CURIE - Sous Marin

COMARGOUX
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Re: CURIE - Sous Marin

Message par COMARGOUX »

Bonjour,
permettez moi d'ajouter mon grain de sel pour vous donner une information complémentaire concernant le SM Curie.
Le 1er février 1924 eut lieu à Toulon une cérémonie en l'honneur du SM Curie et de son équipage, en présence de la veuve du LV O'Byrne et de ses enfants.
Participaient à cette cérémonie, une délégation de marins italiens venue à bord du torpilleur Medici, et le sous-marin O'Byrne.
Madame O'Byrne y reçut, pour son mari, la Médaille de la Valeur Militaire italienne.
Cordialement.
Olivier

PS Je vous aurais bien mis quelques photos de cette cérémonie, mais je n'ai pas été fichu de trouver le mode d'emploi pour les insérer...
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Yves D
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Re: CURIE - Sous Marin

Message par Yves D »

Bonsoir Olivier
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Yves
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Rutilius
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CURIE ― Sous-marin de haute mer de type Brumaire (1913~1928).

Message par Rutilius »

Bonjour à tous,

Le retour à Toulon, le 1er février 1924, des souvenirs du Curie

• Le Figaro, n° 32, Vendredi 1er février 1924, p. 2.

« Les reliques du "Curie"

TOULON, 31 janvier. ― Le contre torpilleur italien le Medici, sous les ordres du commandant Pardo, est arrivé, ce matin, sur rade. Sur le quai Cronstadt, la foule a fait le meilleur accueil au navire envoyé en France pour remettre à la marine française tous les souvenirs du sous-marin français qui a coulé pen-dant la guerre dans le port de Pola.
M. Paul Burdese, ministre plénipotentiaire d’Italie, exerçant les fonctions de consul général pour Toulon et le département du Var, était sur le quai avec les délégations de sociétés italiennes et franco-italiennes. Aussitôt après l’accostage, il est monté à bord pour saluer les officiers, les matelots et le commandant du Medici.
M. Paul Burdese a souhaité la bienvenue au commandant Pardo et à l’état-major et leur a fait con-naître le programme des réceptions dont ils seront l’objet durant leur séjour à Toulon. La remise offi-cielle des souvenirs du Curie aux représentants de la marine française et aux familles de l’ancien équi-page aura lieu demain à dix heures et demie.
Le commandant Pardo, très sensible à l’accueil qui lui a été préparé ainsi qu’à ses hommes, a remercié chaleureusement et a commencé ensuite les visites protocolaires à diverses autorités. »


• Le Temps, n° 22.822, Samedi 2 février 1924, p. 2, en rubrique « Marine ».

« LES SOUVENIRS DU CURIE. ― Les fêtes franco-italiennes, célébrées à Toulon aujourd’hui à l’occasion de la remise des souvenirs du sous-marin Curie à son commandant et à son équipage, et d’une médaille d’or offerte par le roi d’Italie à la veuve du commandant O’Byrne, fait prisonnier par les Autrichiens au moment où il essayait de franchir les barrages de l’entrée de Pola, le 20 décembre 1914, et mort en captivité, ont commencé hier par une réception au Centre naval de Toulon, offerte par l’amiral Fatou, commandant en chef des frontières maritimes de la France. Y assistaient :
Les officiers du torpilleur de la marine royale italienne Medici ; M. Burdese, consul d’Italie à Toulon ; le capitaine de frégate Gabetti, attaché naval d’Italie à Paris ; le vice-amiral Lanxade, préfet mari-time de Toulon, et un grand nombre d’officiers de l’escadre de la Méditerranée.
L’amiral Fatou a, dans une allocution, célébrée l’amitié franco-italienne, évoqué la camaraderie qui unit les deux marines et les attentions touchantes prodiguées par les marins italiens à leurs camarades français au moment de la catastrophe du Dixmude. »


