Bonjour à tous,
Bonjour Marko,
Suite et fin de l'exploitation des dossier de recours en grâce des condamnés à mort.
En 1915, les condamnés à mort suite à une mutilation volontaire, dont le recours en grâce a été accepté, sont au nombre de 11 (des 331e R.I., 1er Tirailleurs Algériens, 88e R.I., 103e R.I., 2e R.I.C., 42e R.I.C., 32e Dragons, 258e R.I., 151e R.I., 57e R.I.C., et un homme d’une unité non mentionnée).
En 1916, les graciés sont 5 (des 172e R.I., 46e R.I., 273e R.I., 8e R.I., 3e Zouaves).
Autre source, les archives de la Prévôté du G.A.E., qui nous informent sur les cas suivants pour l'année 1918 :
Soldat B… François Paul, classe 1918, 114e R.I., 33e Cie, 9e Bon ; sans punition, assez bonne conduite :
« Plainte du commandant du 9e Bon du 114e R.I., S.P. 150 pour crime « d’abandon de poste par mutilation volontaire sur un territoire en état de guerre. »
Evacué le 31 août sur hôpital 20 à Mirecourt pour phlegmon de la main gauche. Plaie suspecte ayant entraîné enquête au cours de laquelle B… a avoué avoir infecté avec du sang provenant d’une dent cariée une blessure légère qu’il s’était faite en tombant sur du grillage métallique.
Ordre d’informer du 5/10/18 pour abandon de poste sur territoire en état de guerre.
Dossier transmis à la D.E. Nord du G.A.E. par bordereau du 20 novembre n°21.574 »
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Soldat Del G… Roland Humbert, classe 1918, 112e R.I., 36e Cie, 9e Bon :
« Plainte du Lt Colonel cdt le groupe n°4 de B.I.
Aurait à dessein aggravé une plaie légère (accidentelle) à la main gauche.
Ordre d’informer du 5/10/18 pour abandon de poste sur territoire en état de guerre.
Dossier transmis à la D.E. Nord du G.A.E. par bordereau du 20 novembre n°21.574 »
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Soldat G… Léon, classe 1919, 112e R.I., 33e Cie ; aucune observation :
« Plainte du Lt Colonel cdt le 4e groupe de B.I. du 8e groupement.
Mutilation volontaire.
Ordre d’informer du 5/10/18 pour abandon de poste sur territoire en état de guerre.
Dossier transmis à la D.E. Nord du G.A.E. par bordereau du 20 novembre n°21.574 »
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Soldat P… Louis, classe 1916, 18e R.I., 9e Bon, 36e Cie :
« Evacué de la zone des Armées le 30 avril 1917 pour phlegmon, est parvenu à rester dans divers hôpitaux pendant plus d’un an en entretenant artificiellement une ulcération. Rapports médicaux formels. Abandon de poste sur territoire en état de guerre (mutilation volontaire).
Ordre d’informer du 5 octobre 1918.
Non lieu du 19 novembre 1918. Avis au corps du 20.
Ordre de mise en route du même jour à Cie du 115e R.I.T. de Mattaincourt. »
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Soldat V… Marius Joseph, 112e R.I., 36e Cie :
« Mutilation volontaire.
Ordre d’informer du 5/10/18 pour abandon de poste sur territoire en état de guerre. »
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Soldat D… Georges Léon, 157e R.I., 33e Cie, passé le 8/9/18 à la 35e Cie, 9e Bon, 4e groupe du 8e groupement de B.I. :
« Mutilation volontaire.
Ordre d’informer du 5/10/18 pour abandon de poste sur territoire en état de guerre.
Ordonnance de non lieu du 7 nov. 1918. Levée d’écrou du 7/11/1918 n°21.999 »
Bien cordialement,
Eric Mansuy
mutilations, hopitaux, soins
- Eric Mansuy
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- Inscription : mer. oct. 27, 2004 2:00 am
Re: mutilations, hopitaux, soins
"Un pauvre diable a toujours eu pitié de son semblable, et rien ne ressemble plus à un soldat allemand dans sa tranchée que le soldat français dans la sienne. Ce sont deux pauvres bougres, voilà tout." Capitaine Paul Rimbault.
