NORMANDY, futur JEAN ― Trois-mâts goélette — Bateau piège.

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Yves D
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Re: NORMANDY, futur JEAN ― Trois-mâts goélette — Bateau piège.

Message par Yves D »

Bonjour Gilles, bonjour à tous,

Combat Normandy, CLC Thoumire - UC 71, Oblt z.S. Saltzwedel

Pour ne pas polluer la longue liste des officiers en faisant digression sur ce sujet, j'ouvre un nouveau fil sur l'engagement du 25 juin qui devait coûter la vie au jeune Lieutenant Trinité-Schillemans. J'ai retrouvé trace de l'affaire dans Spindler ("Der Handelskrieg mit U-Booten" vol.IV) qui a partir du KTB de Saltzwedel écrit ceci :
Ayant repéré le voilier français, UC 71 s’en est approché à l’immersion périscopique afin de l’examiner en détails. Il remarque notamment sur la dunette une superstructure suspecte. A 1000m de distance, il fait irruption en surface et ouvre le feu. Le 3e coup atteint la superstructure en question et dévoile un canon. Plongé en urgence tandis que le voilier commence un feu vif. La présence de deux destroyers n’a pas permis une nouvelle attaque contre le voilier.
L’Amiral Spindler note ensuite qu’il s’agissait du bateau-piège Normandy, 543 tonneaux, armé de 4 x 75mm servi par des personnels de la Marine.

Je crois me souvenir que c'est Paul Chack qui avait évoqué ce combat dans son oeuvre car je m'en étais inspiré à l'époque (1974) pour écrire quelques pages dans mon premier ouvrage d'histoire maritime mais à l'époque je n'avais pas eu accès au côté allemand de la documentation.

Cordialement
Yves
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Ar Brav
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Re: NORMANDY, futur JEAN ― Trois-mâts goélette — Bateau piège.

Message par Ar Brav »

Bonjour à tous,

NORMANDY Bateau piège (1917-1917)

Chantier :

Etats-Unis
Commencé : N.C.
Mis à flot : N.C.
Terminé : N.C.
En service : 1917
Retiré : 1917
Caractéristiques : 700 tjb.
Armement : I de 75, puis IV de 75

Observations :

Goélette 3 mâts
Acheté aux USA ; armé comme cargo piège
26.06.1917 : combat le sous-marin UC 71 (OL Reinhold Saltzwedel) en Manche, l’EV Trinité-Schillemans est tué
Ayant repéré le voilier français, UC 71 s’en est approché à l’immersion périscopique afin de l’examiner en détails. Il remarque notamment sur la dunette une superstructure suspecte. A 1000m de distance, il fait irruption en surface et ouvre le feu. Le 3e coup atteint la superstructure en question et dévoile un canon. Plongé en urgence tandis que le voilier commence un feu vif. La présence de deux destroyers n’a pas permis une nouvelle attaque contre le voilier.
L’Amiral Spindler note ensuite qu’il s’agissait du bateau-piège Normandy, 543 tonneaux, armé de 4 x 75mm servi par des personnels de la Marine.

Après 1917 : renommé Jean

Sources :
Amiral Spindler, Der Handelskrieg mit U-Booten vol.IV, à partir du KTB de l'UC 71 de l'Oblt z.S. Saltzwedel


Cordialement,
Franck
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Yves D
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Re: NORMANDY, futur JEAN ― Trois-mâts goélette — Bateau piège.

Message par Yves D »

J'ai retrouvé le sujet dans le tome 3 d'Histoire Maritime 14-18 (Chack-Antier) p.173-198. Je vais essayer de retrouver mon récit et le mettre en ligne tant pis si je n'ai pas le talent de Paul Chack.
Yves

Je remarque cette note de bas de page :
Le 13 juillet 1917, la 3e spéciale (nom de la brigade de canonniers embarqués à bord du Normandy) embarque de nouveau sur le Normandy rebaptisé Jean, commandant EV Deprez et manque de peu un s/m qui attaque et est mis en fuite par l'arrivée intempestive d'un destroyer anglais. L'équipe opérera ensuite sans succès en Atlantique.


Suite
J'ai retrouvé mon texte, je l'ai mis en ligne à cette adresse :
http://www.histomar.net/documents/Normandy%20juin17.pdf

et une localisation des faits sur la carte en prime.
Image
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Ar Brav
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Re: NORMANDY, futur JEAN ― Trois-mâts goélette — Bateau piège.

