MONTENEGRO - Quatre-mâts goélette

Rutilius
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Re: MONTENEGRO - Quatre-mâts goélette

Message par Rutilius »


Bonjour à tous,


■ Marins de l’État victimes de l’engagement du voilier Monténégro avec un sous-marin (7 février 1918).


— FOURNIER Auguste Jean, né le 20 septembre 1893 à Saint-Valéry-en-Caux (Seine-Inférieure – aujourd’hui Seine-Maritime –) et domicilié à Fécamp (– d° –), Matelot de 3e classe sans spécialité, inscrit à Fécamp, n° 4.321.

Entré le 16 février 1918 à l’Hôpital auxiliaire n° 3 de Marseille – établi dans les locaux du groupe scolaire du boulevard Gustave Desplaces (IIIe Arr.) – et y décédé le 15 mars suivant des suites d’une blessure par éclat d’obus reçue à la tête le 7 février à bord du voilier Monténégro au cours d’un engagement avec un sous-marin.

Fils d’Auguste Clovis FOURNIER et de Mélanie Françoise BIGOT (Acte de décès établi le 16 mars 1918, transcrit à Fécamp, le 23 mars 1918 : Registre des actes de décès 1918, acte n° 104).

— ROMANO François, né le 16 septembre 1897 à Oran (Département d’Oran, Algérie) et y domicilié, mort le 7 février 1918 « en mer, tué au cours d’un engagement du voilier Monténégro avec un sous-marin ennemi », Matelot de ... classe sans spécialité, inscrit à Oran, n° 2.524.

▪ Par arrêté du Ministre de la Marine en date du 7 mars 1922 (art. 2 ; J.O., 15 mars 1922, p. 2.952), inscrit à titre posthume au tableau spécial de la Médaille militaire dans les termes suivants :

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(p. 2.953)
Bien amicalement à vous,
Daniel.
Rutilius
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Re: MONTENEGRO - Quatre-mâts goélette

Message par Rutilius »

.
Bonsoir à tous,


■ Historique (complément).


— 11 février 1918 : Repousse l’attaque d’un sous-marin.


Le Journal, n° 9.379, Samedi 1er juin 1918, p. 3.


« LA SOUSCRIPTION DU "JOURNAL"

LES DONS AUX HÉROS DE LA MER



Sous la présidence du vice-amiral Fournier, le comité de répartition des fonds de la Souscription nationale ouverte pour récompenser les équipages de la marine marchande qui se distinguent dans la lutte contre les sous-marins ennemis a tenu sa séance de mai au "Journal".
Après avoir voté un supplément de 50 francs en faveur d'un homme du paquebot Savoie, de la Société générale des transports maritimes à vapeur, omis sur la liste d’équipage, le comité a examiné les propositions de primes établies d’après les rapports, de la Direction générale de la guerre sous-marine, rédigés à la suite d’enquêtes faites dans les ports sur les engagements entre navires de commerce et sous-marins ennemis. Il a alloué des primes à des officiers et hommes d’équipage des navires ci-dessous désignés :

Vapeur Ustaritz .................................................................................................. Francs 1.400
Voilier Monténégro ....................................................................................................... 6.200
Trois-mâts-goélette Saint-Joseph ................................................................................... 2.400
Vapeur Garonne II ....................................................................................................... 2.500
Vapeur Draa ................................................................................................................. 4.800
Quatre-mâts Nord ......................................................................................................... 4.000
Vapeur Radium ............................................................................................................. 3.100
_______

24.400
Paquebot Savoie (supplément).............................................................................................. 50
_______
24.450

[...]

La lutte contre les pirates

Le voilier Monténégro, de la Société d’armement Van Hamebrick et Cie
[lire : Van Hemelryck et Cie], de Marseille, attaqué par un sous-marin, riposta énergiquement et, après un violent combat d’une heure et demie, obligea l’ennemi à se retirer. Au cours de la lutte, son mât de misaine avait été traversé par les obus, qui lui avaient causé quelques autres avaries.
Le capitaine au cabotage Aimé Manya, l’enseigne de vaisseau de première classe Niox-Château, le quartier-maître charpentier François Alexandre, les canonniers Pierre Le Bihan et Yves Creis, le fusilier Joseph Mothe, le matelot François Le Goff ont été cites à l’ordre de la division ; les matelots François Pappalardo et Pierre Crasto et le mousse Georges Ferrero, à l'ordre de la brigade ; le second maître de mousqueterie Jean Choulimant, le quartier-maître fusilier Hervé Hamon, les quartiers-maîtres canonniers Pierre Quelfeter, Julien Mallegol et Félix Le Bihan, à l’ordre du corps d'armée.
[...] »
Bien amicalement à vous,
Daniel.
olivier 12
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Re: MONTENEGRO - Quatre-mâts goélette

Message par olivier 12 »

Bonjour à tous,

MONTENEGRO

Quatre-mâts goélette de 1198 tx
Armateur Van Hemelryck. Paris pages1418/Forum-Pages-d-Histoire-aviati ... _1.htm#bas
Consignataire : Georges Régis et Cie. Marseille
Armé au port d’Alger avec 26 hommes d’équipage dont 12 hommes de la 4e équipe spéciale de l’AMBC, commandés par l’EV1 Niox-Chateau.
4 canons de 75 mm

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Rencontre avec un sous-marin le 7 Février 1918 et naufrage le 15 Février 1918. Rapport du capitaine

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Quitté Alger le 5 Février 1918 à 08h30 à la remorque du chalutier LA ROSITA, convoyé par un 2e chalutier. Beau temps calme. A 18h00, largué la remorque, établi la voilure et fait route au NNE à 3 nœuds avec légère brise d’Est.
Le 6 même temps. Fait route à 4 nœuds.

