Sergent pionnier

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Ar Brav
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Re: Sergent pionnier

Message par Ar Brav »

Bonjour à tous,
Un petit topo sur le Génie, pour y voir plus clair.
(source O.Douge du 6ème RG que je remercie chaleureusement)

1/ORGANISATION

a) A la veille de la guerre, le génie comporte :
En métropole
Vingt et un bataillons de corps d’armée portant le numéro du corps d’armée d’affectation.
Six bataillons de plates-formes ou de défense des Alpes
Trois bataillons de chemins de fer
Quatre bataillons de télégraphistes ;

Au total trente-quatre bataillons, dont trente-deux regroupés en onze régiments et deux bataillons autonomes ( 7ème bataillon formant corps Besançon, 28ème bataillon Belfort).

En Afrique du nord, deux autres bataillons autonomes : 19ème bataillon Hussein-Dey, 29ème bataillon Tunisie.

b) A la mobilisation, les bataillons de corps d’armée éclatent pour donner naissance :

1/ au profit de chaque division d’active, à une compagnie de sapeurs-mineurs.
2/ au profit du corps d’armée, à deux compagnies de sapeurs-mineurs, dont une créée à la mobilisation , à une compagnie d’équipage de pont et à une compagnie de parc.
3/ au profit de la division de réserve mise sur pied sur le territoire du corps d’armée, à une compagnie de sapeurs-mineurs, une compagnie d’équipage de pont et une compagnie de parc, toutes trois de nouvelle création.

Ces diverses compagnies sont désignées par un numéro fractionnaire dont le numérateur est le numéro du bataillon d’origine (celui du corps d’armée) et le dénominateur celui de l’unité intéressé.

Les dénominateurs : 1 et 2 sont réservés aux sapeurs-mineurs des divisions d’active, 3 et 4 à ceux des corps d’armée, 13 à ceux de la division de réserve : 16 aux compagnies de parc d’active et 24 aux compagnies de parc de réserve. C’est ainsi que l’on trouve :

- à la 15ème DI la compagnie 8/1 (sapeurs-mineurs)
-
- à la 16ème DI la compagnie 8/2 (sapeurs-mineurs)
- à l’échelon corps d’armée : les compagnies 8/3 et 8/4 (sapeurs-mineurs), 8/16 (équipage de pont d’active), 8/21 (compagnie de parc).
- A la 58ème DI, les compagnies 8/13 (sapeurs-mineurs), 8/19 (équipage de pont), 8/24 (compagnie de parc).

c) De 1915 à 1918, les effectifs du génie s’accroissent par la création de nouveaux corps d’armée, de nouvelles divisions et le dédoublement des compagnies divisionnaires de sapeurs-mineurs ; les compagnies dédoublées prennent le numéro de leur compagnie mère avec la mention bis, puis en 1916 ce même numéro majoré de 50, et sans mention bis.

c) A la fin de la guerre, le génie est organisé comme suit :

1) à la division

un commandant du génie divisionnaire,
deux compagnies de sapeurs-mineurs,
une compagnie de parc,
une section de projecteurs de campagne,
un détachement de télégraphistes.

2) au corps d’armée

un commandant du génie,
deux compagnies de sapeurs-mineurs
une compagnie d’équipage de pont,
une compagnie de télégraphistes.

3) à l’armée

le général commandant le génie et son état-major,
un directeur du service du génie,
sapeurs-mineurs, sapeurs-pontonniers, équipages de pont, compagnie d’électriciens, compagnies de sapeurs-télégraphistes, détachements radio (deux), sections de projecteurs de campagne,
un parc du génie.


2/ EMPLOI

La guerre de stabilisation multiplie les missions du génie en tant qu’arme et service :

- dans les grandes unités de l’avant, le génie, en tant qu’arme, dirige et exécute avec les autres armes l’équipement du champ de bataille (position, abris, observatoires) ; il prépare et met en œuvre les destructions, mène la guerre des mines ; après la reprise du mouvement en avant, il participe au rétablissement des communications.

