"Attaques baïonnettes hautes"

ANTONA Antoine
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Re: "Attaques baïonnettes hautes"

Message par ANTONA Antoine »

Bonjour le forum,bonjour Christian, et merci pour la qualité de vos réponses.D'après mes lectures, ce principe d'attaques a été plus fréquent à compter des offensives de Champagne en Septembre 1915 (Massiges notamment).Il correspond également à l'augmentation de la dotation et au perfectionnement des grenades (pour aboutir à la "citron").Cordialement,
Antoine ANTONA.
pierreth1
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Re: "Attaques baïonnettes hautes"

Message par pierreth1 »

Bonsoir,
En fait je suis d'accord sur le principe enonce par antona mais pas en 1914 les armees de cette epoque sont encore des armees du 19 eme siecle au moins dans l'esprit, durant la guerre il y aura une evolution enorme : baisse des effectifs regimentaires et des sections et augmentation consequente du taux d'encadrement,au debut de la guerre une section d'infanterie c'est 60 hommes (presque autant que de nos jours une compagnie!) le taux d'encadrement d'un regiment de 3200 hommes est de 50 officiers et 150 sous officiers pour 3 bataillons a 4 compagnies de 4 sections ce qui fait grossierement 32 officiers chefs de section et 10 sous officiers chefs de section ainsi que 2 a 3 sous officiers par section (on avait dans les annees 80 pour un regiment d'infanterie para de 1000/1200 hommes 50 officiers et 120 sous officiers si nous avions eu le quota de 1914 nous aurions eu 15 officiers et 45 sous officiers cela n'aurait pas ete concevable)
donc une section a un faible taux de cadres ;lors de l'assaut le chef de section est en tete les sergents en "serre file" la tactique de 14 prevoit que les ordres sont donnes par le chef de section il lui est difficile de deleguer car en fait il n'a pas beaucoup de subordonnes pour cela et dans le cas de la marche en tirailleurs il est precise que le chef de section donne l'ordre d'ouvrir le feu,aussi envisager de confier une partie du commandement au chef d'escouade (4 escouades par section) a moins que de repeter cette manoeuvre de nombreuse fois pour qu'il y ait une coordination efficace n'est pas possible le soldat n'a pas ete entraine pour cela
on peut tirer au lebel en se deplacant mais a part faire du bruit il n'y a pas de chance d'efficacite sauf a tres courte distance donc le feu de salve implique un minimum de regroupement avant de tirer ne serait ce que pour eviter de blesser ses camarades tout ceci s'affinera durant le conflit avec l'armement de plus en plus performant des sections grenades, fusil lance grenade, fusil mitrailleur qui rendent le groupe plus efficace et permettent une certaine initiative a ce moment la l'attaque en tirailleur sera privilegiee ce qui n'est pas le cas en 1914
Pour moi si la doctrine stupide et criminelle de l'offensive a outrance a ete pour beaucoup dans nos echecs du debut je pense qu'elle a ete aggravee par des colonels et generaux qui appliquent cette doctrine sans reflechir, (executer servilement un ordre et rendre compte st toujours plus securisant pour le responsable (meme de nos jours) que de faire preuve d'initiative)
les combats se font sans meme savoir ce qu'il y a en face ou est la cavalerie? la lecture du livre du general chambes a ce sujet est edifiante on y assiste au massacre des chevaux par betise ils restent selles au soleil sans boire durant des heures avant meme les combatset l'on sanctionne un officier qui les met a l'ombre! le desastre de rossignol est sur ce point instructif on attaque en foret sans savoir quelle est la valeur de l'enemi et ou il est danbs ces conditions ce n'est pas la charge baionnette au canon qui cause le desastre mais l'incompetence;
de nombreux souvenirs font etat de compagnies qui se perdent avant meme de rejoindre le lieu designe, la lecture des cartes n'est pas le fort de tous les officiers qui en outre sont les seuls a posseder ces cartes, marches et contre marches fatiguent prematurement les soldats, nombre de regiments attaquent sans meme que leur colonel sache quel est le but d'autant que si le regiment est la grande unite de base le bataillon voire la companie sont les unites fonctionnlelles et nombre de souvenirs font etat de bataillons detaches pour supporter une autre unite sans qu'il semble y avoir une idee d'ensemble de la situation et de l'etat des soldats;
les attaques du debut de la guerre sur le front alsacien sont sur ce plan edifiantes : c'est un gigantesque bazard pour parler poliment qui donne l'impression que les etats majors de ce debut de guerre ne sont pas encore operationnels
cordialement
pierre
pierre
garance.
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Re: "Attaques baïonnettes hautes"

