ANDRE Dundee de Fécamp

olivier 12
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Re: ANDRE Dundee de Fécamp

Message par olivier 12 »

Bonjour à tous,

ANDRE

Dundee construit en 1912 au chantier Chantelot de Fécamp pour l’armement La Morue Française et sécheries de Fécamp.
160 tx JB
Non affrété.

Liste d’équipage

Image


Rapport du capitaine


Quitté Saint Pierre et Miquelon le 10 Juillet 1918 après avoir livré ma première pêche. Fait route sur le Grand Banc où j’ai fait ma deuxième pêche.

Reçu l’ordre du patrouilleur DIXMUDE de prendre le premier convoi pour la France.
Le 23 Septembre, reçu l’ordre du patrouilleur ALSACE d’appareiller. J’avais alors 105000 morues, soit environ 2800/3000 qx ou 160 t. Pris le convoi de 24 morutiers escortés par le DOUAUMONT.

Le 30 Septembre, belle brise. Pris un ris dans la grand voile, un ris dans le tape-cul et serré trinquette et petit foc. Le vent fraîchit et perdu de vue le convoi dans la nuit, vers 04h00 du matin.

Le 1er Octobre au matin, aperçu 7 bateaux du convoi et couru sur eux. C’est alors que la patte de ris de la grand voile arrache et déchire le long de la ralingue. Amené la voile pour réparer. Hissé à nouveau la voile à 21h00.

Le 2 Octobre à 02h00, aperçu un projecteur et des lueurs rouges. C’était un navire en feu. On voyait les lueurs de départ de coups de canon, mais on n’entendait rien, étant au vent du navire. Appelé aux postes de combat et fait route au NE pour m’écarter.

(nota : il devait s’agir du vapeur belge KELTIER, 2360 t, allant de Milford Haven à New York sur ballast et coulé ce jour-là par 46°27 N et 11°00 W par l’ U 55 du KL Alexander WEISS)

Fait ensuite route vers un point de rendez-vous donné par le DOUAUMONT et croisé pendant deux jours sur la route du convoi. Rencontré à trois reprises des patrouilleurs américains, mais jamais aperçu de voiles du convoi.

Le 10 Octobre à 08h00, cassé le pic de grand voile et amené aussitôt pour le changer. Vu un patrouilleur américain qui me donne notre position 48°55 N et 11°40 W. C’était le dernier point de rendez-vous donné par le DOUAUMONT. Je n’avais donc plus qu’à faire route sur Brest, suivant les consignes, avant de rallier Fécamp.

A midi, nous étions à déjeuner, sauf le second, le timonier, l’homme de bossoir et le canonnier de quart, quand nous entendons un obus siffler. Un sous-marin nous attaquait. Appelé aux postes de combat.
L’équipage monte aussitôt sur le pont quand un obus de gros calibre percute le pont, tue le matelot Albert PICARD, de Fécamp, et met en pièces les sept doris de tribord, disposés pour le sauvetage.
Dans l’impossibilité de combattre le sous-marin qui reste invisible, donné l’ordre de préparer les trois derniers doris et de les affaler à la mer.
Pendant ce temps je reste avec le canonnier Victor POILVE et fais charger la pièce arrière avec une hausse de 3000 m et une dérive de 50, pour répondre éventuellement au sous-marin. Mais on ne voit rien et les obus continuent de tomber sur l’avant du voilier.

Fait alors embarquer l’équipage dans les doris, pris les papiers et documents confidentiels que je jette à la mer avec le plomb de sonde. Vérifié que tout le monde a évacué, sauf le mort, et quitté le navire le dernier.

Le sous-marin fait alors route sur nous et le commandant me fait monter à son bord. Il me demande nom du bateau, port d’attache, provenance et destination, puis me laisse repartir. Il canonne ANDRE qui coule au bout de quelques minutes.

Fait route sur la France et perdu de vue les autres doris dans la nuit. Très mauvais temps les deux jours suivants.

