Questions sur les abris souterrains

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pouldhu
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Re: Questions sur les abris souterrains

Message par pouldhu »

Bonjour à tous, je me pose une question sur les abris souterrains de tranchée, pas ceux, précaires, fait par les combattants mais sur les gros et profonds abris réalisés par le Génie.
L'abri est-il construit sous le parapet ou sous le parados ?
Je penche pour le parapet car l'entrée à l'angle du sol de la tranchée et du parapet est moins exposée au tir d'artillerie, par contre une entrée au pied du parados risquait de recevoir en directe les minenferwers.
Cette position est un bon moyen de savoir si, au moins à l'origine, une tranchée est allemande ou française.
Cordialement,
Gilles.
PS, je pense à une autre question sur le sujet :
Le Génie a-t-il improvisé la conception des abris souterrains du fait d'une guerre de position pas vraiment prévue, ou bien dans les manuels, les écoles, y avait-il des cours sur le sujet ?
Ex : la conception des abris cavernes est-elle né pendant la guerre et de la guerre ou bien d'avant ?
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le begue
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Re: Questions sur les abris souterrains

Message par le begue »

Bonjour à tous,
Bonjour Gilles,
A grands traits, il existait, bien avant la guerre (et hier encore...) deux types de fortifications :
- LA fortification au sens noble du terme avec remparts, chicanes et barbacanes ...
- la fortification dite de campagne.

Suivant les délais, la mission de l'infanterie etc, on dessinait les tranchées, les postes de tirs, et si on avait le temps, des abris 2 à 6 hommes.
Ces abris étaient surtout destinés aux sentinelles, voire à la garde.
Pour ce qui est de la tranchée, pas de problème, c'est du conventionnel.
Pour les postes de tir... Il faut comprendre par là un ligne permettant de prendre en compte un secteur de tir. Suivant les particularités du terrain, la ligne permettait à une escouade, une section et plus rarement, un peloton, de prendre place. Les tireurs pouvait soit tirer couchés (installation sommaire), soit à genoux, voire debout, pour réaliser ce qui est appelé aujourd'hui une ligne d'arrêt.
Dans ces deux derniers cas, des abris 2, 4 ou 6 hommes pouvaient être aménagés. Destinés au repos, il y avait assez d'espace pour s'allonger et assez profond pour superposer 2 ou 3 couchettes. La protection était sommaire. On installait en alternance une couche de rondins, une couche de terre. Au mieux, 3 couches.

Dans le cas de la Grande Guerre, il faut bien comprendre qu'elle débute "normalement". On marche à l'ennemie, on le fixe et on le détruit (si possible). Il en sera ainsi jusqu'à la première bataille de la Marne. De fin septembre 1914 à fin octobre 14, les mouvements sont encore possible sur une partie du front, en Picardie. Cette phase est injustement nommée course à la mer.
Début novembre 14, l'Etat-major est contraint d'admettre, après les dernières et infructueuses offensives, que l'hiver se passera sur les positions acquises et qu'il faudra attendre le mois de mars, voire avril 1915, pour reprendre une guerre plus conventionnelle.
Pendant ce semestre, la fortification de campagne bat son plein.
Fin 1915, bis répétitas à l'entrée de l'hiver.
La guerre d'usure commence. La fortification se substitue, peu à peu, à la fortification de campagne. Encore que...
Aux "points", si vous me passez cette expression, les Allemands ont de l'avance. Partis des frontières de 1871, ils ont conquis beaucoup de terrain, et faute d'aller jusqu'à Paris, ils entendent bien le conserver. De leur côté, les bétonnières tournent.
Côté français, c'est mal engagé. Couler du béton reviendrait à admettre qu'il faut se satisfaire de ce statu quo, avec toutes les incidences que cela implique. C'est seulement en 1917 que le béton va commencer à couler côté français.
Ajoutez à cela une évolution de l'armement avec l'apparition de l'artillerie de tranchée et la généralisation des mitrailleuses.

Pour conclure, le savoir faire existait avant la guerre, pas forcement là ou on l'attendait. Les évènements, l'armement et la stratégie on permis à ces savoirs faire de glisser lentement des fortifications de l'arrière vers les premières lignes.

Peut-être, à la lecture de ces lignes, voudrez-vous modifier votre question ou en poser de nouvelles. J'y répondrais avec plaisir.

Je vous souhaite une bonne journée,
Très cordialement,
Louis.

PS : Je ne peux vous joindre de croquis ou de photos, ma documentation est enterrée au fond de la grange...
Si d'autres intervenants en ont, merci de contribuer.