Re: mutilations, hopitaux, soins
Bonsoir à tous,
Bonsoir Marko,
Ce témoignage d'un soldat du 38ème RI, pour illustrer un autre aspect des comportements autodestructeurs de nos Poilus.
"Nous avons changé de pays hier. Nous avons embarqué à une gare qui se trouvait à 15 kilomètres d’où nous étions. Nous sommes partis à une heure du matin et le train n’est parti qu’à 9 heures. Nous avons restés 8 heures tassés dans les wagons à bestiaux sans pouvoir s’asseoir et nous avons touché chacun un bout de chocolat et un petit bout de viande froide pour toute la journée. Si on avait rien dans le porte-monnaie, des jours comme ça il faut serrer la ceinture. Quand nous avons débarqué nous avons fait encore une sixaine de kilomètres pour aller dans le camp où nous sommes, sous la pluie. Nous sommes arrivés tout trempé de sueur et de pluie, aussi il en y a beaucoup de malades ce matin. Moi j’ai attrapé la dysenterie et je veux boire un bon coup aujourd’hui pour l’augmenter car je voudrai bien pouvoir réussir à me faire évacuer. D’ici quelques jours nous allons faire quelques jours de manœuvre et après on va nous envoyer dans la fournaise. Nous sommes en ce moment entre l’Oise, la Somme et la Seine Inférieure et il se prépare encore des coups terribles."
Bien à vous,
Bien à vous tous.
Christophe
Bonsoir Marko,
Ce témoignage d'un soldat du 38ème RI, pour illustrer un autre aspect des comportements autodestructeurs de nos Poilus.
"Nous avons changé de pays hier. Nous avons embarqué à une gare qui se trouvait à 15 kilomètres d’où nous étions. Nous sommes partis à une heure du matin et le train n’est parti qu’à 9 heures. Nous avons restés 8 heures tassés dans les wagons à bestiaux sans pouvoir s’asseoir et nous avons touché chacun un bout de chocolat et un petit bout de viande froide pour toute la journée. Si on avait rien dans le porte-monnaie, des jours comme ça il faut serrer la ceinture. Quand nous avons débarqué nous avons fait encore une sixaine de kilomètres pour aller dans le camp où nous sommes, sous la pluie. Nous sommes arrivés tout trempé de sueur et de pluie, aussi il en y a beaucoup de malades ce matin. Moi j’ai attrapé la dysenterie et je veux boire un bon coup aujourd’hui pour l’augmenter car je voudrai bien pouvoir réussir à me faire évacuer. D’ici quelques jours nous allons faire quelques jours de manœuvre et après on va nous envoyer dans la fournaise. Nous sommes en ce moment entre l’Oise, la Somme et la Seine Inférieure et il se prépare encore des coups terribles."
Bien à vous,
Bien à vous tous.
Christophe
Re: mutilations, hopitaux, soins
Merci Titeuil
temoignage flagrant, effectivement, de ce qui pouvait passer par la tête des hommes qu'on envoyé, je cite" à la fournaise".
Je reviens sur le sujet de départ de ce post.
Suite aux diverses recherches des participants ( encore merci à eux ), et je pense que la poursuite des ces recherches est encore de mise ( bonne lectures Eric ).
suite aux divers contacts que j'ai pu avoir en dehors de ce forum ( Rousseau, Le Naour ), il n'y est pas eu de cas avéré d'existence de réél trafic autour des mutilations. Aucune étude pour l'instant n'a été mené pour l'affirmer ou l'infirmer .
( il me reste encore les instances très officielles a contacter ! )
des choses ont été mises en place ( comme le disait Stephan @gosto ) de maniere sporadiques et personelles.
Des pistes restent ouvertes, néanmoins (des cas de contaminations en masse, par exemple, ou encore de mutilation par arme à plusieur. )
Et je pense que par celle là que nous devions nous diriger.
( vu la masse de doc..... on a pas fini !)
- épluchage des JMO
- épluchage des presses
- lecture des "presses médicales"
- compte rendu d'audience judiciaire
J'ai commencé un doc qui tente de condenser toute les infos glanées sur le sujet.
marko
temoignage flagrant, effectivement, de ce qui pouvait passer par la tête des hommes qu'on envoyé, je cite" à la fournaise".
