Bonsoir Stéphan,
BRAVO !!!
Et oui avec l'unité, c'est beaucoup plus facile...
Question :
Pourquoi la journée du 14 juin 1915 peut-elle (ou a pu) être, pour une famille bisontine, qualifiée d'inoubliable ?
La famille originaire de Besançon, avait pour nom Zorn. Cette journée du 14 juin 1915 est (s'il y a toujours des descendants...) ou a pu (s'il n'y en a plus) être pour cette famille qualifiée d'inoubliable car ce jour là deux fils, appartenant à la 6e compagnie du 15e B.C.P. sont Morts pour la France à quelques mètres d'intervalle. Je ne sais si, cet épisode s'est produit plusieurs fois durant cette guerre. Mais, étant le seul à ma connaissance, il m'a semblé bon de vous faire découvrir cette histoire.
Zorn Louis Jean Maurice
Zorn Lucien Auguste René
Indice 1 : Le bois de Winterhagel. Situé près de Sondernach dans le Haut-Rhin, ce bois est le lieu précis de leur décès. Voir les fiches
Indice 2 : "Aussi digne d'être montré à nos ennemis qu'à nos amis" Il s'agit d'une citation marquée sur le premier plat de l'historique du 15e BCP, voir sur le site de Renaud Meunier : [url]http://cecile_meunier.club.fr/historiques/historiques/BCAP-015.pdf[/url]
Indice 3 : Nous étions entre Tabouis et Boussat
Voici un passage du J.M.O. du 15e B.C.P. :
"à droite du 15e Bataillon la 1re Brigade de Chasseurs Tabouis (7e, 13e, 53e Bataillons de chasseurs, 1 bataillon du 213e), après avoir enlevé le 14 les ouvrages d'Hilsenfirst, attaquera dans la direction générale Markus Brunnen, croupe S. de Sondernach, en se reliant vers Breitstein au 15e Bataillon de Chasseurs. A gauche du 15e Bataillon, le Groupe des Bataillons de Chasseurs Boussat (27e, 28e, 68e Bataillons de Chasseurs, 1 bataillon du 152e) attaquera le 15 dans la direction générale Anlass – Wasen, Metzeral, en se reliant à Pliègle au 15e Bataillon de Chasseurs."
Indice 4 : Nous étions officiers... En effet Auguste Zorn était capitaine, commandant la 6e compagnie. Maurice Zorn était lui lieutenant, commandant une section de cette même compagnie.
Voici leurs portraits tirés du Tableau d'Honneur du journal illustration
Enfin, pour finir un autre passage du J.M.O. du 15e B.C.P pour cette journée tragique. (
cote : 26 N 821)
"A midi, le 15e Bataillon de Chasseurs est en place dans les tranchées avancées du 5e Bataillon territorial de Chasseurs, aménagées pour le départ des troupes d'attaque et munies de dépôts de matériel.
3e Cie (Jeanperrin)
à droite, à cheval sur l'Oderbach.
Objectif : rive gauche de l'Oderbach, les 4 maisons, confluent Oderbach et Fecht, liaison Breitstein avec le détachement de skieurs de la Brigade Tabouis.
Mission : couvrir la droite de l'attaque centrale
Au centre : sous les ordres du capitaine Monnet. 2e (Chanal) 5e (Massin) 6e (Zorn), 1 section du Génie. 1 peloton de mitrailleuses (Lieutenant Poivet), dans les tranchées du bois de Rampf.
Objectif : Enderlé
A gauche : 4e Cie (Masson), dans les tranchées des territoriaux au N. du layon réunissant les clairières 1093 et 799.
Mission : couvrir la gauche de l'attaque centrale.
En réserve : 1re Cie (François)
12h 45 : tir préparatoire des pièces de 220 sur les blockhaus précédemment reconnus par les patrouilles à la lisière de l'Ahwäldle, lisières de Winterhagel et Rampf.
16h : après un tir de 155, 75 et 65 sur le front de la ligne d'attaque, l'assaut se déclenche.
La Cie Jeanperrin, après avoir progressé d'environ 200 mètres est prise de face par des blockhaus intacts et de flancs par les feux de la lisière de l'Ahwäldle. Elle ne peut progresser davantage et s'organise.
Attaque principale : 1re ligne : 1 peloton de la 5e Cie à droite, la 2e Cie au centre, 1 peloton de la 6e Cie à gauche, se heurtent sous bois, à 300 mètres à un premier réseau de fil de fer, très profond, absolument intact, défendu par des éléments de tranchées à contre-pente et des blockhaus.
