Bonsoir,
Pour faire la guerre, il ne suffit pas de posséder un bon matériel, il faut aussi savoir s'en servir.
Avant 1914, la France possède sans conteste un excellent canon de campagne, le 75 modèle 1897.
Comment l'instruction de nos artilleurs a-t-elle été réalisée?
Pour répondre à cette question, il faudrait recenser les allocations de munitions accordées chaque année aux batteries d'artillerie de campagne.
Quelques données permettent toutefois de se faire une idée de la question.
On sait que sous le ministère du général André, l'homme de l'affaire des fiches, ministre de mai 1900 à novembre 1904 (un record de longévité pour l'époque!), le nombre de projectiles alloués aux tirs d'instruction était tombé à un chiffre très bas de même que le stock des munitions de guerre. Il est vrai qu'il était alors plus important de compter et d'identifier les officiers "allant à la messe" ou professant un faible intérêt pour la République que de s'instruire face aux périls.
Il est aussi connu que les crises marocaines ont amené un réveil brutal des préoccupations de nos gouvernants pour la préparation à la guerre, jugée dès lors inévitable à court terme.
Un fascicule de 1910 permet de donner l'échelle de l'instruction des artilleurs.
Il est certain qu'un très gros effort est fourni à partir de 1910 pour renforcer non seulement les effectifs de l'artillerie de campagne (dont le nombre des régiment augmente de 50%, avec une augmentation d'environ 20% du nombre des matériels).
Je joins quelques données tirées du "Programme général des exercices de tir à exécuter en 1910" en me limitant à l'artillerie de campagne:
-pour chaque batterie active: allocation de 375 obus ordinaires (en fonte, bien moins cher que les obus en acier) et 125 obus à balles.
-pour chaque batterie de renforcement à créer à la mobilisation: 85 obus ordinaires et 65 obus à balles.
-pour l'instruction de chaque élève-officier de réserve: 30 obus ordinaires et 20 obus à balles.
-pour chaque officier de l'Ecole de Guerre (de toutes armes): 12 obus ordinaires et 36 obus à balles.
-pour les batteries de place de 75: 40 obus ordinaires et 10 obus à balles.
-pour les 6 cours régionaux de l'artillerie de campagne: 15.000 obus ordinaires, 4.500 obus à balles et 1.000 obus explosifs.
-pour le cours pratique d'artillerie de campagne: allocation non fixée exactement.
Je vous propose un petit exercice pratique, connaissant le nombre de batteries actives et de renforcement de l'artillerie de campagne en 1910 (même nombre en 1914), quelles sont les quantités d'obus de 75 allouées pour les tirs d'instruction en 1910?
Question annexe, sachant qu'un tube de 75 a une vie de 6.000 coups, combien de tubes neufs sont nécessaires en moyenne par an?
Ces chiffres permettent de mieux comprendre le haut degré de préparation à la guerre de notre artillerie de campagne en 1914. En effet, à cette époque, bien des puissances secondaires se contentaient d'un stock de guerre de 400 coups par pièce et les tirs d'instruction y étaient limités à 10 ou 20 coups par batterie.
Cordialement,
Guy François.
L'entraînement à la guerre de l'artillerie avant 1914
- Diable Noir
- Messages : 173
- Inscription : dim. janv. 14, 2024 10:37 am
Re: L'entraînement à la guerre de l'artillerie avant 1914
bonjour à vous
merci pour ce sujet très intéressant, je vais tenter de donner une réponse à un sujet qui me passionne "l'artillerie de campagne et le fameux"75".
aller on sort la calculatrice et au travail
Cordialement
Diable Noir
merci pour ce sujet très intéressant, je vais tenter de donner une réponse à un sujet qui me passionne "l'artillerie de campagne et le fameux"75".
aller on sort la calculatrice et au travail

Cordialement
Diable Noir
La devise du 61éme R.A.C! " 61 en Avant !
Re: L'entraînement à la guerre de l'artillerie avant 1914
Bonjour à tous,
Merci pour cet intéressant sujet.
Afin de mieux appréhender les chiffres peut-on définir ce qu’est une « batterie ?
Pour les régiments dotés de 75 il me semble qu’il s’agit de 4 canons. Quid des autres calibres ?
Le sujet a probablement déjà été traité, ici ou autre part, peut-on donner le/les liens ?
