Notre ami Rutilius me communique un document important que je pense utile de signaler aussi ici :
J'ai la conviction que cette toute première mesure de police, le décret du 2 août 1914 relatif aux mesures à prendre à l’égard des étrangers stationnés en France (J.O., 3 août 1914, p. 7.084), fut appliquée à ceux des nomades présents sur le territoire national à la déclaration de guerre, qui ressortissaient d'un État étranger. Et ce nonobstant les dispositions spéciales de la loi du 16 juillet 1912 et du décret du 16 février 1913 auxquelles ils étaient par ailleurs assujettis.
Voir l'exposé des motifs et le dispositif communiqués par ailleurs dans le fil suivant :
Un GRAND MERCI à Rutilius. Je suis certaine qu'il a tapé dans le 1000 !
Bien amicalement.
Mounette, dite aussi Nina
"Tes yeux brillaient moins aujourd'hui /Dis-moi, dis-moi pourquoi chère âme /Dis-moi quel chagrin, quel ennui /Mettait un voile sur leur flamme." - Sergent Ducloux Désiré, dit Gaston - 146° RI
Pour déterminer, au regard du droit international des gens et des règles d’incorporation dans l’armée française, le statut des nomades en âge de porter les armes qui se trouvaient « stationnés en France » au moment de la déclaration de guerre, pas moins de cinq situations juridiques doivent être envisagées :
I. – Nomades de nationalité française.
– Obligation de respecter, pour leur circulation sur le territoire national, les dispositions spéciales de la loi du 16 juillet 1912 sur l'exercice des professions ambulantes et la réglementation de la circulation des nomades et du décret du 16 février 1913 pris pour son application. Ou toute autre mesure de police applicable aux nationaux français.
– Astreints à l’obligation militaire en France dans les conditions de droit commun.
II. – Nomades de nationalité allemande ou austro-hongroise.
– Obligation d’évacuer la région du Nord-Est, ainsi qu’une partie de la région du Sud-Est de la France (D. 2 août 1914, art. 2, al. 1).
– Faculté à eux offerte, soit de sortir du territoire national, soit de se retirer dans l’intérieur du pays (D. 2 août 1914, art. 2, al. 2).
– Faculté de contracter en France un engagement volontaire ordinaire au titre de l’un des régiments étrangers.
III. – Nomades de nationalité allemande, mais alsaciens-lorrains.
– Obligation d’évacuer la région du Nord-Est, ainsi qu’une partie de la région du Sud-Est de la France (D. 2 août 1914, art. 2, al. 1).
– Faculté à eux offerte, soit de sortir du territoire national, soit de se retirer dans l’intérieur du pays (D. 2 août 1914, art. 2, al. 2).
– Faculté de contracter en France, au besoin sous un pseudonyme ou un nom d’emprunt, un engagement volontaire au titre de l’un des régiments étrangers, afin de recouvrer, sur leur demande et après la signature de leur acte d’engagement, la nationalité française en application de la loi du 5 août 1914 relative à l’admission des Alsaciens-Lorrains dans l’armée française (J.O., 6 août. 1914, p. 7.130 ; art. 1er, al. 1).
Alors incorporés, « après accomplissement de cette formalité, dans un corps quelconque de l’armée, s’ils remplissent les conditions d’aptitude exigées pour l’armée dont ce corps fait partie » (L. 5 août 1914, art. 1er, al. 2).
IV. – Nomades d’autres nationalités.
– Possibilité de se maintenir « sur toute l’étendue du territoire national », sous réserve de disposer d’un permis de séjour (D. 2 août 1914, art. 4 – appliqué mutatis mutandis, dans la mesure où cette disposition ne vise que les résidents fixes) et de respecter, pour leur circulation, les dispositions spéciales de la loi du 16 juillet 1912 sur l'exercice des professions ambulantes et la réglementation de la circulation des nomades et du décret du 16 février 1913 pris pour son application.
– Faculté de contracter en France un engagement volontaire ordinaire au titre de l’un des régiments étrangers.
