A propos des jeunes lecteurs

chanteloube
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Re: A propos des jeunes lecteurs

Message par chanteloube »

Bonjour,

Je reprends ici , pour le moins spécialiser, un échange avec notre ami H H qui écrit:

décidément, ça ne s'arrange pas !!!

A la trappe, ces deux bons vieux archi-classiques ?
Mais qu'y a-t-il donc dans les biblio couramment accessibles à nos chers "moins de 20 ans" ?
-"Les oubliés de ci", "les oubliés de ça", et "untel fusillé"... et encore "le fusillé trucmuche", ou "les sénégalais ont gagné la guerre" ? etc...



Je réponds: faut pas exagérer, même pour la bonne cause....
Une bibliographie, une bonne, ça se trouve à la fin de tous les bons ouvrages
évidemmment, il faut choisir un assez récent

[#b80046]-"Les oubliés de ci", "les oubliés de ça", et "untel fusillé"... et encore "le fusillé trucmuche", ou "les sénégalais ont gagné la guerre" ? etc...

et là je sens un soupçon d'hire à propos de laquelle nous nous sommes expliqués.
On ne peut pas aujourd'hui écrire "le feu "ou "les croix de bois" ... la parole est aux historiens
et ils vont chercher dans les coins sombres même si ça gratte ou dérange parfois.

Il y a quelques années, pardon de me citer, j'avais écrit ce qui suit, un article pour justifier la publication des correspondances de Poilus...