Message par Ar Brav »

Bonsoir Yves,

Tout est rentré dans l'ordre maintenant :jap:

Bonne soirée,
Franck
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GENEAMAR
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Re: NORMANDY, futur JEAN ― Trois-mâts goélette — Bateau piège.

Message par GENEAMAR »

Image M.P.F.

Hors Officier... Marin tué à bord le 26 juin 1917.

PENCRÉACH Jean Yves Marie, né le 17 juillet 1890 à BREST (Finistère), Quartier-Maître de manoeuvre.

Cordialement. Malou
olivier 12
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Re: NORMANDY, futur JEAN ― Trois-mâts goélette — Bateau piège.

Message par olivier 12 »

Bonjour à tous,

Un petit complément concernant le NORMANDY

Petit trois-mâts latin de 543 tx
Lancé aux chantiers américains de Bath en 1878 pour l'armement Adams & Hichcock.
Arrive à Rouen le 16 Décembre 1916 avec équipage américain.
Acheté par Mr Pierre Sneyers, importateur de charbon à Paris, sis 39 bd Malesherbes.
La gérance en est confiée à l'armement Prentout et Cie de Rouen.
Est armé en navire piège en Juin 1917.4 canons de 75.Lest de sable.

Capitaine THOUMYRE, de Saint Malo, ancien des Voiliers Bayonnais, torpillé sur le BAYONNE le 17 Février précédent par l'U 84 du KL Walter Roehr.
Equipe de douze canonniers sous les ordres de l'EV Trinité-Schillemans, la 3e spéciale.

Le récit fait par Lacroix est identique à celui de Chack, sauf qu'il donne l'UC 71 coulé. En fait Saltzwedel s'en était tiré. En Août, il combattra victorieusement le Q-ship DUNRAVEN de Gordon Campbell. Il disparaitra le 2 Décembre suivant avec l'UB 81

Une fiche sera mise ultérieurement en ligne concernant le BAYONNE.

Cdlt

Olivier

PS : corrections effectuées le 11/08 suivants indications ci-dessous fournies par kgvm
olivier
kgvm
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Re: NORMANDY, futur JEAN ― Trois-mâts goélette — Bateau piège.

Message par kgvm »

According to Lloyd's Register 1920/21 "Normandy" was built in 1878, 543 GRT.
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Ar Brav
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Re: NORMANDY, futur JEAN ― Trois-mâts goélette — Bateau piège.

Message par Ar Brav »

Bonsoir à tous,

Une représentation du Normandy, illustration de M. Haffner :

Image

Merci à Yann (Tanguy-Pagan) pour cet envoi

Cordialement,
Franck
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gildelan
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Re: NORMANDY, futur JEAN ― Trois-mâts goélette — Bateau piège.

Message par gildelan »

Bonjour à tous,
Citation du 3ème groupe de canonniers à bord du trois-mâts goélette Normandy et les extraits des rapports officiels du combat du 25 juin 1917.

1 citation à l’Ordre de l’Armée
Le 25 juin 1917, le trois-mâts goélette NORMANDY, capitaine THOUMIRE, Enseigne de Vaisseau de 1ère classe auxiliaire, inscrit à Saint-Malo, se rendait du Havre à Swansea sur lest. Il avait à bord le 3ème groupe de canonniers (armements spéciaux) commandé par l’Enseigne de Vaisseau de 1ère classe TRINITE SCHILLEMANS. Ce groupe comprenait 12 quartiers-maîtres ou marins de l’Etat.

Texte de la citation à l’Ordre de l’Armée
(Journal officiel du 23 juillet 1917)

« 3ème groupe de canonniers, commandé par l’Enseigne de Vaisseau de 1ère classe TRINITE SCHILLEMANS : pour la façon brillante dont il a combattu contre un sous-marin ».

Extraits des rapports officiels

Le 25 juin 1917, à 19h05, le NORMANDY se trouvait par 50°13’ nord et 2°05’ ouest, se rendant du Havre à Swansea.

Vers 19h05, déclare le Capitaine THOUMIRE, nous entendîmes des coups de canon. Nous montâmes sur le pont, l’Enseigne de Vaisseau SCHILLEMANS, chef de mission et moi. Quelques coups de canon passaient dans la mâture ou au-dessus. Le sous-marin qui apparaissait comme un point à environ 5 milles dans le S.S.O. se dirigeait vers nous en continuant à tirer.