Le 7 à 06h30, un sous-marin ennemi est signalé par la hanche bâbord arrière et ouvre le feu à 5000 m. Chacun est mis à son poste pour la manœuvre et le combat. Combat mené de façon très énergique, avec le plus beau courage par l’officier de tir et son équipe. Le combat finit à 08h00 avec la disparition du sous-marin. Plusieurs obus sont tombés à bord, endommageant mâture, coque, pont et gréement. Le matelot Romano a été tué et plusieurs hommes ont été blessés dont un, Fournier, grièvement.
Faible brise et fait venir le navire au vent en changeant d’amures pour aider le tir. Manœuvres longues et difficiles à cause de la faiblesse du vent. Le mécanicien a allumé la chaudière pour pomper en cas de besoin. La pompe fonctionne et l’eau vient avec une certaine abondance. En raison du tir de nos pièces, le navire subit un fort ébranlement dans toutes ses parties, coque et mâture. Envoyé signaux par TSF.

8 Février, temps calme. Aperçu un convoi dans l’ESE vers 06h00. Hissé pavillon français et signal du code « Avons besoin de secours immédiat ». Mais le convoi s’éloigne sans nous voir. A 09h30, immergé le corps du matelot tué. Dans l’après midi, aperçu Minorque.

9 Février. Le navire ne gouverne plus. Temps calme. A 15h00, aperçu un convoi dans le SE. Tenté de l’approcher avec le signal de secours. Mais le convoi ne nous voit pas. Le navire fait de l’eau de façon sensible. Continué à pomper.

10 et 11 Février. Beau temps calme. Le navire ne gouverne pas.

12 Février. Le soir, la brise fraîchit d’Ouest.

13 Février. Vers 20h00, la brise fraîchit de NW et la mer grossit. Tangage et roulis violents. Cargué les flèches.

14 Février. Le mât de misaine, percé par un obus au cours du combat, tombe à tribord entraînant le mât de flèche du grand mât avant et toutes les drailles de focs. Venu bout à la lame. A 10h00, la mer grossissant toujours et le navire fatiguant énormément, pris deux ris dans l’artimon pour maintenir la cape. A 11h00, perdu la voile d’artimon. Les coups de roulis redoublent et font craindre la perte de la mâture. La basse carène donne beaucoup de mou. Le grand mât avant finit par tomber, entraînant le grand mât arrière. A 13h00, c’est le mât d’artimon qui tombe à son tour sur l’arrière, blessant l’officier de tir. Le navire fait beaucoup d’eau bien que les pompes continuent à fonctionner. Jugeant le navire en détresse, mis à la mer l’embarcation de sauvetage et préparé les radeaux.
A 18h00, allumé les feux de détresse. Le pont est recouvert par les lames à chaque coup de roulis. Fatigue du navire et augmentation de l’eau dans les cales.

Le 15 Février à 02h00, les pompes cessent de fonctionner. A 06h00, aperçu une fumée à l’horizon et fait les signaux de détresse par pavillons. Le navire nous aperçoit et met le cap sur nous. C’est une canonnière anglaise, PETUNIA, qui nous prend à la remorque. Le pont est balayé par les lames et l’eau monte dans la cale.
Après consultation de l’équipage et sur l’avis unanime de tous, y compris du commandant de la canonnière décidé de faire évacuer le bord. Demandé à l’EV 1 de l’équipe spéciale et au commandant de la canonnière de rester à bord, mais ils estiment que cette solution serait un sacrifice inutile vu l’état du navire et les 60 cm d’eau déjà dans la cale. A 03h30, largué la remorque à environ 40 milles dans le Sud de Sicié. La canonnière vient au vent à nous et commence le sauvetage. Elle reste sur les lieux pour surveillance de l’épave et décision éventuelle au petit jour. Celle-ci demeure à flot et la canonnière reste toute la journée près d’elle. Vers 20h00, un torpilleur français arrive sur les lieux et échange des signaux avec la canonnière. Nous faisons alors route sur Marseille où nous arrivons le 16 à 04h00.

Le navire avait été avarié gravement lors du combat du 7 tant dans la coque que le gréement et le pont, et avait perdu ses qualités de résistance au mauvais temps et à la mer ainsi que ses qualités de navigabilité. C’est ce qui a entraîné la perte du navire.
Tous les effets de mes hommes et officiers, ainsi que les miens, ont été perdus dans le naufrage.

Déposition du TSF Marcel PLEVEN

Nota : on trouve tout le récit fait en 1972, à l’âge de 86 ans, par ce radiotélégraphiste sur le site très intéressant de Jean Marie Pleven - déjà signalé sur le forum - http://petunia3.over-blog.com/article-34738739.html

J’étais en poste de TSF à Alger et le 31 Janvier, j’ai reçu l’ordre d’embarquer sur MONTENEGRO sur lequel on venait d’installer la TSF. Mais les appareils neufs venus de France n’étaient pas arrivés et on avait pris celui du NELLY II qui était au bassin. Ils ont été installés à bord par les soins des services d’Alger. C’était un Magunna modèle 4 avec comme source un accumulateur 28 volts et réception Oudin. L’appareil était en bon état, mais le TSF du NELLY II avait signalé que les accumulateurs n’avaient pas été chargés depuis un certain temps. Il a été question de les charger avant le départ, mais on en a pas eu le temps.
Quand on a perçu le sous-marin, j’ai envoyé le ALLO et n’ai pas reçu de réponse. J’ai lancé 4 fois le signal en l’air et 3 fois « SOS. MONTENEGRO canonné ».
C’est alors qu’un obus a enlevé un des angles de la cabine, coupant la sortie d’antenne. Puis une gerbe d’eau provoquée par un obus est tombée le long du bord venant toucher le poste et mouillant tous les appareils. J’ai alors réparé provisoirement l’antenne et épongé tous les appareils ce qui a pris 30 minutes. Puis j’ai continué à envoyer SOS pendant trois heures à des intervalles courts. Je n’ai entendu aucune répétition, ni aucune réponse. J’ai cessé les signaux une fois le combat terminé et j’ai commencé la charge, d’accord avec le chef d’équipe. J’ai aussi fait une réparation définitive à l’antenne.
La nuit venue, j’ai fait des appels collectifs, cherchant à entrer en contact avec un chalutier, aux heures de veille. Mais je n’ai reçu aucune réponse. Les appareils ne nous permettaient que de faire de l’onde 1000 pour laquelle le poste avait été réglé à Alger et l’écoute se fait généralement sur 800.
J’ai renouvelé des appels collectifs au passage des convois, mais j’avais du mal à émettre, la charge des accus étant tombée. J’ai fait mon possible, mais sans parvenir à rien, même à courte distance des convois. Le chef d’équipe en est témoin. A bord, j’étais directement sous ses ordres.