L'inventaire rapide, d’une bibliographie consacrée aux milliers d’ouvrages ayant trait à la Première Guerre Mondiale montre qu’environ deux cents témoignages ou écrits polémiques ont été publiés, en France, pendant les hostilités. Il montre aussi que dès l’armistice, parurent en grand nombre les " Souvenirs " et " Mémoires " des acteurs politiques du conflit et " Les historiques grands formats " de ceux qui avaient exercé le commandement des Armées. Comme si un irrépressible désir de justification et d’explication émergeait soudain ! Il révèle enfin qu’aux textes suscités par un évident désir de propagande, comme " Gaspard " ou " Bourru soldat de Vauquois " s’ajoutèrent des œuvres écornées par la censure, dont les auteurs, Barbusse, Dorgelès, Genevoix ou Lintier, tentaient de rendre compte de l’horreur dans laquelle les soldats avaient été plongés.
Le succès populaire des uns et des autres, fut indéniable mais les combattants revenus du front ne reconnurent pas leur expérience singulière dans cette profusion de publications.
Dès 1919 André Maillet écrivait : " Qui sauvera des ténèbres qui l’ensevelissent, la sauvagerie des luttes multiples que nous livrons ? Tout cela est irrémédiablement perdu, et c'est dommage […] ". C’est probablement la raison pour laquelle, parallèlement aux grandes éditions, plus discrètement, des dizaines d’ouvrages virent le jour. Derniers honneurs rendus à quelque célébrité locale, pieux hommages à la mémoire de disparus ou volonté de survivants de dire les heures terribles vécues au front, ces écrits manifestent, tous, un même souci de témoigner, une volonté commune, très souvent formulée, de ne pas laisser s’effacer les traces de la tragédie .
Lorsque, en 1929, Norton Cru fit paraître " Témoins ", il appuyait son travail sur trois cent quatre volumes. Deux cent seize avaient été publiés entre 1915 et 1919, les autres, dans les dix années qui suivirent. Au sein de ce corpus, comportant les auteurs dont on a l’habitude de dire qu’ils sont les meilleurs : Meyer, Delvert, Pézard, Bernier, Escholier, rares étaient les authentiques " Carnets de guerre ", encore plus rares les Correspondances de soldats. " Volatier [était] le seul soldat homme du peuple, le seul poilu non bachelier, non breveté dont on [avait] publié les impressions ".
Quatre vingt dix sept ans plus tard, et tenant compte de la floraison d'ouvrages postérieurs aux commémorations de 1998, on constate, sans surprise, que les documents dont nous disposons sont presque toujours l’œuvre d’hommes rompus à la pratique de la langue écrite. Font exception des livres, comme, " Grenadou paysan français ", " Les carnets de Louis Barthas, tonnelier " et quelques ouvrages publiés, sous l’impulsion d’universitaires comme Rémy Cazals et Patrick Cabanel à Toulouse, Gérard Canini, Pierre Barral à Nancy . On conviendra qu’un tiers des textes les plus anciens émanent d’officiers, on conviendra aussi qu’ils ont souvent été " lissés " par la censure, des héritiers timorés , des éditeurs prudents.
Depuis 1998 une évolution se perçoit. Au témoignage d’un spécialiste comme Jules Isaac , on peut confronter de nouvelles publications qui constituent, peu à peu, les sources nécessaires à l’étude de la vie des " hommes – soldats " de 14-18 et de leurs mentalités.
On citera, entre autres : " Un Commandant bleu horizon ", présenté par Yves Pourcher (Editions de Paris), " Emile Carrière : un professeur dans les tranchées 1914-1916 " (L’Harmattan), " Si je reviens comme je l'espère : Lettres du front et de l'arrière, 1914-1918 ",(Grasset) par R. Cazals et N. Offenstadt, " Carnets de guerre d’un hussard noir de la République " sous la direction du Général Bach, sans oublier l’étonnant " Une lettre par jour " de Gérard Berger (CERHI – Saint-Etienne).
Ces œuvres, moins littéraires, moins éloignées des préoccupations quotidiennes de la troupe, s’inscrivent dans ce mouvement de renouveau, sans pour autant corriger la sous représentation des " hommes du peuple ", les grands silencieux du corpus dont nous disposons.
Un exemple, emprunté à Emile Carrière : " Parce que je porte le même uniforme qu'eux, les propres ouvriers de mon père se croient immédiatement autorisés à me tutoyer, à me parler grossièrement. Nous vivons tous ici dans un état de promiscuité physique et morale extrême. Nous sommes entassés la nuit, […] nos membres s'enchevêtrent, nos transpirations se pénètrent, nos haleines se mélangent. "
Une pareille évocation de la promiscuité est rarement présente dans les témoignages issus de soldats venus des milieux populaires et, à fortiori, une telle conscience de classe.