• Le Figaro, n° 33, Samedi 2 février 1924, p. 2, en rubrique « Dernière heure »

« Le retour à Toulon des reliques du Curie

TOULON, 1er février. ― C’est par un temps radieux que s’est déroulée, ce matin, sur le port, la céré-monie de la remise des reliques du sous-marins Curie, transportées de l’arsenal de Pola à Toulon par le torpilleur italien Medici.
Tous les navires présents à la Vielle-Darse, où était amarré le bâtiment italien, encadré par les sous-marins O’Byrne et Curie, étaient pavoisés, ainsi que les unités de l’escadre venues à Toulon pour don-ner de l’éclat à la fête franco-italienne.
A 10 h. 30, quand les vices-amiraux Fatou, Lanxade et Dumesnil, suivis de M. Claude, maire ; Gozzi, sous-préfet ; le consul d’Italie, l’attaché naval italien et les officiers généraux arrivèrent sur le quai, ils y trouvèrent une foule très dense et très émue. La
Marseillaise fut jouée, les troupes rendirent les honneurs. On remarquait les familles des morts du Curie, les survivants de l’équipage et les déléga-tions des sociétés italiennes.
Après avoir effectué la remise des souvenirs à bord du Curie, le commandannt Gabetti prononça un discours et remis la médaille d’or
Ad Valorem, décernée par le roi d’Italie à Mme O’Byrne, veuve du valeureux commandant. Puis M. Burdese, consul d’Italie ; l’amiral Fatou prononcèrent les allocutions patriotiques. Les autorités saluèrent les familles des disparus du Curie, la délégation et le détache-ment italiens et s’arrêtèrent à l’arrière du Medici, à bord duquel remontèrent les officiers italiens.
Cette cérémonie, simple mais émouvante, se termina au milieu de l’enthousiasme de la foule.

Sympathies franco-italiennes

Le président du Conseil a chargé l’ambassadeur de France à Rome d’exprimer au roi d’Italie les remerciements de M. Raiberti et de la marine française pour la touchante pensée que Sa Majesté a eue de faire remettre à la veuve du lieutenant de vaisseau O’Byrne, commandant du sous-marin Curie, la médaille d’or italienne ad valorem. [...] »


MEDICI – Torpilleur italien – I  – .jpg
MEDICI – Torpilleur italien – I – .jpg (884.52 Kio) Consulté 268 fois
Dernière modification par Rutilius le mar. avr. 02, 2024 10:59 am, modifié 3 fois.
Bien amicalement à vous,
Daniel.
COMARGOUX
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Re: CURIE - Sous Marin

Message par COMARGOUX »

Bonsoir à tous,
voici donc, grâce aux indications aimablement fournies, quelques photos de cette cérémonie :

Sur le carré du port de Toulon, on reconnaît de gauche à droite le SM O'BYRNE, le torpilleur italien MEDICI et le SM CURIE
Image

Le Préfet maritime prononçant son discours devant les autorités militaires franco-italiennes
Sur la table recouverte du drapeau tricolore, ce que je pense être un morceau du filet auquel le SM Curie doit sa perte
Image

Des marins apportent les "reliques" à bord du SM Curie.
J'ignore quel est ce yacht à tribord du Curie. Français ou italien ???
Image

Le sous-marin O'Byrne appareille après la cérémonie. Le SM Curie a déjà quitté les lieux. Le trorpilleur Medici s'apprête à en faire autant.
Image

Cordialement
Olivier
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Yves D
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Re: CURIE - Sous Marin

Message par Yves D »

Merci Olivier
Superbes photos d'une grande valeur affective.
Cordialement
Yves
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gildelan
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Re: CURIE - Sous Marin

Message par gildelan »

Bonsoir,
Un document pré-mortel du Commandant sur la perte du sous-marin et du PM CHEFNOURY, rescapé.
Cordialement
Gilbert.