Question de l’enquêteur : Avez-vous à signaler quelque chose d’anormal sur la conduite du capitaine ?

Il a fauté pendant le combat. Il a fait des extravagances et a perdu la tête. Il était très excité et est sorti de lui-même. Il a été enfermé par deux hommes, sur ordre du chef d’équipe, dans le magasin à filins où je l’ai vu le soir, en passant par là.
Le lendemain, je l’ai revu sur le pont. Il ne parlait pas beaucoup et était taciturne. Plus tard, au moment du démâtage, quand le chef d’équipe a été blessé, il a recommencé à donner des ordres.

Dans son récit fait en 1972, Marcel Pleven dit que le capitaine Lemerle avait fait distribuer par le mousse un quart de vermouth à l’équipage pendant le combat. Quand le TSF avait demandé au mousse : « As-tu bu le tien ? » celui-ci avait répondu : « Bien sûr, mais le capitaine aussi et lui, ce n’est pas un quart qu’il a bu … » Le capitaine était ensuite remonté sur le pont en titubant et en tenant des propos incohérents : « Vive la République ! Vive Napoléon ! » Il était finalement tombé à la mer.

A propos du soi-disant refus de revenir sur le voilier après être monté sur PETUNIA, Marcel Pleven dit qu’il ne s’était pas caché, mais était à l’infirmerie de la canonnière où l’on soignait sa blessure au pied et qu’il n’avait pas eu connaissance de l’ordre de retourner sur l’épave. Malheureusement pour lui, il ne répond rien à l’officier enquêteur et omet donc de donner cette explication manifestement exacte.


Le récit passionnant de Marcel Pleven, fait plus d’un demi-siècle après les évènements, concorde totalement avec les documents officiels de l’enquête

Déposition du matelot chauffeur Jean PASQUALINI


Quand le sous-marin a commencé à tirer, j’ai reçu l’ordre de mettre la chaudière en pression et d’être prêt à pomper. Après le combat, le bâtiment faisait très peu d’eau. Je ne pompais que tous les deux jours et enlevais environ 80 cm d’eau à chaque fois.
Quand le mât de misaine est tombé, le navire a commencé à faire beaucoup d’eau, et surtout quand les 3 autres mâts sont tombés. Il ne gouvernait plus et l’eau embarquait de tous les bords. L’eau arrivait surtout par le pont, plus que par la coque. Les pompes sont restées en marche continuelle pendant deux jours. Nous avons été obligés de les stopper quand le giffard (nota : flotteur indicateur permettant d’alimenter la chaudière) a manqué. Nous avons alors tenté d’alimenter la chaudière aux ¾ du plein de tube en enlevant la soupape d’arrêt et de rallumer les feux. Mais il a fallu laisser tomber aussitôt. Quand la canonnière anglaise est arrivée, un mécanicien anglais est venu à bord, mais il n’a pu réamorcer le giffard.

Déposition du maître d’équipage Jean MATTEI

Le 7 Février, quand je suis monté sur le pont, j’ai aperçu une lueur à l’horizon et entendu un coup de canon. Un obus est tombé à 30 m sur bâbord. Le chef d’équipe a appelé aux postes de combat et nous nous sommes battus jusqu’à 08h30. Je me suis occupé de la manœuvre et du passage des projectiles. AU bout de 20 minutes, il n’y avait plus qu’un matelot de valide et moi. Le mât de misaine avait été traversé par un obus et les voiles étaient trouées. Dans la basse carène un galhauban avait été tréviré.
Je n’ai envoyé personne dans la mâture. J’ai été le seul à m’occuper de la remise en état du gréement, le 2e capitaine étant blessé et le capitaine ne donnant aucun ordre. A plusieurs reprises, je lui ai fait part de l’état du gréement, mais il avait l’air de ne pas comprendre. Déjà, au départ d’Alger, j’avais fait remarquer qu’il fallait reprendre les ridoirs de la basse carène qui prenaient du mou. J’avais même commencé à raidir le grand mât.
Il m’avait répondu que ça pouvait se faire, mais qu’il manquait de monde. Il avait pris la direction effective au départ d’Alger et l’a conservé jusqu’au premier coup de canon.