Autre exemple, plus ancien : Jacques Meyer qui consacrera, en 1966 quelques lignes de l’avant propos de son livre " Les soldats de la Grande Guerre " à expliquer que le terme Poilu était une création de l’arrière et que les soldats, selon lui, répugnaient à l’utiliser . Meyer, officier subalterne vivait au contact de la troupe mais conservait de son éducation, certaines délicatesses de langage et son témoignage, par ailleurs fort intéressant, est, bien sûr, marqué par son origine sociale.
Plus singulier est le cas de Robert Hertz. Ses lettres publiées ", révèlent une obsession d'intégration qui le conduit à l'acceptation du sacrifice de sa vie : " C'est difficile de parler de ces choses si nuancées, mais c'est vrai qu'il y a quelque chose d'admirable dans cette tranquille et gaie acceptation du plus grand risque par nos petits troupiers. C'est une armée de gens qui y voient clair, qui ne se laissent pas bourrer le crâne et qui acceptent tout, résolument, sans faire usage de leur raison si éveillée et si vive, parce qu'il le faut. C'est une bénédiction de vivre parmi eux surtout pour un Juif. Aussi suis-je plein de gratitude et d'amour pour la douce patrie si accueillante, jusqu'à l'excès […] "
Mise à part le très croyant Johannès Berger de " Une lettre par jour ", une attitude d'extrême soumission au destin n'est jamais formulée aussi nettement dans les correspondances venues du rang dont nous avons eu personnellement connaissance.
Ces trois exemples montrent que pour tenter de savoir ce que pensaient les combattants, une voie est à privilégier : accumuler les témoignages !
On a, hélas, beaucoup trop attendu, pour s'en préoccuper.
" Combien d'erreurs ont été répandues sur les combattants ! […] Que ceux qui sont loin du combat ne nous travestissent pas par leur imagination ! Qu'ils ne songent point à décrire des états d'âme où ils n'entrent point et où ils n'ont pas droit de visite ! Qu'ils nous laissent la vérité […] que nous payons de notre sang ! ", protestait, avant d'être tué à Verdun, R. Jubert, scandalisé par les élucubrations d'un Barrés
On a souvent, considéré avec méfiance les témoins directs : " Les historiens se sont toujours méfiés de ce que l'on appelle l'histoire orale, c'est à dire le récit d'un événement par ceux qui l'ont fait ou en ont été les témoins. Méfiance légitime si l'on songe que tout événement passant par le prisme déformant d'une personnalité donnée est filtré par une mémoire qui l'interprète, n'est plus qu'une vérité subjectivée, que toute évocation d'un passé lointain fait nécessairement jouer la sélectivité dans les souvenirs et leur télescopage, transmute la réalité vécue et l'éclaire différemment, gommant ici, idéalisant là, ordonnant les événements selon l'intensité avec laquelle ils ont été ressentis […].", écrit Simone Pesquies-Courbier du S.H.A.A dans la revue " ICARE , " avant de poser l’autre grande question : " L'histoire peut-elle être faite uniquement à partir de documents écrits dont l'objectivité n'est, après tout, pas davantage absolument garantie? Le témoignage d'hommes que l'on interroge sur des événements contemporains n'apporte-t-il pas aussi, malgré‚ ses imperfections, une note nouvelle, donnant à la réalité son poids d'humanité ? "
On a même évoqué, au cours d'un colloque (Jean-François Jagielski) le problème de l'altération de la " perception du temps chez les combattants ".
Cette défiance, beaucoup trop souvent manifestée à l’encontre des témoins, explique, probablement, le retard pris dans l’étude des mentalités des soldats. Il va sans dire aussi que certains propos dérangent quand ils vont à l’encontre des idées reçues ou en vogue.
Les recherches historiques récentes ont fait avancer la connaissance des événements, l’ouverture des Archives a permis aux spécialistes de redresser nombre d’erreurs et d’éclaircir bien des zones d’ombre, les " Traces " laissées par la guerre, dans des domaines aussi divers que la sociologie, la littérature, la musique, la peinture, l’industrie, l’aviation ont été explorées. On sait tout des automobiles, de l’artillerie, des uniformes et des armes, on sait tout …ou presque, mais une interrogation demeure : comment des hommes ont-ils pu se laisser ainsi conduire, en masse, à la mort ?
L’expliquer par une sorte de consentement généralisé n'est pas convaincant au regard des registres de Prévôté; par le patriotisme inculqué par l'Ecole de la République ou " le souci de la défense d'un sol dans lequel ils sont enfouis à longueur de journée [qui correspondrait] à la mentalité de paysans-fantassins et [paraîtrait] d'autant plus nécessaire que des camarades sont morts sur cette terre […] Défendre le sol, c'est aussi défendre ceux qui sont morts pour lui " est un peu court. L’expliquer par la peur de l'encadrement, des officiers, du peloton d’exécution, par la terreur que faisait régner les gendarmes qui sévissaient sur les arrières des armées et " l'impérieux regard des autres " n’est pas suffisant selon nous. [...]

