(...suite)
Lundi 21. — L'aube arrive : pas de nouvelles de l'assaut ; par contre, la pluie redouble. Du côté des Allemands, la position ne doit pas être beaucoup plus gaie. Ils défendent la route qui aboutit au pont de Steenstraete et l'angle du champ de betteraves, où les racines achèvent de pourrir. Entre nous, d'anciennes tranchées pleines d'eau et de cadavres, et tout au pied des fils de fer ennemis, une longue rangée de marins, dans l'attitude du tirailleur rampant, qui ont été fauchés et immobilisés dans la mort par quelque mitrailleuse.
Nos 75 tonnent dans la journée contre les tranchées d'en face ; les Allemands ripostent en nous arrosant. Ma section n'a pourtant qu'un seul blessé. Il pleut de la neige fondue, et mes hommes n'ont rien pour se couvrir. Dans quel état seront-ils à l'heure de l'attaque ?
(à suivre...)
Journal d'un fusilier marin
Re: Journal d'un fusilier marin
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Le cœur des vivants doit être le tombeau des morts. André Malraux.
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Re: Journal d'un fusilier marin
(...suite)
Mardi 22. — De très bon matin, les ordres arrivent : on juge, non sans raison, notre bataillon trop épuisé par ses trente-six heures de bain glacé, pour le pousser en avant. A quatre heures du matin, ma section se serre sur les trois autos, pour laisser la place aux compagnies du bataillon de Kerros qui vont entrer en danse. L'offensive va se faire par l'angle saillant de la ligne et le petit bois. Dès le jour, à six heures quinze, la préparation d'artillerie se déclanche. Petits nuages de fumée noire suivis du bruit sec, déchirant, de l'explosion ; en l'air, de la terre et des débris. Cela cesse bien vite à notre gré. Les fils de fer n'ont pas dû être bien ratissés. Tandis que nous restons immobiles dans nos mares stagnantes, la 5ème compagnie (capitaine Feillet), la 7ème (capitaine Barthal), la 8ème (capitaine Ravel) attaquent. Petit crépitement de fusillade. Brusquement, sur la tranchée en face de nous, à 300 mètres, on voit trois ou quatre marins. « Cessez le feu. Ce sont les nôtres. La tranchée est prise. » Hélas ! ce sont quelques prisonniers. La vague d'assaut s'est brisée sur les réseaux de fils de fer. Barthal a disparu avec la plus grande partie de sa compagnie. Feillet est tué d'une balle au moment où il réussissait à regagner l'abri de sa tranchée. Ravel est blessé. L'officier des équipages Le Bolès, de la compagnie Barthal, ne peut rentrer qu'à la nuit, après avoir passé les heures de lumière dans un trou d'obus rempli d'eau.
Triste journée pour nous, qui avons dû voir une partie de ces choses. Nous subissons un peu le contre-coup, l'arrosage par l'artillerie grondant comme un essaim dont on a dérangé la ruche. Aucune contre-attaque ne se déclanche cependant. Le capitaine et moi, claquant des dents côte à côte, et nous moquant mutuellement de nos grimaces, essayons vainement de nous réchauffer par l'ardeur d'une discussion philosophique sur l'espace et le continu !
Le soir, la 6ème du 2ème (Le Bigot) nous relève au moment où nous achevions d'ensevelir nos deux morts et d'évacuer nos quatre blessés. Bien peu de chose auprès de la secousse revue par nos camarades.
(à suivre...)