Après le combat, il a semblé ne plus comprendre ce que je lui disais. Il avait perdu la tête et ne donnait plus aucun ordre. Nous avons du intervenir pour le calmer à seule fin qu’il ne fasse pas de bêtise. Il était comme fou. Il courait de l’avant à l’arrière, engueulant tout le monde. Il est même tombé à la mer et nous avons dû, un canonnier et moi nous pencher par-dessus bord pour le hisser. Une fois remonté sur le pont, il est allé chez lui se changer, puis est ressorti quelques minutes après complètement nu, faisant appeler le chef d’équipe. Le chef d’équipe est venu, surpris de le voir ainsi, et le capitaine ne lui a absolument rien dit. Le 2e capitaine, le chef d’équipe et moi avons considéré qu’il était impossible de lui laisser le commandement car il n’avait plus ses esprits. Le chef d’équipe a dit : « Je prends le commandement » et le 2e capitaine n’a fait aucune objection. On l’a fait enfermer chez lui par 4 hommes de l’équipe, mais sans le brutaliser. Il avait alors passé une vieille chemise et un pantalon.
Je ne connaissais pas le capitaine auparavant. J’ai juste passé 40 jours avec lui à Alger, alors qu’il n’était que second et n’avais rien remarqué d’anormal.
Le 2e capitaine a continué son service, bien que blessé. Il n’a pris que quelques instants pour se faire panser.
Le lendemain, nous avons reconnu que le capitaine était à nouveau à même de commander car il a donné des ordres de commandement et a repris son sang froid. Mais pendant plusieurs jours, il n’a rien fait du tout. Il faisait le quart avec le chef d’équipe, mais comme chef de quart seulement. Il était devenu plus calme et n’engueulait plus personne. Mais il donnait encore des ordres inexécutables. Par exemple, il a voulu faire un virement de bord vent debout en bordant partout. Pour lui faire plaisir, on a exécuté l’ordre, et au bout de deux heures le chef d’équipe a fait remettre les voiles en ordre et a interrompu cette manœuvre impossible.
Quand le mauvais temps est venu, j’ai fait carguer les flèches. On s’apprêtait à rentrer le clinfoc quand le mât de misaine a craqué. Les deux bordées étaient sur le pont. On a prévenu le chef d’équipe, mais pas le capitaine, du moins pas officiellement. Je n’ai pas eu l’idée de faire réveiller les hommes de l’équipe spéciale pour nous aider.

Déposition du QM fusilier SOULIMANT

Après le combat, j’ai vu le maître d’équipage et le commandant qui se disputaient. Le capitaine a même jeté la casquette du maître d’équipage sur le pont et lui a lancé un coup de poing qui l’a manqué.
J’ignore ce qui avait amené la discussion. J’ai entendu le maître d’équipage lui dire qu’il était inapte au commandement du bâtiment et le commandant lui a alors lancé le coup de poing. Je les ai séparés. Monsieur Niox était sur le pont et a donné l’ordre au commandant de descendre. Il avait appelé deux canonniers pour séparer le capitaine et le maître et le QM canonnier l’a accompagné jusqu’au salon. Mais quelques minutes après, le capitaine est revenu sur le pont. Il avait l’air d’un homme chaviré et avait perdu la tête. Il s’est mis à crier, à gesticuler. Sur ordre de Monsieur Niox, j’ai été obligé de le faire prendre par le même quartier maître et de le conduire au magasin à filins. Il a voulu remonter de la soute à voile, mais Monsieur Niox l’a menacé de le faire amarré.

Le lendemain, le capitaine est monté sur le pont en disant qu’il avait un éclat d’obus dans le ciboulot. Mon impression est qu’il ne se rendait pas compte de ce qu’il avait fait la veille. Les jours suivants, sa conduite n’a rien eu d’anormal. Au moment du naufrage, il s’est très bien conduit et a repris sa fonction de capitaine quand Monsieur Niox a été blessé.

Déposition du mousse Georges FERRERO

Je me trouvais près du roof équipage après avoir été blessé sur l’arrière. J’ai alors entendu le maître d’équipage et le capitaine qui se disputaient et j’ai vu la capitaine donner un coup de poing au maître d’équipage. Le maître n’a pas répondu et s’est contenté de lui tenir les bras.
Le capitaine avait l’air d’avoir bu. Je l’avais vu juste avant donner à boire du vermouth aux canonniers pendant une interruption du combat.
Monsieur Niox l’a alors fait prendre par deux canonniers et conduire chez lui.

Je n’avais embarqué que 3 jours avant le départ et n’avais jamais entendu le maître se disputer avec le capitaine. Ensuite, le maître m’a dit de ne plus obéir au capitaine, mais à Monsieur Niox et au second.
A bord, le capitaine faisait du bruit. Il cherchait noise à tout le monde et cherchait à frapper. Moi-même, il m’a menacé quand j’étais à la barre et qu’il est sorti du magasin. J’ai été obligé de me sauver pour ne pas être frappé. Il a alors pris la barre en insultant le second capitaine, prétextant que le second ne voulait pas virer de bord, alors qu’il y avait calme plat. On l’a finalement emmené se coucher.

Le lendemain, il avait mal aux cheveux. Il disait qu’il avait un éclat d’obus dans la tête. Il est retourné se coucher toute la matinée. Après, il allait mieux.

Le jour du naufrage, quand le chef ‘équipe a été blessé, le capitaine lui a demandé : « Est-ce que je peux monter sur le pont. L’officier a répondu : « Oui ». A partir de ce moment là il s’est occupé de toute la manœuvre, circulant sur le pont malgré le mauvais temps et les craintes qu’on avait de voir tomber la mâture. Il est resté toute la journée dans l’eau, sur le pont.

Description du sous-marin

80 à 100 m de long.
Pas très élevé sur l’eau.
3 canons dont un paraissant de 77 mm, un de 105 mm tous deux sur l’arrière, et un canon contre avion sur l’avant du kiosque.
Voici sa silhouette

Image

Ce sous-marin était donc l’U 64 du Kptlt Robert MORATH. (Voir les renseignements donnés sur lui à la fiche du vapeur LE TARN)

Interrogatoire du capitaine suite aux dépositions de l’équipage

- Voulez-vous nous dire si vous vous êtes rendu compte, au moment du combat, de l’état de surexcitation dans lequel vous vous trouviez et comment vous y êtes arrivé.

