attaque à la baïonnette nocturne (von Hausen)

ALVF
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Re: attaque à la baïonnette nocturne (von Hausen)

Message par ALVF »

Bonjour,

Nous avons évoqué dans ce sujet deux épisodes distincts d'attaques nocturnes menées sur une grande échelle au moment de la bataille de la Marne:

-la question initiale, l'attaque de la III° Armée allemande de Von Hausen en plein centre du dispositif français contre le 11° Corps d'Armée, assez peu décrite comme l'indique Patrick.

-la grande attaque nocturne de la V° Armée du Kronprinz de la nuit du 9 au 10 septembre 1914, celle décrite par Genevoix dans "Sous Verdun", qui mit en oeuvre pas moins de cinq divisions allemandes face au VI° Corps d'Armée français principalement, attaque destinée elle aussi à percer le centre du dispositif français à l'Ouest de Verdun.Cette attaque est encore moins bien décrite du côté français, elle fut pourtant extrémement meurtrière dans les deux camps.

Le récit de Georges Blond, très vivant, comme tous les récits de cet auteur de talent qui ont fait les délices de notre jeunesse, sont à prendre avec précaution car l'auteur a colporté de nombreuses "légendes" de la Grande Guerre.
Cordialement, Guy.
humanbonb
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Re: attaque à la baïonnette nocturne (von Hausen)

Message par humanbonb »

Bonjour,
Sujet très interressant que voila !
Est il possible d'avoir une retranscription de quelques lignes de ce type d'attaque ?

Merci d'avance et bonne soirée.
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patrick corbon
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Re: attaque à la baïonnette nocturne (von Hausen)

Message par patrick corbon »

Re bonjour à tous,

La seule chose que j'ai :
A l'heure fixée les saxons s'ébranlent . Quand ils arrivent aux avants postes Français quelques hommes crient "France ! ne tirez pas !" (belle traitrise). Puis ils avancent baïonnettes au canons.
Ailleurs, l'auteur cite un extrait d'un récit Georges Blond "La Marne",
"Le début de l'assaut Allemand ressemble plutôt à un égorgement... Qui vive...? ... Alerte ! Le cri des guetteurs s'achève en râle. Des gradés crient "Feu ! Tirez donc, non de Dieu ! " mais leurs hommes n'ont même pas le temps d'épauler ! Un flot furieux passe sur leurs cadavres"


Comment une telle masse d'attaque a pu se rassembler sans alerter nos troupes ? En 14, la surprise était encore courante et combien se sont laissés surprendre au bivouac ?. J'ai au moins un autre cas entre Abreschwiller et Trois-Fontaine où un bataillon est surpris.

Côté Verdun je vais vérifier mais je ne pense pas avoir quelque chose.

Cordialement
patrick
lieutenant z
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Re: attaque à la baïonnette nocturne (von Hausen)

Message par lieutenant z »

Bonsoir
Un possesseur de son ouvrage pourrait il nous citer ses sources, cela pourrait permettre d'entamer une recherche.

Cordialement
Jérôme Charraud
Bonsoir,


Dans mon exemplaire, G Blond ne cite aucune source. Son livre sur la Marne, comme ses autres ouvrages, est de lecture agréable mais de valeur historique limitée comme le dit ALVF.

Genevoix, tout comme Porchon dans ses carnets, disent que les allemands sont montés à l'assaut à la Vaux Marie le 10 septembre 14 en combinant les tirs fusils et l'arme blanche.
Porchon :"Tout à coup, crépitement, sifflement de balles. C'est la tranchée en face de nous .... Nous nous replions poursuivis par des cris, des hurlements et des coups de fusil et une jolie charge à la baïonette". Genevoix précise : " Ces boches étaient du 13 Corps d'armée...On les avait saoûlés d'alcool et d'éther...Ils s'attendaient à être fusillés... Beaucoup avaient dans leur sac des pastilles incendiaires ; plusieurs de mes hommes m'ont affirmé en avoir vu qui prenaient feu de la tête aux pieds lorsqu'une balle les atteignait... ".