Copie des notes du Commandant O’BYRNE sur les évènements qui ont précédé la perte du sous-marin CURIE suivies des notes du premier-maître patron-pilote CHEFNOURY sur ces évènements (extraits).

Le 15 décembre (1914) au matin, j’ai pris les ordres de l’Amiral commandant en chef qui peuvent se résumer à ceci :
« Attaquer toute force navale ennemie dans les parages de Pola. Ne tenter de rentrer dans ce port qu’une fois s’être assuré qu’aucun navire de guerre ne se trouvait dans la baie de Fasana ».

Le 15 et le 16 décembre, le CURIE a fait son plein de combustible, pris des vivres pour 10 jours, débarqué plus d’une tonne de matériel non indispensable, fait une plongée d’essai. Malgré le poids enlevé dans sa quille pour compenser l’augmentation du poids dû aux gardes de gouvernails et le matériel débarqué, le CURIE était beaucoup trop lourd.

J’attribue ce fait, en partie au poids des gardes supérieures au …, en partie à des sources sous-marines dans le voisinage de Platéali, centre des sous-marins à cette époque. La densité n’était cependant pas à la surface inférieure à celle trouvée dans l’Adriatique.

Vers 4 heures de l’après-midi, le 16, pris la remorque du JULES MICHELET. Navigation bonne, très beau temps. Il serait bon, dans le cas de remorquage de durée d’avoir 400 mètres de remorque allongée jusqu’à 600 en cas de mauvais temps.

Le 18, vers 2 heures du matin, à environ 20 milles au-delà de l’ile Pelagosa, largué la remorque et fait route pour se rapprocher des iles Dalmates, de façon à rectifier le point dans l’après-midi avant de se rapprocher de la pointe sud de l’Istrie. Temps légèrement brumeux, mais beau, mer belle. Toutes les dispositions étaient prises pour une plongée rapide. Tous les hommes en bas, à leur poste, seul le veilleur et moi sur le pont. Tous les ballasts pleins sauf les centraux.

En se rapprochant de la côte sud de l’Istrie, rencontré dans l’obscurité plusieurs bâtiments sans feux, à allure rapide, probablement des contre-torpilleurs.

Vers 9 heures du soir, à 3 ou 4 milles de la pointe sud, incliné la route vers l’Ouest pour aller stationner à 15 milles environ dans le sud de Pola. Nuit très obscure sans lune. Dans le trajet, rencontré un contre-torpilleur très proche, plongé très rapidement. Toutes les dispositions étant prises à l’avance et en particulier les ballasts pleins, la disparition du CURIE a été extrêmement rapide. J’ai eu cependant l’impression, au moment où le kiosque non encore tout à fait immergé faisait un fort remous, que le contre-torpilleur à 50 mètres tout au plus du CURIE, diminuait de vitesse. Je note l’impression de la diminution de vitesse du contre-torpilleur sans en tirer de conclusion ; je le rapprocherai d’un autre fait survenu quelques heures plus tard. Ce contre-torpilleur n’a cependant montré aucun signe d’hostilité, aucun éclairage par projecteur, aucun coup de canon. A-t-il eu l’impression d’un sous-marin s’immergeant ?

Stationné pendant quelques heures à 15 milles au sud de Pola en chargeant les accumulateurs. Remis en route à 3 heures du matin (le 19) vers le Nord. Peu de temps après, plongé pour un bâtiment sans feux à vapeur, paraissant être un contre-torpilleur. Remonté en surface une demi-heure après et continué la route.

Entre 5 heures et demie et 6 heures (le 19), le jour ne paraissant pas encore à cause des nuages, aperçu un contre-torpilleur à trois cheminées à petite distance ; plongé une demi-heure en continuant la route. Vers 7 heures du matin, temps clair du côté de l’Italie, brumeux du côté de la terre, fait route vers l’Est.