Depuis le jour où l’équipe spéciale est arrivée à bord, je me suis rendu compte que j’allais faire faire à mon équipage un voyage dans des conditions pour lesquelles je ne l’avais pas engagé. Il avait été entendu que nous ferions la traversée Alger-Marseille à la remorque. Quand je suis parti, j’étais persuadé que, dans les conditions où nous allions naviguer, le bâtiment ne reviendrait pas. J’étais affecté moralement. J’avais entendu des rumeurs dans l’équipage. Il disait qu’on le menait à la boucherie. C’était la première fois que je voyais un combat et j’avais le remords d’avoir entraîné mon équipage dans ces conditions. J’ai été fortement émotionné et petit à petit j’ai perdu la tête.
Je me rappelle avoir pansé un canonnier blessé, puis être descendu chez moi prendre une bouteille pour donner à boire aux canonniers. Je suis revenu ensuite au passage des munitions, et après je ne me souviens plus de ce que j’ai fait.

- Aviez-vous eu des discussions avec votre maître d’équipage avant le jour du combat ?

Je n’ai jamais eu de discussions avec lui car j’ai voulu patienter et atténuer bien des choses. Pourtant, j’aurais pu en avoir au sujet du travail et de la manière dont il menait l’équipage. Il ne s’occupait pas assez de son service et ne faisait pas suffisamment travailler les hommes. Je n’ai rien à lui reprocher au point de vue conduite.

- Vous êtes-vous rendu compte de la façon dont vous êtes tombé à la mer ?

Non. Je ne me rappelle pas du tout.

- Vous êtes-vous rendu compte du moment où on vous a enlevé votre commandement ?

Non. Je ne me rappelle pas du tout.

- A quel moment avez-vous repris vos esprits et vous êtes-vous rendu compte de ce que vous faisiez ?

Le lendemain quand je suis monté sur le pont vers 07h00. J’ai eu une réaction et j’ai même fait le point et la méridienne avec le chef d’équipe. J’étais beaucoup mieux.

- Quand avez-vous demandé à reprendre votre commandement.

Le 9. Monsieur Niox m’a répondu qu’il conservait le commandement et que je ferai mon quart comme d’habitude. Quand il a été blessé par le mât d’artimon dans la journée du 14, je ne me rappelle pas qu’il m’ait dit qu’il me rendait le commandement. Mais il m’a fait comprendre que je pouvais le reprendre.

- Quand vous êtes monté sur le pont le 14, après que le mât de misaine venait de craquer, n’avez-vous pas eu l’idée de venir vent arrière pour fuir devant le temps, ce qui aurait pu conserver votre mâture arrière, au lieu de mettre en cape ce qui a entraîné la chute des autres mâts ?

Je n’ai pas eu cette idée la nuit. Ce n’est qu’au jour que nous avons essayé de laisser porter. Même en amenant la voile d’artimon, nous nous sommes rendus compte que le navire n’arrivait pas.

- Pouvez-vous donner les noms des hommes qui sont allés avec vous sur la canonnière anglaise et se sont cachés à bord au lieu de revenir sur MONTENEGRO ?

Le novice Cayla, le QM TSF Pleven, les matelots Luciani et Gaffieri et le mécanicien Pasqualini.

- Les avez-vous recherchés avant de partir de la canonnière ?

Je les ai fait rechercher par le charpentier de l’équipe et un second maître anglais. Mais le commandant anglais m’a dit de me presser pour aller passer la remorque et je suis parti avec l’embarcation.

- Comment avez-vous établi votre rapport de mer ?

Avec les renseignements fournis par le second et par le journal de bord. Je l’ai communiqué à Monsieur Niox qui l’a approuvé après quelques légères modifications sur les changements d’amures au cours du combat.

- Pourquoi avez-vous donné des renseignements inexacts à la commission dans votre première déposition quand on vous a demandé si vous vous étiez rendu compte de l’état de votre bâtiment après le combat. Pourquoi n’avez-vous pas dit à la commission que le commandement vous avait été enlevé pendant la plus grande partie de la traversée ?

Si j’ai donné des renseignements inexacts, c’est par amour-propre. J’avais honte de dire que mon commandement m’avait été enlevé. Je savais bien que la chose serait connue puisque Monsieur Niox, en tant que militaire, était obligé d’en rendre compte. Mais je n’osais pas l’avouer moi-même.

Conclusions de la commission d’enquête

La commission estime que le MONTENEGRO a quitté Alger dans des conditions défectueuses.
L’équipage avait été recruté pour effectuer la traversée Alger – Marseille à la remorque et ne comportait aucun marin ayant navigué à la voile. Les hommes envoyés en renfort par la flottille d’Alger étaient, sauf un, aussi ignorants que l’équipage de ce qu’est un voilier.
Le maître d’équipage a été au dessous de ses fonctions en ne s’occupant pas de remettre son gréement en état après l’attaque et en n’indiquant pas à ses chefs les réparations qui devaient être faites dans la mâture.
La direction a manqué aussi bien après le combat pour la remise en état, qu’au moment du coup de vent où un peu plus de sens marin, ou plutôt un peu plus d’habitude dans la navigation à voile aurait probablement sauvé le bâtiment.
Le capitaine Lemerle, par sa conduite au moment du combat, s’est rendu indigne des fonctions de commandant. La commission estime que la faculté de commander doit lui être enlevée au moins à titre provisoire. Désirant tenir compte de la façon dont il a agi par la suite et au moment du naufrage, elle demande qu’il ne lui soit pas fait application de la dépêche du 28 Octobre 1917 afin de lui permettre de naviguer en sous-ordre au commerce.
Elle demande un blâme pour 4 marins et pour le QM TSF Pleven que ses galons devraient obliger à plus de dignité.
Dans une lettre au Ministre, le Préfet Maritime demande que la dépêche du 28 Octobre 1917 (interdiction de naviguer) soit appliquée au capitaine Lemerle en raison de ses antécédents, et que le QM Pleven soit suspendu de son grade.

La commission propose de récompenser le 2e capitaine Manya, deux matelots et le mousse Ferrero qui, bien que blessés, sont restés à leurs postes pendant le combat et ne se sont pas sauvés au moment du naufrage, comme leurs camarades.