Quoi qu'il en soit, ces tehniques d'assaut surprise à la baïonette ont montré leur limite en août septembre 14.
Il faudra attendre mars 18 pour voir des assauts atteindre leur but sur de grandes profondeurs. Ludendorff se servira alors de son expérience sur le front russe pour former des Sturmdivisionen, elle même renforcées de strosstruppen, c'est à dire des divisions d'assaut au sein desquelles des groupes de choc étaient chargés de la rupture. C'était une vision très élitiste et très moderne des troupes d'élite. La tactique s'appuyait sur l'utilisation d'armes nouvelles et adaptées (lance flammes, fusils mitrailleurs, lance grenades ...) et sur une parfaite coordination avec l'artillerie (ce qui demandait des troupes de très haut niveau opérationnel) qui se contentait d'une préparation courte et concentrée suivi d'un barrage roulant.

La remarque de Norton Cru sur le sujet me parait pertinente et parfaitement en phase avec les faits comme indiqué très justement par Jérôme.

Bien à vous

Ph.
humanbonb
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Re: attaque à la baïonnette nocturne (von Hausen)

Message par humanbonb »

Merci pour avoir répondu à ma demande.

Par contre, qu'est ce qu'une pastille incendiaire ?
Si une personne à une photo ainsi que des explications sur son utilité première, je suis prenant également.


Bonne journée à tous.
Cordialement Julien.
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RIO Jean-Yves
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Re: attaque à la baïonnette nocturne (von Hausen)

Message par RIO Jean-Yves »

Bonjour à toutes et à tous.

Une petit rectification pour commencer : l'attaque Allemande se produisit dans la nuit du 7 au 8.09.
Je peux d'autant plus en parler que mon GPp l'a vécu en première ligne à LENHARREE.
Son témoignage est d'autant plus rare que le JMO du 116e est totalement muet sur ce point; il ne parle même pas de l'envoi du 1er Bataillon sur le village.
Pour précision, les 2 Bataillons Bretons présents en première ligne (1 du 116 et 1 du 62e), déjà incomplets depuis MAISSIN et la retraite, eurent à s'opposer à une déferlante de 4 Régiments Allemands qui avaient reçu comme mot d'ordre "d'égorger les pantalons rouges" (témoignage d'un soldat du 103e IR qui se trouvait façe à la position de mon GP). Les "survivants" d'après le premier assaut qui avaient respecté le mot d'ordre "se faire tuer sur place plutot que reculer" réussirent à tenir près de 2 heures et demi dans et autour d'un village qui, qui plus est, avait été précédemment bombardé par obus incendiaires, détail qui ne figure dans aucun livre. Les Allemands mirent tout en oeuvre pour faire sauter ce verrou de LENHARREE aprement défendu la veille par le 19e R.I.

Cf mon sujet ici (septembre 2006 déjà !) :
pages1418/forum-pages-histoire/lenharre ... 4591_1.htm

Pour ce qui concerne N.CRU, je suis de plus en plus dubitatif et circonspect quant à ses jugements pour les moins hatifs sur certains écrits de ses contemporains.
Si lui n'aurait jamais usé de sa baionnette (l'était trop sensible peut-être ?), un détail vécu et rapporté par Jacques d'ARNOUX lors de l'attaque du 25 Septembre 1915 sur Tahure prouve le contraire : un soldat du 116e RI lui sauve la vie en embrochant un soldat Allemand qui allait le tuer. Le détail de ce pauvre ennemi recherchant la pointe de la baionnette lui ressortant du bas ventre et mon brave Breton du 116 qui ressort son arme en lui donnant un coup de pied dans les reins, cela ne s'invente pas . Ames sensibles s'abstenir !
Mais il est vrai que CRU a jugé les écrits du fils du Lt-Colonel du 116e "fantaisistes" ! S'il avait pris la peine de lire le JMO du 116e de ce jour là et les témoignages des officiers arrivés vivants sous TAHURE, il se serait aperçu que le récit de d'ARNOUX s'imbrique parfaitement aux faits .... Ce dont moi je me "régale" (si je puis dire :o ) dans ma reconstitution de ce 25.09.

Bien cordialement
Jean-Yves
Recherches sur les régiments vannetais (116e & 316e RI, 28e & 35e RAC) et l'histoire de VANNES
http://vannes1418.canalblog.com/
humanbonb
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Re: attaque à la baïonnette nocturne (von Hausen)

Message par humanbonb »

Re-bonjour,
Je doute également que les armes blanches tel les baionnettes est étaient beaucoup utilisées.
En effet, il fallait avoir du cranc pour tuer quelqu'un avec une arme plus que barbare puisque c'est en corps à corps que ça se passe contrairement avec un fusil où l'on ne voit pas réellement qui l'on tue !

