Bonsoir,
Oui, "la question reste entière" car il est un peu trop simple d'accuser
uniquement les militaires de "naïveté et d'aveuglement collectif".
Il faut d'abord examiner l'attitude des gouvernants, toujours prompts à refuser avant 1914, et singulièrement de 1900 à 1910, les crédits d'investissement "lourds" pour l'achat de matériels coûteux comme l'artillerie, la nouvelle tenue de campagne, le fusil "automatique", etc...Je vous invite à lire les péripéties de l'adoption de la plaquette Malandrin dans un sujet de cette rubrique où la magie du verbe de serviles courtisans permet d'épargner au pays la dépense de 85 millions de francs prévus pour l'achat des obusiers légers qui feront défaut pendant toute la guerre à notre Armée (un exemple qui n'est malheureusement pas unique lors de cette période).
Chaque grande manoeuvre se terminait devant les ministres et parlementaires par une "charge" de plusieurs milliers d'hommes criant de préférence "Vive la République" pour convaincre (?) les élus de la fidélité de l'Armée aux Institutions.
Dans le même temps, les chefs de section de mitrailleuses étaient priés de se faire discrets pour ne pas troubler la sérénité de ces scènes qu'auraient pu peindre un Detaille ou un Alphonse de Neuville.Dans le même esprit, les artilleurs étaient eux-aussi priés à la discrétion et le général Maurin, futur "grand-maître" de l'artillerie française en 1918, se plaisait à raconter "ses" manoeuvres de 1912 où il lui fut violemment reproché de "tirer" à la distance jugée "insensée" de 5000 mètres sur une cavalerie en mouvement dont la charge constituait le tableau final d'une "grande manoeuvre" devant un aréopage civil béat.
Il faut donc aussi juger une "politique" des années 1900 à 1910 où des esprits brillants de la politique pensaient que les baïonnettes étaient moins coûteuses que l'artillerie lourde, construite de surcroît par des grands groupes "capitalistes" et qu'un "élan" du style de l'An 2 de la République suffirait à assurer la défense de la Patrie.
Voici donc une page d'une "autre" instruction qui s'adressait aux officiers de réserve issus des "grandes écoles" (Centrale, etc...) et aux officiers de l'Ecole d'application pour le tir de l'Infanterie de la Valbonne, c'est à dire à des centaines d'officiers chaque année.Ce cours date des années 1910 à 1913, on est loin du texte en tête du sujet, rien n'y manque, même les enseignements de la guerre russo-japonaise de 1904-1905.L'instruction fait plus de 30 pages, en voici une qui montre aussi "une autre réalité" de l'Armée française de 1914, en tout cas, bien loin de l'hystérie collective des officiers du dépôt du Régiment d'Infanterie cité en tête du sujet.

Cordialement,
Guy François.