Mardi 22. — De très bon matin, les ordres arrivent : on juge, non sans raison, notre bataillon trop épuisé par ses trente-six heures de bain glacé, pour le pousser en avant. A quatre heures du matin, ma section se serre sur les trois autos, pour laisser la place aux compagnies du bataillon de Kerros qui vont entrer en danse. L'offensive va se faire par l'angle saillant de la ligne et le petit bois. Dès le jour, à six heures quinze, la préparation d'artillerie se déclanche. Petits nuages de fumée noire suivis du bruit sec, déchirant, de l'explosion ; en l'air, de la terre et des débris. Cela cesse bien vite à notre gré. Les fils de fer n'ont pas dû être bien ratissés. Tandis que nous restons immobiles dans nos mares stagnantes, la 5ème compagnie (capitaine Feillet), la 7ème (capitaine Barthal), la 8ème (capitaine Ravel) attaquent. Petit crépitement de fusillade. Brusquement, sur la tranchée en face de nous, à 300 mètres, on voit trois ou quatre marins. « Cessez le feu. Ce sont les nôtres. La tranchée est prise. » Hélas ! ce sont quelques prisonniers. La vague d'assaut s'est brisée sur les réseaux de fils de fer. Barthal a disparu avec la plus grande partie de sa compagnie. Feillet est tué d'une balle au moment où il réussissait à regagner l'abri de sa tranchée. Ravel est blessé. L'officier des équipages Le Bolès, de la compagnie Barthal, ne peut rentrer qu'à la nuit, après avoir passé les heures de lumière dans un trou d'obus rempli d'eau.
Triste journée pour nous, qui avons dû voir une partie de ces choses. Nous subissons un peu le contre-coup, l'arrosage par l'artillerie grondant comme un essaim dont on a dérangé la ruche. Aucune contre-attaque ne se déclanche cependant. Le capitaine et moi, claquant des dents côte à côte, et nous moquant mutuellement de nos grimaces, essayons vainement de nous réchauffer par l'ardeur d'une discussion philosophique sur l'espace et le continu !
Le soir, la 6ème du 2ème (Le Bigot) nous relève au moment où nous achevions d'ensevelir nos deux morts et d'évacuer nos quatre blessés. Bien peu de chose auprès de la secousse revue par nos camarades.
(à suivre...)
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Re: Journal d'un fusilier marin
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Mercredi 23. — Que la ferme où nous cantonnons est donc sordide ! La saleté de tout, de la fermière (que nos marins ont surnommée la Joconde à cause d'une beauté absente), des meubles, des ustensiles, tout cela nous choque, même au retour de la tranchée la plus boueuse qui ait jamais laissé des traces sur nos vêtements !
Je m'attendais un nombre de malades formidable : trente hommes seulement à la visite. Cela fait plus de cent pour le bataillon. Un gradé me dit : « C'est que la visite a lieu le matin, et les plus fatigués n'ont pas voulu bouger de leur paille. Vous verrez demain. »
Des ballots d'effets chauds nous arrivent, avec des gâteries, de petites lettres aimables auxquelles on répond avec enjouement.
(à suivre...)
Mercredi 23. — Que la ferme où nous cantonnons est donc sordide ! La saleté de tout, de la fermière (que nos marins ont surnommée la Joconde à cause d'une beauté absente), des meubles, des ustensiles, tout cela nous choque, même au retour de la tranchée la plus boueuse qui ait jamais laissé des traces sur nos vêtements !
Je m'attendais un nombre de malades formidable : trente hommes seulement à la visite. Cela fait plus de cent pour le bataillon. Un gradé me dit : « C'est que la visite a lieu le matin, et les plus fatigués n'ont pas voulu bouger de leur paille. Vous verrez demain. »
Des ballots d'effets chauds nous arrivent, avec des gâteries, de petites lettres aimables auxquelles on répond avec enjouement.
(à suivre...)
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Re: Journal d'un fusilier marin
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Jeudi 24. — Ca y est. Mon gradé avait raison : soixante-dix hommes à la visite pour ma seule compagnie, ce matin. Peu de pieds gelés, disent les médecins, mais beaucoup de rhumatismes, d'engelures, de diarrhées.
Les renforts ne sont pas encore arrivés pour boucher les vides faits dans le 1er régiment par les deux offensives du 17 et du 22, qu'il a supportées à peu près seul. On refond donc provisoirement le régiment à deux bataillons, en rendant aux compagnies leur 4ème section. Les compagnies sont un peu plus fortes, voilà tout. Mais nous gardons notre numérotage de bataillons et de compagnies. Le 1er bataillon n'est pas mort, il est éclipsé ad tempus.
Encore des effets chauds et des cadeaux de Noël. On nous gâte. Tout le monde a sa part.