Cordialement,
Cyrille
Merci pour cet intéressant sujet.
Afin de mieux appréhender les chiffres peut-on définir ce qu’est une « batterie ?
Pour les régiments dotés de 75 il me semble qu’il s’agit de 4 canons. Quid des autres calibres ?
Le sujet a probablement déjà été traité, ici ou autre part, peut-on donner le/les liens ?
Cordialement,
Cyrille
- Diable Noir
- Messages : 173
- Inscription : dim. janv. 14, 2024 10:37 am
Re: L'entraînement à la guerre de l'artillerie avant 1914
Bonjour à tous,
oui Cyrille, vous avez raison une batterie est bien composée de quatre canons.
En règle générale, les R.A.C régiments d'artillerie de campagne ont été jusqu'à 62 régiments.
Un R.A.C était généralement composé de 3 groupes de 3 batteries: en chiffre cela donnait un total de 9 batteries à 4 canons donc un Total de 36 canons de 75mm . Les R.A.C ont aussi utilisés des canons de 90mm,95mm, 100mm, et 105 il me semble. (Je compte sur ALVF, Mr Guy François grand spécialiste de l'artillerie pour corriger mes erreurs et y apporter tous renseignements complémentaires)
Cordialement
Diable Noir.
Diable noir était le surnom donné aux artilleurs du 61éme R.A.C par les allemands qui redoutaient ces diables maculés de noir par la poudre des départs de feux de leurs terribles 75.
oui Cyrille, vous avez raison une batterie est bien composée de quatre canons.
En règle générale, les R.A.C régiments d'artillerie de campagne ont été jusqu'à 62 régiments.
Un R.A.C était généralement composé de 3 groupes de 3 batteries: en chiffre cela donnait un total de 9 batteries à 4 canons donc un Total de 36 canons de 75mm . Les R.A.C ont aussi utilisés des canons de 90mm,95mm, 100mm, et 105 il me semble. (Je compte sur ALVF, Mr Guy François grand spécialiste de l'artillerie pour corriger mes erreurs et y apporter tous renseignements complémentaires)
Cordialement
Diable Noir.
Diable noir était le surnom donné aux artilleurs du 61éme R.A.C par les allemands qui redoutaient ces diables maculés de noir par la poudre des départs de feux de leurs terribles 75.
La devise du 61éme R.A.C! " 61 en Avant !
Re: L'entraînement à la guerre de l'artillerie avant 1914
Bonjour à tous,
Bonjour Diable noir,
Merci pour cette mise en perspective du 61ème RAC avec à sa tête l'audacieux colonel Boichut qui a été déterminant (notamment avec ses tirs tendus) dans le soutien de la 42ème division d'infanterie (6ème corps) qui a très bien résisté sous le feu lors de la bataille des frontières.
Bien cordialement.
Emmanuel
Bonjour Diable noir,
Merci pour cette mise en perspective du 61ème RAC avec à sa tête l'audacieux colonel Boichut qui a été déterminant (notamment avec ses tirs tendus) dans le soutien de la 42ème division d'infanterie (6ème corps) qui a très bien résisté sous le feu lors de la bataille des frontières.
Bien cordialement.
Emmanuel
"Quand tous les souvenirs s'éteignent, il reste encore leur point d'attache" Ernst JÜNGER
Re: L'entraînement à la guerre de l'artillerie avant 1914
Bonjour,
S'agit-il de la dotation annuelle ?
Ces obus ordinaires vont se retrouver employés dans la bataille au moment des pénuries, comme le mentionne par exemple le JMO du Parc d'artillerie du 3e CA :
- au 28 octobre 1914, livraison aux batteries de 828 obus ordinaires de 75,
- au 17 novembre 1914, réception de 4 000 de ces obus.
Pour l'usure des tubes après une moyenne de 6000 coups, sur quoi faut-il se baser pour retrouver le nombre de coups tirés, car il me semble que dans les écoles il y aussi l'emploi d'obus d'entrainement, lestés au sable ?
