Re: Artillerie Spéciale - La carrière char du Canonnier Henri Trémeau

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Tanker
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Re: Artillerie Spéciale - La carrière char du Canonnier Henri Trémeau

Message par Tanker »

Bonjour,

Fin 2011, aux éditions Gilles Platrier, était publié le parcours de guerre de Claude Henri Trémeau qui,
de l'Artillerie, passa dans l'Artillerie Spéciale, pour finalement finir la guerre comme pilote de chasse.

Ce livre a déjà été évoqué dans la partie aviation du forum :

pages1418/aviation-1914-1918/henri-trem ... 1787_1.htm

Sur les 165 pages de ce livre, le passage dans les chars d'Henri Trémeau
représente une page de texte et 4 pages de photos (Page 16 et 18 à 21).

Au premier abord peu de chose, et finalement pas mal d'informations et de photos intéressantes,
même si texte et légendes des photos présentent un certain nombre d'erreurs.

Né en 1998, Claude Henri Trémeau, venant de réussir (en Juin 1916) son baccalauréat.
Il décide de s'engager pour la durée de la guerre, afin de profiter de l'opportunité de choisir son arme.
Son intention était alors déjà, semble-t-il, de rentrer dans l'aviation.

L'aviation ne recrutant pas directement, il choisit l'artillerie et se retrouva affecté,
le 18 Octobre 1916, au 85° RALT de Dijon.
Il a probablement, assez rapidement, rédigé sa demande pour servir dans l'aviation,
et cette demande finira par le rattraper quelques mois plus tard . . . .

En Mars 1917, il est, suite à une des demandes de la Direction de l'Artillerie, affecté dans l'Artillerie Spéciale.
Pour une raison, non expliquée dans le livre, mais probablement en lien avec son envie d'être affecté dans une
"arme savante", plutôt que dans une unité d'infanterie, il se déclare "Electricien", lors de son conseil de révision.

C'est, de manière certaine, cette spécialité qui le fera sélectionner pour l'AS. Les électriciens étaient alors
très recherchés par l'AS, et cette spécialité faisait partie des critères de sélection prioritaire.

Ses chefs n'ont pas eu besoin de le sélectionner parmis les "fortes têtes et mal vus" dont il était alors, effectivement
assez facile, pour les unités sollicitées, de se débarrasser lors de ces prospections de personnels !

Le Canonnier Henri Trumeau arrive donc à Marly-le-Roi le 1° Mars 1917, et la seule page de texte du livre, ne fournit
malheureusement, pas énormément de détails sur son séjour à la 80° Batterie du 81° RALT du Trou d'Enfer.

Image

Ses commentaires sur le Schneider, le Saint Chamond et l'engagement des Schneider le 16 Avril 1917 sont, pour
le moins légers : "Les survivants furent rares" à propos des combats des Groupements Bossut et Chaubès . . . . .
Son affectation "500° RAS" en 1917, se retrouve dans sa Fiche Matricule et même si les futurs pilotes restaient
probablement sous contrôle de leur ancienne unité durant leur formation initiale, il s'agissait alors du 81° RALT.

Il mentionne simplement dans cette page qu'il est affecté comme mécanicien . . . . . .

Etait-il destiné à servir comme mécanicien, dans un Groupe de chars ou dans une SRR, devait-il rester au trou
d'Enfer ou être affecté à Cercottes ou Champlieu pour l'entretien des chars ? Cette courte page n'en dit rien !

Dans ce livre, écrit en trois périodes, il est difficile de cerner ce qui est "brut d'époque" de souvenirs remis
en forme quelques années plus tard :
- Quel a été son rôle au Trou d'Enfer en Mars et Avril 1917 à Marly-le-Roi ?
- Dans lequel des trois forts a-t-il été logé ?
- Où se situaient les baraquements d'instruction et les hangars ?
- Quel était son rythme de travail, à quel cours a-t-il assisté ?

Autant de points qui restent sans réponse. Le Centre AS du Trou d'Enfer reste assez mystérieux car, peu
de photos (autres que celles de chars) on été faites et peu de récits en parlent avec beaucoup de précision.

Une chose est certaine il envoyé à l'Usine FAMH de Saint Chamond, et affecté à l'atelier tracteurs blindès, pour un mois de stage.
C'était le sort réservé à tous les mécaniciens destiné aux chars Saint Chamond et c'est probablement plus de 3000 Officiers,
Sous-Officiers et Hommes du Rang qui sont passés dans les usines des différents constructeurs de chars de fin 1916 à fin 1918.

Malheureusement pas de détails très intéressants sur ce stage à Saint Chamond, ni d'aillleurs sur son emploi et ses activités
comme comme mécano sur char, au Trou d'Enfer durant le mois de Juin 1917.
Même pas la moindre ligne sur la vie de tous les jours et les sorties en ville . . . .

