé" est utilisé.

En 1934, le Crapouillot sort un hors-série "Les fusillés pour l'exemple"

Cordialement
Jérôme Charraud

[Stephan @gosto]

Salut Jérôme,

Quand eue lieu la première apparition de l’appellation "Fusillé pour l'Exemple"?

Je ne sais pas, mais sur Gallica, dans la presse notamment, on trouve cette expression bien avant la guerre. La notion, en tous cas, était déjà bien là.

Un exemple, parmi d'autres, dans La Croix, du 23.04.1901 : "Les nègres armés par les Anglais ont été sévèrement châtiés, désarmés et plusieurs fusillés pour l'exemple".

Un autre, dans Le Matin, en 1892 : "L'ivoire aurait été confisqué au bénéfice de l'Etat du Congo et les 1,800 porteurs fusillés « pour l'exemple». Un seul homme aurait été laissé vivant pour aller porter aux siens la terrible nouvelle et terroriser le pays."

Pas le temps de continuer, mais il y a bien d'autres.

Bonne soirée.
Stéphan

[garigliano1]

Bonjour à vous deux

Il serait difficile de "dater" l'origine de cette expression.

Je vous livre cette phrase qui n'est pas de moi: "Il y a dans toute justice une idée qui renvoie à l'exemple, à savoir dissuader par les jugements les délinquants à aller tâter de la prison".

En 14/18, les condamnés pour crimes de sang l'ont été aussi pour l'exemple dans l'esprit des juges militaires.

Selon une de mes connaissances, cette notion ne figure pas dans le code de justice ce qui n’empêche pas qu'elle soit présente dans la plupart des jugements qu'ils soient d'hier ou d'aujourd'hui. On entend toujours un avocat ou un procureur requérir une peine exemplaire pour un crime ou un délit.

Cette expression, si elle a été "accolée" aux fusillés de 14/18, est liée à la notion de justice et donc implicitement présente depuis le fonctionnement d’une justice que je qualifierais de "républicaine" par opposition à une justice dictée par un monarque par exemple.

Il est intéressant de voir apparaître ce genre de discussion.

Amicalement
yves

[Charraud Jerome]

Bonjour

Merci de vos réponses.
Certes la valeur d'exemple existe avant le conflit, une condamnation est toujours censée avoir valeur d'exemple, quelque soit son degré de gravité. C'est le principe même de la justice. Mais le vocable de "fusillé pour l'exemple" dans un contexte 1GM évoque toujours un "fusillé avec/sans jugement pour d'injustes raisons".

Ce que je cherche, justement, c'est la période de ce glissement concernant le sens de cette expression. C'est pour cela que je fais appel aux membres du forum.

Cordialement
Jérôme Charraud

[chanteloube]

Bonjour Jérôme,

Une piste peut-être...dans le vocabulaire employé par les généraux dans les échanges officiels traîtant de cette question.....Il me semble avoir lu chez Bach une proclamation d'un officier responsable d'une "exécution musclée" terminant son discours aux troupes par ces mots: "A qui le tour?" Ce qui signifie bien qu'il y a eu exécution-sanction ET qu'elle doit servir d'exemple! Quand au moment où l'expression s'accompagne de l'idée que l'exécution a eu lieu pour d'injustes raisons -ce qui n'était pas le cas lorsqu'on exécutait pour de justes raisons ( en tous les cas percues comme telles par les soldats)- il faut probablement le chercher dans le sentiment "juste" qu'ont eu les soldats d'une justice baclée et inéquitable... Cordialement CC

[IM Louis Jean]

Bonjour à toutes et à tous,

L'expression, avec une connotation "fusillé avec/sans jugement pour d'injustes raisons", a été employée bien avant la 1ère Guerre Mondiale. Il n'y a pas eu donc, à mon avis, un "glissement concernant concernant le sens de cette expression" spécifique aux exécutions de 14-18, mais un réemploi.

Un exemple datant de 1901 extrait d'un chapitre sur les massacres de prêtres par les révolutionnaires :
<< A l'intérieur, de temps en temps, on en fusille pour l'exemple, sept à Besançon, un a Lyon, trois dans les Bouches-du-Rhône, et, sur tous ces meurtres déguisés ou affichés, les adversaires du fanatisme, les philanthropes officiels, les déistes éclairés de Fructidor édifient le culte de la Raison. >>
source LES ORIGINES DE LA FRANCE CONTEMPORAINE par H. TAINE (Hachette 1901)

Cordialement
IM Louis Jean
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[Charraud Jerome]

Bonjour à toutes et à tous,
L'expression, avec une connotation "fusillé avec/sans jugement pour d'injustes raisons", a été employée bien avant la 1ère Guerre Mondiale. Il n'y a pas eu donc, à mon avis, un "glissement concernant concernant le sens de cette expression" spécifique aux exécutions de 14-18, mais un réemploi.
Un exemple datant de 1901 extrait d'un chapitre sur les massacres de prêtres par les révolutionnaires :
<< A l'intérieur, de temps en temps, on en fusille pour l'exemple, sept à Besançon, un a Lyon, trois dans les Bouches-du-Rhône, et, sur tous ces meurtres déguisés ou affichés, les adversaires du fanatisme, les philanthropes officiels, les déistes éclairés de Fructidor édifient le culte de la Raison. >>
source LES ORIGINES DE LA FRANCE CONTEMPORAINE par H. TAINE (Hachette 1901)
Cordialement
IM Louis Jean
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Bonjour
Merci Jean Louis pour cette intéressante utilisation pré conflit. En 1901, nous sommes en plein dans les luttes républicaines contre les cléricaux. Sait-on si H. TAINE était un adepte de l'anticléricalisme? ce qui pourrai expliquer l'utilisation de l'expression et savoir si cela a le même sens qu'après le conflit.