Et il me vient l'idée de demander à chacun s'il connait une bonne bibliographie de 14-18.

A bientôt.
CC


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Patrice Pruniaux1
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Re: A propos des jeunes lecteurs

Message par Patrice Pruniaux1 »

Bonjour à tous,
Bonjour Claude,
...Autre exemple, plus ancien : Jacques Meyer qui consacrera, en 1966 quelques lignes de l’avant propos de son livre " Les soldats de la Grande Guerre " à expliquer que le terme Poilu était une création de l’arrière et que les soldats, selon lui, répugnaient à l’utiliser . Meyer, officier subalterne vivait au contact de la troupe mais conservait de son éducation, certaines délicatesses de langage et son témoignage, par ailleurs fort intéressant, est, bien sûr, marqué par son origine sociale.
Le terme " Poilu " existait et était employé avant la guerre.
Ce n'est donc pas une création directe de celle-ci, même si elle désigne les combattants.
Sauf à être une expression typiquement Franc-Comtoise, ce que je ne crois pas, il suffit de (re)lire Louis Pergaud.
" Salut poilu ! " Expression qu'avec mes copains d'enfance nous avons fait évoluer, vu notre age, en " Salut vieux poilu ! " ce qui n'a rien à voir, dans ce cas d'emploi, avec nos anciens de 14-18 mais bien une façon de saluer comme Lebrac le faisait avant guerre.
...Ces trois exemples montrent que pour tenter de savoir ce que pensaient les combattants, une voie est à privilégier : accumuler les témoignages !
On a, hélas, beaucoup trop attendu, pour s'en préoccuper.
" Combien d'erreurs ont été répandues sur les combattants ! […] Que ceux qui sont loin du combat ne nous travestissent pas par leur imagination ! Qu'ils ne songent point à décrire des états d'âme où ils n'entrent point et où ils n'ont pas droit de visite ! Qu'ils nous laissent la vérité […] que nous payons de notre sang ! ", protestait, avant d'être tué à Verdun, R. Jubert, scandalisé par les élucubrations d'un Barrés.
C'est définitivement trop tard.
Maurice Genevoix a écrit dans une préface de l'Almanach du Combattant qu'il apprenait dans les livres la guerre qu'il avait faîte. C'est plus que jamais d'actualité plus de témoins directes ne pouvant contester. Moi qui a eu la chance de côtoyer " ceux qui l’avaient faite " pendant une trentaine d'années, qui a beaucoup retenu et noirci quelques pages de carnets de leurs anecdotes, je suis consterné de lire ce que certains pseudos historiens s'autorisent à écrire. C'est clair. Ceux là n'ont jamais rencontré, écouté un ancien ou alors ils n'ont rien retenu.
Monsieur Serge SMULEVIC, Déporté à Auschwitz, m'a autorisé à publier, comme en présentation de mon blog, un de ses poèmes, le voici:


La Mémoire et l'Oubli.
La Mémoire et l'Oubli cohabitent.
Forcément.
Et toutes les cohabitations ont une fin.
Forcément.
La qualité de la Mémoire dépend de la façon dont elle aura été transmise.
Comment réagiront les récipiendaires de la Mémoire, dans cent ans ou plus ?
A part quelques monuments, quelques cérémonies discrètes ou quelques vestiges dans des musées, que restera-t-il de la Mémoire ?
Celle d'aujourd'hui ?
Aller à des cérémonies ? Corvées...
Aller dans des musées ?
Les gens ont toujours préféré aller voir des choses gaies plutôt que des choses tristes.
Le Temps, maître des événements, maître des souvenirs, diluera fatalement l'esprit de la Mémoire.
La Mémoire que nous connaissons.
Celle que nous voudrions transmettre.
Celle qui sera contestée parce que nous ne serons plus là.

Parce que cette Mémoire ne sera plus que celle d'une Mémoire tombée dans les oubliettes de l' Histoire.


