17 Février 1918 Rencontre avec un sous-marin

Rapport du capitaine
Quitté Boulogne le 15 Février 1918 à 01h00 et mouillé en rade des Dunes à 08h30. Appareillé à 10h00 après arraisonnement. Mouillé à Yarmouth le 16 à 08h00 ayant reçu des ordres par signaux (trafic Nord et Sud interrompu). Appareillé à 10h30 et mouillé au feu flottant Spurn à 21h00. Appareillé le Dimanche 17 à 05h00 et passé Flamborough à 09h10. Longé la côte à une distance de 2milles.
Par le travers de Whitby, à 12h15, par 54°30 N et 00°35 W de Greenwich, le canonnier de la pièce arrière signale une torpille venant dans notre direction par tribord arrière. Mis aussitôt la barre à gauche toute et la torpille passe à environ 20 m du couronnement. Signalé par TSF « Attaqué par un sous-marin » et hissé le signal distinctif (Pavillon B sur boule noire). Le poste de Cullercoats répond au signal de détresse. Navigué en zigzags et fait des signaux au sifflet pour avertir les navires qui viennent à contre-bord. Les deux pièces prêtes à tirer aussitôt l’attaque du sous-marin. Suivi la côte à une distance de deux milles et déposé le rapport à l’arraisonneur à l’entrée de Tyne Dock à 16h00 et à l’Amirauté le 18 Février.
Rapport du QM fusilier Jean GUERMEUR
Ce QM de l’AMBC était chef de pièce au canon de retraite et de veille à cette pièce quand OUTREAU a été attaqué. C’est lui qui a donné l’alerte en criant : « Une torpille à tribord ».
Aperçu un périscope à tribord à une distance d’environ 600 m par le travers de sa pièce. Allait crier « Un sous-marin » quand il vit près du périscope, à la surface de la mer, un bouillonnement indiquant qu’une torpille venait d’être tirée. Se précipite à sa pièce, ainsi que les deux autres servants à proximité, et le chargement est fait rapidement. Il ne retrouve pas et ne revoit pas le périscope.
Interrogé sur la raison pour laquelle il n’a pas tiré au jugé, le QM Guermeur répond que c’est à cause des bateaux de pêche se trouvant dans la direction du tir, au-delà du sous-marin. Il estime à une vingtaine de mètres la distance à laquelle la torpille est passée de l’arrière de l’OUTREAU.
Il y avait 5 ou 6 vapeurs venant à contre-bord, autant faisant même route que l’OUTREAU et une dizaine de bateaux de pêche à moteur au large des routes des vapeurs, grosso modo sur la ligne des bouées. Les navires en vue ralliaient la côte. OUTREAU faisait route à 9 nœuds.
Proposition de récompense pour le capitaine Olive MORGANTI
Citation à l’Ordre du Régiment
Brave et excellent marin au caractère énergique et décidé. Commandant à la mer depuis le début de la guerre, sait exiger à son bord une vigilance sans défaut.
Au début de la guerre, le capitaine Morganti commandait le vapeur TIDJITT, de la Compagnie Franco-Mostaganemoise d’Armement. Ce vapeur fut affecté au ravitaillement du Monténégro.
Le 21 Février 1915, dans le port d’Antivari, TIDJITT fut bombardé par des avions ennemis et deux bombes tombèrent dans les cales ouvertes. Devant les hésitations de ses hommes, le capitaine Morganti alla lui-même chercher les bombes, successivement, pour les jeter à la mer.
TIDJITT étant devenu propriété de la Société des Aciéries de Paris et d’Outreau, changea de nom et devint PARACIERS. Le 9 Avril 1917, PARACIERS fut attaqué au canon par un sous-marin ennemi (nota : peut-être UB 39) et riposta bravement. Le peu de visibilité régnant alors mit fin au combat.
Le 17 Septembre 1917, PARACIERS fut coulé par une torpille que lui envoya un sous-marin ennemi. (UC 64)
A la suite de ces deux attaques de sous-marins (9 Avril et 17 Décembre 1917) le vapeur PARACIERS, qu’il commandait, a obtenu un Témoignage Officiel de Satisfaction du Ministre de la Marine pour la bonne attitude de l’équipage.
Capitaine du vapeur OUTREAU, attaqué par un sous-marin le 17 Février 1918, il a exécuté avec la plus prompte décision la manœuvre qui pouvait éviter la torpille, laquelle manqua son but.
En raison des services à la mer du capitaine Morganti au cours de la guerre, depuis le début des hostilités, de l’excellent exemple qu’il est pour ses équipages, de la façon impeccable dont il assure la veille à son bord au cours de ses navigations, et de la conduite qu’il a tenue dans les circonstances où ses navires ont été attaqués par l’ennemi, considérant qu’il vient de donner encore une preuve de son énergique esprit de décision, la commission estime devoir proposer cet officier pour une Citation à l’Ordre du Régiment.
Note du CV Commandant la Marine à Boulogne, au Vice Amiral Commandant Supérieur de la Marine dans la zone des Armées du Nord. 4 Mars 1918
Il ressort de l’enquête que le capitaine de l’OUTREAU a fait la manœuvre qui convenait pour éviter la torpille lancée sur son bâtiment.
Il a déjà reçu un Témoignage de Satisfaction suite à deux attaques sur le vapeur PARACIERS qu’il commandait, la première au canon, et la seconde à la torpille, qui a occasionné la perte du navire
Il a eu une conduite tout à fait digne d’éloges sur TINGITT pendant un bombardement par avion, allant prendre successivement deux bombes non éclatées pour les jeter à la mer.
Il est bien établi que le capitaine Morganti est un commandant sérieux et énergique, naviguant dans des circonstances comportant des risques fréquents, et que sa conduite dans les situations critiques a toujours été digne d’éloges.
Je m’associe en conséquence, aux conclusions de la commission d’enquête pour une proposition de Croix de Guerre pour cet officier de la Marine Marchande.
Récompenses
Citation à l’Ordre de la Brigade
MORGANTI Olive Capitaine au Cabotage Bastia 299
S’est distingué à plusieurs reprises au cours des hostilités et a réussi à échapper à une attaque à la torpille grâce à son esprit de décision et à ses qualités manœuvrières.
Témoignage Officiel de Satisfaction du Ministre et prime de 200 f
GUERMEUR Jean QM fusilier-canonnier Brest 13361
Pour sa vigilance qui a permis à son capitaine de manœuvrer et d’échapper à une attaque à la torpille
Le sous-marin attaquant
N’est pas identifié.
Cdlt