Sanctions et récompenses

Suspension temporaire de la faculté de commander pendant 1 an

LEMERLE Charles CLC Nantes 460

A été à son bord une cause de désordre au cours du combat de son navire contre un sous-marin.
Il en sera fait mention dans son article matriculaire

Blâme

LUCIANI Dominique Matelot
GIAFFERI Napoléon Matelot
CAYLA Frédéric Novice
PASQUALINI Jean Chauffeur
PLEVEN Marcel QM Télégraphiste

Avoir abandonné leur bâtiment sans ordre au moment du naufrage et s’être cachés à bord de la canonnière anglaise qui était venue à leur secours.

Nota : en réalité, le Ministère de la Marine se contentera d’adresser aux 5 hommes de « sévères observations » sans inscription au fichier matricule du marin, mais avec possibilité de sanction plus grave si quelque nouvelle défaillance venait à être signalée.
En ce qui concerne le TSF Marcel Pleven, il ne s’était pas caché et était en fait à l’infirmerie de la canonnière. Il ne sera pas suspendu de son grade.


Note du Ministère de la Marine au Vice Amiral Commandant en Chef, Préfet Maritime de Brest 30 Avril 1918

Il résulte de l’étude du dossier du voilier MONTENEGRO et du naufrage de ce bâtiment que l’Enseigne de Vaisseau de 1ère classe NIOX-CHATEAU qui commandait la 4e équipe de l’AMBC a outrepassé ses instructions en prenant le commandement de ce voilier en raison de l’attitude du capitaine pendant le combat et du simple brevet de capitaine au cabotage du second du navire.
Monsieur Niox-Chateau, une fois en possession de ce commandement, n’a pas su prendre les mesures que lui imposaient ses fonctions et profiter des jours de beau temps pour consolider une mâture avariée en utilisant son personnel militaire à défaut d’un équipage qu’il a déclaré insuffisant.
Il mérite de ce fait des observations que je vous prie de lui transmettre par la voie de l’AMBC.

Cependant, cet officier avait fait preuve au cours du combat de qualités militaires que j’ai entendu consacrer par une Citation à l’Ordre de la Division.

Citation à l’Ordre de la Brigade

MANYA Aimé 2e capitaine Capitaine au Cabotage

N’a pas quitté son poste quoique blessé et s’est très bien conduit pendant le combat et lors du naufrage de son bâtiment

Témoignage Officiel de Satisfaction

CRASTO Pierre Matelot
PAPPALARDO François Matelot
FERRERO Georges Mousse

Quoique légèrement blessés ou contusionnés, sont restés à leurs postes pendant le combat et se sont bien conduits pendant le naufrage de leur bâtiment.

Complément d’information sur le capitaine LEMERLE

Il y a eu plusieurs capitaines du nom de Lemerle à Nantes, et celui-ci était le fils d’Anatole Lemerle et de Joséphine Collin, né le 18 Juin 1882. D’abord domicilié à Nantes, 47 bd de St Aignan, il avait déménagé à Marseille en 1918.
Il avait obtenu son brevet de CLC (brevet simple) le 13 Février 1907. De 1907 à 1918 il avait été embarqué sur une vingtaine de navires différents, de multiples compagnies, ce qui est assez étonnant à une époque où les marins faisaient des embarquements très longs, de plusieurs mois, voire plusieurs années, sur le même navire. Son premier commandement avait été en 1911 le VILLE DE CANNES, un caboteur de Bougie, mais pendant quelques jours seulement, et probablement toujours à quai.
Il avait ensuite continué comme lieutenant (DU COUEDIC, FRANK DELMAS, SAHEL) et l’on remarque un embarquement de second capitaine sur le 3-mâts EUGENIE FAUTREL en Août 1913. Mais il avait débarqué en cours de voyage, à Melbourne, en Janvier 1914 pour une raison inconnue. En Avril 1915, il est lieutenant sur LA GASCOGNE, puis d’Août à Novembre second capitaine sur CAROL 1er. En Mai 1916, il est second capitaine sur BACCHUS (cela ne s’invente pas) mais repasse lieutenant dès le mois de Juin sur VILLE DU HAVRE, puis JULES HENRY d’Octobre 1916 à Septembre 1917. C’est d’ailleurs son embarquement le plus long semble-t-il, et il est certain que Charles Lemerle a été très desservi, au cours de l’enquête, par le rappel d’une affaire remontant au mois de Septembre 1917. Voici un rapport du Consul de France à Port Saïd, adressé à l’Administrateur de l’Inscription Maritime de Nantes et daté du 24 Septembre 1917

« J’ai l’honneur de vous informer à toutes fins utiles que le Contre Amiral Commandant la Division Navale de Syrie à Port Saïd a infligé au CLC Charles Lemerle, Nantes 460, Lieutenant sur le transport auxiliaire JULES HENRY de la 1ère armée navale une peine disciplinaire de 15 jours d’arrêts simples pour absence illégale de trois heures, ivresse et incorrection envers son commandant.
Cet officier présente un danger pour le JULES HENRY étant donné qu’il ne tient aucun compte des ordres et du règlement. En particulier, il fume sur le pont du navire qui est un pétrolier, risquant ainsi de provoquer une explosion. J’ai, à la demande du Lieutenant de Vaisseau auxiliaire commandant le navire, provoqué son débarquement d’office à Port Saïd par mesure disciplinaire. Je l’ai rapatrié en France le 30 Septembre par le paquebot des Messageries Maritimes DJEMNAH. »

Mais l’Administrateur de l’Inscription Maritime de Nantes envoie alors la note suivante à son supérieur :

« Je communique au Directeur de l’Inscription Maritime la note ci-dessus par laquelle le Consul de France à Port Saïd m’avise du débarquement par mesure disciplinaire du Capitaine au Long Cours Lemerle.
Mr. Lemerle est né le 18 Juin 1882 et vient donc d’avoir 35 ans.

