Entre les lignes...

A Malinowski
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Re: Entre les lignes...

Message par A Malinowski »

72ème régiment d’infanterie
2ème bataillon
Compte-rendu des événements survenus dans la nuit du 28 au 29 juin 1917

Le 28 juin vers 20 heures15 un bombardement violent se déclenchait sur les lignes françaises situées vers l’ouest de Cerny. En moins de cinq minutes le bombardement, gagnant vers l’est, englobait tout le saillant de la Bovelle et augmentait d’intensité. Une fusée à trois globes, tirée sur la gauche du bataillon, déclenchait le tir de barrage de nos batteries. Pendant de longues heures, le tir des Boches ne se ralentit pas un instant, bouleversant les boyaux et les tranchées du secteur coupant toutes les communications téléphoniques et balayant le terrain.
Vers 3 heures 30, les premiers renseignements arrivèrent de la 6ème Cie. Le Lieutenant Prost me rendait compte que ses tranchées de première ligne étaient bouleversées près du boyau de Béthune et que sa deuxième ligne était sans cesse marmitée. Les deux sections en ligne avaient éprouvé de fortes pertes tandis que les sections en réserve, qu’il portait en première ligne pour se renforcer, avaient été très peu éprouvées. Je donnai l’ordre à une section de la 7ème Cie d’aller renforcer la 6ème Cie.
La liaison était assurée entre les deux Cie de première ligne et le commandant du 1er bataillon me faisait prévenir que sa droite était en liaison avec nous.
Vers 4 heures 30 je reçus des nouvelles de la 5ème Cie. Elle n’avait été que très peu éprouvée et les hommes, veillant sans relâche, se tenaient prêts à tout événement.
Vers 5 heures, le bombardement dont l’intensité ne s’était pas ralenti depuis la veille cessa tout à coup et le secteur redevint calme.
J’allai me rendre compte de l’état du secteur. Tout est absolument nivelé : plus trace de boyaux ou de tranchées.
Les pertes éprouvées par le bataillon sont les suivantes :
5ème compagnie : 3 tués et 4 blessés
6ème compagnie : environ 60 hommes tués, blessés, disparus
2/72 : 2 blessés.
Parmi les tués de la 6ème Cie figurent deux sergents qui ont été atteints par notre 75. Depuis deux jours, on se plaint à l’artillerie que ses barrages sont trop courts mais elle n’en a cure. Ces accidents ont un effet déplorable sur le moral des hommes.
Le sous-lieutenant Le Toquin, blessé légèrement hier et qui n’avait pas voulu être évacué, a été blessé grièvement cette nuit.
Je dois dire qu’à la 6ème Cie s’est passé le fait suivant :
Ce matin vers trois heures 30 le sous-lieutenant Noël parcourait la tranchée de première ligne pour encourager ses hommes. Les deux sergents venaient d’être tués par le 75. Un sergent d’une autre section arrive à lui; il l’envoie prendre le commandement des hommes qu’il venait de quitter. Le sergent part et quelques instants après revient en déclarant qu’il n’y avait personne dans la tranchée. Le sous-lieutenant Noël bondit au parapet et aperçoit une dizaine de ses hommes qui, sans équipements et sans armes se rendaient aux tranchées ennemies où des Boches leur faisaient signe de venir. Il déchargea sur eux son revolver.
On ne peut expliquer ces faits que par l’affolement et l’épuisement des hommes. Depuis deux jours ils subissent un bombardement intensif sans avoir un abri. De plus, ils en sont à leur neuvième jour de tranchée et sont exténués. Leur moral est très affecté et je crois qu’il serait urgent de les relever. Je les crois incapable de pouvoir supporter encore un effort comme celui qu’ils viennent de fournir depuis deux jours.

CCM 25/1/2007
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Charraud Jerome
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Re: Entre les lignes...