Cordialement
Jérôme Charraud

[IM Louis Jean]

Re-bonjour,

En 1901, nous sommes en plein dans les luttes républicaines contre les cléricaux. Sait-on si H. TAINE était un adepte de l'anticléricalisme? ce qui pourrai expliquer l'utilisation de l'expression et savoir si cela a le même sens qu'après le conflit.

Je ne me suis pas attaché au fond de ses écrits mais uniquement à la forme. Cette dernière me semble totalement indépendante des opinions exprimées.

Je n'ai vu que le lien "fusillé pour l'exemple" - iniquité : << on en fusille pour l'exemple .../... et, sur tous ces meurtres déguisés ou affichés >>. C'est le seul texte trouvé où il est exprimé littéralement et non induit.

Cordialement
IM Louis Jean
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[Charraud Jerome]

Bonjour

Je ne me suis pas attaché au fond de ses écrits mais uniquement à la forme. Cette dernière me semble totalement indépendante des opinions exprimées.
Je n'ai vu que le lien "fusillé pour l'exemple" - iniquité : << on en fusille pour l'exemple .../... et, sur tous ces meurtres déguisés ou affichés >>. C'est le seul texte trouvé où il est exprimé littéralement et non induit.
Cordialement
IM Louis Jean
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Franchement, je n'ai jamais lu Taine, mais voici ce que je trouve le concernant (avec toutes les limites que l'on connait concernant Wikipédia):
"Esprit pessimiste (« Quel cimetière que l'histoire ! »), Taine était parfois injuste sinon hâtif dans ses conclusions. Auteur de grandes synthèses, il lui fallait aller vite et, pour cette raison, le recours aux archives était réduit au minimum. En dépit de leurs insuffisances, ses interprétations, dont on ne peut nier les fulgurances, ont connu et connaissent encore aujourd'hui un grand succès, en France et à l'étranger, notamment en alimentant des doctrines politiques conservatrices ou la « légende noire » de la Révolution de 1789.
Pour ces raisons, Taine fut récupéré politiquement par ceux qui rejettent l'École méthodique, républicaine, dominante dans les sciences historiques de la fin du XIXe siècle. Peu intéressé par la politique, Taine est un conservateur qui critique les extrêmes (les Jacobins de 1793 ou la Commune de 1871). Il est plutôt libéral, et pour un État minimum où domineraient les élites. Il n'aime pas les foules et se méfie de la démocratie. Il fut dès lors apprécié par Maurras et l'Action française et donc tenu en suspicion par la République et ses défenseurs."

L'utilisation du "fusillé pour l'exemple" se rapproche donc assez de celle d'après conflit. Nous sommes dans la démarche "réhabilitationniste", au sens "fusillé avec/sans jugement pour d'injustes raisons" que je citai plus haut.

Si je résume (très rapidement), quel qu’en soit la date d'apparition (je faisais donc erreur sur la date d'apparition), le "fusillé" est le terme légal, le "fusillé pour l'exemple" est le terme devenu courant, mais qui a une connotation plus partisane.
Cordialement
Jérôme Charraud

[IM Louis Jean]

Re-bonjour

Si je résume (très rapidement), quel qu’en soit la date d'apparition (je faisais donc erreur sur la date d'apparition), le "fusillé" est le terme légal, le "fusillé pour l'exemple" est le terme devenu courant, mais qui a une connotation plus partisane.

A notre époque l'extension "pour l'exemple" est majoritairement perçue comme péjorative. Peut-être cela découle t-il effectivement de son emploi lors de la 1ère Guerre!

Mais auparavant, à la lecture des occurrences, les deux sens (descriptif et péjoratif) coexistaient.

<< Dans les mauvais jours de 1870, alors que la lance des uhlans se promenait audacieuse dans nos contrées affolées, un coup de feu fut tiré sur eux, dirent-ils, à Tréveron. A l'instant, tous les conseillers municipaux sont saisis et placés sous bonne garde, a l'exception du maire, qui était en fuite. On menace
de les fusiller pour l'exemple.
Un homme alors se présente au conseil prussien et dit :
Messieurs, nul de ces conseillers n'est coupable, et si vous voulez un exemple, me voici. Ces hommes sont pères de famille, et vont laisser des veuves et des enfants moi je suis plus libre, fusillez-moi, l'exemple sera aussi efficace. >>

source La Croix du 25/02/1885 (Numéro 523).

Cordialement
IM Louis Jean
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