Les statistiques qui ont été donnés sur ce post vont dans ce sens:
pages1418/forum-pages-histoire/Generali ... 8333_1.htm

Les armes blanches ne dépassant pas les 1%.


Ce phénomène est également visible dans le post consacré aux nettoyeurs de tranchées où tous les témoignages, ou la quasi-totalité, disent que le couteau est plus que délaissé!


Cdlt JuLien.

ALVF
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Re: attaque à la baïonnette nocturne (von Hausen)

Message par ALVF »

Bonjour,

Au même jour et à la même heure (10 septembre 1914 à 03h00) que la grande attaque nocturne de la V° Armée du Kronprinz, la IV° Armée allemande du Duc de Wurtemberg lança aussi une attaque surprise contre la IV° Armée française, notamment dans le secteur de Maurupt, où, écrit le Général Toulorge dans son récit de la bataille, se déroula dans les vergers, les jardins et les maisons de Maurupt des "combats acharnés, corps à corps".
Ce combat vit l'engagement du 18° Corps d'Armée allemand contre le 2° Corps d'Armée français.Là encore, les combats furent meurtriers, le seul 72° R.I français y perdit plus de 1800 hommes!
Nul doute que les combats des nuits des 8 et 9 septembre (au 11° Corps d'Armée français) et des 9 au 10 septembre 1914 (aux 6° et 2° Corps d'Armée français) virent des engagements au corps à corps où on "usa largement de la baïonnette" pour reprendre une expression du temps.Il est à noter que certains chefs allemands (et pas seulement les français) surestimaient largement les résultats à attendre de telles attaques qui en tout cas furent extrémement meurtrières des deux côtés.
Cordialement, Guy.
ALVF
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Re: attaque à la baïonnette nocturne (von Hausen)

Message par ALVF »

Rectification pour la date des engagements du 11° Corps d'Armée, lire nuit du 7 au 8 septembre.Les grandes tentatives des V° et IV° Armées allemandes datent bien de la nuit du 9 au 10 septembre 1914, notamment le 10 septembre à 03h00 pour les principales attaques à l'arme blanche.
Cordialement, Guy.
tad-kozh
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Re: attaque à la baïonnette nocturne (von Hausen)

Message par tad-kozh »

Bonsoir à toutes & tous

L’attaque nocturne à la baïonnette des troupes de Von Hausen à Lenharrée le 8 septembre est également évoquée : dans le livre de Robert VILLATE : « Foch à la Marne » éditions Charles-Lavauzelle (1933)

Extraits du livre précité :

LE COMMANDEMENT ALLEMAND LE 7 SEPTEMBRE 1914 AU SOIR.

Les deux journées du 6 et du 7 septembre ont été dures pour les troupes allemandes opposées à la 9e armée française.
Les objectifs, que, par un bel optimisme, Bülow et Hausen ont donnés à leurs unités, sont loin d'être atteints. Les pertes sont sérieuses, les comptes rendus des commandants de division signalent la fatigue des hommes harassés par la marche ininterrompue depuis le 20 août et par les combats sans trêve, en même temps qu'ils insistent sur les ravages provoqués par notre artillerie.

A ces nouvelles du combat, nouvelles tactiques si nous pouvons dire, s'ajoutent, dans l'esprit des deux commandants d'armée, de graves préoccupations stratégiques.

(….) Dans la matinée du 7, von Bülow a signalé à von Hausen que son aile droite est fortement engagée contre un ennemi renforcé, qui paraît supérieur en nombre, et que son aile gauche doit continuer son mouvement offensif auquel la IIIe armée est priée de prêter tout son appui.
Dans la journée (…) la XXIIIe division de réserve a été poussée en avant, mais les progrès sont nuls. La résistance française est très forte et, si les feux d'infanterie, bien que violents, ne sont pas infranchissables, les tirs d'artillerie sont, sur tout le front de la Somme, considérés comme particulièrement dangereux.
(…) Il faut pourtant agir. Les combats de toute la journée ont montré que l'ordre du général Joffre s'exécute, que les plans du haut commandement allemand sont contrecarrés. (….) Or, il est impossible d'obtenir la supériorité du feu d'artillerie avant de passer à l'attaque proprement dite.

