"Mort pour la France"

printemps
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Re: "Mort pour la France"

Message par printemps »

Bonjour à toutes et tous,
Quels sont les critères pour être reconnus "Mort pour la France" à la guerre 14-18 ?
Car je possède une fiche d'un soldat qui est mort de maladie pendant la guerre (en tant que soldat),
mais que n'est pas reconnu "Mort pour la France" !
Merci de m'avoir lu et pour ce que vous me répondrez...
Printemps
Rutilius
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Re: "Mort pour la France"

Message par Rutilius »

Bien amicalement à vous,
Daniel.
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obelix
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Re: "Mort pour la France"

Message par obelix »

Bonjour à toutes et tous,
Quels sont les critères pour être reconnus "Mort pour la France" à la guerre 14-18 ?
Car je possède une fiche d'un soldat qui est mort de maladie pendant la guerre (en tant que soldat),
mais que n'est pas reconnu "Mort pour la France" !
Merci de m'avoir lu et pour ce que vous me répondrez...
Printemps
Bonjour Printemps,

Voir aussi:

http://www.legifrance.gouv.fr/affichCod ... ieLien=cid

Cordialement
I prefer to live in peace. Not in pieces.
Rutilius
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Re: "Mort pour la France"

Message par Rutilius »


Bonsoir,
Bel exemple d'anachronisme juridique ! La qualification juridique d’une situation de fait à une date déterminée s’effectue toujours par référence aux seules dispositions législatives et réglementaires alors en vigueur.

« La loi ne dispose que pour l’avenir ; elle n’a point d’effet rétroactif. » (Code civil, art. 2).

En 1803, lors de l’examen de cet article par le Corps législatif, Jean Étienne Marie PORTALIS, l’un des éminents rédacteurs du Code civil, en dégageait ainsi l'exacte portée :

« C’est un principe général que les lois n’ont point d’effet rétroactif. A l’exemple de toutes nos assemblées nationales, nous avons proclamé ce principe. Il est des vérités utiles qu’il ne suffit pas de publier une fois, mais qu’il faut publier toujours, et qui doivent sans cesse frapper l’oreille du magistrat, du juge, du législateur, parce qu’elles doivent constamment être présentes à leur esprit. L’office des lois est de régler l’avenir. Le passé n’est plus en leur pouvoir. Partout où la rétroactivité des lois serait admise, non seulement la sûreté n’existerait plus, mais son ombre même. »

Bien amicalement à vous,
Daniel.
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- Joel Huret -
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Re: "Mort pour la France"

Message par - Joel Huret - »

Ce sujet a été déplacé de la catégorie Forum Pages d'Histoire vers la categorie Pages mémoire: nécropoles - MPLF-MDH par - joel Huret -
sev38
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Re: "Mort pour la France"

Message par sev38 »

Bonjour à tous.
La lecture des propos de Rutilius m'interpelle:
Bel exemple d'anachronisme juridique ! La qualification juridique d’une situation de fait à une date déterminée s’effectue toujours par référence aux seules dispositions législatives et réglementaires alors en vigueur.

« La loi ne dispose que pour l’avenir ; elle n’a point d’effet rétroactif. » (Code civil, art. 2).
Mais alors que dire de la loi du 2 juillet 1915 qui instaure la mention "Mort pour la france" en précisant dans son article 2: "En ce qui concerne les militaires ou civils tués ou morts dans les circonstances prévues par l’article 1er, depuis le 2 août 1914 et dont l’acte de décès ne contiendrait pas, par erreur, omission ou toute autre cause, la susdite mention, l’officier de l'état civil devra, sur avis favorable de l’autorité militaire, inscrire en marge des actes de décès les mots : « Mort pour la France. »" ?
N'y-a-t-il pas là un bel exemple de rétroactivité de la loi sans laquelle les morts antérieurs à la loi du 2 juillet 1915, et nous savons que 14 fut particulièrement meurtrier, auraient tout simplement été dépourvus de cette reconnaissance ?

Merci de vos commentaires.

Cordialement,

Séverine
air339
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Re: "Mort pour la France"

Message par air339 »

Bonjour Séverine,


L'article du Code Civil cité par Daniel/Rutilius trouve sa source dans l'article 8 de la Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen du 26 août 1789 : "nul ne peut être puni qu'en vertu d'une loi établie et promulguée antérieurement au délit".