Je crois sincèrement que le problème est bien là, même si la période est différente.
On a souvent, considéré avec méfiance les témoins directs : " Les historiens se sont toujours méfiés de ce que l'on appelle l'histoire orale, c'est à dire le récit d'un événement par ceux qui l'ont fait ou en ont été les témoins. Méfiance légitime si l'on songe que tout événement passant par le prisme déformant d'une personnalité donnée est filtré par une mémoire qui l'interprète, n'est plus qu'une vérité subjectivée, que toute évocation d'un passé lointain fait nécessairement jouer la sélectivité dans les souvenirs et leur télescopage, transmute la réalité vécue et l'éclaire différemment, gommant ici, idéalisant là, ordonnant les événements selon l'intensité avec laquelle ils ont été ressentis […].", écrit Simone Pesquies-Courbier du S.H.A.A dans la revue " ICARE , " avant de poser l’autre grande question : " L'histoire peut-elle être faite uniquement à partir de documents écrits dont l'objectivité n'est, après tout, pas davantage absolument garantie? Le témoignage d'hommes que l'on interroge sur des événements contemporains n'apporte-t-il pas aussi, malgré‚ ses imperfections, une note nouvelle, donnant à la réalité son poids d'humanité ? "
Je dirais que tous les témoignages doivent être recoupés.
Même de bonne foi, qu'ils soient donnés immédiatement ou longtemps après les faits, oraux ou écrits, venant de témoins lambdas ou de spécialistes, ils peuvent contenir des erreurs..
Comment, sans un minimum de recherches, ne pas croire des officiers observateurs de la D.C.A qui écrivent un rapport officiel dans lequel ils affirment que des avions italiens bombardent Belfort en 1940?
De " nombreux " habitants ont certifié avoir vu la même chose !!! ( Idem sur la Loire et en Meuse. )
Il y a aussi, malheureusement, des faux témoignages, ou des vérités falsifiées qui font une Histoire locale reconnue mais truquée. J'ai vu et démontré cela avec l'après résistance.
Le problème, parfois, est que la (les) méthode(s) de recherche(s) habituelle(s) fait (font) que l'on s'attache trop aux dossiers " basiques " sans chercher à voir ailleurs.
Pour terminer:
... mais une interrogation demeure : comment des hommes ont-ils pu se laisser ainsi conduire, en masse, à la mort ?
L’expliquer par une sorte de consentement généralisé n'est pas convaincant au regard des registres de Prévôté; par le patriotisme inculqué par l'Ecole de la République ou " le souci de la défense d'un sol dans lequel ils sont enfouis à longueur de journée [qui correspondrait] à la mentalité de paysans-fantassins et [paraîtrait] d'autant plus nécessaire que des camarades sont morts sur cette terre […] Défendre le sol, c'est aussi défendre ceux qui sont morts pour lui " est un peu court. L’expliquer par la peur de l'encadrement, des officiers, du peloton d’exécution, par la terreur que faisait régner les gendarmes qui sévissaient sur les arrières des armées et " l'impérieux regard des autres " n’est pas suffisant selon nous. [...]
Je pourrais simplement dire que pour poser cette question il faut n'avoir pas entendu ce que disaient les combattants, ni pourquoi ils aimaient la Paix.
Pour ceux que j'ai connus la réponse était, pour citer l'un deux,
" une certaine idée de la France " et du Devoir d'être Français.
Ce n'est pas toujours ce qui est compliqué qui peut paraitre incompréhensible. C'est comme si la simplicité faisait peur. Pourquoi faire simple ...
Qu'est ce qui a fait que des hommes et des femmes soient entrés en Résistance entre 1940 et 1945?
Ils n'y avaient ni obligations, ni risques d'être fusillés pour refus d'obéissance ou désertion.
Par contre tous et toutes savaient que leur vie était en jeu, avec en prime la torture.
Qu'est ce qui fait qu'aujourd'hui, des hommes et des femmes mettent à chaque instant leur vie en jeu pour aider ou protéger leurs concitoyens?
Ici non plus pas d'obligation.
Ce sont deux exemples de choix librement consentis, et il n'est pas né celui qui me démontrera le contraire.
Alors pourquoi remettre en cause ou douter du fait que des hommes, ai eu le courage moral de faire ce qu'ils ont fait?
Bien cordialement, Patrice.

chanteloube
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Re: A propos des jeunes lecteurs

Message par chanteloube »

Bonjour Patrice,
Merci d'avoir pris le temps de lire mon texte et d'y répondre...A l' origine il s'agissait de répondre aux Becker qui s'embarquaient dans les débuts de la polémique sur la dictature du témoignage, éliminant ainsi ce qui les contrariaient........passons..
En choisissant de me "répondre" en évoquant la Résistance...vous m'embarquez sur un terrain!!!!!!....passons..
Vous souvient-il que Pétain et son entourage, expliquaient la défaite par l'action pernicieuse des syndicats, des instituteurs, des Juifs et des francs- maçons, toutes personnes " ayant fait leur devoir en 14.... que c'était-il passé?
Vous savez, si vous cherchez mon nom, celui des Battesti ou des Bucheton vous allez trouver des noms de gens qui ont donné pour une certaine idée de la France Un compagnon, une rosette à titre militaire, voyez le Maitron vous comprendrez
....et pourtant ...nous ne comprenons pas
....lorsque nous en parlons, nous évoquons le désir de dire "non" à une certaine mauvaise idée de la "France" ce que je n'exposerai pas ici.
cordialement
cc
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Patrice Pruniaux1
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Re: A propos des jeunes lecteurs

Message par Patrice Pruniaux1 »

