Bonsoir à tous,
Amicalement,
Alain MC
Un article de OUEST FRANCE avec une belle photo.
Anne Dompmartin, dermatologue, mène l'étude sur la larvothérapie, au CHU de Caen. Ici, l'un des pansements utilisés, volontairement déchiré pour montrer les asticots qu'il contient. : Jean-Yves Desfoux
Les larves de mouches sont depuis longtemps connues pour leurs propriétés cicatrisantes.Au CHU de Caen, une équipe teste leur action sur des patients volontaires.
CAEN. - Des asticots pour soigner vos plaies, ça vous tente ? L'idée a de quoi faire grimacer. Elle n'a pourtant rien de farfelu. Dès le XVIe siècle, le célèbre Ambroise Paré, père de la chirurgie moderne, décrivait l'effet bénéfique des larves de mouches. Pendant les campagnes napoléoniennes, de nombreux médecins militaires constatèrent également l'utilité des asticots sur les blessures des soldats. Certains de ces bébés insectes ont la bonne idée de ne manger que des tissus morts et d'aider ainsi la plaie à cicatriser.
Avec l'avènement des antibiotiques, le rôle des petites bêtes a été oublié. Mais, notamment devant l'apparition de bactéries résistantes aux médicaments traditionnels, les larves refont surface.
Prisonniers dans un pansement
Au CHU de Caen, depuis mars 2005, on teste leur action sur des patients volontaires. « Au début, ça n'a pas été facile avec les autorités de santé », sourit Anne Dompmartin, la dermatologue qui mène cette étude. Mais la forme sous laquelle se présentent les asticots ménage les âmes sensibles : « Ils sont une vingtaine, prisonniers dans un pansement. La larve libère sa salive à travers le tulle et la ravale. » Le pansement ressemble à n'importe quel autre.
Coûteux - 80 à 120 € l'unité -, il n'est utilisé que pour les plaies infectées ou dites « fibreuses », recouvertes d'une croûte jaunâtre de tissu mort. « Sans ces pansements, on est obligés d'anesthésier la zone à traiter, puis de gratter manuellement », explique la spécialiste.
Avec la « larvothérapie », comme elle la désigne, le soin est beaucoup plus simple. On laisse agir le pansement trois à quatre jours. Il faut juste l'humidifier deux fois par jour pour que les asticots ne meurent pas. Pendant ce temps, « ils se régalent des bactéries multirésistantes ». La plaie est nettoyée en deux semaines.
Deux races uniquement
La conception même du pansement est plus complexe. C'est un laboratoire allemand, BioMonde, qui s'en charge : il sélectionne d'abord deux races précises de mouche, Lucilia sericata et Phormis regina. Contrairement à d'autres, ces larves restent en surface de la peau et ne creusent pas les tissus.
Le labo en recueille les oeufs qui sont stérilisés dans une solution contenant de l'alcool et d'autres composés chimiques. Une fois les larves écloses, elles sont conditionnées sous forme de pansements, puis envoyées par colis urgent. Il ne reste plus qu'à les appliquer.
Déjà 90 patients ont collaboré à cette étude menée « en double aveugle » : on compare les résultats entre patients soignés par les larves et ceux qui reçoivent des pansements traditionnels. Aucun des participants ne sait quel type de traitement lui est prescrit. Pourtant, « certains, qui n'ont pas reçu de pansements avec larves, me disent qu'ils les sentent bouger », sourit la Dr Dompmartin.
Cent vingt personnes au total doivent participer au test. Et confirmer l'efficacité des larves, déjà reconnues comme médicament depuis 2004. Pour soigner des escarres, des plaies chez des diabétiques ou des plaies après une opération ou un traumatisme, ces nouveaux pansements pourraient faire mouche.