Le 1° Juillet 1917, la demande d'affectation aviation d'Henri Trémeau le rattrape et il quitte l'AS après quatre mois et un stage
de mécanos qui lui a sans doute apporté une base de qualification technique qu'il n'avait certainement pas avant . . . .

Il est intéressant de noter qu'à Saint Chamond, ses camarades de stage et les ouvriers avec qui ils travaillaient,
découvrant qu'il était bachelier et n'avait aucune qualification d'électricien ne semblent pas avoir apprécié cette "dissimulation". . . .
Il est probable que pour ces ouvriers, ce bachelier aurait du être officier au front et non avec eux.
Affectés en usine (et pas au front) il ne jugeaient certainement pas que leur place était le résultat d'une magouille
permettant d'éviter le Front, ce d'autant que bon nombre d'entre-eux, rappelés par leurs usines, n'y faisaient parfois
que quelques mois, avant de rejoindre leur unité au Front . . . .
Les archives du Service Automobile sont pleines de demandes de rappels de personnels qualifiés par des industriels,
rappels destinés à traiter des aspects très spécifiques de la construction des chars.

Le passage par l'Artillerie Spéciale, pour rejoindre l'aviation était une filière connue. Le Général Estienne,
par ses notes du 30 Juin 1917 et du 31 Octobre 1917 rappellera qu'il n'appuyait pas ces demandes qui,
il faut le reconnaître laissaient partir des personnels d'expérience, parfois formés depuis plusieurs mois sur les chars . . .

Dans ce livre, concernant les chars, ce sont, bien entendus les 4 pages de photos qui sont intéressantes:

Pages 18 :

Image

Légende photo 1 :

"Tracteur agricole et de travaux publics américains Caterpillar avec chenilles. Les chars français
ont copiés ses chenilles. Il était utilisé à Saint Chamond pour apprendre à piloter les chars."


Légende photo 2 :

"Caisse blindée sur chenille - Un des premiers prototypes de chars de combats. Certains ont servi pendant la première
bataille du 18 Juin 1918 vers Villers-Cotterets pour approvisionner l'infanterie en munitions sur le champ de bataille même".


Les photos 1 et 2 sont très intéressants. Il s'agit du hangar d'aviation de type Bessonneau, installé au Trou d'Enfer,
pour servir d'atelier. Il est ici photographié sans la tente recouvrant l'armature métallique. Il était, probablement,
encore en cours d'installation, lors de ces prises de vue.

Trois types de matériels y ont été photographiés :
- des caterpillars Baby-Holt de 45 cv
Si la présence de Baby-Holt au Trou d'Enfer était connue, leur nombre n'est pas précisé dans les documents
et il est probable que les nombreuses pannes (souvent pour manque de pièces), immobilisant les premiers
Schneider et Saint Chamond, ont été paliées par quelques Holt supplémentaires.

- un Schneider CA1 M1
Ce Schneider M1 est au standard de base sans surblindage et porte-bagages.
En Mars 1917, la priorité allait aux chars des Groupements Chaubès et Bossut qui allaient être engagés en Avril.
Il est intéressant de noter qu'il n'a pas le feu avant des chemins de fer et un phare, apparemment, plus gros que
ceux habituellement montés sur les chars Schneider.

- le prototype du Schneider de commandement de type CA 2.

Ce prototype, testé à Champlieu le 26 Mars 1917, ne répondait pas aux besoins exprimés par le Général Estienne.
La demande de l'affecter à Marly-le-Roi, comme char d'instruction a été fait le 8 Avril 1917, et ce char étant toujours
présent à Champlieu fin Mai, le Général réclamera de nouveau son envoi au Trou d'Enfer le 23 Mai 1917.
Ces deux photos ont donc été réalisées en Juin 1917, au retour d'Henri Trémeau de son stage à la FAMH.

La légende photo concernant ce char prototype est totalement fausse.
Il s'agit bien d'un prototype, mais pas celui d'un char de rang !

Ce char prototype a déjà été évoqué ici :

pages1418/Pages-d-Histoire-Artillerie/A ... _377_1.htm

et ces photos de l'album du MdL Bonneville (AS 12) ont fait l'objet d'un article de François Vauvillier,
dans la revue GBM n° 109 (page 41 à 45) de l'été 2014.

Les combats de début Juin, avec les chars, sont ceux de Méry et pas plus que ceux à l'Est de Villers-Cotterets (ou d'ailleurs !)
ont été utilisés, par les français, de chars destinés à "approvisionner l'infanterie en munitions sur le champ de bataille".

La suite de la carrière du prototype de CA 2 n'est pas connue. Ce char peut avoir fini en pièces de rechange
au Trou d'Enfer, à moins qu'il ait été envoyé à Cercottes lors du déménagement de Décembre 1917.
C'est, en effet, en Décembre 1917 que le Camp AS de Marly-le-Roi sera fermé et que la 80° Batterie du 81° RALT
rejoindra, au Camp de Cercottes, les 81° et 82° Batterie.