En raison de son âge et des circonstances spéciales de son récent débarquement du JULES HENRY, je vous propose de demander au Ministre s’il ne conviendrait pas de rappeler immédiatement Mr. Lemerle au service de la Flotte ».

C’est ainsi que d’Octobre à Décembre 1917 il embarque successivement à Marseille comme lieutenant sur VILLE D’ORAN, VILLE DE TUNIS et LA DIVES. Ces navires sont en réalité en escale à Marseille et il est probable qu’il remplace temporairement des officiers qui ont pris une permission de quelques jours. Le 23 Décembre 1917, à Alger, il devient capitaine du 4-mâts MONTENEGRO. C’est son premier véritable commandement à la mer, et il est vraiment curieux de constater que c’est aussi le résultat d’une sanction disciplinaire…

Après l’interdiction de commander qui lui est signifiée, il embarque le 1er Mai 1918 comme lieutenant sur le vapeur LE GARD. Manque de chance, il est torpillé le 26 du même mois par l’UB 49 du Kptlt Hans Von MELLENTHIN au large du cap Bengut lors de la traversée Marseille – Alger. Il y aura 14 victimes et cette fois Charles Lemerle recevra un Témoignage Officiel de Satisfaction « pour l’activité et le dévouement dont il a fait preuve lors du torpillage du vapeur LE GARD ».

De Juin à Septembre 1918, il redevient second capitaine sur THONG SAMUD appartenant encore au gouvernement thaïlandais et qui passera en 1919 sous pavillon du gouvernement français. Mais il redevient bientôt lieutenant sur DUMONT D’URVILLE où il embarque le 1er Septembre 1918.

Nouvel avatar sur ce vapeur dont il est débarqué le 14 Novembre. Son fichier matricule porte la mention suivante :

« Condamné par le tribunal maritime commercial réunis à bord du vapeur DUMONT D’URVILLE à Constantinople à trois mois de prison avec sursis pour ivresse avec désordre et désobéissance avec injures ».

De 1919 à 1922, il ne naviguera pratiquement plus que comme lieutenant sur divers vapeurs : VILLE DE MARSEILLE, GENERAL MAUNOURY, SAINT LOUIS, GENERAL LYAUTEY, VILLE DE PARIS, SCHLESWIG, ODAL, VIRGINIE… On se rend bien compte qu’il est instable et sans doute peu désiré sur les navires où il trouve un court embarquement. Il finira matelot du 1er au 17 Juillet 1922 sur un chalutier de Boulogne (mais armé à Vannes) le MOUETTE. Et il décèdera à l’île d’Arz le 7 Septembre 1922 tout juste âgé de 40 ans.

Il n’est pas question, un siècle après les évènements, de se permettre de juger ces hommes, malheureusement plongés dans le tourbillon d’une guerre infernale. Mais il est certain que Charles Lemerle n’était pas fait pour commander en raison de son stress permanent et de son manque de contrôle sur lui-même.
Et, surtout, il avait manifestement un problème, problème que le petit mousse de MONTENEGRO avait bien identifié en 1918 quand il confiait aux enquêteurs : « Le matin, il avait mal aux cheveux… »

Cdlt
olivier
Rutilius
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Re: MONTENEGRO - Quatre-mâts goélette

Message par Rutilius »

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Bonjour à tous,


Sur la Société d’armement maritime R. Van Hemelryck & Cie [Raymond Van Hemelryck], V. le sujet « YVONNE — Quatre-mâts — Société d’armement R. Van Hemelryck & Cie ».

—> pages1418/Forum-Pages-d-Histoire-aviati ... _1.htm#bas
Bien amicalement à vous,
Daniel.
olivier 12
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Re: MONTENEGRO - Quatre-mâts goélette

Message par olivier 12 »

Bonjour à tous,

A propos du naufrage du vapeur LE GARD en Mai 1918, son capitaine, le CLC Reynaud de Trets écrit :

"Monsieur Lemerle, lieutenant, Monsieur Le Guillou, TSF, se sont multipliés et ont fait preuve de dévouement et de courage, ainsi que les matelots Leroux et Régis, et le mousse Duguet."

C'est ce qui valut un Témoignage Officiel de Satisfaction pour Charles Lemerle.

Cdlt
olivier
Rutilius
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Re: MONTENEGRO - Quatre-mâts goélette

Message par Rutilius »

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Bonsoir à tous,


■ Le capitaine du Monténégro lors de l’engagement du 7 février 1918.


— LEMERLE Charles Jean Baptiste, né le 18 juin 1882 à Nantes (Loire-Inférieure – aujourd’hui Loire-Atlantique –), rue des Olivettes, et décédé le 7 septembre 1922 à l’Île d’Arz (Morbihan).


Fils de (Registre des actes de naissance du 4e canton de la ville de Nantes, Année 1882, f° 54, acte n° 315) :

– Anatole Apollinaire LEMERLE, né le 10 juillet 1845 à Trentemoult, commune de Rezé-lès-Nantes (Loire-Inférieure – aujourd’hui Loire-Atlantique –) (Registre des actes de la commune de Rezé, Année 1845, f° 13, acte n° 100) et y décédé, le 15 février 1922, capitaine au long-cours.

Et de :

Joséphine Françoise COLLIN, née le 9 janvier 1857 à Nantes, au 2, chaussée Magdeleine (Registre des actes de naissance du 4e canton de la ville de Nantes, Année 1857, f° 4, acte n° 16), sans profession, son épouse.

Époux ayant contracté mariage à Nantes, le 2 septembre 1876 (Registre des actes de mariage du 4e canton de la ville de Nantes, Année 1876, f° 49, acte n° 95).