(…) Hausen conclut que, seule, une attaque, vigoureuse de l'aile gauche de la IIe armée, de l'aile droite de la IVe armée et de la IIIe armée permettrait de connaître le point faible de l'ennemi et provoquerait la décision. Une telle action percerait le front français et paralyserait l'offensive des troupes françaises, supérieures en nombre, dirigée contre l'aile droite allemande.
Pour réaliser la surprise et pour éviter le plus possible les tirs de l'artillerie française, Hausen envisage une attaque de nuit, sans préparation d'artillerie, à la baïonnette, l'assaut étant poussé sans arrêt jusqu'aux positions des batteries ennemies.

Pour obtenir l'adhésion de von Bülow et du duc de Würtemberg, Hausen envoie des officiers de liaison. Il demande au commandant de la IIe armée de faire attaquer la Garde en même temps que les Saxons et de mettre la division la plus proche de la IIIe armée aux ordres du général von Kirchbach.
(…) Le général von Bülow acquiesce à cette demande ;

(…) A 22 heures, le XIIe corps de réserve reçoit l'ordre en vue de l'attaque très matinale du lendemain, et un quart d'heure plus tard, le général von Hausen rend compte au grand quartier général allemand :
« Attaque à la baïonnette le 8 au point du jour, avec toutes les troupes disponibles. Les ailes voisines des IIe et IVe armées attaquent avec nous. »

Il fallait que le 8 septembre apporte la victoire aux armées allemandes.
Le 7, à 17 heures, le général von Hausen envoie son ordre en vue de l'attaque au petit jour qu'il a décidé de faire :
« L'ennemi a attaqué sur tout le front devant l'armée allemande. Les forces françaises sont supérieures devant l'aile droite allemande. L'ennemi ne peut pas être fort et supérieur partout sur tout le front. Seule, une attaque énergique, renouvelée dans notre secteur, petit éclaircir la situation de l'ennemi, percer son front et parer à l'offensive supérieure des Français contre l'aile droite allemande. Pour soustraire l'attaque d'infanterie à l'action possible de l'artillerie française, l'assaut sera lancé à la pointe du jour, il sera mené à la baïonnette jusque sur les positions de l'artillerie ennemie. Je charge le général commandant le XIIe corps de réserve de l'attaque simultanée des XXXIIe division et XXIIIe division de réserve , le général commandant le XIIe corps actif de la conduite de l'attaque des XIXe corps et XXIIIe division. Les IIe et IVe armées ont été priées de se joindre à notre mouvement offensif. Elles acceptent. Tout le monde se portera en avant pour l'attaque. La marche, en avant de la XXIVe division de réserve , de bonne heure, sera commandée par le général commandant le XIIe corps de réserve » Général Von Hausen

(…) La XXXIIe division attaque à 3 heures. Sans bruit, fusils déchargés, dans certaines unités même la culasse a été enlevée, baïonnette au canon, les bataillons saxons s'ébranlent en lignes denses de tirailleurs.
Le point de direction pour le centre de la division est Lenharrée :
le 103e régiment, en liaison avec un bataillon des grenadiers de la Reine-Augusta, est face au milieu de la route de Normée et Lenharrée, le 102e à sa gauche, puis le 178e contre la sortie nord-ouest de Lenharrée et le 177e contre les lisières est de cette localité.

Tous ces régiments ont pour mission de s'emparer des hauteurs entre Vaurefroy et Montepreux. Les avant-postes français, installés au nord de la Somme, sont complètement surpris, mais leur ébauche de résistance alerte les unités plus à l'arrière. Si les Saxons, aux cris des hourrahs, parviennent jusqu'à la rivière, ils se heurtent à une résistance acharnée en certains points; c'est ainsi que de violents combats, homme à homme, se livrent vers l'église de Lenharrée. Ce n'est que vers 5 h. 30 que le village est entre les mains des unités de la XXXIIe division ; il a fallu près de deux heures et demie pour progresser de 2 kilomètres au plus et s'emparer d'un village en flammes.

Cordialement :hello:
Jean-Louis

PS : mon GP (62è RI ; 2ème bataillon ; 5ème Cie) était à Lenharrée le 8 sept. 14 –il fût grièvement blessé ce jour là-

Recherches sur les 62è, 65è et 118è RI
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