Conformément à ce qui avait été convenu entre nous, nous mîmes deux embarcations à la mer avec l’équipage du navire (marins du Commerce). Après avoir fait l’appel S.O.S., le télégraphiste fut mis dans une des embarcations à environ 300 mètres par le travers tribord ainsi qu’il en avait reçu l’ordre. La barre amarrée dessous le vent maintenait le navire en ralingue et permettait au besoin de mettre un peu de vent dans les voiles en choquant doucement les écoutes de misaine et des focs, ce que j’ai dû faire à certain moment pour maintenir mes embarcations par le travers.

Je restai à bord avec M. SCHILLEMANS et les 12 hommes de la mission armant les pièces.

Le sous-marin voyant les embarcations à la mer cessait de tirer. Il avait tiré 15 coups environ et s’immergeant montrait seulement son périscope et faisait le tour du bord, se montrant très circonspect et très méfiant. Les embarcations sont toujours à 500 mètres par tribord, à peu près par le travers, se maintenant en nageant.

Vers 8h45, c'est-à-dire au bout d’une heure environ, le sous-marin se décida à émerger et se dirigea vers les embarcations en les appelant. Puis tout à coup, se dirigeant vers le bord, tira un coup de canon qui nous atteignit dans la misaine et dans le gréement. Puis aussitôt un autre coup qui nous atteignit dans les pavois un peu sur l’AR de l’écubier d’embossage tribord avant. Ce coup de canon nous fit des avaries assez sérieuses et tua M. SCHILLEMANS qui fut frappé à la tête et au ventre et le quartier-maître de timonerie PANCREACH Jean qui étaient tous deux placés près de l’écubier par où ils observaient le sous-marin qui s’était rapproché d’environ 100 mètres.

C’est alors, déclare le quartier-maître canonnier LE BERRE, que le NORMANDY a riposté sur l’ordre du Lieutenant SCHILLEMANS qui fut tué aussitôt.

A la mort de SCHILLEMANS, le Capitaine THOUMIRE prit la direction du tir. Les deux pièces de tribord, celle de l’AR d’abord, puis celle de l’AV ensuite, commencèrent le feu à volonté. Au premier coup long de la pièce de l’AR dont la hausse était à 500 mètres, les hausses furent mises à 400 mètres. 19 coups de canon furent tirés dont 13 à la pièce AR et 6 à la pièce AV.

Dès les 3 ou 4 premiers coups de la pièce AR un nuage de fumée noire sortait du blockhaus du sous-marin qui s’enfonça par l’AV sous un angle de 40° environ. Il reste dans cette position un temps appréciable, le gouvernail et l’hélice hors de l’eau. Enfin, 3 minutes après environ, il coulait toujours l’AV le premier et nous ne l’avons plus revu. La partie AR du sous-marin était littéralement couverte d’obus. Les hommes des embarcations qui continuaient à se maintenir à la hauteur du navire, tout en s’écartant, ont déclaré qu’ils avaient vu le sous-marin prendre une certaine inclinaison sur un bord tout en appiquant de l’AV.

Ne voyant plus rien, dit le Capitaine THOUMIRE, je rappelai les embarcations qui accostèrent vers 21h40. Les embarcations rentrées, je fis route sur Cherbourg au sud 15 Est vrai.

A ce moment, vers 9h45, nous aperçûmes un second sous-marin à environ 5 milles dans l’ouest nord ouest, courant sur nous. Je fis faire le signal S.O.S. : il était 9h50. Nous marchions environ 7 nœuds. Les armements furent remis aux pièces et nous nous préparions à le recevoir, tout en continuant notre route et en réparant nos avaries de gréement. Au bout d’une demi-heure environ, le sous-marin s’écartait de nous et nous le perdîmes de vue.

Je fis transporter nos morts sur le roof arrière, recouverts du pavillon national, et hissai les couleurs en berne.

Je continuai ma route sur Cherbourg où je mouillai sur rade à 3h50 du matin, le 26 juin.

Le NORMANDY était monté par 12 hommes d’équipage, capitaine compris, et par 13 hommes de la mission spéciale, soit 25 hommes en tout.

La conduite de chacun a été digne de tout éloge. Celle de M. SCHILLEMANS, en particulier, fut admirable ainsi que celle du second qui a conduit les embarcations avec un sang-froid remarquable.

