On sait que l'histoire s'édifie par à-coups, par petites ou grandes touches et que les "sources" elles-mêmes pratiquent l'art de former et de déformer les faits, voyez le livre déjà cinquantenaire de M. Rambaud, L’Art de la déformation historique dans les Commentaires de César, qui a finement débusqué les astuces du "divin chauve".
Je reviens, pour le nourrir d'un élément sinon nouveau, du moins édifiant, sur le sujet des condamnations de Henriette WEST et de son mari, communément désigné comme "le forestier West", qui furent, lui, condamné à 20 ans de travaux publics, et elle, fusillée le 22 août 14 à Belfort, après condamnation par le 3e Conseil de Guerre de Belfort, "pour intelligence avec les ennemis, recel d’ennemis et cruautés".
Toute la presse, locale, régionale et nationale, s'est passionnée pour cette affaire. A l'origine, une dépêche Le Temps Journal quotidien du Midi (AD de l’Hérault), « JUSTE CHÂTIMENT », citant une dépêche officielle de Havas, reprise telle quelle par l’ensemble de la presse nationale et régionale, dont L’Eclair de l’Hérault du 22 août, La Croix du 25 août 14 : « Une femme passée par les armes ». Le Temps du 20 août, dépêche de Belfort du 19 août : La femme d’un forestier allemand,
. Le Journal de la Vienne, des Deux Sèvres..., du 22 août 14, « La femme d’un forestier allemand condamnée à mort », ayant été (je cite)accusée d’avoir scié le cou d’un soldat français
Résumons la teneur de ces articles, tous dépendant de la même source (j'y insiste) : ces civils ont traîtreusement attiré des soldats français dans un guet-apens, ont provoqué la mort d'un soldat.accusée d’avoir scié le cou{p} (sic) d’un soldat français.
Vous voyez le point commun,
ce qui est un summum d'atrocité, à un moment où, dans cet automne 1914, s'enrichissent par les témoignages et les enquêtes les livres noirs des "atrocités boches" commises en Belgique. Par définition, des Allemands, civils comme militaires, passaient pour commettre des atrocités de Goths, celle-là viendrait enrichir le florilège. Mais Le Temps du 31 octobre 14 revient sur « Le cas du forestier West et de sa femme », à la suite d’une dépêche de l’Agence Wolff du 26 octobre à Strasbourg, qui indiquait qu’ils avaient été condamnés pour avoir abrité sous leur toit des soldats des avant-postes allemands. Le journal s’empresse de rétablir et de compléter : West et sa femme ont été condamnés, en août dernier, par le Conseil de Guerre de Belfort, parce qu’ils avaient sciemment attiré dans un guet-apens une patrouille française dont deux hommes furent blessés et un autre tué par les ennemis qui se cachaient chez eux.ils ont "scié le cou" d'un soldat,
donc. D'oùSciemment,
?scié le cou
Allez savoir....
Voilà, ce sera tout pour aujourd'hui.
aB