Re Claude,
En choisissant de me "répondre" en évoquant la Résistance...vous m'embarquez sur un terrain!!!!!!....passons..
Pas que la Résistance, et je ne tiens nullement à vous " embarquer " sur ce sujet.
Je cite aussi les femmes et hommes d'aujourd'hui.
Il me faut pourtant bien trouver des points de comparaisons aux interrogations face à l'attitude des combattants de 14-18.
Rejeter simplement le fait qu'ils puissent n'avoir fait que leur Devoir de Français comme certains l'écrive n'est pas admissible.
Je n'écris pas qu'il l'on fait dans la joie mais, et je reprends une réponse qui revenait souvent:
" Qui pouvait le faire à part nous? "
Rejeter également aujourd'hui que le contexte de l'époque, patriotisme, morale, défense de la Patrie n'a pas eu un certain rôle ne fait que démontrer que ces valeurs n'ont plus guère d’intérêt de nos jours.
La mentalité du Paysan-soldat est aussi une réalité bien marquée dans certaines régions et en Franche-Comté elle se raccorde à la dure loi que ce sont bien les paysans qui sont les premiers à souffrir des guerres. Au début du XXe siècle le souvenir des Suédois et des Espagnols est toujours vivace et se transmet aux veillées. Que dire alors de la guerre Franco-Prussienne de 1870-71?
Les volontaires du Rhône, du Bordelais ou de la Haute Saône venus défendre Belfort n'avaient-ils pas une certaine idée de leur Devoir de Français?
Pourquoi en serait-il autrement en 1914?
Vous voyez Claude , j'ai nettement changé d'époque !!!
Bien cordialement, Patrice.
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Patrice Pruniaux1
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Re: A propos des jeunes lecteurs

Message par Patrice Pruniaux1 »

Je n'ai pas l'intention de m'immiscer dans cette remarquable conversation; cependant, et seulement si vous le souhaitez, je vous invite à lire ce texte, hélas incomplet, de Manuel Azana ( on me pardonnera l'absence du tilde ) sur ce qu'il pensait de la France après un séjour pendant la Grande Guerre:
http://www.arkheia-revue.org/Reims-et-V ... gros_titre
Il me semble y retrouver certaines de vos idées.
Bonjour Pierre,
Et pourquoi donc ne pas participer? Nous sommes entre nous!
Il eut été dommage que vous n'apportiez point votre contribution avec ce lien.
Comme vous l'écrivez, dommage qu'il soit incomplet.
Je le mets de coté pour le relire tranquillement.
Un grand merci, Patrice Pruniaux.

POUDRIERE
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Re: A propos des jeunes lecteurs

Message par POUDRIERE »

Bonsoir,
Je tiens à remercier et féliciter très vivement Chanteloube et Patrice Pruniaux pour le superbe échange qu'ils nous ont proposé ci-dessus.
On est loin des nombreux posts factuels que l'on peut lire sur le forum. Mais ces derniers y ont également leur place et leur intérêt c'est justement cette sorte de diorama qui en fait l'attrait.
Ici, on est dans la réflexion profonde, dans l'humain, dans un questionnement perpétuel. J'ai lu et relu ces textes de nombreuses fois, et j'y reviendrai encore.
Pourquoi cette immense masse de "paysans-fantassins" a-t-elle marché avec élan vers cette incroyable tuerie ?
On peut d'abord penser qu'à leur départ ils ne savaient pas trop ce qui les attendait. Mais ça n'a pas duré !
La réponse se trouve, pour moi du moins, dans cette magnifique phrase de Manuel Azana qu'il ne sera jamais vain de re-citer, surtout pour ceux d'entre nous qui sont passés à côté :
La discipline se trouva fondée non sur la coercition extérieure, ni sur le respect des hiérarchies historiques, mais sur l'acceptation volontaire du sacrifice, comme est accepté un devoir qu'impose la conscience.

Me pardonnera t-on, pour illustrer cette phrase, de faire à nouveau référence à mon grand-père ? Du viaduc de Flirey il écrivait à sa femme ce qu'il pensait être sa dernière lettre, étant sûr que l'attaque qu'il devait mener sur le bois de Mortmare ne lui laisserait aucune chance. On peut y lire ceci :
J'offre volontiers ma vie à la France, en vue de la grandeur de laquelle j'ai toujours travaillé et vécu.
Tout est dans le "volontiers".