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pouldhu
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Re: Questions sur les abris souterrains

Message par pouldhu »

Bonjour à tous, merci Louis de votre réponse de spécialiste qui confirme ce que je pensais. A partir du savoir du Génie d'avant guerre a été développé un nouveau type de fortification, les fortifications enterrées de campagne.
Fortification qui ont du être adaptées à l'évolution de l'artillerie part l'emploi du béton et/ou du terrain pour résister aux plus gros obus ou aux nouveaux projectiles.
L'Aisne, entre autre le Chemin Des dames, est un cas intéressant car la topographie et la nature de la roche (calcaire plus ou moins tendre) a permis aux sapeurs français et allemands de pousser très loin l'art de la fortification souterraine. Ici pas ou peu de béton sauf pour la ligne Hindenbourg mais une formidable utilisation des pentes pour percer les plateaux et créer de vastes abris et tunnels. de plus surtout du coté allemand la présence de carrières souterraines (les creutes) a été mise à profit pour la fortification du secteur.
Ce qui me passionne dans l'évolution de la connaissance et de la technique c'est le passage de "artisanat" à "l'industriel", le moment où ces abris ont été standardisés, où ils ont été nommés et identifiés.
Exemple : à quel moment de la guerre un abri à deux entrées de 80cm (la largeur d'un homme) parallèles accédant à un couloir (la chambre) est devenu un standard nommé "Abri caverne" ?
Reste à savoir si on le creuse dans le parapet ou le parados !
comme votre doc est enterrée au fond de la grange, sans doute un défaut de sapeur :lol: :lol: :lol: voici quelque exemples d'abris souterrain.

Abri pour demie-section de type Caverne
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Topo sur sa construction
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Autre type d'abri caverne
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Abri pour PC de division
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Cordialement,
Gilles
Cyril Cary
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Re: Questions sur les abris souterrains

Message par Cyril Cary »

Bonjour
Au mieux, 3 couches.
C'est seulement en 1917 que le béton va commencer à couler côté français.
Je ne suis pas tout à fait d'accord.
Les toits de casemates sont beaucoup plus élaborés. Il y a des couches, c'est vrai, des rondins, des pierres, de la terre, mais au minimum deux couches de chaque et souvent entrecroisées. En plus il peut y avoir une couche constituée de plaque de béton éclateur. Ce sont des plaques de béton d'environ 60x60 cm liées entre elles par du fil de fer.
Mais nous parlons là des casemates ou des blockhaus construit à fouille ouverte mais non souterrains.

Les Allemands comme les Français n'ont que rarement bétonné les abris souterrains ou sappes (souvent que l'entrée) qui eux sont constitués d'étançonnage en bois recouvert de tôles ou de papier goudronné.

Dans certains manuels réglementaires comme "l'occupation du terrain par l'artillerie", "vadae mecum de l'officier du génie" ou encore "le manuel du gradé de l'infanterie", la distinction est bien marquée entre ces deux constructions.
Je ferai des scans ce week end de ces documents.

Par contre le béton français qui est, certe, assez rare sur le front, hors fortification, il commence à couler en 1914. De nombreux vestiges sur le front de Verdun le prouve. La période la plus "productive" sera 1915. En effet, lorsque deux armées sont statiques, l'établissement de blockhaus en béton sur la première, seconde ou même troisième ligne est malaisé. Un simple bombardement et tout est détruit. Les blockhaus ont toujours été construits sur des secteurs calmes, loin de la première ligne, sur une ligne de repli bien protéger.

Cordialement
Cyril
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pouldhu
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Re: Questions sur les abris souterrains

Message par pouldhu »

Bonjour Cyril, vos propos au sujet des couches est très bien illustré par le plan de l'abri de division ci-dessus. quand je parle d'abri souterrain, je ne parle pas d'abris type métro légèrement enfouis sous une couche de terre et de pierres mais d'ouvrages imposants constitués de galeries et chambres à au mois une dizaine de mètres sous terre.
Cordialement,
Gilles.
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le begue
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Re: Questions sur les abris souterrains

Message par le begue »

Bonsoir à tous,
Bonsoir Gilles, bonsoir Cyril,

Pour Cyril,
Je suis bien évidement de votre avis. Cependant, je prends grand soin, lorsque je donne une explication, de rester très généraliste, sachant pertinemment qu'à tel ou tel endroit du front, existe le contre exemple. Quand je dis "côté allemand, le béton coule", je ne suis pas innocent. Le différentiel allemand/français est flagrant. Il n'est que de comparer le cubage par km de front et de le mettre en parallèle avec le rapport Kw/Km. Y a pas photo ! Côté allemand, ca blinde ! Côté français, c'est plutôt léger !!!
Idem pour le nombre de couche pour les abris. Du béton fin 1914...on a à faire à des "Pépères" qui peaufinent....pour le moins !

Pour Gilles,
Le passage de l'artisanat à l'industriel relève de ce que l'on nomme aujourd'hui le retour d'expérience. Vous noterez au passage dans l'extrait de JMO les termes de galeries et coffres qui viennent directement de la mine.
La encore, je reste prudent. Il existe des compagnies de divisons, de corps d'armée et des territoriales. Toutes n'ont pas le même taux de rotation. Il en résulte que telle Cie de CA reste en secteur et aménage, à sa façon, ses abris. Les Cies divisionnaires adaptent aux us et coutumes de la Division soutenue. Vient la relève et le cycle repart. Il convient de ne pas écrire une règle à partir d'un cas, fut-il concret. Pour le reste, votre analyse est juste.

Je vous souhaite une bonne soirée.
Cordialement,
Louis.
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