Message par garance. »

bonjour pierreth1, tout ce que vous écrivez est (tristement) vrai...

c'est le problème du passage de la théorie à la pratique, et cela se paye avec le sang des hommes; c'est pour cela que j'admire les cadres qui entraînent leur troupe avec ténacité, le slogan ultérieur "la sueur épargne le temps" prenant alors tout son sens !

La génération de 1914 était encore nourrie de furia francese et rares étaient les chefs lucides !

cordialement à tous !
"Il pleuvait en cette nuit de Noël 1914, où les Rois Mages portaient des Minenwerfer."
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Stephan @gosto
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Re: "Attaques baïonnettes hautes"

Message par Stephan @gosto »

Bonjour,

En écho à tout ceci, dans le témoignage d'un sous-lieutenant (*) que je lis actuellement :

Extrait d'une lettre du 25 septembre 1914 :

"Quant aux assauts à la baïonnette, que le règlement faisait revenir comme un refrain au bas de toutes les pages de nos manuels, on en devient de plus en plus avare, et l'on a été payé pour cela."

Autre extrait :

"D'ailleurs, il faut bien avouer qu'il n'y a aucun plaisir à recevoir à 4 ou 5 kilomètres une pluie de projectiles qui viennent on ne sait d'où et auxquels on ne peut pas répondre. Dans les trois batailles auxquelles j'ai assisté, je n'ai pas fait tirer en tout plus de 50 cartouches."

"[...] pour mon compte, je n'ai jamais approché les allemands à moins de 700 à 800 mètres."

"Il n'est pas difficile d'aller à la baïonnette, mais bien plutôt de rester coucher à sa place alors que les obus tombent à quelques mètres autour de vous et parfoi dessus. [...] Les quelques officiers jeunes et bouillants dont l'ardeur était réelle et non pas de mots seulement, ont été descendus au premier combat."


Pour finir, un peu en dehors du sujet, mais bon, j'aime bien... Extrait d'une lettre du 14 août 1914, avant les combats évoqués ci-dessus :

"Malgré tout, je ne me sens pas l'âme belliqueuse. La seule pensée de voir des bras percés, des têtes réduites en bouillie, des jambes coupées, du sang... me fait frémir. J'ai fait aiguiser mon grand sabre [...]. Or, je me demande encore comment je pourrais me décider à enfonder ce coupe-choux dans le ventre d'un homme."

Amicalement,

Stéphan

(*) "Jean Bouvyer (1890-1915)", Librairie de l'Aube Nouvelle, 1923.
ICI > LE 74e R.I.
Actuellement : Le Gardien de la Flamme

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garance.
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Re: "Attaques baïonnettes hautes"

Message par garance. »

bonjour pierreth1, tout ce que vous écrivez est (tristement) vrai...

c'est le problème du passage de la théorie à la pratique, et cela se paye avec le sang des hommes; c'est pour cela que j'admire les cadres qui entraînent leur troupe avec ténacité, le slogan ultérieur "la sueur épargne le temps" prenant alors tout son sens !

La génération de 1914 était encore nourrie de furia francese et rares étaient les chefs lucides !

cordialement à tous !
erreur : vous aurez rectifié de vous-même : "la sueur épargne le sang

merci
"Il pleuvait en cette nuit de Noël 1914, où les Rois Mages portaient des Minenwerfer."
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