différentiel entre tués et blessés au combat

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Eric Mansuy
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Re: différentiel entre tués et blessés au combat

Message par Eric Mansuy »

Bonjour à tous,

Merci pour vos récents apports à ma question.

Pour Etienne : le cas le plus connu dans les Vosges, qui a déjà été évoqué ailleurs et auparavant sur ce forum, est celui de l’abbé Collé, qui a relevé de nombreuses identités et procédé à des inhumations entre Ménil-sur-Belvitte et la Chipotte, de 1914 à 1916 (ce qui n’a pas manqué de lui attirer des déconvenues, qui sont une autre histoire). L’un des témoignages qu’il en a laissés est édifiant :
« C’est en 1916, le 10 novembre. Avec huit soldats, nous identifions grâce aux plaques : R... Edouard, 1912, Rodez, 2044 ; CA… Auguste, 1913, Rodez, 1090 ; P... Pierre, 1912, Rodez, 1743 ; CH... Jean, clairon, 1911, Riom, 167, tous du 139e régiment d’infanterie. Les familles R… et CH… réclament des cercueils en cas d’identification. Ils en ont, et la tombe étant élargie, ils occupent les deux extrémités. Chacun d’eux reçoit une croix bien marquée, et R… aura en plus un cœur gravé émaillé. Impossible de se tromper ! Cependant, en 19, à la relève pour le cimetière de Sainte-Barbe, l’équipe réussit à supprimer les noms R… et CH… et attribue les cercueils aux deux autres. M’apercevant de la grave erreur, j’en informe le Ministère qui, en fin de compte, donne droit à son équipe qui n’a pas trouvé… de plaques !! Il les avait reçues depuis 1916 ! Ah, les mensonges, c’est commode et ça prend ! J’en dirai bien d’autres si c’est nécessaire. »

Bien cordialement,
Eric Mansuy
"Un pauvre diable a toujours eu pitié de son semblable, et rien ne ressemble plus à un soldat allemand dans sa tranchée que le soldat français dans la sienne. Ce sont deux pauvres bougres, voilà tout." Capitaine Paul Rimbault.
chanteloube
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Re: différentiel entre tués et blessés au combat

Message par chanteloube »

Bonjour,

Toutes les informations que nous avons désormais, et fort bien documentées, étaient tout à fait importantes pour les familles. Pour les futures pensions, pour les héritiers en attente d'une décision de tribunal me semble-t-il? Que devient une entreprise dont le propriétaire a "disparu"? La famille peut-elle la vendre? La mettre en gérance?
Vaste question!
Un autre aspect du problème, une fois que l'on a évoqué la règle, et nous savons tous que la hiérarchie est attachée au respect à la lettre de la règle, une autre chose, dis-je, est la "pratique" de la déclaration des pertes. Nous avons tous eu en main des témoignages d'officiers qui pestent contre leur hiérarchie qui leur réclame des états ubuesques en peine attaque, demandes impératives portées par des coureurs qui risquent leur vie pour un état des "peaux de moutons" disponibles ou des "bottes" de tranchées à l'hiver 14-15. La lecture des carnets du colonel Tantot en pleine attaque du Bois en Hache le 17 février 15 est édifiante à ce sujet. Un certain nombre de « petites pratiques » consistaient à différer la déclaration, si on le pouvait, afin de ne pas faire baisser l’effectif et par conséquent les dotations et les rations accordées.( Situation à cinq jours ??? il me semble)
Peut-on avancer que le GQG avait d’abord besoin de ces états pour avoir une vision globale des effectifs disponibles afin de préparer la levée de nouveaux contingents et qu'à ce niveau les pertes étaient globalisées (tués + blessés + déserteurs + disparus + prisonniers)? Il fallait les remplacer.
La récupération des blessés de nouveau en état de combattre ne devait pas beaucoup entrer dans les calculs. Par contre, le chiffre des prisonniers, voire des désertions, pouvait signifier une baisse de la combativité, une usure morale et physique des unités. Il sera reproché en mars avril mai 17 à certains officiers supérieurs de ne pas avoir perçu cette usure, ce à quoi ils rétorqueront avec raison que les officiers subalternes ne les en ont pas informés... Un petit nombre sera sanctionné.

On voit que cette question des pertes, bien au-delà de ses aspects formels, soulève bien des interrogations ?
A bientôt
CC
chanteloube
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Re: différentiel entre tués et blessés au combat

Message par chanteloube »

Pierreth1
écrit:
En Ex yougoslavie en 1996 nous ne savions jamais combien de militaires étaient présents sur le territoire (et pourtant tout présent avait un ordre de mission individuel ou collectif, il y avait ces fameuses SPA et ce n'est pas une plaisanterie, nous n'avions une vision proche de la réalité qu'une fois par mois lorsque le trésorier distribuait l'avance de solde perçue en liquide sur le territoire! Cela peut sembler ahurissant mais c'était la réalité..

Vous semblez avoir une expérience d'officier, ou au moins de commandement, croyez-vous que cet état de flou relatif ait eu la moindre influence sur le déroulement des opérations? S'il manque un homme dans une section, le Chef le sait, s'il manque un pilote de char... il a été remplacé....s'il manque un Sergent-chef aux effectifs.... ça n'a pas une grande importance, ceux qui restent font, en général, son travail!
Durant la Guerre de 14-18 je pense qu'il en allait de même, c'est la raison pour laquelle il était difficile d'accorder des permissions aux soldats dans les tranchées sans les dégarnir. Comme les calculs se faisaient à partir de quota et que l'on pouvait plus facilement remplacer les militaires non combattants, ceux au contact se sentaient, à juste titre, lésés.

A bientôt.
CC
grandchamps
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Re: différentiel entre tués et blessés au combat

Message par grandchamps »

hello les amis .
merci pour les vécus et pour les infos "juridiques" de Pierreth, Chanteloube et Eric.
Voici deux cas belges Ils rappellent les démêlés de l'abbé Collé, ils illustrent encore une fois la fragilité des
rouages administratifs en temps de guerre et de bataille .Pour le second document, soldat Scheffers, noter que l'enquête est menée en 1919 alors que le soldat Scheffers est mort en 1914
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fafouille
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