Bien amicalement.
Patrick Fournié
Shark260486
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Re: A propos des jeunes lecteurs

Message par Shark260486 »

Bonjour,

chanteloube a écrit : "pour tenter de savoir ce que pensaient les combattants, une voie est à privilégier : accumuler les témoignages ! "

En effet j'approuve, plus on lit sur le sujet plus on peut s'en faire une idée. Ils étaient tous différents, des intellectuels, des familles de militaires de père en fils, des personnes avec ferveur politique, des gens de la ville, des ruraux, certains ont vécu la guerre d'un bout à l'autre d'autre non. Chacun ont eu une vision de l'instant propre à leur vie (vision de la France, de la guerre et de la mort).

Je suis jeune, je n'ai pas connu les poilus et seul les lettres (avec regard critique) ou carnets de guerres parlent. Et quant ils parlent ils disent la vérité pour un poilus. Mais il y a un hic. Seul les soldats sachant écrire nous apportent leurs visions. Quant est t'il des autres? Ce qui ne sont pas assez instruits ou qui n'ont pas les mots pour dire les choses? On ne saura jamais tout mais les carnets nous aident à avoir un aperçu.

Il n'y a rien de mathématique dans un poilus. On aura jamais le résultat en faisant 1+1=2. Tout est une histoire de contraste.

J'attends avec impatience les nombreux carnets qui vont sortir des greniers, il y aura du négatif avec le centenaire mais ceci je pense est un positif qui se produira j'en suis certain.

Cordialement,
Shark (un petit poucet dans la cours des grands penseurs)
p Lamy
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Re: A propos des jeunes lecteurs

Message par p Lamy »

Bonjour,
ce qui m'a toujours surpris des anciens de 14, c'est ce patriotisme ardent dont faisaient montre beaucoup, et pour certains se soldant par un engagement volontaire avant la date normale d'incorporation, ou pour d'autres ayant commencé la guerre sous l'uniforme allemand en tant que malgré-nous, et la terminant sous l'uniforme français à combattre les Allemands.
Et surtout pour tous le fait d'avoir tenu contre l'ennemi, sans avoir forcément une menace dans leur dos, mais tout simplement parce qu'ils faisaient leur devoir...
Cordialement.
P. Lamy
"C'est le Vin qui a fait gagner la Guerre"
Jean-Louis Billet, agent de liaison au 70e BACP
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Bruno Tardy
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Re: A propos des jeunes lecteurs

Message par Bruno Tardy »

Bonjour,

P. Lamy a dit :
Et surtout pour tous le fait d'avoir tenu contre l'ennemi, sans avoir forcément une menace dans leur dos, mais tout simplement parce qu'ils faisaient leur devoir...
Dans le même sens cette simple phrase de mon père juste après la débandade en 1940 :
"Nous, on avait tenu"

Cordialement
Bruno
robin des bois
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Inscription : dim. juin 08, 2014 2:00 am

Re: A propos des jeunes lecteurs

Message par robin des bois »



Grâce à ce topic et à Chanteloube, je retrouve la seule citation sur ce forum se rapportant à un Soldat de 14-18 , mort en 1917 du côté de Douaumont et à son "petit livre" qu'il a laissé à la postérité

Ce soldat m'a toujours intéressé car il a passé le début Avril 1916 au même endroit où fut tué l'arrière grand-père maternel de mes enfants (le 12 avril 1916).

Il s'agit de Raymond JUBERT et de son livre-témoignage :
Mars-avril- mai 1916 - VERDUN

( figure chez Norton CRU)

En hommage à ces 2 voisins de combat de la rive gauche de Verdun en avril 1916, voici ce passage extrait de la page 28 de son bouquin : je le trouve de toute beauté et d'une actualité brûlante en ce centenaire , y compris sur ce forum " spécialisé 14-18"

" Que ceux qui sont loin du combat ne nous travestissent point par leur imagination!
Qu'ils ne songent point à décrire des états d'âmes où ils n'entrent point, et où ils n'ont pas droit de visite s!
Qu'ils nous laissent la vérité et le bénéfice d'un esprit que nous payons de notre sang !
Nos âmes aussi sont des champs de bataille, où se combattent et se succèdent les sentiments les plus divers , et l'enthousiasme n'est que là.
Il n'y a qu'une porte par laquelle on participe à nos âmes, c'est celle du danger, et il n'y a pour apprécier le courage que ceux qui en meurent !


( et ils en sont morts, bien jeunes .... )




robin des bois
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