Ce soir, nous nous rapprochons du feu, mais pour rester en deuxième ligne, disséminés par compagnies, en cantonnement d'alerte. Passé la nuit de Noël dans une très belle ferme, intacte, non loin des ruines de Zuydschoote. Comme réveillon, les 75 donnent un concert, par une belle nuit à peine embrumée, sous un froid presque sec.
(à suivre...)
Jeudi 24. — Ca y est. Mon gradé avait raison : soixante-dix hommes à la visite pour ma seule compagnie, ce matin. Peu de pieds gelés, disent les médecins, mais beaucoup de rhumatismes, d'engelures, de diarrhées.
Les renforts ne sont pas encore arrivés pour boucher les vides faits dans le 1er régiment par les deux offensives du 17 et du 22, qu'il a supportées à peu près seul. On refond donc provisoirement le régiment à deux bataillons, en rendant aux compagnies leur 4ème section. Les compagnies sont un peu plus fortes, voilà tout. Mais nous gardons notre numérotage de bataillons et de compagnies. Le 1er bataillon n'est pas mort, il est éclipsé ad tempus.
Encore des effets chauds et des cadeaux de Noël. On nous gâte. Tout le monde a sa part.
Ce soir, nous nous rapprochons du feu, mais pour rester en deuxième ligne, disséminés par compagnies, en cantonnement d'alerte. Passé la nuit de Noël dans une très belle ferme, intacte, non loin des ruines de Zuydschoote. Comme réveillon, les 75 donnent un concert, par une belle nuit à peine embrumée, sous un froid presque sec.
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Re: Journal d'un fusilier marin
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Vendredi 25 décembre. Noël ! — L'aumônier est venu jusqu'à nous et célèbre, ce matin, la messe de Noël, dans la grange où couchent nos hommes, sur une paille qui forme un vrai décor de crèche. Nous avons, pour festoyer joyeusement, les cadeaux reçus d'un peu partout. Même, sur la table du chef de bataillon cantonné avec nous, un minuscule vase de cuivre supporte un petit bouquet de fleurs artificielles venues de France. Je ne sais si les Allemands furent gais, là-bas, du côté de Bixchoote. En tout cas, nous l’étions bien franchement et bien doucement.
Sur l'emplacement quitté par une batterie de 75, nos hommes, cassant la glace des trous pleins d'eau, font la corvée de ramassage des douilles et résidus. La batterie dut rester là plusieurs jours, car nous recueillons plus de trois mille douilles. Cependant aucun des nombreux obus percutants qui lui furent adressés n'arriva exactement au but. Les trous dans le sol prouvent un encadrement ; pas une empreinte à moins de 30 mètres ; pourtant un aéroplane avait repéré la position, comme le prouve une longue banderole encore lestée d'un caillou et portant un télégramme triomphant au sujet de quelque victoire sur les Russes.
(à suivre...)
Vendredi 25 décembre. Noël ! — L'aumônier est venu jusqu'à nous et célèbre, ce matin, la messe de Noël, dans la grange où couchent nos hommes, sur une paille qui forme un vrai décor de crèche. Nous avons, pour festoyer joyeusement, les cadeaux reçus d'un peu partout. Même, sur la table du chef de bataillon cantonné avec nous, un minuscule vase de cuivre supporte un petit bouquet de fleurs artificielles venues de France. Je ne sais si les Allemands furent gais, là-bas, du côté de Bixchoote. En tout cas, nous l’étions bien franchement et bien doucement.
Sur l'emplacement quitté par une batterie de 75, nos hommes, cassant la glace des trous pleins d'eau, font la corvée de ramassage des douilles et résidus. La batterie dut rester là plusieurs jours, car nous recueillons plus de trois mille douilles. Cependant aucun des nombreux obus percutants qui lui furent adressés n'arriva exactement au but. Les trous dans le sol prouvent un encadrement ; pas une empreinte à moins de 30 mètres ; pourtant un aéroplane avait repéré la position, comme le prouve une longue banderole encore lestée d'un caillou et portant un télégramme triomphant au sujet de quelque victoire sur les Russes.