- à tous les échelons du commandement, et en particulier au niveau de l’armée et de la direction de l’arrière, le génie :

- entretient et rétablit les voies de communications (routes et ponts), prépare et met en œuvre les destructions,

- met en œuvre les moyens de transmissions des grandes unités. Ravitaille les unités de toutes armes en matériels du génie (outillage et matériaux),

- équipe le champ de bataille en eau et électricité,

- assume la construction, l’entretien et la gestion des cantonnements de l’arrière,

Cinq services du génie de l’armée se sont particulièrement développés :

1) le service routier, dont l’importance croit avec le développement considérable du service automobile et dont le rôle a été primordial pendant la bataille de Verdun pour l’entretien de la « voie sacrée » (support d’un trafic journalier de cinq à six mille voitures).

2) Le service des eaux, dirigé par des techniciens qualifiés, réalise une œuvre peu connue et considérable pour assurer l’approvisionnement des troupes en eau potable. En Champagne dès 1915, sur la Somme en 1916, dans les régions ou l’eau est rare et profonde, il faut installer de très nombreuses pompes à moteur ou à bras.

3) Le service forestier : l’instruction du 16 septembre 1916 prescrit, pour une meilleure sauvegarde du domaine forestier, la création dans chaque armée d’un certain nombre de « secteur forestier » ; les chefs de secteurs, en cas de déplacement de l’armée, resteront sur place.

4) Le service électrique : un officier de l’état-major du général commandant le génie de l’armée dirige les travaux et dispose d’une compagnie d’électriciens, afin de distribuer la lumière électrique qui, seule, ne vicie pas l’atmosphère dans les grands abris.

5) Le service des camps et cantonnements : un « major supérieur des camps et cantonnements », du grade de général de brigade, dirige l’ensemble du service. Le territoire est réparti en un certain nombre de zones ayant chacune à leur tête un « major de zone » et chaque groupe de cantonnements possède un « major de cantonnement », flanquées par le service du génie, et le casernier gère un petit magasin pourvu de paillasses supplémentaires, moyens d’éclairage, outils.

A la mémoire des soldats du génie confinés dans des tâches ingrates et que l'histoire a parfois tendance à oublier, et en particulier au soldat Eugène Decriem, du 6ème Génie, tombé à la Cote du Poivre le 30 mai 1916.

Cordialement,
Franck






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Ar Brav
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Re: Sergent pionnier

Message par Ar Brav »

Re,
Petit complément d'informations :

Après les premiers mois de guerre, dès que le front va se stabiliser, le commandement constatant l’insuffisance du Génie divisionnaire, va donner au Génie des auxiliaires d’infanterie pour construire les réseaux de tranchées, puis il va augmenter le nombre de sapeurs.

Dès janvier 1915 sont créés les compagnies « bis ». Pour cela, on prélève sur le corps du Génie, un certain noyau technique de sapeurs, soit : 1 officier, 1 adjudant et une trentaine de sapeurs, on y amalgame 150 fantassins prélevés sur 8 régiments différents. Grâce à l’énergie des commandants de compagnies, il ne faudra que quelques mois pour rendre les nouvelles unités aptes aux travaux de terrassement et de mines.

Un exemple : c’est ainsi que, pour le 6ème RG, la compagnie 9/51 est créée le 1er octobre 1915, à partir de sapeurs de la 9/1 et de fantassins, elle sera la deuxième compagnie de la 17ème et son histoire sera identique à celle de la 9/1.
La 10/51 est créée le 21 octobre 1915 à partir de la 10/1 et de pionniers des régiments d’infanterie, la 10/52 à parti de la 10/2, la 10/63 à partir de la 10/13.

Les pertes au 6ème RG : 85 officiers, 234 sous officiers et 2876 sapeurs morts pour la France.

Merci Bernard pour le tuyau, je vais voir çà de plus près.
Amicalement,
Franck
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Stephan @gosto
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Re: Sergent pionnier

Message par Stephan @gosto »

Bonjour,

Juste en passant, histoire de rendre à César... et de bien référencer nos sources, ce texte, tout au moins la première partie, est une transcription fidèle de celui qui se trouve dans "Inventaire sommaire des archives de la guerre. Série N 1872-1919" régigé par le colonel P. Guinard, J.-C. Devos et J. Nicot (Impr. de la Renaissance, 1975) aux pages 169-171.