Bien cordialement,
Régis R
Pour tenter de répondre à cette question, je me base sur un total de 960 batteries au 2 août 1914 (cf. "Historique et organisation de l'artillerie", capitaine Leroy, 1922, page 5) ce qui donne, pour les obus ordinaires, 360 000 projectiles, et pour les obus à balles, 120 000.Je vous propose un petit exercice pratique, connaissant le nombre de batteries actives et de renforcement de l'artillerie de campagne en 1910 (même nombre en 1914), quelles sont les quantités d'obus de 75 allouées pour les tirs d'instruction en 1910 ?
S'agit-il de la dotation annuelle ?
Ces obus ordinaires vont se retrouver employés dans la bataille au moment des pénuries, comme le mentionne par exemple le JMO du Parc d'artillerie du 3e CA :
- au 28 octobre 1914, livraison aux batteries de 828 obus ordinaires de 75,
- au 17 novembre 1914, réception de 4 000 de ces obus.
Pour l'usure des tubes après une moyenne de 6000 coups, sur quoi faut-il se baser pour retrouver le nombre de coups tirés, car il me semble que dans les écoles il y aussi l'emploi d'obus d'entrainement, lestés au sable ?
Bien cordialement,
Régis R
Re: L'entraînement à la guerre de l'artillerie avant 1914
Bonsoir,
Pour répondre aux questions posées, le plus simple est de publier les 4 tableaux ci-dessous qui récapitulent le nombre des batteries de 75 en temps de paix et après mobilisation.
Ils sont tirés des AFGG, tome 1, appendices (édition de 1936); volume cité en lien, en page 1 de la rubrique "Livres et revues", page 1 du sujet d'Arnaud Carobbi (bien lire l'édition 1936 beaucoup plus complète que la 1ère édition).
Un petit rappel:
Les RAC présentent, en 1914, deux types d'organisation:
-les 20 RAC de Corps d'Armée sont organisés à 4 groupes de 3 batteries (total 48 canons).
-les RAC affectés à des Divisions sont organisés à 3 groupes de 3 batteries (total 36 canons).
Les tableaux du tome 1 des AFGG:
-Batteries actives du temps de paix:
-Nombre de canons de 75 en août 1914 et munitions existantes:
-Batteries existantes à l'issue de la mobilisation:
Je rappelle que les quantités de munitions allouées en 1910 concernent les munitions à consommer pendant les écoles à feu et exercices de l'année en cours. Le chiffre est très considérable et représente environ 10% des quantités du stock de guerre composé exclusivement d'obus à balles et d'obus explosifs ce qui témoigne d'un effort d'instruction exceptionnel. Il est bien dommage que les autres composantes de l'armée n'aient pas bénéficié d'un effort comparable, notamment pour l'infanterie.
Cordialement,
Guy François.
Pour répondre aux questions posées, le plus simple est de publier les 4 tableaux ci-dessous qui récapitulent le nombre des batteries de 75 en temps de paix et après mobilisation.
Ils sont tirés des AFGG, tome 1, appendices (édition de 1936); volume cité en lien, en page 1 de la rubrique "Livres et revues", page 1 du sujet d'Arnaud Carobbi (bien lire l'édition 1936 beaucoup plus complète que la 1ère édition).
Un petit rappel:
Les RAC présentent, en 1914, deux types d'organisation:
-les 20 RAC de Corps d'Armée sont organisés à 4 groupes de 3 batteries (total 48 canons).
-les RAC affectés à des Divisions sont organisés à 3 groupes de 3 batteries (total 36 canons).
Les tableaux du tome 1 des AFGG:
-Batteries actives du temps de paix:
-Nombre de canons de 75 en août 1914 et munitions existantes:
-Batteries existantes à l'issue de la mobilisation:
Je rappelle que les quantités de munitions allouées en 1910 concernent les munitions à consommer pendant les écoles à feu et exercices de l'année en cours. Le chiffre est très considérable et représente environ 10% des quantités du stock de guerre composé exclusivement d'obus à balles et d'obus explosifs ce qui témoigne d'un effort d'instruction exceptionnel. Il est bien dommage que les autres composantes de l'armée n'aient pas bénéficié d'un effort comparable, notamment pour l'infanterie.
Cordialement,
Guy François.