Le 13 Octobre à 11h30, aperçu la goélette ADELAÏDE II, de Figueiras, Portugal, qui nous recueille par 49°05 N et 06°25 W. Très bien reçu à bord. Sommes débarqués le 17 Octobre à Leixoes et embarqués sur le VILLE DE CASABLANCA qui nous amène à Saint Jean de Luz le 25 Octobre.

Autres doris

Le premier avait été récupéré par le destroyer américain SIGOURNEY le 13 Octobre à 07h00 par 48°22 N et 05°41 W.

Voici une photo de ce destroyer construit en 1917 (DD81) et qui deviendra par la suite HMS NEWPORT dans la Royal Navy. Il terminera sa carrière en 1945.

Image

Le doris du second était arrivé ce même 13 Octobre, à 19h00, à Ouessant.

Le naufrage de l’ANDRE n’aura donc fait qu’une seule victime.

Description du sous-marin

45 m de long environ
Avant droit
Périscope au milieu du kiosque
Pas vu de tubes lance-torpilles, de coupe-filets ou d’antenne TSF.
Un canon sur l’avant, peut-être de 100 mm
Un canon sur l’arrière, peut-être de 75 mm
Peinture grise récente

Commandant
Entre 25 et 30 ans. Parle mal le français. Maigre, rasé, environ 1,70 m.

Vu douze hommes en tout.

Conclusion de la commission d’enquête

Celle-ci reprend tout le rapport du capitaine Caron et sa conclusion ne manque pas de sel.

Le capitaine Caron a perdu un temps précieux à louvoyer aux points de rendez-vous avec le DOUAUMONT.
Quand un obus a frappé son navire, tuant un homme et mettant en morceaux sept de ses doris, il n’a eu qu’une idée : sauver son équipage et abandonner son navire, alors que le sous-marin, qu’il ne pouvait voir car il était dans le soleil, tirait maladroitement :???: .

Il a cru bien faire de sauver son équipage et de quitter le bord le dernier après avoir immergé les documents confidentiels.
Mais il n’a pas rendu ses pièces inutilisables.

Bien qu’on ne puisse demander à tous les marins d’avoir la présence d’esprit et l’héroïsme du capitaine du KLEBER, cette précipitation est blâmable.

D’ailleurs, Caron n’a jamais assisté à des conférences avant son départ du Grand Banc et ne connaissait aucune des manœuvres à effectuer en présence d’un sous-marin :???: . Tout au plus avait-il participé à un cours de tir au canon de deux heures, ce qui est insuffisant.
Le capitaine du dundee ANDRE doit être blâmé pour abandon précipité de son navire.

Les noms des membres de cette commission méritent quand même qu’on les cite : DUPOURQUE, LABOURDETTE et LACRUER. Pour être juste, on peut d'ailleurs noter que par la suite le CF Dupourqué se montrera plutôt très clément avec les marins marchands, ayant mesuré le courage et l'abnégation dont ils faisaient généralement preuve.

Mais ce malheureux capitaine, qui pensait avoir bien fait en sauvant la presque totalité de son équipage, après d’ailleurs une très dure navigation dans les doris à cause du mauvais temps, recevra donc le blâme suivant :

CARON Frédéric Capitaine au cabotage Fécamp

Blâme

A abandonné son navire avec précipitation sans rendre ses pièces inutilisables

( nota : on remarque tout de même que navire et canons -47 mm à l’avant et 65 mm à l’arrière- ont été envoyés par le fond en quelques minutes.)

Le sous-marin attaquant

C’était l’ U 55 du KL Alexander WEISS.

Dans la nuit du 10 au 11 Octobre, les hommes se trouvant dans le doris recueilli par la suite par le SIGOURNEY, avaient à nouveau croisé un sous-marin naviguant en surface. Il s’agissait certainement du même U 55.