Et cependant, vous l'avez noté, la loi du 2 juillet 1915 est bien rétroactive ! car une loi peut l'être, dans certains cas prévus, si elle est plus généreuse pour le citoyen concerné. Par exemple, dans le domaine pénal, une nouvelle loi plus favorable permet aux auteurs d'un délit antérieurement commis d'en bénéficier (= remise de peine).

Donc oui, pour reprendre vos termes, il y a un bel exemple de rétroactivité, favorable, ici, aux ayants droits.


Bien cordialement,


Régis
Rutilius
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Re: "Mort pour la France"

Message par Rutilius »

.
Bonsoir à tous,

Mon observation portait sur la question classique de l’application de la loi dans le temps. En la circonstance, j’entendais simplement souligner que les conditions légales posées pour qu’un militaire tué à l’ennemi ou mort durant la Grande guerre soit déclaré « Mort pour la France » étaient normalement celles déterminées par la loi du 2 juillet 1915 « complétant, en ce qui concerne les actes de décès de militaires ou civils tués à l'ennemi ou morts dans des circonstances se rapportant à la guerre, les articles du Code civil sur les actes de l’état civil », telle que modifiée par la loi du 28 février 1922.

Depuis mon intervention, a été publiée l’ordonnance n° 2015-1781 du 28 décembre 2015 relative à la partie législative du Code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre (J.O. 29 déc. 2015, Texte n° 37), qui codifie à nouveau les dispositions antérieurement en vigueur. Au titre Ier [« Mentions et inscriptions sur les monuments commémoratifs »] du Livre V [« Mentions à l’état civil et sépultures »], figure un chapitre Ier intitulé « Mention "Mort pour la France" », qui comporte les articles L. 511-1 à L. 511-5 nouveaux. Or, aux termes de l'article L. 511-4, les dispositions du chapitre en question sont expressément « applicables aux actes de décès dressés ou transcrits depuis le 2 août 1914 ».

—> https://www.legifrance.gouv.fr/jo_pdf.d ... 0031702175

Bien amicalement à vous,
Daniel.
Serge90
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Re: "Mort pour la France"

Message par Serge90 »

Bonsoir à tous,

Merci à Daniel/Rutilius de ces derniers propos documentés. Cependant le contexte juridique et administratif de l’époque a eu pour effet de passer par pertes et profits une catégorie de victimes de la « Grande Guerre » par trop méconnue voir ignorée : les artificiers en charge du désobusage des zones sinistrées par les opérations de guerre. La figure de l’oublié est souvent convoquée à tort et à travers mais s’il y a encore des victimes ignorées de ce conflit, ce sont bien eux. Exemple même de l’aberration liée à une stricte application des lois et instruction alors en vigueur : un artificier militaire tué en service commandé de désobusage le 23 octobre 1919 (veille de la date légale de cessation des hostilités) est reconnu mort pour la France, son collègue tué 2 jours plus tard ne le sera pas ; quant aux artificiers civils (la quasi-totalité étant des soldats démobilisés), qu’ils soient tués en service avant ou après la date légale de cessation des hostilités, nulle démonstration de reconnaissance de la nation pour eux. Aujourd’hui, seules les modifications apportées par le code des pensions militaires ( Article L488 ) permet la reconnaissance du sacrifice de ces hommes, fût-ce au prix d’un « anachronisme juridique » et passons sur le fait qu’ils sont alors assimilés à des victimes fortuites d’explosion d'engins de guerre.

Bien cordialement,

Serge

sev38
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Re: "Mort pour la France"

Message par sev38 »

Bonjour à tous,

Merci à Rutilius de ces précisions et de son expertise, ainsi que Régis et Serge pour les commentaires qui nous montrent bien les limites d’une stricte application du principe de non rétroactivité de la loi peut conduire à des aberrations. Par ailleurs il est vrai que la date du 24 octobre 1919 retenue par l’instruction ministérielle du 11 janvier 1922 a conduit à exclure du bénéfice de la reconnaissance nationale bien des victimes de guerre, comme le démontre serge avec l’exemple des démineurs morts en opération de désobusage qui avaient pourtant toute leur place sur les livres d'or communaux. D’où l’intérêt de la rétroactivité de certains articles du Code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de guerre s'ils peuvent réparer ces oublis car il y a bien eu des oubliés sur les MAM contrairement à ce qu'on peut notamment lire sur le fil suivant:
pages1418/qui-cherche-quoi/oublie-monum ... 3696_1.htm

Cordialement,

Séverine
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