Vers 8 heures, j’ai pu me situer à environ 4 à 5 milles de Pola. Vers le même moment, un cuirassé, que je crois pouvoir affirmer être du type « Radetwky » rentrait à Pola. Ce cuirassé rentrait-il à Pola averti par le contre-torpilleur rencontré la nuit ? En notant la coïncidence des deux faits, j’ai cru au début que, aperçu la veille au soir, j’avais été signalé à Pola et que les cuirassés aussitôt leurs feux allumés étaient rentrés à Pola. A la réflexion, je ne le crois pas. Nous étions un samedi veille de la semaine de Noël ; il est plausible de croire que les Autrichiens aient ramené de Fasana ce jour-là leurs bâtiments pour fêter Noël, fête particulièrement aimée des Autrichiens.

J’ai circulé ce jour-là et le lendemain dans le voisinage immédiat de la jetée de Pola sans constater aucune surveillance particulièrement active.

Vers 9h30, passé à environ 200 mètres de la pointe… Rencontré à courte distance deux contre-torpilleurs sortant de Pola. Fait à toute petite distance de la terre le tour de la rade extérieure de Pola, de façon à me présenter … du port. Il m’a été impossible, en passant à la hauteur de la passe intérieure de Fasana (petite passe Sud), de voir si quelque cuirassé s’y trouvait.

Après avoir dépassé d’une centaine de mètres le prolongement de la jetée, fait tête sur le barrage dont je supposais l’existence par un plan à main levée fourni par l’Etat-Major, mais auquel celui-ci n’attribuait pas une grande exactitude.

Cependant je dois dire, dans le cas où l’on se servirait de même service d’espionnage, que les autorités autrichiennes ayant découvert, après le relevage du CURIE ce document (non officiel), le seul qui n’ait pas été détruit come je l’expliquerai plus tard, ont paru extrêmement ennuyés de l’exactitude de ce document. Les constatations au sujet de nos mines personnelles me confirment dans la même idée.

J’ai viré de bord, longé le barrage à moins de 10 mètres de la jetée. Je crois pouvoir affirmer d’une façon absolue qu’aucune passe n’existait de ce côté. Du côté de la terre, au contraire, une série de canots à vapeur, 3 au moins, semblaient travailler au barrage. J’ai tout lieu de croire que ces canots étaient en train de refermer la passe ouverte pour le passage des cuirassés aperçus 2 heures avant.

Ayant reçu l’ordre de ne pas entrer à Pola avant de m’être assuré que la rade de Fasana était vide, j’ai fait route pour cette rade en restant à l’intérieur de la ligne de torpilles portées sur mon plan.

J’ai constaté dans ce trajet que des mouilleurs de mines (vapeurs et grosses chaloupes) travaillaient dans la zone indiquée par le plan.

Dans la baie de Fasana, un gros remorqueur. Sorti de la baie à la nuit tombante et aussitôt éloigné de terre. Monté en surface pour se porter, tout en chargeant rapidement, avec un moteur à 20 milles environ à l’ouest de Pola. De nombreux contre-torpilleurs circulaient en éclairant avec leurs projecteurs. Pendant un certain temps, j’ai été accompagné par trois contre-torpilleurs, un de chaque bord et un derrière éclairant sans cesse et en apparence avec persistance le CURIE.

Ces contre-torpilleurs n’ayant montré aucune hostilité, je crois pouvoir conclure que le CURIE n’a pas été aperçu.

A 20 milles de Pola (nuit du 19 au 20) stationné sur une gueuse dont l’orin tenu par un homme pouvait être rapidement abandonné. Terminé la charge.

Vers 3 heures du matin (le 20) fait route sur Pola, plongé une fois pour un contre-torpilleur à trois cheminées. Atterri en plongée au Sud de … Fait route en longeant la côte sur Pola, à l’intérieur des lignes de torpilles. Comme la veille, des mouilleurs de mines étaient en train de travailler. Aperçu un contre-torpilleur faisant route vers le Nord.