Message par Charraud Jerome »

Bonsoir
Merci Alain pour ce 72e "Entre les lignes".
Pour ce 72e numéro donc, quoi de mieux que d'aborder le 72e RI, si cher à Laurent. ;)
Vivement le 90e numéro :lol:

Ah le fameux 75 si cher aux journalistes de l'arrière, Ah, le 75 qui faisait tomber les Boches comme les mouches :fou:

Cordialement
Jérôme Charraud
Les 68, 90, 268 et 290e RI dans la GG
Les soldats de l'Indre tombés pendant la GG
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vincent le calvez
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Re: Entre les lignes...

Message par vincent le calvez »

Bonjour à tous,
Bonjour Alain, bonjour Jérôme,

Voici deux extraits identiques, trouvés dans le JMO du 28e RI concernant certaines salves de notre artillerie.

[g]Le 22 novembre 1914, à Sapigneul, près de Berry-au-Bac (nord-est de Reims)[/g]

6h20 : le 2e bataillon téléphone qu’une attaque d’infanterie se prononce sur son centre et le saillant NE du secteur. La force en est évaluée à trois petites compagnies en même temps l’artillerie allemande de 77 bombarde les tranchées du saillant. Les balles allemandes sifflent en grande quantité sur la route 44.
6h25 : le commandant du régiment demande à l’artillerie de faire barrage dans les secteurs 1, 2, 3, 4.
L’artillerie entre en action vers 6h30.
Dans le secteur 2 : la 1re salve tombe entre le canal et la Neuville près du groupe du chef du 2e bataillon (renseignement fourni par le commandant du 2e batailllon). La 2e salve tombe dans le dos des tranchées de la 8e Compagnie.
Sur demande du chef de bataillon, transmise par le commandant du régiment, l’artillerie allonge son tir et la 3e salve tombe dans la partie droite de la tranchée x.
6h30 : Le 2e bataillon téléphone à nouveau que l’attaque paraît se dessiner. Trois gros paquets qui paraissent les têtes de 3 compagnies sorties de la tranchée x, un autre de la tranchée A mais sous le feu violent de notre infanterie, ils sont rentrés dans leurs tranchées.
6h45 : la 3e salve de notre artillerie dans le secteur 2 vient de tomber dans la partie droite de la tranchée X. L’attaque reprend, les Allemands ressortent de leurs tranchées sauf de X d’où personne ne bougera plus et s’avancent jusqu’à notre réseau de fil de fer.
A la même heure la fusillade s’étend vers Sapigneul où le 3e bataillon est soumis à un feu violent de mousqueterie, mitrailleuses et canon de 77 et 210, sans cependant que de ce côté l’infanterie ennemie sorte de ses tranchées (1 obus tombe sur le poste téléphonique de Sapigneul : 1 adjudant blessé, 4 hommes tués).
Le commandant du 3e bataillon demande directement l’appui de l’artillerie dans le secteur S, les premières salves très courtes ; 3 obus dit-il ensuite, éclatent sur nos tranchées, occasionnant des pertes (2 sergents, 3 hommes).
6h50 : Sous l’action de la fusillade et de la canonnade, l’attaque allemande réintègre ses tranchées [...]"


Le 26 mai 1915, devant la tranchée des Saules, Aix-Noulette, au nord d'Arras

Lors de la préparation d’attaque de l’artillerie, des coups courts de 75 m/m et de torpilles, arrivent juste sur la tranchée des Saules (7 ou 8 coups) et démolissent environ 2 sections des compagnies qui s’y trouvaient, désorganisaient le reste.
Plusieurs messages téléphoniques et rapports portés par plantons furent envoyés sans résultats, de mêmes des fusées.
Un lieutenant d’Artillerie vient lui-même constater les dégâts.
A l’heure fixée par l’attaque, la 8e Compagnie (1ere ligne) essaya de déboucher de la tranchée des saules et fut fauchée par des mitrailleuses allemandes qu’étaient restées intactes.
La 7e Compagnie en sortant de la tranchée de départ subit le même sort, un essai renouvelé au moment de l’attaque marocaine n’obtint pas de meilleurs résultats, personne ne put dépasser les dix pas de départ.
Le reste de ces deux compagnies et une compagnie du 3e Bataillon restèrent dans la tranchée des saules où elles subirent un violent bombardement des batteries d’Angres qui leur firent des pertes.
A 20 heures, le restant des 7e et 8e Compagnies fut rassemblé dans les gourbis et boyaux en arrière de la tranchée des saules où il passa la nuit.
La 6e Compagnie sortit du parallèle en avant de l’ancienne tranchée française à l’heure fixée pour l’attaque, se portant sur les tranchées allemandes des saules. Elle fut reçue par le feu des mitrailleuses encore en position, et perdit près des _ de son effectif avant d’atteindre la ligne allemande. Une quarantaine d’hommes sauta dans la tranchée allemande avec le lieutenant Chamerot et en occupa une partie pendant près de deux heures, combattant à coups de grenades."


