Bonjour à tous,
Voici quelques compléments concernant le naufrage de France III.
Conclusions de la commission d’enquête
La perte de France ne résulte ni d’un évènement de mer, ni d’une décision malheureuse du capitaine ou d’un fait quelconque de l’équipage. Malgré la bonne volonté et le sang froid de chacun, il n’a pas été possible d’éviter une attaque favorisée par les circonstances atmosphériques. Aucune responsabilité n’est engagée à la suite de la disparition de ce vapeur.
Complément au rapport du capitaine
Après l’abandon du navire, le sous-marin ennemi s’est dirigé vers nous. Son commandant m’a interpellé en anglais, puis en français, et m’a intimé l’ordre d’accoster près de son bord. Il m’a demandé port de départ, nature des opérations commerciales et dates des escales. J’ai répondu évasivement que nous venions des Dardanelles sur lest, sans relater de façon précise notre date de départ. Il m’a ordonné de lui remettre les papiers du bord que je possédais :
- Acte de francisation,
- Congé de douane
- Rôle d’équipage
- Liste des passagers
- Rapport de mer commercial
Le sous-marin était d’un grand modèle, 70 à 80 m, avec franc-bord élevé. Avant muni de pavois évasés vers l’extérieur. Deux canons d’environ 70 mm sur socle, formant tourelle et pouvant disparaître dans un puits au moment de la plongée. Projectiles puisés dans une soute voisine en forme de tube avec capot étanche de fermeture. Kiosque à deux étages avec deux périscopes.
Le pont était occupé par de nombreux hommes occupés à ramasser les douilles en cuivre des cartouches et à disposer de nouvelles munitions.
Le commandant était en bras de chemise, tête nue et sans insignes, sur une plate-forme surélevée formant passerelle. Il ne quittait pas des yeux l’horizon sur lequel il braquait ses jumelles. Près de lui, un opérateur faisait fonctionner un appareil cinématographique. Il a du enregistrer les phases de l’attaque, l’abandon du navire et est resté dirigé sur l’embarcation et sur moi pendant tous les pourparlers.
Le sous-marin s’est ensuite éloigné à toute vitesse vers le SE.
(Nota : il serait intéressant de savoir si un film existe de l’attaque du paquebot France III

)
Note du Vice consul de France à Cagliari
Je vous informe que je rapatrie ce jour par Civitta Vecchia, Gênes et Nice 10 Officiers, 53 hommes d’équipage et 7 passagers du vapeur France, 4326 tx JB et 3520 tx JN, affecté au ravitaillement du corps expéditionnaire d’Orient, coulé alors qu’il revenait de Moudros sur Marseille. Les départs de Cagliari pour Tunis et pour les ports italiens sont provisoirement suspendus à cause de l’insécurité.
Trois marins grièvement blessés restent en traitement à Cagliari où ils sont l’objet des soins les plus attentifs.
Les 5 embarcations du navire canonné ont été confiées à la garde de la capitainerie du port. Elles sont en parfait état de conservation.
(Nota : la 6e embarcation avait coulé pendant le sauvetage)
Itinéraire de France III avant son naufrage
Quitté Marseille le 20 Septembre 1915 à 18h00
Arrivé à Alger le 22 Septembre à 05h00. Embarqué 2200 tonnes de marchandises et 65 militaires. Appareillé le 27 Septembre à 18h00
Arrivé à Bizerte le 29 Septembre à 07h00. Appareillé à 17h00 après avoir embarqué 97 militaires pour le corps expéditionnaire d’Orient à Moudros.
Le 2 Octobre à 06h30, à 18 milles de Cerigotto, aperçu un sous-marin en surface à 2 milles. Signalé par TSF et manœuvré aussitôt pour lui échapper. Le sous-marin plonge et disparaît. A 09h30, arraisonné par des torpilleurs français et dirigé sur Milo.
Le 3 Octobre à 07h00, à 6 milles au SW de Strati, poursuivi par un sous-marin dont on aperçoit le périscope. Augmenté l’allure. Le sous-marin disparaît après 15 minutes de poursuite. Mouillé à Moudros à 11h00 et procédé aux opérations de débarquement. Appareillé à 17h00 pour Milo afin de procéder aux opérations de sauvetage des passagers et marchandises du YUNNAN, remorqué après torpillage et échoué.
Arrivé à Milo le 10 Octobre à 11h00. Opérations de sauvetage avec l’aide du MARIUS CHAMBON.
Appareillé de Milo le 19 à 16h30 avec 1100 tonnes de marchandises sauvées et 261 marins et soldats. Arrivé à Moudros le 20 au matin et déchargement terminé le 30 Octobre. Le départ de Moudros est fixé le 30 à 17h00 en convoi escorté avec le MEDIE. Mais l’appareillage est annulé suite à la rupture de la boite à clapets automatiques de bâbord arrière.
Appareillé de Moudros le 4 Novembre à 17h00 sans convoyage. Franchi le canal de Cerigotto à 23h15. Passé Gozzo le 6 à 16h15 et Pantellaria à minuit.
Le 7 vient le récit de la rencontre avec U 38 et du naufrage.
Liste des blessés du FRANCE III
BRANDI Jules Soutier Grièvement atteint. Mâchoire inférieure emportée
FERRIOL Marius Soutier Plaie pénétrante sérieuse à la cuisse
BOUNA Sidibé Chauffeur Blessures légères aux jambes et au visage
ROUSSEL Joseph Garçon Blessure à la jambe et à la main droite
NICOLINI Antoine Chauffeur Blessure superficielle dans le dos
ALLEGRINI Pierre Sd maître Eraflures légères dans le dos
AMARENCO Antonin Garçon Eraflures légères à la jambe
Le capitaine Raffaelli signale dans son rapport que l’infirmier Jean Gauthier s’est occupé, à bord et dans le canot, des deux blessés les plus gravement atteint avec le plus grand dévouement.
Récompenses
Citation à l’Ordre de l’Armée et Croix de Guerre avec palmes
RAFFAELLI Antoine Capitaine (voir posts ci-dessus)
Citation à l’Ordre de la Brigade et Croix de Guerre avec étoile d’argent
GAUTHIER Jean Infirmier
Avec beaucoup de sang froid et d’expérience a donné les premiers soins aux blessés, sous le feu de l’ennemi lors de la perte du France III coulé par un sous-marin allemand.
BRANDI Jules Soutier
A continué à faire son devoir malgré une grave blessure (mâchoire inférieure emportée)
Témoignage officiel de satisfaction
COLLET Emile Second mécanicien
BLANC Emmanuel Second capitaine
SUQUET Xavier 1er lieutenant
BERARD Henri Radiotélégraphiste
Pour le dévouement qu’ils ont montré dans l’accomplissement de leur devoir.
Lettre de félicitations
à tout l’équipage de France pour l’esprit de discipline, le courage et le sang froid qui l’ont caractérisé dans cette dangereuse circonstance.
Médaille du sauvetage
SCUDERI Pasquale capitaine du remorqueur armé MARTINO TAMPONI
Cdlt