disparu, prisonnier, ou mort ?

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touille
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Re: disparu, prisonnier, ou mort ?

Message par touille »

Bonjour à tous,
J'essaie de comprendre les circonstances de la mort de mon grand-oncle:
Jean Antoine Marie ROUCHOUSE, né à Saint Etienne le 12/8/1894, adjudant au 317° RI, 16° Cie, mort à Massiges le 6 mars 1916.
Voici les infos dont je dispose, qui sont contradictoires:
1) sa fiche matricule mentionne :"disparu le 6 mars 1916 à Massiges. Décédé le 6 mars 1916 par suite de blessure par balle au coeur. Avis officiel du 30 juin 1920"
2) le site Mémoiredeshommes le mentionne dans les Morts pour la France, avec l'avis "tué à l'ennemi" et un jugement rendu par le Tribunal de la Seine le 20 février 1920
3) il y a dans les registres d'état civil de Paris un acte de décès faisant référence à ce jugement et indiquant "décédé des suites de ses blessures"
4) le JMO du 317 ° RI fait apparaître Jean Rouchouse dans la liste des disparus le 6 mars 1916.
5) j'ai retrouvé une photo de Jean Rouchouse dans les papiers de famille, avec écrit au dos de la main de son père: "mon petit Jean, tué le 6 mars 1916 par un schrapnel français à Massiges", inscription non datée.
6) toujours dans les papiers de famille, j'ai trouvé plusieurs lettres de membres de la famille à destination des parents de Jean Rouchouse, datées de mars-avril 1916, et se réjouissant que Jean soit prisonnier, et non mort ou blessé. Par contre, je n'ai trouvé aucune trace d'un avis à la famille comme quoi il aurait été fait prisonnier.
7) sur le site de la Croix Rouge, il y a une fiche à son nom, mentionnant "fait prisonnier le 7 mars 1916, combats en Champagne près de Valmy", mais aucune cote exploitable, et indiqué "négatif envoyé 28/3/16". J'ai d'ailleurs retrouvé ce courrier négatif dans les archives familiales. Par contre, plusieurs autres Poilus de la même compagnie portés disparus le même jour, ont bien été prisonniers, et on retrouve leur parcours dans les camps de prisonniers sur le site de la Croix Rouge.
8) enfin, la mémoire orale familiale, rapportée par mon beau-père de 86 ans, qui le tenait de sa mère, soeur de Jean Rouchouse, raconte ceci: Jean Rouchouse, bien que sous-officier, avait une arme de poing, donnée par son père armurier de profession. Fait prisonnier, et ayant entendu des insultes proférées par l'officier allemand qui les gardait, à l'égard de l'armée française (il travaillait à Paris dans une joaillerie et parlait allemand), il aurait sorti son arme et tué l'officier. Il aurait été immédiatement abattu. Cette histoire aurait été rapportée à ses parents par un de ses compagnons d'armes, mais son nom n'est pas parvenu jusqu'à nous.
9) pas de sépulture connue

Est-il envisageable de démêler cette histoire, ou au moins de mieux comprendre ce qui a pu se passer.
Merci d'avance pour toute piste de recherche.
Bonne journée à tous.
Pierrette
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Arnaud Carobbi
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Re: disparu, prisonnier, ou mort ?

Message par Arnaud Carobbi »

Bonjour Pierrette,

Le meilleur moyen d'éviter de partir dans les "moi ma théorie préférée c'est..." qui ne repose que sur des impressions, serait d'accéder aux documents ayant permis l'établissement du jugement rendu par le tribunal de la Seine. L'hypothèse la moins probable (mais pas impossible...) me paraît tout de même être celle de la capture et du décès suivi de la perte de son identité par les Allemands. Les Allemands établissaient des listes des blessés décédés et des hommes inhumés puis les fournissaient aux Français (et vice versa) ; ces documents sont d'ailleurs très présents dans les dossiers de disparus que j'ai pu consulter dans quelques AD.

La seule certitude que vous avez pour l'instant, c'est qu'il n'y a eu au plus qu'un témoin de sa disparition parmi les hommes non capturés. S'il y en avait eu deux, il aurait eu son acte de décès rédigé. Dans le cas présent, c'est un acte de disparition (établi lorsqu'il n'y a aucun témoin ou qu'un seul témoin concernant le sort d'une personne).

La plupart des indications viennent de ce jugement : la fiche MDH (2), la mention sur la fiche matricule (1), le registre d'état civil (3)
Concernant l'éventuelle capture, il était fréquent que les familles de disparus fondent des espoirs sur elle, surtout si un ou plusieurs camarades ont écrit qu'ils pensaient qu'il était prisonnier ou que de nombreux hommes ont été capturés le jour de sa disparition. Souvent, on ne dispose plus que d'une petite portion des échanges épistolaires réalisés à cette occasion.