Etant à peu près certain que la passe des contre-torpilleurs n’était pas du côté de la jetée, mais bien du côté de la terre, craignant en outre qu’une attente de surveillance ne me donne le secret de cette passe trop tard dans la soirée pour entrer, étant dans ce cas obligé de quitter les eaux de Pola pour rallier d’après les ordres reçus, j’avais deux solutions à adopter : ou me lancer un peu aveuglément à toucher le long de la terre à la recherche de cette passe au risque de rencontrer à cette distance un caillou non marqué sur la carte et de sombrer immédiatement (un contre-torpilleur veut une passe de 4 m de profondeur, un sous-marin comme le CURIE plus de 10m50) ou bien traverser le barrage.

La passe devait faire un angle assez brusque au nord de la jetée. L’apparence du barrage me faisait supposer que, non seulement la manœuvre devait être possible, mais encore facile. C’est cette solution que j’ai adoptée. Pendant que le CURIE se débattait pour se dégager, j’ai pu me rendre compte de l’exactitude de mes prévisions. Voici en effet la structure du barrage. Au fond de l’eau, une grosse chaine ou filière. A la surface, filière moyenne portée par des flotteurs (bouées rondes enfilées et espars amarrés longitudinalement) réunissant les deux des petites filières de 10 mm environ de diamètre, espacées de 2 ou 3 mètres. La hauteur de l’eau est d’environ 40 mètres, les filières intermédiaires n’étaient pas raidies.

Le premier barrage a été passé vers 11h30 sans le moindre incident. A peine a-t-on perçu un très léger grattage sur la coque. Nous étions à petite vitesse. L’homme de barre qui mettait son point d’honneur à tenir l’immersion d’une façon impeccable, pour corriger rapidement une erreur de 20 cm au maximum qui ne lui était pas coutumière, a mis de la barre. La vitesse étant petite, l’angle de barre a été assez fort, 10 ou 15° probablement. La malchance a voulu que le centre passe au même instant le long des filières. L’une d’elles, comme le montre le plan du début du rapport, trouvant un passage libre entre la garde et le gouvernail, s’est introduite le long de la coque, à toucher la mèche.

Je me suis rendu compte de ce détail en regardant par les hublots du kiosque. C’était le gouvernail bâbord milieu. Le gouvernail tribord milieu n’était pas engagé. Quoique du fait de l’écartement des filières (2 à 3 mètres) on puisse supposer que la filière tribord ait fait un certain effort sur la garde et le gouvernail (largeur du sous-marin : 6,50 m) on peut conclure que l’angle de barre mis était l’angle critique et qu’une légère différence de construction des gardes a permis qu’un côté soit engagé et non l’autre…


Notes personnelles du premier-maître CHEFNOURY, patron du sous-marin CURIE, sur la suite des évènements qui ont amené la perte de ce sous-marin et la prise de son équipage

En manœuvrant pour faire dégager le gouvernail que jugeait pris le Commandant, un fort craquement entendu par les hommes de l’AR fit présumer que la filière-garde, placée à Malte pour préserver la cage du gouvernail, était cassée ou désemparée de ses attaches. Un peu plus tard, l’hélice bâbord était prise.

Avec un complet sang-froid, toutes sortes de manœuvres furent ordonnées et exécutées dans le plus parfait silence, comme à l’exercice : changements d’immersion, pointes différentes, souvent excessives, en transportant du matériel d’un bout à l’autre du sous-marin, variations de vitesse, etc. L’une de nos pointes dépasse 30°. C’est à peine si quelques accoreurs de la batterie craquèrent, l’épontillage ne bougea pas. Les moteurs électriques donnèrent un rendement que l’on n’aurait pas osé leur demander même en essais.

Je dois dire hautement que, dans cette période d’acharnement à nous dégager, à aucun moment il ne se fit entendre à bord aucune plainte, aucune parole d’angoisse.