Légende photo 3 :

"Char saint Chamond prototype à l'essais".

Ce Saint Chamond M1 n'est pas un prototype à l'essai.
Il s'agit d'un char de rang, photographié à Saint Chamond sur le terrain d'essais de l'Horme.
A droite de la photo, 4 cheminées des usine et en arrière plan les lignes de premières crêtes du massif du Pilat.
Le char est en camouflage usine et porte son numéro 3 chiffres, comme il était d'usage en sortie d'usine.
Il pourrait s'agir :
du St Chamond M1 numéro 62474 (affecté au Groupe AS 36 en Mai 1917),
du numéro 62494 (qui pourrait être resté à St Chamond pour test et essais)

Pages 19 :

Image

Légende photo 4 :

" Char Schneider ayant perdu une chenille après avoir sauté sur une mine"

Ce char Schneider est photographié devant un des hangars installé au Trou d'Enfer.
Il est en parfait état, peint en camouflage usine et déjà équipé du surblindage.
Cette photo date probablement de Juin 1917, date à laquelle les Schneider ont commencé à être livrés en surblindage monté en usine.
La porte latérale, les réservoirs arrière et les porte-bagages ne sont pas encore installés.
Ce char est en parfait état et n'a absolument pas pu sauter sur une mine au Trou d'Enfer.
Les chars français ne découvriront les mines que dans les combats de l'été 1918.
Les arbres en arrière sont probablement ceux de l'allée du plateau qui longeait le fort du Trou d'Enfer.

Légende photo 5 :

" Cinq homme entassés dans l'intérieur d'un char Saint Chamond, avril 1916"

Ce Saint Chamond est un M2 et la photo a du être faite à l'Usine, ou sur le terrain d'essais de FAMH.
Les premiers M2 livrés à Champlieu le 27 Avril 1917, sont 8 Chars caisson, qui seront refusés par
le Général Estienne et renvoyé en usine.
La production des Saint Chamond M2 de rang avait donc bien commencé, et c'est donc à l'usine
qu'Henri Trémeau et ses camarades de stage ont découvert cette version.
La date 1916 est une coquille (il s'agit bien de 1917) et plus vraisemblablement au mois de Mai.

Pages 20 :

Image

Légende photo 6 :

" Char Saint Chamond - Deux prototypes de char pétroléo-electrique aux essais à Marly-le-Roi. Ils sont encore dépourvus de tout armement "

Cette photo, donnée comme prise à Marly-le-Roi, a été faite à Saint Chamond, sur le site d'essais de la FAMH.
Le terrain n'est pas plat et limité par les bois du parc de Marly, comme autour des hangars AS du Trou d'Enfer.

Ces deux St Chamond M2 sont bien équipés de leur armement et juste aux essais avant d'être envoyé à Cercottes.
Ils portent le marquage usine avec N (en place de 62).
Sortant d'usine, ils seront livrés à Cercottes sans leur casemate chef de char.
Le n° 62643, d'abord affecté au Groupement AS n° XIII, est affecté en Janvier 1918 au Groupement AS n° XII et sera,
en Juillet 1918, au sein de la 2° Batterie du Groupe AS 37, le char du MdL Marmagne (char détruit à l'Est de Missy-au-Bois
le 19 Juillet 1918) et le n° 62644 a été affecté au Groupe AS 38.
Premier char de la 3° Battarie et commandé par le Lt Dhaille, il sera détruit le 11 Juin 1918 dans le secteur de St Maur (Bataille de Méry).

Légende photo 7 :

" Détail des chenilles du char Saint Chamond"

Il s'agit probablement ici d'un char caisson et cette photo a sans doute été faite à Saint Chamond.
Comme sur les premières séries, le char est sans double blindage, avec longerons verticaux et plaques
bouchant des trappes supprimées.

Légende photo 8 :

" Char Schneider. L'entretien des chars étaient très salissant. Nous n'arrivions plus à avoir linge et costume propres"

Toujours au Trou d'Enfer, il s'agit du Schneider M1 déjà commenté en page 19.

Pages 21 :

Image

Les deux photos (photo 9 et 10) prises à l'usine de Saint Chamond, permettent d'identifier quelques compagnons d'Henri Trémeau à l'AS.

il est possible que la collection photo d'Henri Trémeau comporte d'autres photos en lien avec l'AS.
Il reste donc à les consulter . . .
Il est par ailleurs possible que le brut de ses notes contiennent d'autres indications que son fils et
son éditeur n'ont pas jugé utile de mentionner, ou dont l'intérêt a pu leurs échapper.

A suivre donc . . . Michel
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Liens sur les sujets Artillerie Spéciale de "Pages 14-18" :
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