Je dois signaler également la conduite pleine de sang-froid et de bravoure des quartiers-maîtres canonniers chefs de pièce LE BERRE Auguste et SALOU Auguste, ainsi que celle des armements des pièces et des embarcations.

Tout le monde a fait bravement son devoir.

Le Capitaine THOUMIRE, qui avait déjà été attaqué à peu près dans les mêmes parages sur le voilier BAYONNE qu’il commandait et qui fut coulé en février dernier, a eu le mérite après s’être concerté avec M. l’Enseigne de Vaisseau SCHILLEMANS sur les dispositions à prendre en cas d’attaque, de mener celle-ci à bien, secondé par son second M. DESPRES qui était déjà sous ses ordres sur le BAYONNE.

La mort étant venue frapper M. TRINITE SCHILLEMANS, il a conduit la manœuvre comme il avait été convenu, s’en est tiré à son honneur et mérite les plus grands éloges.


Rapport du Vice-amiral TRACOU, commandant en chef, préfet maritime à Cherbourg

J’ai l’honneur de vous transmettre le rapport de la commission d’enquête prévue par votre circulaire du 13 avril 1917, sur le combat qui a eu lieu dans la soirée du 25 juin 1917 entre un sous-marin ennemi et le trois-mâts goélette français NORMANDY de la Marine du Commerce à bord duquel se trouvait la troisième équipe spéciale commandée par l’Enseigne de Vaisseau TRINITE SCHILLEMANS.

Bien qu’un coup malheureux ait privé l’équipe spéciale de son vaillant commandant dès le début de l’action, tout s’est déroulé depuis le moment où le sous-marin ennemi a ouvert le feu jusqu’à celui où il a disparu, suivant le plan murement réfléchi préparé par M. TRINITE SCHILLEMANS. Il avait su en faire pénétrer les moindres détails dans l’esprit du Capitaine du NORMANDY et des marins de son équipe ; tous avaient compris l’importance du rôle qu’ils devaient jouer, ils savaient que le succès ne serait obtenu s’ils gardaient tout leur sang-froid sous les coups de l’ennemi et sans riposter, jusqu’au moment propice d’ouvrir le feu, avec la certitude de détruire le sous-marin.

C’est ce que s’est passé. Aussitôt après l’évacuation du navire qui s’est faite dans un ordre et un calme admirables sous la direction du second, le Capitaine ne quittant pas son bord, tous sont restés étendus à leur poste pour ne pas se faire voir, ou rampant sur le pont quand il fallait manœuvrer les écoutes des voiles. Pendant les minutes angoissantes qu’a duré l’examen minutieux du trois-mâts par le sous-marin en plongée, dont la durée pouvait faire croire que le navire allait être torpillé, aucun n’a bronché ; tous avaient l’œil sur leur chef attendant son commandement pour ouvrir le feu. Quand le sous-marin a émergé et tiré son premier coup de canon, SCHILLEMANS a jugé que le moment était venu.

« Démasquez les pièces et ouvrez le feu à 500 mètres. Hardi mes gars, il est à vous ».

A peine avait-il prononcé ces paroles que le second et dernier obus éclatait en traversant la lisse de plat bord et le tuait ainsi que le quartier-maître de timonerie PENCREACH qui se tenait à ses côtés pour l’aider dans la mesure des distances.

Les hommes ne s’aperçoivent pas tout d’abord de la mort de leur officier et l’action continue suivant le plan concerté, la hausse ayant été ramenée à 400 mètres.

Le troisième coup tiré par le canonnier LE BERRE détermine une très violente explosion dans le kiosque du sous-marin, due probablement à la déflagration des munitions de la pièce qui s’y trouvaient. Comme le temps avait dû manquer pour fermer le panneau de sécurité, on peut penser que ce coup a causé une avarie grave, car c’est à ce moment que le sous-marin commence à s’enfoncer par l’avant avec une inclinaison prononcée sur bâbord.

En le voyant disparaître, les chefs de pièce qui avaient interrompu le tir le reprennent immédiatement sur l’ordre du Capitaine du NORMANDY et l’arrière qui émergeait assez pour montrer le gouvernail de plongée et les hélices, reçoit les derniers coups tirés. Détail important et qui ne figure pas dans les interrogatoires, les hélices étaient immobiles.

L’action a été rapide et il ne s’est pas écoulé plus de trois minutes entre l’ouverture du feu et la disparition du sous-marin. Dix-neuf coups de canon ont été tirés, 13 par la pièce de l’arrière, 6 seulement par la pièce de l’avant qui a eu malheureusement un engagement de projectile.