Par une de nos pointes où notre étrave sortit de l’eau, les Autrichiens s’aperçurent de notre présence dans leur port. Ils tirèrent quelques coups de feu entendus de l’intérieur, mais qui n’atteignirent pas la coque sous-marine. Un peu plus tard, ils déversèrent sur le CURIE des chaînes et des ferrailles.

Au bout de 5 heures de manœuvre infructueuses, le Commandant fit prendre une dernière fois les densités et la pression restante aux accumulateurs d’air. Nos ressources étaient épuisées. Se laissant reposer sur le fond (40 mètres), le Commandant ordonna de détruire tous les documents secrets et confidentiels. L’A .T.R. ainsi que sa jumelle furent mis en miettes, les papiers brûlés, puis il décida de tenter de sauver l’équipage en ordonnant les dispositions pour que le bâtiment ne tombe pas entre les mains des Autrichiens.

En raison de la première hostilité marquée par l’ennemi lors de notre apparition, il était à présumer que cette hostilité se marquerait encore plus fort lorsque nous ferions surface.

Garder les prises d’eau ouvertes était la première intention du Commandant, persuadé que les obus nous feraient des purges mais, pour plus de sûreté, il ordonna qu’on ouvrirait également la vanne du drain au poste central ou davantage, selon les évènements qui nous auraient attendus et pour laisser le moins de temps possible l’équipage dans le sous-marin.

Une bouée de sauvetage fut délivrée à chaque homme. On doit à cette précaution de n’avoir pas eu de noyés, quelques hommes ne sachant pas nager.

« Chassez partout, les prises d’eau resteront ouvertes… ».

Chassé partout bâbord, puis l’AR seulement, pour corriger la pointe que nous prenions.

Sitôt en surface, la mitraille fait rage. Le kiosque est atteint plusieurs fois, le panneau Diésel déformé.

« Ouvrez les panneaux et évacuez ».

Les panneaux AV et AR s’ouvrent aisément et l’équipage évacue par ces deux panneaux.

Un obus éclate dans le poste central. Je crois d’abord le Commandant blessé. C’est seulement sur le pont qu’il devait être atteint d’un éclat d’obus à l’épaule gauche.

Le bord vide du personnel, j’ouvre sous les yeux du Commandant la vanne de drain du poste central, l’eau rente à flots, puis je monte par le kiosque pendant que le Commandant monte par le panneau AV. Le sous-marin s’enfonçait déjà.

Debout et fier sur le pont AV, le Commandant dit un dernier adieu à ses hommes : « Courage mes enfants, c’est pour la France… » et le glorieux CURIE s’enfonçait sous ses pieds normalement, comme pour une plongée d’exercice.

Le feu des Autrichiens cesse. Leurs embarcations recueillirent l’équipage qui fut distribué sur divers bâtiments.

L’officier en second (Enseigne de Vaisseau CHAILLEY) a dû être tué à la mer et entraîné ensuite par le barrage auquel il s’était appuyé.

Le quartier-maître LEBON était atteint à la nuque par un projectile. Il mourait à l’hôpital quelques heures plus tard.

Le second-maître électricien LE REST avait la jambe gauche traversée par une balle.

Le second-maître mécanicien DEMAY, une blessure légère sur le haut de la tête.

Le quartier-maître T.S.F. CASSAN, blessure au pied. L’éclat d’obus lui restait à l’extrémité du soulier.

Le quartier-maître SALAUN, blessure légère à une jambe.

Toutes ces blessures ont été reçues dans l’eau
Signé : CHEFNOURY

(source : livre d'or de la Marine - guerre 14/18)
Excès de peur enhardit.
geralda
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Re: CURIE - Sous Marin

Message par geralda »

Bonsoir,
Mon oncle Paul DALMAS, cuisinier, né en 1891, a été sous-marinier durant la Guerre 14-18. Décoré de la Médaille Militaire. Il a vécu des faits semblables à ceux du sous-marin CURIE. Sans plus de précision, comment être certain que cet oncle et bien celui figurant sur la liste de l'équipage que vous avez bien voulu nous communiquer.
Avec tous mes remerciements.
Gérald.