Cdlt
Rutilius
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Re: ANDRE Dundee de Fécamp

Message par Rutilius »


Bonjour à tous,


Le dundee terre-neuvier André, armé par la société dite « La Morue française et Sécheries de Fécamp », a sombré peu après midi, le 10 octobre 1918, par 48° 55’ N. et 11° 40’ W. Il était alors commandé par Frédéric Benjamin CARON, capitaine au cabotage, inscrit à Fécamp, n° 247. La victime fut :

— PICARD Albert Alexandre, né le 31 octobre 1866 aux Loges (Seine-Inférieure – aujourd’hui Seine-Maritime –) et domicilié à Fécamp (– d° –), Matelot, inscrit à Fécamp, n° 2.664. Fils naturel non reconnu d’Alexandrine Aglaée PICARD. Époux de Maria SAVALLE.

(Registre des actes de décès de la ville de Fécamp, Année 1918, Vol. II, f° 50, acte n° 427).


« N° 427 — Décès de Picard Albert Alexandre, Épx. Savalle. Acte transcrit.

Ce jourd’hui dix Octobre mil neuf cent dix-huit, à douze heures trente, étant à la mer par longitude 11° 40’ Ouest et latitude 48° 55’ Nord, Nous, Caron Frédéric Benjamin, capitaine du dundee l’André armé à Fécamp pour la pêche à la morue à Terre-Neuve, remplissant à bord les fonctions d’officier de l’état civil en vertu de l’article 86 du Code civil, en présence de M. Brentot Robert Michel, âgé de vingt-neuf ans, domicilié avant son embarquement à Fécamp, arrondissement du Havre, département de la Seine-Inférieure, et M. Palfray André, âgé de vingt-neuf ans, domicilié avant son embarquement à Fécamp, arrondissement du Havre, département de la Seine-Inférieure, appelés comme témoins, déclarons et attestons, après avoir constaté l’identité du cadavre, que le matelot Picard Albert Alexandre, fils naturel non reconnu de Picard Alexandrine Aglaée, né le trente-et-un octobre mil huit cent soixante-six aux Loges, arrondissement du Havre, département de la Seine-Inférieure, domicilié avant son embarquement à Fécamp, arrondissement du Havre, département de la Seine-Inférieure, époux de Savalle Maria, inscrit au quartier de Fécamp, f° X., n° 2.664, et sur le rôle d’équipage en qualité de matelot, est décédé à bord aujourd’hui (Mort pour la France) à douze heures trente minutes. En foi de quoi nous avons dressé à la suite du rôle d’équipage dudit navire le présent acte de décès qui a été signé après lecture par nous et les témoins. A bord, les jours, mois et an que dessus, (signé) F. Caron, R. Brentot, A. Palfray. Vu pour la légalisation de la signature de M. Caron Frédéric, Capitaine au cabotage, le 30 octobre 1918 à Fécamp, l’Administrateur de l’Inscription maritime, (signé) Vignole. Vu pour légalisation de la signature de M. Vignole, Administrateur de l’Inscription maritime à Fécamp. Paris, le 9 novembre 1918, le Chef du service du Personnel et du Travail maritime, (signé) Illisible. Transcrit le dix-neuf Novembre mil neuf cent dix-huit à dix heures du matin par nous, adjoint au maire de Fécamp, officier de l’état civil par délégation, (signé) Illisible.
»
Bien amicalement à vous,
Daniel.
Rutilius
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Re: ANDRE Dundee de Fécamp

Message par Rutilius »

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Bonjour à tous,


La Société en nom collectif Massé et Chantelot, société de construction navale dont le siège social était établi à Fécamp (Seine-Inférieure – aujourd’hui Seine-Maritime –), boulevard de la Plage, fut formée le 21 novembre 1892 pour une durée de 10 ans. Son capital social initial était de 2.000 fr. (Archives commerciales de France, n° 98, Mercredi 7 décembre 1892, p. 1.484).
Bien amicalement à vous,
Daniel.
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