De la lecture de l’enquête et des réponses que m’ont faites les marins de l’équipe et de l’équipage au cours d’une visite que j’ai faite à bord du NORMANDY, il ressort nettement pour moi que l’on peut considérer le sous-marin comme détruit. Mon opinion est basée :
- sur la violence de l’explosion qui s’est produite dans le kiosque au troisième coup de canon (colonne de fumée noire et jaune montant jusqu’à plus de 20 mètres de hauteur) et qui n’a aucun rapport avec l’explosion des autres projectiles qui ont atteint le sous-marin ;
- l’inclinaison prononcée sur bâbord immédiatement après le troisième coup avec laquelle le sous-marin a commencé à s’enfoncer ; de la pointe accentuée qu’il a prise en pleine immobilité puisque les hélices étaient au repos ;
- l’absence de toute manifestation de sa part après son immersion, car s’il n’avait pas été détruit, il serait revenu immédiatement torpille le NORMANDY et couler ensuite ses embarcations.

L’honneur de ce brillant succès revient en première ligne à l’Enseigne de Vaisseau TRINITE SCHILLEMANS qui a su prévoir tout ce qui s’est passé et qui avait su inculquer à son personnel sur lequel il avait un ascendant absolu, la confiance qu’il avait dans le succès. La profonde satisfaction qu’a causée la réussite de ce hardi coup de main est assombrie par la mort de ce vaillant officier destiné, sans aucun doute, à rendre encore de grands services à son pays.

L’Enseigne auxiliaire THOUMIRE, commandant le NORMANDY, qui avait tenu à rester à son bord a fait preuve du plus grand sang-froid avant le début de l’action, rampant sur le pont pour manœuvrer lui-même les écoutes des voiles. Dès la mort de l’Enseigne de Vaisseau SCHILLEMANS, il a surveillé le tir et l’a fait continuer jusqu’à la disparition du sous-marin. Il a su ensuite prendre toutes les décisions voulues pour faire réembarquer son équipage, manœuvrer pour éviter le second sous-marin (un engagement de nuit présentant trop d’aléas) et faire route sur Cherbourg.

Les armements des pièces ont été à la hauteur de leur rôle et ont fait preuve de sang-froid et de bravoure sous le feu.

Les deux chefs de pièce, le quartier-maître LE BERRE surtout, se sont distingués par leur coup d’œil et leur habileté et ont largement contribué à la destruction du sous-marin ennemi.

Enfin, je dois rendre hommage à la conduite du second du trois-mâts et à son équipage dont le rôle, à première vue plus effacé, n’en était pas moins des plus périlleux. Après avoir évacué dans le plus grand calme le bâtiment, les embarcations avaient l’ordre de se maintenir à 500 mètres par le travers et avaient été prévenues que, si le sous-marin venait se placer entre elles et le NORMANDY, cela n’empêcherait pas d’ouvrir le feu. Le second DESPRES a su maintenir les deux embarcations en ligne de file dans cette position et quand le trois-mâts a commencé à tirer, il n’a eu que le temps de s’écarter pour ne pas être couvert par les éclats, en raison du voisinage du sous-marin dont il n’était qu’à 50 mètres.

En cas de non réussite, les embarcations eussent été certainement coulées, les hommes le savaient et avaient fait le sacrifice de leur vie.

J’ai essayé, Monsieur le Ministre, de vous retracer aussi rapidement que possible la physionomie de cette brillante action qui honore à la fois la Marine de Guerre et la Marine du Commerce. Ceux qui ont été au danger et qui ont fait vaillamment leur devoir doivent être récompensé, aussi je vous demande de vouloir bien accueillir avec bienveillance les propositions formulées en faveur des marins de la 3ème équipe spéciale et du trois-mâts NORMANDY.
Signé : TRACOU
(source : livre d'or de la Marine - guerre 14/18)

Cordialement,
Gilbert.
Excès de peur enhardit.
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Terraillon Marc
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Re: NORMANDY, futur JEAN ― Trois-mâts goélette — Bateau piège.

Message par Terraillon Marc »

Bonsoir

Le NORMANDY n'est donc pas un bateau piege au sens propre mais plutot un navire de commerce armé ...

Vos avis sont les bienvenus
Cordialement
Marc TERRAILLON

A la recherche du 17e RIT, des 166/366e RI et du 12e Hussards.
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