[:alain dubois:8] ...

Hormis les victimes citées ci-dessus sans oublier "RADIUM", le chien du bord mort asphyxié; l'équipage était constitué de :

Premier Maître : CHEFNOURY Jean, Patron pilote.
Second Maître : DEMAY Paul, Mécanicien.
Second Maître : LE REST Émile, Électricien.
Second Maître : PAHU Anatole, Torpilleur.
QM : ANDRÉ Eugène, Mécanicien.
QM : BRACHET Émile, Mécanicien.
QM : CALVES François, Torpilleur.
QM : CHAMOND Aimé, Torpilleur.
QM : COULOMB Clément, Torpilleur.
QM : DOMERGUE Léon, Mécanicien.
QM : JONAS Georges, Mécanicien.
QM : LAGET Gabriel, Mécanicien.
QM : LE MELL Raphaël, Électricien.
QM : LE PORT Mathieu, Électricien.
QM : LOHIER Jean, Timonier.
QM : MENUT Joseph, Électricien.
QM : PUYRIGAUD Paul, Mécanicien.
QM : RAULT Joachim, Mécanicien.
QM : SALAÜN Frédéric, Électricien.
QM : THOMAS Pierre, Électricien.
Mt : BUISSON René, Mécanicien.
Mt : CASSAN Noël, Électricien.
Mt : DALMAS Paul, Cuisinier.
Mt : LE CORRE Louis, Électricien.
Mt : PENETTO Charles, Torpilleur.

[:patrice pruniaux1:6]
Rutilius
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CURIE ― Sous-marin de haute mer de type Brumaire (1913~1928).

Message par Rutilius »

Bonsoir,

net marine : « Les héros maritimes français de la première guerre mondiale ».

― DALMAS Paul, Matelot cuisinier, Sous-marin Curie, Matricule n° 51.769.

Citation :

« A fait preuve du plus grand héroïsme en pénétrant au fond d'un port ennemi malgré la multiplicité des moyens de défense, a lutté avec la plus grande énergie pour échapper à l’ennemi, et a coulé le bâtiment pour éviter qu’il ne tombe entre ses mains. » (Déc. 1914)
Dernière modification par Rutilius le mar. nov. 27, 2018 12:39 am, modifié 1 fois.
Bien amicalement à vous,
Daniel.
Rutilius
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CURIE ― Sous-marin de haute mer de type Brumaire (1913~1928).

Message par Rutilius »

Bonjour à tous,

Le sous-marin Curie à Corfou avant son retour à Toulon (1918)

Photographie prise par médecin major Le Maître, du Tourville,
et publiée dans L’Illustration du 28 octobre 1918



Image

Ministère de la Culture – Médiathèque de l’architecture et du patrimoine
Tirage n° OR160528
Dernière modification par Rutilius le lun. avr. 01, 2024 8:12 pm, modifié 2 fois.
Bien amicalement à vous,
Daniel.
LE CORRE Patrick
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Re: CURIE - Sous Marin

Message par LE CORRE Patrick »

Bonjours à tous. je m'appelles Le Corre Patrick et , je suis le petit fils de Le Corre Louis Eugéne, matelot electricien à bord du sous marin Curie, sabordé pae son équipage pour que le bateau ne tombe pas aux mains de l'énnemie. J'ai en ma possésion, le recit de l'odyssée du sous marin ecrit par mon G Pére ainsi que la photo de plusieurs marins, dont mon G Pére, en captivité à Deutsch-Gabel. merci de m'informer, comment je puis vous communiquer ces documents
Cordialement.
Le Corre Patrick
LE CORRE Patrick
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