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Re: Journal d'un fusilier marin
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Samedi 26. — L'heure des relèves varie naturellement pour éviter l'arrosage. Cette nuit, départ très tard pour la tranchée.
(à suivre...)
Samedi 26. — L'heure des relèves varie naturellement pour éviter l'arrosage. Cette nuit, départ très tard pour la tranchée.
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Re: Journal d'un fusilier marin
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Dimanche 27. — C'est déjà dimanche depuis deux heures, quand nous arrivons au poste, toujours dans le même secteur que la dernière fois, mais non dans la même tranchée. La compagnie forme l'extrême droite de notre ligne, dans le petit bois, et, en prenant contact avec nos voisins de droite, c'est avec un officier du 20ème corps que je m'entretiens un instant. La tranchée est un peu meilleure que la précédente, un peu plus solide, guère moins humide. Temps gris, quelques ondées. Pour s'abriter, nos hommes fouillent de nuit le terrain entre les lignes et ramassent les toiles de tente allemandes, article très demandé par les marins. Beaucoup de cadavres au voisinage des tranchées : restes des offensives des 17 et 22. Chaque nuit, on en enterre quelques-uns. De jour, on ne peut bouger : ce matin, la 11ème compagnie, notre voisine, a perdu en quelques minutes un maître fusilier et un homme qui tentaient de porter secours à un blessé. Fritz visait bien : trois impacts à la tête. De jour, ration convenable d'obus de part et d'autre.
(à suivre...)
Dimanche 27. — C'est déjà dimanche depuis deux heures, quand nous arrivons au poste, toujours dans le même secteur que la dernière fois, mais non dans la même tranchée. La compagnie forme l'extrême droite de notre ligne, dans le petit bois, et, en prenant contact avec nos voisins de droite, c'est avec un officier du 20ème corps que je m'entretiens un instant. La tranchée est un peu meilleure que la précédente, un peu plus solide, guère moins humide. Temps gris, quelques ondées. Pour s'abriter, nos hommes fouillent de nuit le terrain entre les lignes et ramassent les toiles de tente allemandes, article très demandé par les marins. Beaucoup de cadavres au voisinage des tranchées : restes des offensives des 17 et 22. Chaque nuit, on en enterre quelques-uns. De jour, on ne peut bouger : ce matin, la 11ème compagnie, notre voisine, a perdu en quelques minutes un maître fusilier et un homme qui tentaient de porter secours à un blessé. Fritz visait bien : trois impacts à la tête. De jour, ration convenable d'obus de part et d'autre.
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Re: Journal d'un fusilier marin
(...suite)
Lundi 28. — Pendant la nuit, l'infatigable colonel installe lui-même le téléphone avec nos tranchées de première ligne. Petit à petit, nous voilà dotés de tous les perfectionnements modernes : en quelques jours, nous avons reçu des fusées éclairantes, des grenades à main, le téléphone. Le moindre parapluie ferait pourtant mieux notre affaire. La pluie est devenue si violente, avec vent, que tout est transpercé. Mon gourbi est une mare. Mon ordonnance, un petit fusilier de dix-sept ans, grelotte la fièvre et ne peut se réchauffer : il faut l'évacuer sans attendre la relève. La chasse aux toiles de tente continue. On nous apporte un peu de papier bitume pour faire des toitures : il faut lutter avec les hommes pour les empêcher d'en prendre des lambeaux individuels. Nos 120 arrosent les tranchées ennemies avec de belles gerbes.
Nous avons, sans bruit, progressé d'environ 30 mètres en creusant de nouvelles tranchées et rectifiant un coin de la ligne pendant ces deux nuits. Le temps est de plus en plus mauvais : tempête de vent et de pluie.
(à suivre...)