- Diable Noir
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- Inscription : dim. janv. 14, 2024 10:37 am
Re: L'entraînement à la guerre de l'artillerie avant 1914
bonjour à tous,
je prends note de toutes ces précisions pour mon travail sur le 61éme R.A.C
et je me replonge souvent dans votre ouvrage Mr Guy François "Le canon de 75 modèle 1897 en ma possession.
une photo prise lors de ma visite à Verdun d'un 75 modèle 1897 qui a été restauré
cordialement
Diable Noir
je prends note de toutes ces précisions pour mon travail sur le 61éme R.A.C
et je me replonge souvent dans votre ouvrage Mr Guy François "Le canon de 75 modèle 1897 en ma possession.
une photo prise lors de ma visite à Verdun d'un 75 modèle 1897 qui a été restauré
cordialement
Diable Noir
- Pièces jointes
-
- canon de 75 à VERDUN.jpg (642.67 Kio) Consulté 4287 fois
La devise du 61éme R.A.C! " 61 en Avant !
Re: L'entraînement à la guerre de l'artillerie avant 1914
Bonjour,
Ces précisions permettent d'affiner le décompte :
644 batteries d'active
- obus ordinaires : dotation annuelle de 375 obus = 241 500
- obus à balles : dotation annuelle de 125 obus = 83 000
226 batteries de renforcement
- obus ordinaires : dotation annuelle de 85 obus = 19 210
- obus à balles : dotation annuelle de 65 obus = 14 690
Cela donne une consommation annuelle de 358 400 projectiles, ce n'est pas rien !
Ajout : Le rapport sénatorial du budget du ministère de la Guerre de 1911 cite une étude comparative sur les prix des établissements de l'Artillerie et de l'industrie privée sur la production de douilles de 75 : "la fabrication de 100.000 douilles ne dépassera pas les besoins annuels, puisqu'elle correspond aux consommations des tirs d'exercice" (page 239). Cette étude du contrôleur Mercier date d'avant 1911.
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k ... rk=64378;0
Concernant l'infanterie, la crise de 1905 a provoqué également une prise de conscience de l'insuffisance des stocks et conduit à des commandes complémentaires auprès de l'industrie privée (la SFM) en 1906 - 1907 ; ces cartouches marquées IE D en lieu d'ART D, que l'on retrouve parfois sur le champ de bataille, il ne semble pas qu'il y ait eu de crise d'approvisionnement en 1914, comme pour les obus.
Bien cordialement,
Régis R.
Ces précisions permettent d'affiner le décompte :
644 batteries d'active
- obus ordinaires : dotation annuelle de 375 obus = 241 500
- obus à balles : dotation annuelle de 125 obus = 83 000
226 batteries de renforcement
- obus ordinaires : dotation annuelle de 85 obus = 19 210
- obus à balles : dotation annuelle de 65 obus = 14 690
Cela donne une consommation annuelle de 358 400 projectiles, ce n'est pas rien !
Ajout : Le rapport sénatorial du budget du ministère de la Guerre de 1911 cite une étude comparative sur les prix des établissements de l'Artillerie et de l'industrie privée sur la production de douilles de 75 : "la fabrication de 100.000 douilles ne dépassera pas les besoins annuels, puisqu'elle correspond aux consommations des tirs d'exercice" (page 239). Cette étude du contrôleur Mercier date d'avant 1911.
https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k ... rk=64378;0
Concernant l'infanterie, la crise de 1905 a provoqué également une prise de conscience de l'insuffisance des stocks et conduit à des commandes complémentaires auprès de l'industrie privée (la SFM) en 1906 - 1907 ; ces cartouches marquées IE D en lieu d'ART D, que l'on retrouve parfois sur le champ de bataille, il ne semble pas qu'il y ait eu de crise d'approvisionnement en 1914, comme pour les obus.
Bien cordialement,
Régis R.
-
- Messages : 3331
- Inscription : dim. oct. 24, 2004 2:00 am
Re: L'entraînement à la guerre de l'artillerie avant 1914
Bonjour à Tous,
Ce nouveau quiz de Guy François semble stationnaire, à moins que les réponses ne soient dans les tableaux publiés dans l’AFGG?
Cordialement BB
Ce nouveau quiz de Guy François semble stationnaire, à moins que les réponses ne soient dans les tableaux publiés dans l’AFGG?
Cordialement BB
- Août 1914 dans le département des Ardennes : du début août avec l'arrivée et le passage des troupes se concentrant en se dirigeant vers la Belgique, au repli de fin août vers la Marne en résistant sur la Semoy, La Chiers, la Meuse, l'Aisne, la Retourne.