Collecter des temoignages

[rem730]

Bonjour,
Je sais que ce post sera hors sujet, et j'ai longtemps hésité avant de le poster, mais étant donner que la cause me semble juste (Devoir de Memoire, transmissions de souvenirs...), je me permet de le mettre, cependant s'il n'est pas le bienvenue, je comprendrais que le ou les moderateurs le supprime...
Ma petite amie habite dans une petite commune où une maison de retraite à ouvert il y a quelques mois. Chaque mois, un repas est ouvert aux personnes de l'extérieur, pour permettre aux résidants d'avoir de la visite de personne de l'extérieur. Ma copine qui a participé à l'un de ces repas, ma fait part, sachant que je suis en Licence d'Histoire et intérréssé par les deux Guerres Mondiales, ainsi que fortement impliqué dans le Devoir de Memoire, que beaucoup des résidants évoquaient à plusieurs reprises des souvenirs de la Seconde Guerre Mondiale. De plus la responsable de la maison de retraite qu'elle connait lui a demandé, s'il elle le voulait d'organiser une fois par mois une activité pour les résidants. Met alors venue cette idée: pourquoi ne pas créer une sorte d'atelier ou chacun des résidants le souhaitant pourrait nous livrer son témoignages (ceux ci étant de plus en plus rare) et ainsi le transmettre aux générations futures. Elle l'a proposé à la responsable qui trouve l'idée intéressante. Je me tourne à présent vers vous, car je ne connais pas d'autre forum, d'autant qu'ici se trouvent bon nombre de personnes compétentes dans tout les domaines, expositions, conférences, réunions ect...
Mes questions sont les suivantes, comment selon vous devrais je mis prendre (organisation, présentation, questions ect)? Quels supports utiliser (video, audio, papier)? Tout le monde est libre de m'apporter des idées, ici ou en MP, toute idée est la bienvenue.

Merci, en esperant ne pas m'être trop éloigné du sujet de la 1e GM...

Rémy

[nono26]

Bonjour Rémy,
Je me permets très humblement de compléter l'idée de votre démarche... les résidents dont vous parlez,(80 ans et plus) ont entendu personnellement les témoignages de ceux qui ont vécu la Grande Guerre... Il y a sans doute la aussi beaucoup à glaner.. Quand à la manière, je crois qu'il faut être très simple::Je m'intéresse à ce que vous avez connu il y a longtemps!! Voudriez vous m'en parler??
Ca peut ne pas marcher du premier coup, certains préfèreront les confidences entre quatre yeux... mais la richesse potentielle est gigantesque mais périssable... faites vite et tenez nous au courant ..
Cordialement Nono

[le begue]

Bonjour à tous,
Bonjour Rémy,

Une méthodologie que j'ai employé au temps jadis...
1°) Rencontrer les anciens un par un. Éviter les témoignages indirects. Faire une première sélection pour éviter les controverses...
2°) Commencez par identifier soit une bataille, soit une unité.
3°) Renseignez vous sur ces faits.
4°) Menez l'interview en vous appuyant sur vos documents.
5°) Une caméra sur trépied ou un magnétophone seront un plus.

Cordialement
Louis

[HT62]

Bonjour Rémy, bonjour à tous,

Bonne idée mais pas si facile car vous risquez d'avoir des informations en vrac, bonnes et mauvaises suivant la fatigue de ces personnes, vous allez aussi déranger.
Soyez donc très prudents, je rejoins tout à fait l'idée de Louis de rencontrer ces personnes individuellement avant de poursuivre vos actions.
J'ai fait comme vous, il y a quelques temps, j'ai vite abandonné.
Rien ne vaut l'accueil direct à la maison, ce que je fais d'ailleurs depuis 10 ans mais ce n'est pas toujours évident d'entrer non plus pour de multiples raisons .
Bon courage, cordialement, Hervé.

[rem730]

Bonjour,
Merci pour ces conseils et idées, je ne manquerai pas de vous tenir au courant. Je pense effectivement que cela risque d'être complexe et long mais qui ne tente rien n'a rien...
Alors je vais encore réfléchir la chose, pour ne pas arriver sans idées fixe, je vais me servir de vos conseils et "advienne que pourra".

Merci encore,

Rémy

[stcypre]

Bonjour,

Pour l'avoir fait il y a quelques années pour la rédaction de 2 de mes livres j'ai:
- pu obtenir des témoignages interessants (à condition de les recouper, de vérifier avec ma bibliothèqueet ma doc).

- été submergé de "je crois que, on m'a dit...", et de récit fantaisiste avec notamment une confusion entre les deux guerres.

- quelques réglements de compte entre membres d'un même village, notamment concernant les embusqués.

Il faut préciser que ma recherche concernait la vie à l'arrière et dans les zones occupées 14-18 bien sûr.
Cette enquête qui s'est déroulée sur une année, dans une maison de retraite "de campagne", m'a permis de rencontrer des personnes qui se sont révélées heureuses que l'on discute avec elles.
Canevas de travail:
Je contactais une première personne pour obtenir son lieu de vie à l'époque, son histoire familiale, etc... puis insensiblement je venais à des questions plus précises. Puis 2 semaines plus tard je revenais voir cette personne et nous recommencions... Souvent d'ailleurs elle me disait: "j'ai réfléchi et j'ai pensé à ceci ou cela que j'ai oublié de vous dire la dernière fois"...
A votre disposition.
J.Claude

[Cuchlainn]

Bonjour,

Je suis un peu perplexe sur la méthode d'organisation d'ateliers, mais sans doute les personnes qui travaillent au quotidien avec ceux que vous souhaitez interroger sont-elles les mieux placées pour juger. Je vois des risques : d'une part que les anciens voient un côté "interrogatoire" à cette "officialisation"; certains peuvent avoir des souvenirs douloureux ou pesants et se braquer - il arrive aussi qu'une personne âgée juge très grave, ou secrète ou potentiellement dérangeante pour l'interlocuteur une information pour nous anodine car dépassionnée par le temps. L'autre risque c'est que les personnes ne se sentent pas en forme à l'heure fixée et n'y aillent pas. Enfin, en groupe, certaines personnes timides n'oseront pas parler, et vous perdrez une partie de l'information.
Je me joins donc à ceux qui préconisent l'entretien individuel.

