HYACINTHE-YVONNE
Voilier de pêche type dundee (cotre à tapecul)
Armé d’un canon de 47 mm
Patron Hyacinthe CUISAT (avait pris part aux combats en Argonne et aux Eparges)
Fusilier Laurent VICHON (un ancien du CHARLEMAGNE ayant pris part au combat des Dardanelles)
Matelots Auguste MONNERON, Georges BUTAUD, Georges PETITOT et Jean PHILIBERT (un ancien de Dixmude)
Quitte Les Sables d’Olonne le 16 Mars 1917 à 18h00 pour se rendre sur la zone de pêche du plateau de Rochebonne en compagnie d’autres pêcheurs Sablais qu’il doit protéger contre un diabolique sous-marin (sic).
Le récit du journaliste de l’Illustration est dans le style de l’époque, légèrement tendancieux, et plein de grandes envolées au caractère patriotique. Mais, entre les lignes superflues, on arrive à se faire une bonne idée des circonstances du combat.
A 11h00 le 18 Mars on est à 10 milles du plateau de Rochebonne, dans l’ WquartNW de la pointe des Baleines (Ile de Ré)
Trois navires pêchent côte à côte : HYACINTHE-YVONNE, PIERRE-EMILE et PETITE DESIREE. Le plateau de Rochebonne, à 31 milles de l’ile d’Yeu, est un massif rocheux en saillie sur la ligne des fonds inférieurs à 50 m, parallèle à la côte. Banc dangereux où la mer est souvent grosse et les lames redoutables.
Ce jour-là, le temps est beau.
A 11h30, un sous-marin émerge devant le HYACINTHE-YVONNE à 500 m. Le capot du kiosque s’ouvre et deux hommes en surgissent, sautent sur le pont, arment le canon de 100 (nota : sans doute plutôt un canon de 88). Ils tirent un premier coup un peu court, qui tombe sur l’avant.
Le patron Cuisat immobilise la barre au moyen d’un raban et aide le canonnier Vichon à dégager la pièce de 47, masquée par une voile et des filets.
Ayant momentanément assuré, grâce au raban, l’équilibrage du cotre, le patron Cuisat se fait le servant du canonnier qui ouvre le feu à l’instant même où un second projectile ennemi atteint le bateau par tribord, à hauteur de l’étrave, occasionnant une forte voie d’eau.
Le sous-marin, stoppé, continuant à courir sur son erre, canonnant toujours le HYACINTHE-YVONNE, cherche à se placer sur son arrière pour éviter les coups. Trois hommes du sous-marin, avec des armes individuelles, tirent sans relâche sur le dundee. Presque toutes les balles s’enfoncent dans la corne de rechange de grand voile, amarrée sur le pont, et qui protège les hommes.
Cuisat reprend la barre et fait éviter son bateau, dégageant à nouveau le champ de tir du canon que Vichon pointe alors par bâbord sur le sous-marin.Voici un dessin de l'époque montrant le combat contre le sous-marin

Les Allemands semblent surpris et disparaissent du pont. Le capot du kiosque se referme. Mais le sous-marin reste immobile à 300 m du voilier. Soudain, il apique de l’avant et son arrière se dresse hors de l’eau sur une longueur d’environ 8 mètres. Il se maintient dans cette position pendant quatre ou cinq minutes et l’équipage du cotre, dont la cale est envahie par l’eau, tire encore quelques obus jusqu’à ce que le sous-marin coule à moins de 100m d’eux. A l’endroit où il a disparu s’étale une nappe d’huile de 300 m de diamètre.
Il n’y a aucun moyen d’aveugler la voie d’eau et l’on doit abandonner le voilier dans le pauvre youyou qui fait de l’eau comme un panier et que l’on vide avec des casseroles. A 12h15, salué par ses matelots, le HYACINTHE-YVONNE s’enfonça doucement dans la mer. Les marins furent recueillis par le PIERRE-EMILE qui les ramena aux Sables.
Le journaliste ajoute : les détails donnés par tous les témoins ne permettent pas de douter de l’heureux résultat de ce combat.
Le sous-marin attaquant
C’était l’UC 70 du KL Werner FÜRBRINGER.
Bien sûr, il n’avait pas été coulé puisqu’il sévira encore jusqu’au 28 Août 1918, lorsqu’il disparaitra, sous les ordres de l’OL Karl DOBBERSTEIN.
Fürbringer jouera d’ailleurs un rôle important après la guerre, à la fin des années 20, dans la renaissance de l’arme sous-marine en Allemagne.
On peut penser, au vu de ce récit, que Fürbringer a effectivement été surpris de voir un petit pêcheur résister ainsi. Sans doute ne se serait-il pas approché autant s’il avait eu un doute. Peut-être même l’a-t-il alors pris pour un Q-ship.
Pourquoi a-t-il mis autant de temps à plonger ? Problème de ballastage ?
Il serait intéressant d’avoir le KTB du sous-marin pour comparer avec le récit des pêcheurs.
Mais il faut aussi toujours se méfier des embellissements journalistiques de l’époque.
L’équipage du HYACINTHE-YVONNE a été cité à l’ordre de l’armée.
Cdlt
Olivier