Si les documents des dossiers de jugement sont conservés, il peut y avoir des clefs. Dans le cas contraire, comment départager une hypothèse plutôt qu'une autre ?
A mon avis, si aucune source n'apporte d'informations complémentaires, il sera très difficile - voire impossible - de savoir si un récit est plus à retenir qu'un autre. S'il a effectivement été tué comme l'indique le (8), il a pu y avoir un ou plusieurs témoins prisonniers interrogés lors d'enquêtes réalisées pendant la guerre ou à leur retour de captivité pour trouver la trace de disparus. Un tel fait, même modifié, a pu être consigné et... mis dans le dossier pour le tribunal. Sauf s'il n'y a eu aucun témoin ou si aucun n'a survécu. Tout cela dans l'hypothèse qu'il ne soit pas mort isolé. Beaucoup de "si". Et il faut que les documents aient été conservés lors de l'archivage...

Je reviens toujours à la même source. Série U aux Archives de Paris je pense.

Bonnes recherches,
Bien cordialement,
Arnaud
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touille
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Re: disparu, prisonnier, ou mort ?

Message par touille »

Bonsoir à tous. Merci à ceux qui m'ont répondu si vite, je constate que ce forum est plein de gens très compétents et coopératifs. A force de repasser les éléments du problème dans tous les sens, je finissais par ne plus rien comprendre. Des regards neufs et extérieurs sont vraiment les bienvenus. Mais vos réponses montrent que la vérité est loin d'être acquise, ce dont je me doutais...
Comment obtenir le dossier du jugement de décès, ce n'est pas en ligne. Suffit-il d'écrire aux Archives de Paris avec la date de jugement? Je me suis déjà fait jeter une fois pour un registre matricule, dont on m'a dit qu'on ne l'envoyait plus par la poste. Alors un jugement ! La seule solution serait-elle d'aller à Paris ?
En tout cas, merci encore et à bientôt.
Pierrette
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Arnaud Carobbi
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Re: disparu, prisonnier, ou mort ?

Message par Arnaud Carobbi »

Bonjour à nouveau,

Je tiens à préciser qu'à aucun moment je n'ai parlé du jugement dont on sait déjà la quasi totalité de ce qu'il contient, mais des pièces réunies qui ont servi à établir le jugement : acte de disparition, correspondance avec le dépôt, avec la mairie du domicile, témoignages de prisonniers français ou de soldats de l'unité, de civils de la commune de décès (pour les combats de la guerre de mouvement), actes d'autres corps dans le cas d'une inhumation par une autre unité... La diversité des documents est très grande mais aussi très aléatoire suivant le cas.

Monte au créneau :
"Quelqu'un l'aurait vu "blessé d'une balle au cœur" et aurait transmis l'information qui finalement serait arrivée jusqu'à être collationnée : Miracle !"
. Consultez quelques dossiers, vous serez surpris. Mais ce ne sera pas noté dans le jugement tel quel.

Je pense qu'il faut aller aux Archives de Paris, sans aucune garantie que les dossiers aient été conservés.
S'il était conservé dans ce cas, il serait possible de recouper les informations disponibles et peut-être d'y voir plus clair. Je n'ai jamais écrit non plus qu'il faut prendre tout ce qui est écrit ou dit comme vrai ; c'est le recoupement qui permet de se rapprocher du vrai.

Cordialement,
Arnaud
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b sonneck
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Re: disparu, prisonnier, ou mort ?

Message par b sonneck »

Bonjour,

En mars 1916, le 317e RI formait, avec le 130e RI, la 15e brigade de la 8e DI. Les JMO du 130e RI, de la 15e brigade et de la 8e DI existent et peuvent donc être consultés pour avoir une idée de ce qui s'est passé le 6 mars.
A titre indicatif, en relisant ce que j'avais écrit dans le fascicule "1916" de l'opuscule sur les régiments de la Mayenne dans la Grande Guerre, je vois le paragraphe suivant : "Une attaque menée avec lance-flammes le 6 mars permet aux Allemands d'atteindre v la 2e ligne dans le secteur du 115e et du 317e ; le terrain perdu sera repris les deux jours suivants, "presque uniquement à la grenade" selon le journal de la division".
Le 115e RI formait, avec le 117e, l'autre brigade (la 16e) de la 8e DI.

Cordialement
Bernard
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touille
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Re: disparu, prisonnier, ou mort ?

Message par touille »

Merci à tous pour vos réponses, cordialement. Pierrette
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