J'ai constaté à plusieurs reprises que la première chose qui fait que nos anciens se taisent, c'est la conviction que "leurs histoires du vieux temps" n'intéressent pas les jeunes. S'ils voient juste une affichette les invitant à venir... ils risquent de conclure : "oh, mais moi je n'ai rien d'intéressant à dire, je vais laisser la place à ceux qui ont connu des choses un peu plus hors de l'ordinaire." Mais si vous faites la démarche d'aller témoigner directement de l'intérêt aux souvenirs d'une personne, beaucoup de tiroirs s'ouvriront pour vous dans le vaste secrétaire des mémoires. Prévenez avant, faites circuler l'information que vous aimeriez aller "interviewer" les gens, que vous vous intéressez à des souvenirs tout simples. "Des souvenirs de la guerre de..." ? les gens peuvent se fermer ou penser qu'ils n'en savent pas assez. "Des souvenirs sur la vie à... à tel moment" ? Là, peut-être que davantage se diront : ah ça, oui, je peux en parler !

Pour compléter le post de Louis, je dirais : quelquefois, c'est fascinant aussi de ne pas être trop dans le "guidé", de demander simplement à la personne de raconter comment elle a vécu telle période, sans se fixer sur un fait précis. On a tout, le quotidien et la grande Histoire mêlés, il faut parfois "relancer" en prenant garde à ne pas fatiguer, mais on voit alors la mémoire se dérouler comme un film. Ce sont de beaux moments. Tout dépend de ce que vous cherchez. Mais j'ai tendance à dire que notre petit devoir de mémoire à nous, c'est aussi d'enregistrer ces films. Et nombre de nos aînés n'attendent que ça, en fait : qu'on leur demande, pour éteindre la lumière et lancer la projection.
Enfin : je dirais que le dispositif enregistreur quel qu'il soit est essentiel : vous avez tout, et tout le temps d'exploiter. Mais sans oublier de demander à la personne si cela ne la dérange pas.

Cdlt
Cyrille

[stcypre]

Re bonjour,

Ce qui m'a facilité la tâche c'est que dans cette maison de retraite il était rédigé un petit journal, qu'il y avait un atelier cuisine de notre temps, etc...
Les personnes contactées n'ont pas pris mes interrogations sous le mauvais aspect mais au contraire "on les écoutait"...
Quant à l'absence de paroles des poilus, il est évident que ce qu'ils pouvaient raconter sortait du "compréhensible" et bien souvent on pensait qu'ils radotaient... Comment en effet croire que, par exemple, au fort de Vaux ils avaient bu leur urine pour survivre?
C'est en partie pour cela que, dès la guerre finie, une multitude d'assos. d' AC est apparue. Car lors des réunions de ces assos. ils pouvaient parler et surtout ils se comprenaient.
Merci.
J.Claude

[rem730]

Bonjour J. Claude et Cyrille, tout d'abord merci pour toutes vos idées et reflexions qui seront très utiles. Cyrille, vous évoquer des risques de faire ce genre d'atelier, car pourrait braquer les gens ect mais l'idée est venue du fait que ces personnes racontaient d'elles même sans même avoir abordé le sujet, leurs souvenirs...
Mais je pense qu'il y a de nombreux elements a prendre en compte dans ce que vous avez tous dit ici, et je mettrai ici la forme dans laquelle je pense faire le projet avant de mi mettre,

Merci,

Rémy

[le begue]

Bonjour à tous,
Bonjour Cyrill,

Vous nous dites : "...quelquefois, c'est fascinant aussi de ne pas être trop dans le "guidé" ..."
J'entends bien, mais si on veut faire autre chose qu'écouter, il est préférable de préparer ses interviews. Les premiers entretiens servent d'ailleurs à cibler la valeur potentielle du témoignage.
Pour ma part, j'ai toujours évité les témoignages indirects, les "on m'a dit que ... j'y étais pas mais je sais tout ..."
Ensuite, la mémoire est joueuse. Il est parfois nécessaire, non pas de guider, mais d'épauler le témoin qui, comme tout être humain, peut avoir
des pertes ou des "déformations" de mémoire. Il faut alors qu'il puisse rebondir. Les connaissances acquises y aident (dates des combats, autres unités engagées, chefs concernés, topographie etc.)
J'ai réalisé pas mal d'entretiens avec des Anciens de la WWII, Indo et Algérie. Tant qu'on interroge des soldats, pas de Pb.
Interrogez des chefs de corps ou des responsables de haut niveau, je vous assure qu'il vaut mieux connaître son sujet !
D'abord pour comprendre ce qu'on vous dit et ensuite, pour éviter de passer pour un gentil "rigolo". Classé avec cette étiquette, toutes les portes se ferment.
A l'inverse, "Vous pouvez lui parler, il sait..." vous ouvre bien des boulevards. "Vous devriez rencontrer Untel... ça vous intéresse ?"
Précautions également avec les enregistrements : TOUJOURS prévenir dès le premier entretien et planifier la date ... Sinon sentiment de vol, exhibition etc. pour l'interviewé.
Ceci n'est qu'une méthode de travail que je suggère à Rémy dans le cadres de ses études ... Chacun est libre d'adapter celle qui lui convient le mieux.

Cordialement,
Louis.