"Monsieur Le Gac, capitaine du vapeur français Molière de La Rochelle déclare être parti du Port Talbot à destination de Rochefort, avec une cargaison de charbon, le 18 mai 1917, à dix-huit heures. Le dix-neuf, mouillé sur rade de Penzance à onze heures, pas de convoi vers le sud.
Le vingt, parti de Penzance à vingt heures, fait route sur le point indiqué, me trouvant à environ quinze milles nord Ouessant. Le vingt et un à sept heures, étant sur la passerelle, j'aperçus tout à coup le périscope d'un sous-marin à environ dix-mètres par babord avant ; d'après son sillage, voyant qu'il nous coupait la route, j'ai commandé au timonier : "Venez sur tribord". J'ai fait cette manoeuvre pour passer dessus. Aussitôt, j'ai ressenti un frôlement sous le navire. Au même moment, j'aperçois le sillage d'une torpille qui venait de nous passer sous la quille et continuait sa route perpendiculairement à notre travers. J'ai mis l'équipage aux postes de combat, et apercevant par tribord arrière tout près du couronnement un gros bouillonement d'eau et des bulles d'air, ai commandé au quartier-maître canonnier de quart Le Port, de commencer le feu ; tout en m'éloignant j'ai fait continuer le tir sur le même point, je suppose avoir gravement avarié le sous-marin.
Les deux chalutiers anglais de l'escorte sont accourus à la rescousse et eux aussi ont ouvert le feu. Ayant fait sonder les ballasts et peak avant par le chef mécanicien, le navire ne paraissant pas avoir souffert, je continuais à suivre le convoi.
En arrivant près de la (?), je m'apercois que le navire s'alourdissait et gouvernait mal. Fait sonder de nouveau ballasts et peak, et mettre les pompes en action.
Voyant que l'eau gagnait, j'ai signalé ma situation. Puis, par TSF je demandais du secours. Ayant pris le pilote à Saint Mathieu, voyant que le navire se maintenait à flot, j'ai fait route sur Brest escorté par les torpilleurs et le remorqueur Haleur. Je suis arrivé en rade de Brest par mes propres moyens à midi et mouillé pour attendre les ordres. Aussitôt que la marée nous l'a permis, j'ai, suivant les ordres de l'Amiral, échoué mon navire sur le banc Saint Marc et fait le nécessaire pour le placer dans la meilleure position. Les pompes d'épuisement du Haleur ont été mises en action, le scaphandrier ayant découvert une déchirure à tribord avant. Le nécessaire a été fait pour aveugler la voie d'eau.
L'équipage s'est très bien comporté pendant les deux alertes. Chacun était à son poste et exécutait les ordres donnés. Le vingt deux mai, à quatorze heures, le navire étant à flot, je me suis dirigé avec l'assistance des remorqueurs de l'arsenal, vers la forme de radoub du bassin de commerce où je suis rentré à quinze heures. Le nécessaire a été fait pour l'accorage du navire. Je ne pourrais me rendre compte de l'importance des avaries et savoir si le navire a fatigué sur le banc de Saint-Marc qu'après avoir vu le rapport des scaphandriers."
Le capitaine Louis Le Gac, capitaine au cabotage, inscrit à Vannes, n° 553.
Comme indiqué par le message de Michael Lowrey ci-dessus, le sous-marin a été coulé, entraînant la disparition de tout son équipage (UC 36, Gustav Busch, 27 disparus). Ce sous-marin venait de couler auparavant le cargo français Ferdinand A. (sujet dans le forum) et il attaquait un autre navire du convoi quant il a été éperonné par le Molière qu'il n'avait pas du repérer.
Il est à remarquer que Molière est le seul navire de commerce français ayant coulé par abordage un sous-marin allemand. Cela ne lui pas réussi puisqu'il a été coulé par l'U 101 en 1918.
Source : AD du Finistère, tribunal de commerce de Brest, 63U/22/7, cité par René Richard et Jacques Roignant, Les navires des ports de la Bretagne provinciale coulés par faits de guerre, 1914-1918,
Vol 1 (2010), Vol 2 (2012), Association Bretagne 14-18.
Cordialement.