Amicalement, et merci de l'avoir retranscrit ici ;)

Stéphan

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Ar Brav
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Re: Sergent pionnier

Message par Ar Brav »

Bonjour Stephan,
Merci pour ces précisions que j'ignorais.
Indépendamment de M. Douge, déjà cité,
Le texte complet dont les extraits ci dessus sont tirés, a été élaboré à partir des ouvrages suivants :
- Historique des compagnies du 6ème Génie ( 1920 ) écrit à partir des journaux de marche et des opérations des compagnies.
- Cours commun d’histoire militaire des Ecoles de Coëtquidan.
- La grande guerre vécue, racontée et illustré par les combattants
- ( tome I et II) Ed Quillet
- Histoire générale des peuples (Ed Lib Larousse 1926)
- Album de la Grande Guerre de l’Illustration
- La bataille de VERDUN Maréchal Pétain
- Mémoire Tome I et II Général JOFFRE
- Mémoire Tome I et II Maréchal FOCH
- Le Génie Edition GR 1960
- La guerre au jour le jour Lt Colonel ROUSSELET
- VERDUN Jacques Henri LEFEVRE Ed du Mémorial
- Revue du Génie militaire Tome LIV janvier- juin 1924
- La guerre du droit E HINZELIN lib Quillet 1916
- La collection complète de toutes les revues « L’ILLUSTRATION » 1914-1919

Le texte de l’ouvrage a été enrichi par les témoignages de deux anciens sapeurs du 6ème Régiment du Génie qui ont effectué toute la guerre dans les rangs du régiment, monsieur Renaud, ancien de la compagnie 9/2 et monsieur Cavignaud.

Amicalement,
Franck
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Ar Brav
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Re: Sergent pionnier

Message par Ar Brav »

Re,
Un oubli impardonnable de ma part :
Un grand merci à M. Bruno DECRIEM, qui m'a beaucoup aidé dans mes recherches, arrière petit fils d'Eugène DECRIEM, tombé au champ d'honneur il y aura 90 ans mardi 30 mai prochain. Son frère Charles sera tué le 11 août 1917 à Moronvilliers, soldat au 330ème RI.
Qu'ils reposent en paix.
Très amicalement,
Franck
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Charraud Jerome
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Re: Sergent pionnier

Message par Charraud Jerome »

Bonsoir

68e RI??? J'arrive un peu avec du retard, mais j'arrive quand même.

Au sein de SHR, des pionniers d'infanterie avaient en charge les petits travaux de génie du régiment. Pour des travaux plus amples, ils pouvaient alors être associés à leurs collègues du Génie.
Voici deux pionniers du 68e RI en 1911 (merci Joel Guyonneau)

Image

A noter les deux haches croisées symboles des pionniers

Sources photos: http://perso.wanadoo.fr/liddes.genealog ... eri008.jpg

Gérard, à quelle lecture faites vous allusion?

Cordialement
Jérôme Charraud
Les 68, 90, 268 et 290e RI dans la GG
Les soldats de l'Indre tombés pendant la GG
"" Avançons, gais lurons, garnements, de notre vieux régiment."
Image
Gerard GEHIN
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Re: Sergent pionnier

Message par Gerard GEHIN »

Bonsoir à tous,
Bonsoir Jérôme
Bonsoir Stephan,

Effectivement moi aussi j'ai oublié de citer ma source
"Institution de la MALGRANGE (Nancy)
Livre d'Or de la Grande Guerre
Professeurs et anciens élèves morts pour la France"

Si Jérôme est interessé je peux lui fournir une copie des 2 pages ainsi que la photo.