No comment

Bien cordialement

Vincent
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gerard mathern
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Re: Entre les lignes...

Message par gerard mathern »

Merci, Vincent, de ces deux récits. Le dernier m'a replongé de nombreuses années en arrière. Mon GP, ancien du 158è RI, me racontait (rarement) l'épisode suivant : C'était une attaque surprise. Devant nous, des marocains avaient attaqué, et beaucoup d'entre eux retombaient morts dans la tranchée à peine sortis. On nous donné l'ordre de marcher à notre tour. Nous avons refusé. Mais pendant des heures nous entendions les blessés qui criaient "Maroc, Maroc". Je ne connais pas la suite. Il était de la classe 14 et a été blessé, puis a terminé la guerre comme infirmier-soldat sans un Hôpital au Havre je crois.
Le 158è était-il impliqué dans le combat auquel vous faites allusion ?

Merci
Bien cordialement.

Gérard Mathern
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vincent le calvez
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Re: Entre les lignes...

Message par vincent le calvez »

Bonsoir Gérard,

Le 158e RI, c'est le régiment de Lorette et c'est l'un des régiments qui a été particulièrement touché lors des nombruses attaques pour prendre la tranchée des saules en mai 1915.

D'ailleurs, il y a un monument dédié à ce régiment :

http://perso.orange.fr/memoiresdepierre ... te158.html

Bien cordialement

Vincent

PS : désolé Alain pour avoir dévié ton fil...
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Jean-Claude Poncet
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Re: Entre les lignes...

Message par Jean-Claude Poncet »

Bonsoir,
A quelle date le 158e RI. a-t-il quitté la région lyonnaise avec armes, bagages et ses effectifs ? En région lyonnaise, il avait au moins un bataillon alpin.
Image

1913 ?
J'ai vu une photo (non datée et non située) montrant le défilé du régiment lors de son arrivée dans sa nouvelle garnison. Serait-ce dans les Vosges ?
Je constate tant pour le régiment d'active que pous sa réserve (le 358e) que la plupart des morts des années 14 et 15 sont originaires de la zone de recrutement du 14e CA. Les documents de mobilisation n'avaient pas dû être mis à jour.
En tous cas, le régiment a été engagé dans les Vosges immédiatement (j'ai un mort le 8 août au col du Bonhomme), puis il combat à Abreschwiller et Saint-Léon, à Menil, à Saint-Benoît.
Vers le 14 septembre on le trouve s'étant déplacé latéralement dans la région de Suippes, Sompuis.
En octobre il est dans le Pas-de-Calais, Bénifontaine, Violaines, Loos.
En novembre il est engagé au Kemmel, à Dickebusch.[img]
Si quelqu'un avait l'historique avec les listes de morts, je suis intéressé à réaliser la numérisation.
Ce qui est aussi à noter c'est que rapidement le dépôt régimentaire a déménagé et s'est retrouvé à Lyon.
Cordialement,
JCP.

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paul73
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Re: Entre les lignes...

Message par paul73 »

Bonjour,
Mon grand-père a fait son service au 158 RI au fort de Vulmix (au-dessus de Bourg Saint Maurice) d'Octobre 1910 à Septembre 1912 avant d'être mobilisé au 97 RI en Août 1914.
Cordialement
Paul
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