V. – Nomades apatrides.
– Règles de maintien sur le territoire national indéterminées.
– Pour leur circulation sur le territoire national, obligation de respecter, les dispositions spéciales de la loi du 16 juillet 1912 sur l'exercice des professions ambulantes et la réglementation de la circulation des nomades et du décret du 16 février 1913 pris pour son application.
– Faculté de contracter en France un engagement volontaire ordinaire au titre de l’un des régiments étrangers.
Merci d’abord à Daniel pour sa communication, j’espère que je peux résumer en disant que les nomades français avaient les mêmes obligations militaires que le reste de la population, même chose s’agissant des étrangers.
Vis-à-vis de la problématique des carnets anthropométriques, je n’avais pas spécialement capté que la position militaire ne figurait pas sur le carnet du nomade – le document qu’il avait avec lui –, mais seulement sur la "notice individuelle", c’est-à-dire la feuille recto-verso remplie en parallèle du carnet et conservée à la préfecture. Cela doit représenter la seule divergence entre les informations personnelles portées sur le carnet et celles de la notice individuelle, qui s’explique par le fait que le nomade avait aussi son livret militaire. CQFD.
J’ai ainsi inspecté une vingtaine de notices individuelles du milieu des années 1930 conservées aux AD 78. Au bas de la première page, la rubrique "Situation militaire" est loin d’être systématiquement remplie. Je joins les photos concernant deux notices individuelles dont la rubrique est renseignée, même si c’est toujours succinct. Je ne sais pas si leur "volet militaire" appelle un commentaire particulier.
J'ai été trop rapide dans ma formulation, j'aurais dû développer en disant que "les nomades étrangers pouvaient, comme les étrangers non nomades, contracter un engagement volontaire, selon les conditions ouvertes à leur nationalité".
C'est ce qui a permis à votre grand-père de suivre sa vocation !
Votre remarque sur "rien de probant sur la présence au corps de nomades" semble contradictoire avec la règle que je lis avec : Astreints à l’obligation militaire en France dans les conditions de droit commun. Peux-t-on argumenter que dans cette situation de conflit, la catégorisation "nomade" disparaissait pour les nomades français soldats ?
Crest, et les autres camps étaient ouverts pour les Alsaciens-Lorrains "gitans", devenus Allemands depuis 1870, et de ce fait considérés comme "ennemis" de la France.
Il existait probablement une petite nuance administrative à modulation variable entre les termes ennemis et étrangers.
Modulation variable selon les régions et points de chute dans l'hexagone, des applications nuancées et variables des lois et réglements en vigueur, venant de l'Administration, mais et surtout mises en oeuvre par les agents des services de préfecture, police, mairie auxquelles s'ajoutent les influences des Eglises.
Par ailleurs, les listes des AL évacués, réfugiés ou insoumis, "gens du voyage" ou pas, nous montrent qu'on y associait souvent les sujets Austro-hongrois vivant en France avant 1914.
Le sujet reste ouvert, merci à tous.
Cordialement.
Evelyne et Marc, MERCI à vous !
Je remercie également tout le monde dont, surtout, les fouilleurs de génie qui font progresser ce sujet ...qui me passionne.
Mounette.
Cliché A. Barthélémy :
"Tes yeux brillaient moins aujourd'hui /Dis-moi, dis-moi pourquoi chère âme /Dis-moi quel chagrin, quel ennui /Mettait un voile sur leur flamme." - Sergent Ducloux Désiré, dit Gaston - 146° RI
Belle illustration " administrative ". (datant d'une époque plus récente toutefois.)
Oui, bien sûr, chers amis ! c'est du post 1950 !
De la deuxième moitié du XXème siècle aussi, en voici une autre ...que j'intitule : "La tagadatactique" de qui ?
Cliché d'A. Barthélémy
Coucou aux rohmer [:mounette_girl:8]
Et bien amicalement à tous
Mounette
[:mounette_girl]
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