PAUL ET MARIE
Trois-mâts goélette de 321 tx JB et 272 tx JN immatriculé à Saint Malo
Armateur ODUSSE d’après le rapport d ‘enquête. Une autre source donne Emile HOUET, mais l’un d’eux pourrait en réalité être l’affréteur.
Capitaine Pierre LOGUEVY inscrit à Paimpol
11 hommes d’équipage.
La perte de PAUL ET MARIE
A quitté Fowey le 16 Janvier pour Livourne avec un complet chargement de kaolin.
Le 20 Mars 1917 à 07h30, le voilier se trouve par 43°28 N eet 09°35 E, soit à 14 milles dans l’ouest de l’ile Gorgona et à 32 milles de sa destination finale Livourne.
Il fait route à l’est, avec bonne brise de SW fraîchissant, grosse houle, lorsqu’il aperçoit à environ 3 milles dans la direction de Gorgona un sous-marin stoppé en surface. Celui-ci tire un coup de semonce et arbore le pavillon de guerre allemand. Il se rapproche du voilier, passe sur son arrière et vient stopper à 300 m au vent.
Le capitaine Loguevy donne l’ordre de mettre les deux embarcations à la mer. La première, montée par lui et 5 hommes accoste le sous-marin et il reçoit l’ordre de monter sur le kiosque et de déposer ses papiers sur une petite table.
Un bref dialogue s’engage entre lui et le commandant du sous-marin qui parle très correctement le français :
-« Pourquoi naviguez-vous ? »
-« Pour gagner ma vie »
-« D’où venez-vous, où allez-vous et quel est votre chargement ? »
-« De Fowey à Livourne avec du kaolin »
-« Etes-vous le capitaine ? Donnez-moi la preuve. Faites-moi voir votre commission »
-« Je suis le capitaine. Mon fascicule de mobilisation qui est parmi les papiers du bord porte la mention maître au cabotage.
Mais il va faire mauvais temps, donnez-moi au moins la remorque pour nous rapprocher de la côte »
-« Non, je ne peux pas. Regagnez la côte comme vous pourrez. »
La brise fraîchissant rapidement et la mer devenant forte il était évident que les embarcations auraient beaucoup de difficultés pour gagner la terre. Tandis qu’elles s’éloignaient, le sous-marin tira des coups de canon sur le voilier qui coula en dix minutes vers 08h20. Le capitaine avait remarqué que des matelots allemands portaient des bombes et étaient munis de haches. Mais l’état de la mer modifia probablement les premières intentions du commandant.
Prenant la mer par l’arrière, les deux embarcations firent route à l’aviron. Seule celle du capitaine parvint, après une traversée des plus pénible, à atteindre Porto del Marmi, entre Viareggio et La Spezzia, qui sert de port à Carrare, le 21 Mars à 09h30. (nota : aujourd’hui Marina di Carrare).
On ignore le sort de la seconde, montée par le second capitaine et 5 hommes, qui a été perdue de vue dès le 20 Mars vers 09h30.
Description du sous-marin
50 à 55 m de long
5 m de large
Pas de numéro
1 canon de 90 ou 105 mm sur l’avant du kiosque
Périscope et petit mât de pavillon sur l’arrière du périscope
Filin allant de l’avant à l’arrière et passant par dessus le kiosque
Peinture gris clair
Sur l’avant, structure de tôle de forme arrondie que l’on pense être un tube lance-torpille.
Probablement aussi tube lance-torpille sur l’arrière.
Le second de PAUL ET MARIE avait déjà rencontré, dans des circonstances analogues, l’U 46 et aurait déclaré que c’était le même type de sous-marin. Mais, quand on leur montre des silhouettes de sous-marins allemands, le personnel désigne l’U 21 comme s’en rapprochant le plus.
Il y avait 15 à 17 hommes sur le pont, certains paraissant très jeunes. Tous portaient des jumelles prismatiques et étaient vêtus de draps ou de bleu de chauffe.
Le commandant, blond, rasé, avait un air américain (sic) (nota : je ne sais pas trop ce que les marins considèrent comme « air américain », car il ne devait sûrement pas ressembler à un Sioux

Il devait avoir dans les 45 ans. Le second, brun, environ 35 ans, parlait lui aussi très bien français.
Le commandant a conservé tous les papiers du bord, parmi lesquels se trouvait le fascicule de mobilisation du capitaine et un passeport (laissez-passer) délivré à celui-ci en Novembre 1916 par la police de Cardiff.
Le sous-marin attaquant
C’était l’U 34 du KL Johannes KLASING. Ce sous-marin sera un temps commandé par le KL Wilhelm CANARIS, de Janvier à Mars 1918, puis repris par Johannes Klasing jusqu’à la fin de la guerre. Il appareillera pour la dernière fois le 18 Octobre 1918 et disparaîtra avec tous son équipage de 38 hommes, peut-être dans les parages de Gibraltar.
Mais la description de ses officiers est intéressante. Le commandant Klasing, né le 26 Mars 1883 était à quelques jours de ses 34 ans.
On peut donc penser que l’officier de 45 ans pris pour le commandant et qui mena l’interrogatoire était en réalité un chef de flottille, temporairement embarqué sur le submersible. (Il faudrait savoir si Klasing était blond ou brun)
En ce qui concerne le second qui avait croisé la route de l’U 46, on notera que les seuls caboteurs français coulés par ce sous-marin, alors sous les ordres du KL Alfred SAALWÄCHTER, avaient été le GOULFAR le 25/12/16 et le MARIE PIERRE le 27/12/16, tous deux au large des côtes espagnoles. C’est donc très probablement sur l’un de ces voiliers qu’était embarqué ce second capitaine, qui aura aussitôt repris du service sur le PAUL ET MARIE.
Aucun renseignement ultérieur sur le sort de son embarcation ne figure aux archives.
Cdlt