Petit-fils de :

– Jean-Baptiste LEMERLE, né vers 1815, maître au cabotage, et de Reine Aimée BOUIN, née vers 1823, sans profession, son épouse.

Et de :

– Jean-Baptiste COLLIN, né vers 1830, vannier, et de Joséphine GUILLOU, née vers 1834, marchande de vannerie, son épouse.


Frère de Fernand Paul LEMERLE, né le 10 juillet 1880 à Nantes (Loire-Inférieure – aujourd’hui Loire-Atlantique –) (Registre des actes de naissance du 4e canton de la ville de Nantes, Année 1880, f° 60, acte n° 356), disparu le 3 octobre 1918 avec le cargo Saint-Luc, de la Société navale de l’Ouest (S.N.O.), bâtiment qu’il commandait depuis le 10 août 1909, torpillé et coulé par le sous-marin allemand UB-105 (Oberleutnant zur See Rudolf Petersen) dans le N.-O. d’Alger, à 48 milles dans le Nord du cap Tenès.

Capitaine au long-cours, inscrit à Nantes, f° et n° 453, ayant été nommé par brevet du 28 juin 1905. Provenait de la matricule des inscrits définitifs, f° 4.121, n° 621, où il figurait en qualité de matelot de 3e classe sans spécialité.


**********


Capitaine au long-cours, inscrit à Nantes, f° et n° 460, ayant été nommé par brevet simple du 13 février 1907. Provenait de la matricule des inscrits définitifs, f° et n° 16.366, où il figurait en qualité d’élève de la Marine marchande.

A uniquement exercé le commandement des trois bâtiments suivants :

– Ville-de-Cannes : du 18 octobre au 30 novembre 1911 [Bâtiment armé au cabotage à Bougie (Algérie)].

Quatre-mâts goélette Monténégro : du 23 décembre 1917 au 15 février 1918, jour de son désarmement [Bâtiment armé au cabotage à Alger (Algérie)].

– Général-Lyautey : du 1er février au 18 juin 1920 [Bâtiment armé au long-cours au Havre].


Par décisions ministérielles des 13 et 26 août 1918, objet d’un témoignage officiel de satisfaction « pour l’activité et le dévouement dont il a fait preuve lors du torpillage du vapeur Gard. »


D’un caractère assurément irascible et intempérant, selon ces deux mentions portées sur sa matricule :

« Suspendu de la faculté de commander pendant un an : " A été à bord du voilier Monténégro une cause de désordre au cours du combat de son navire contre un sous-marin, le 7 février 1918 " (Décision ministérielle du 5 mai 1918). »

« Condamné par le Tribunal maritime commercial réuni à bord du vapeur Dumont-d’Urville à Constantinople, le 13 novembre 1919, à trois mois de prison avec sursis pour ivresse avec désordre et désobéissance avec injures. » [Alors lieutenant à bord de ce bâtiment, armé au cabotage à Brest, le 1er septembre 1919, et désarmé dans ce port, le 14 novembre suivant].

(Archives départementales de Loire-Atlantique, Quartier de Nantes, Matricule des capitaines de la Marine marchande : Matricules de 1883, f° et n° 258, Cote 7 R 4/1113*, p. num. 38).
Bien amicalement à vous,
Daniel.
Memgam
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Re: MONTENEGRO - Quatre-mâts goélette

Message par Memgam »

Bonjour,


Charles Jean-Baptiste Lemerle avait pour père Anatole Appollinaire Lemerle, capitaine au long cours, connu dans le milieu nantais sous le sobriquet de Le merle noir, pour sa dureté vis à vis de son équipage.
Comme en témoigne l'un des ses derniers commandements au sein de la maison Crouan, armateur à Nantes: Le premier voyage du trois-mâts Belem (celui qui navigue encore de nos jours). Au cours de ce premier voyage du 29 juillet 1896 au 27 janvier 1897, le Belem a connu un violent coup de pampero, un incendie à Para et du mauvais temps au retour. Les relations ont été très difficiles avec le second Rio, marqué par une bagarre pour un refus de celui-ci de modifier le journal de bord. Rio sera plus tard sénateur et secrétaire d'Etat à la Marine marchande. Au moment de l'incendie, le capitaine Lemerle (51 ans) a insulté son fils Fernand (16 ans), novice, frère ainé de Charles, et lui a donné un coup de poing à l'origine de son débarquement à Para le 5 octobre 1896.
Fernand avait commencé sa carrière de marin comme mousse le 14 avril 1893 sur le trois-mâts Denis Crouan. Son frère Charles a d'abord suivi les cours de l'école d'hydrographie de Nantes et a obtenu le diplôme d'élève officier de la marine marchande de 2ème classe le 30 avril 1898, et a fait son premier embarquement sur le Belem, comme mousse, alors commandé par le capitaine Dolu, de novembre 1898 au 22 octobre 1899.
Ce voyage n'a pas dû lui convenir, car il :"a déclaré le 29 mars 1899 vouloir renoncer à la navigation" (registre des inscrits provisoires n° 557 (7 R 4/1348)
Mais Le merle noir est intervenu, car :"a déclaré le 10 février 1900 vouloir reprendre la navigation", signé de lui-même et de son père (dito).
Le 13 février 1900, il embarquait sur le trois-mâts La Fontaine, comme novice, cette fois, pour en débarquer le 19 mars 1901 à Liverpool.

Sources : Archives départementales de Loire-Atlantique, Marine, inscrits provisoires 7R4/1348, Lemerle, Fernand, n°72 et Lemerle, Charles, n° 557.
Louis Lacroix, Les derniers voiliers antillais et les voyages de forçats à la Guyane, EMOM, 1970 (édition princeps en 1945).
L.O. Gosse, Belem, Terre et mer, 1984.
Daniel Hillion, Le Belem, cent ans d'aventures, Les éditions de l'Epargne, 1996.

Cordialement.
Memgam
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