5e Cie : le peloton de la 5e Cie perd la moitié de son effectif en voulant le franchir et se retranche, renforcé par le 2e peloton.
2e Cie : le peloton de gauche coupe à la cisaille le premier réseau de fil de fer, perd son lieutenant, plus de la moitié de son effectif, enlève néanmoins une ligne de fortins allemands et trouve 100 mètres plus loin un deuxième réseau de fils de fer également intact et défendu par une deuxième ligne de tranchées. Le peloton de droite, pris sous un feu violent pendant la coupe à la cisaille du premier réseau de fils de fer, perd son lieutenant, son adjudant , ses sous-officiers et tout son monde à l'exception de 11 hommes, qui se retranchent sur place.
6e Cie : le 1re peloton se heurte au premier réseau de fils de fer, le cisaille, perd ses officiers et chefs de section et se retranche sur place. Le 2e peloton de la 6e Cie et le 2e peloton de la 5e Cie sont envoyés par le capitaine Monnet en renfort de la 1re ligne, qui s'organise sur place à la hauteur de la 1re ligne allemande conquise, le peloton de la Cie Chanal se repliant à cette hauteur, sous une menace de débordement et d'investissement.
A gauche : 2 sections en première ligne (1re et 3e), une section de mitrailleuses. La section de droite (3e) arrive à 10 m environ de la lisière du bois de Winterhagel, est soumise au tir violent de mitrailleuses qui en part et s'organise sur place.
La 1re section coupe à la cisaille et traverse le réseau de fils de fer, atteint la lisière O. du l'étranglement et enlève un blockhaus.
La 2e section se met en liaison avec la gauche de notre attaque centrale, et, renforcée par la 4e section, repousse une contre-attaque allemande sur la 6e Cie.
La 4e Cie (Masson) est renforcée à 17h 30 par la Cie François (1re Cie). Elle est en liaison à gauche avec la Cie Lejard, du 28e Bataillon qui a pris pied dans la lisière S.O. de Winterhagel.
Etat nominatif des officiers, sous-officiers et chasseurs tués, blessés, faits prisonniers et disparus le 14 juin 1915
Zorn Auguste, Lucien, René, 6e Cie, capitaine, tué
Zorn Maurice, 6e Cie, sous-lieutenant, tué
Bonamour Henri, 2e Cie, sous-lieutenant, tué
Vichard André, Charles, 2e Cie, sous-lieutenant, tué
Brézault Léon, 6e Cie, sous-lieutenant, tué
...
Total: 153 tués, 147 blessés (dont 2 morts le 16 juin), 39 disparus (dont 6 rentrés)
...
Sont cités à l'Ordre de l'Armée (ordre général n°33 du 10 juillet 1915 de la VIIe Armée)
Le 15e bataillon de Chasseurs sous le commandement du chef de bataillon Dussauge "s'est battu pendant 5 journées consécutives avec une bravoure superbe allant jusqu'à l'héroïsme. Malgré les grosses pertes subies, a prouvé quelques jours plus tard, en attaquant gaillardement un autre point du front, qu'il conservait l'âme ardente qu'a su lui donner son chef."
Le capitaine Zorn Auguste Lucien René :
"sabre haut, et criant de toutes ses forces "Vive la France", est monté à l'assaut en tête de sa Compagnie, dort maintenant au Champ d'Honneur son dernier sommeil."
Le sous-lieutenant Zorn Maurice Jean Louis :
"Mort en brave en entraînant à l'assaut sa section par son exemple et son énergie."
Les sous-lieutenants Bonamour, Vichard et Brézault : "superbes chefs de section, glorieusement frappés en entraînant leurs hommes à l'assaut."
Cette famille du Doubs, en ce jour de juin 1915, touchée dans sa chair, par la perte de deux fils, à quelques mètres à peine l'un de l'autre... (je vous laisse imaginer...) voilà quelle était le sens profond de ma question, voilà ce que je voulais vous faire découvrir... Je suis désolé d'avoir été très très très très "nébuleux". Promis je ne le referai plus. Mais, je crois que cela en valait la peine. J'ai découvert cette anecdote, lors de recherches effectuées au S.H.D. pour Eric Mansuy, qui effectuait une étude sur le sous-lieutenant Bonamour, du 15e B.C.P., et qui était décédé ce même jour.
Merci à toutes et tous ceux qui ont essayer de résoudre cette énigme et qui ont participé à ces deux jours de recherches.
Bravo à toi Stéphan, je te passe la main... une mention spéciale à Gilles Roland qui aurait mérité également...
Bien cordialement
Guilhem LAURENT