Lundi 28. — Pendant la nuit, l'infatigable colonel installe lui-même le téléphone avec nos tranchées de première ligne. Petit à petit, nous voilà dotés de tous les perfectionnements modernes : en quelques jours, nous avons reçu des fusées éclairantes, des grenades à main, le téléphone. Le moindre parapluie ferait pourtant mieux notre affaire. La pluie est devenue si violente, avec vent, que tout est transpercé. Mon gourbi est une mare. Mon ordonnance, un petit fusilier de dix-sept ans, grelotte la fièvre et ne peut se réchauffer : il faut l'évacuer sans attendre la relève. La chasse aux toiles de tente continue. On nous apporte un peu de papier bitume pour faire des toitures : il faut lutter avec les hommes pour les empêcher d'en prendre des lambeaux individuels. Nos 120 arrosent les tranchées ennemies avec de belles gerbes.
Nous avons, sans bruit, progressé d'environ 30 mètres en creusant de nouvelles tranchées et rectifiant un coin de la ligne pendant ces deux nuits. Le temps est de plus en plus mauvais : tempête de vent et de pluie.
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Re: Journal d'un fusilier marin
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Mardi 29. — La 12ème du 2ème nous a relevés ce matin vers cinq heures. Après trois heures de pataugeage dans la boue, nous retrouvons notre « Joconde » et sa sordide famille. On se serre autour du poêle qui fume, les hommes se fourrent dans la paille, et deux cuisiniers préparent un rata monstre pour toute la compagnie, faisant bouillir les haricots dans le chaudron de fonte où, en temps de paix, mijotait la nourriture des porcs.
C'est par sacs, par ballots, que les cadeaux de Noël continuent à arriver. Chaque homme a eu, en une ou deux fois, sa livre de chocolat.
La visite du médecin révèle encore quelques pieds gelés et quelques bronchites, mais l'ensemble tient bon. L'homme est vraiment plus résistant que je ne le croyais et l'humidité, qui nous fait cruellement souffrir, n'arrive pas à nous démolir tout à fait.
Apres midi arrive l'ordre de se préparer à changer de cantonnement. Ce sera sans regrets de notre part.
(à suivre...)
Mardi 29. — La 12ème du 2ème nous a relevés ce matin vers cinq heures. Après trois heures de pataugeage dans la boue, nous retrouvons notre « Joconde » et sa sordide famille. On se serre autour du poêle qui fume, les hommes se fourrent dans la paille, et deux cuisiniers préparent un rata monstre pour toute la compagnie, faisant bouillir les haricots dans le chaudron de fonte où, en temps de paix, mijotait la nourriture des porcs.
C'est par sacs, par ballots, que les cadeaux de Noël continuent à arriver. Chaque homme a eu, en une ou deux fois, sa livre de chocolat.
La visite du médecin révèle encore quelques pieds gelés et quelques bronchites, mais l'ensemble tient bon. L'homme est vraiment plus résistant que je ne le croyais et l'humidité, qui nous fait cruellement souffrir, n'arrive pas à nous démolir tout à fait.
Apres midi arrive l'ordre de se préparer à changer de cantonnement. Ce sera sans regrets de notre part.
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Re: Journal d'un fusilier marin
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Mercredi 30. —Rassemblement du régiment à dix heures trente. On regagne la grand'route pour la remonter un peu vers le nord. Le 2ème régiment sera à Oostvleteren, le 1er aura un bataillon au pont d'Elsendamme, et le nôtre dans les fermes autour du carrefour de Linde.
Nous avons dit adieu au 20ème corps, dont les marins avaient été fiers de faire partie pendant quelques jours ; adieu aux dragons, dont les tranchées voisinaient avec les nôtres et qui formaient division avec nous ; adieu au petit cimetière creusé dans le jardin du meunier de Pypegaele, et où dorment cinq de nos officiers.
(à suivre...)
Mercredi 30. —Rassemblement du régiment à dix heures trente. On regagne la grand'route pour la remonter un peu vers le nord. Le 2ème régiment sera à Oostvleteren, le 1er aura un bataillon au pont d'Elsendamme, et le nôtre dans les fermes autour du carrefour de Linde.
Nous avons dit adieu au 20ème corps, dont les marins avaient été fiers de faire partie pendant quelques jours ; adieu aux dragons, dont les tranchées voisinaient avec les nôtres et qui formaient division avec nous ; adieu au petit cimetière creusé dans le jardin du meunier de Pypegaele, et où dorment cinq de nos officiers.
(à suivre...)
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