Ce livre comporte 352 notices biographiques sommaires.
Bonne soirée
Bien cordialement
Gérard GEHIN
jolivet
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Re: Sergent pionnier

Message par jolivet »

Bonjour,

A propos de l'éparpillement des unités du Génie ( Ar Brav discussions du 26/05/2006)

J'ai retrouvé la description d'un assaut dans la correspondance ( 22 février 1915), d'un médecin auxiliaire du 58ième RI (Cf Paroles de Poilus lettres et carnets du front 1914/1918, n°245 collection Librio )

" Chaque groupe est ainsi constitué: un lieutenant, derrière lui, six sapeurs du génie sans fusils, armés de boucliers d'une main, d'énormes cisailles de l'autres (pour couper les fils de fer). Derrière eux toutes la section, et fermant la marche, six sapeurs portant des pelles et des pioches, pour travailler sitôt arrivés dans la tranchée boche à la défense de celle-ci."

Merci pour ce forum que je parcoure avec beaucoup d'intérêt.

Jolivet
jolivet
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Jean RIOTTE
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Re: Sergent pionnier

Message par Jean RIOTTE »

Bonjour Jolivet,
Merci pour ces précisions... et bienvenue sur notre Forum.
Cordialement.
Jean RIOTTE.
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le begue
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Re: Sergent pionnier

Message par le begue »

Bonjour à tous,

Je vois le sujet remonter à la surface et toute une série de précisions que je vais tenter d'affiner.
Pour faire rapide, le Sapeur qui est du Génie dessine la tranchée, le pionnier qui est fantassin (parfois un cavalier) la creuse.
Par la suite ( à partir des années 1929-1930), on verra la création des régiments de pionniers, un "quelque chose" entre un régiment de territoriaux et de cantonniers.

Pour la partie qui nous préoccupe, le pionnier existe alors que le Sapeur et le Mineur servent encore au Royal Bombardier (1750)... et que le Corps du Génie est exclusivement formé d'ingénieurs ayant rang d'officier.
En 1914, comme tout le monde, le Génie accuse le coup et certaines compagnies vont perdre 75% de leur effectif entre août et septembre 1914. Dès la fin novembre (après les attaques infructueuses d'Ypres et de la Lys), il devient urgent de combler les vides.
C'est à cette date que l'armée des Alpes, assez peu sollicitée fournit ses artilleurs au Génie.
Dans un second temps, on prélève sur le reste de l'Armée tous ceux qui, dans un premier temps, n'avaient pas rejoint le Génie. Au début, l'Infanterie pense que ses gens partent en stage et lui reviendront. Il n'en fût rien, bien évidement. En même temps, on constate un sous-effectif criant concernant le Génie et que le pourcentage prévu en temps de paix est largement sous évalué. C'est ainsi que les compagnies du Génie prévues initialement pour être des compagnies de forteresse passent aux Divisions. Les Territoriales en font autant. Ceci explique la présence de Cies X/x T à l'ordre de bataille des DI. Malgré ces ajustements, les effectifs ne sont pas atteints. Les Pionniers sont prélevés en priorité, bientôt renforcés des "stagiaires" et des mutés d'office.
Enfin, si chacun annonce la constitution d'un CA en 1914, en chiffre cela donne 1000 sapeurs pour 30 000 fantassins soit 1 pour 30 soit une escouade pour un bataillon. Même avec des gros bras, il fallait bien de l'aide...

Concernant la citation initiale faisant référence au XVI° CA Allemand, il est commandé par un chef remarquable, le Gal Von MUDRA. C'est un Pionnier (pour les plus jeunes, le Sapeur français appelle "Pionnier" le sapeur allemand par commodité de lecture et d'écriture). Il a sous ses ordres les Pionniers de Metz dont la spécialité est la guerre de siège. La suite, chacun la devine et la connaît.

Entre nous, Von MUDRA est également un stratège de bon niveau et c'est sans aucun à lui qu'on doit le choix de Verdun pour les offensives de 1916. Rien ne relève du hasard.

J'ai essayé de faire court, mais je répondrais à toutes les questions que vous jugerez opportun de me soumette.

Je vous souhaite une bonne journée.
Cordialement.
Louis Le Begue.
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