Je reviens sur le sujet de départ de ce post.
Suite aux diverses recherches des participants ( encore merci à eux ), et je pense que la poursuite des ces recherches est encore de mise ( bonne lectures Eric ).
suite aux divers contacts que j'ai pu avoir en dehors de ce forum ( Rousseau, Le Naour ), il n'y est pas eu de cas avéré d'existence de réél trafic autour des mutilations. Aucune étude pour l'instant n'a été mené pour l'affirmer ou l'infirmer .
( il me reste encore les instances très officielles a contacter ! )
des choses ont été mises en place ( comme le disait Stephan @gosto ) de maniere sporadiques et personelles.
Des pistes restent ouvertes, néanmoins (des cas de contaminations en masse, par exemple, ou encore de mutilation par arme à plusieur. )
Et je pense que par celle là que nous devions nous diriger.
( vu la masse de doc..... on a pas fini !)
- épluchage des JMO
- épluchage des presses
- lecture des "presses médicales"
- compte rendu d'audience judiciaire
J'ai commencé un doc qui tente de condenser toute les infos glanées sur le sujet.
marko
ce n'est pas à la taille du pinceau que l'on voit le talent de l'artiste
- Eric Mansuy
- Messages : 4290
- Inscription : mer. oct. 27, 2004 2:00 am
Re: mutilations, hopitaux, soins
Bonjour à tous,
Bonjour Marko,
Deux citations intéressantes trouvées dans mes lectures du moment. A méditer...
"Cette même suspicion [concernant les blessés des membres supérieurs], je l'ai vue moi-même régner pendant la guerre actuelle à X... ; quelques officiers ne manquaient pas de dire : "il est bien évident qu'il s'agit de mutilations volontaires, puisqu'il n'y a guère que des blessés des mains ; il est bien évident aussi que ce sont des mutilés volontaires, puisqu'ils appartiennent à tel corps, à tel régiment plus suspect que tout autre"." [c'est moi qui souligne] (docteur Chavigny, in Les Mutilations volontaires par armes à feu)
"J'en ai eu d'autres encore [des cas] plus délicats. Des soldats traduits en conseil de guerre pour des mutilations volontaires. Je les ai tous fait avouer, mais toujours le rapport médico-légal que j'avais à fournir laissait la place au doute. Le mutilé était acquitté et guéri, retournait aux tranchées, même avec trois doigts de moins, mais dans une autre unité. En conscience je croyais bien agir. Nul ne peut répondre de ce qu'il ferait dans les conditions, parfois atroces, dans lesquelles nos poilus vivaient. Et le plus souvent ces malheureux, fous de cafard, risquaient le poteau pour retourner auprès d'une femme qu'ils savaient infidèle.
Qu'on fusille un déserteur qui passe à l'ennemi, oui. Mais mettre au poteau un gosse qui a déjà combattu et que le désespoir d'une vie impossible abat momentanément, c'est une erreur. Le cafardeux est un malade et s'il a comparé sa vie avec celle des innombrables embusqués de Paris, sa maladie se conçoit et s'excuse." (docteur François Perrin (médecin militaire d'active), in Un Toubib sous l'uniforme)
Bien cordialement,
Eric Mansuy
Bonjour Marko,
Deux citations intéressantes trouvées dans mes lectures du moment. A méditer...
"Cette même suspicion [concernant les blessés des membres supérieurs], je l'ai vue moi-même régner pendant la guerre actuelle à X... ; quelques officiers ne manquaient pas de dire : "il est bien évident qu'il s'agit de mutilations volontaires, puisqu'il n'y a guère que des blessés des mains ; il est bien évident aussi que ce sont des mutilés volontaires, puisqu'ils appartiennent à tel corps, à tel régiment plus suspect que tout autre"." [c'est moi qui souligne] (docteur Chavigny, in Les Mutilations volontaires par armes à feu)
"J'en ai eu d'autres encore [des cas] plus délicats. Des soldats traduits en conseil de guerre pour des mutilations volontaires. Je les ai tous fait avouer, mais toujours le rapport médico-légal que j'avais à fournir laissait la place au doute. Le mutilé était acquitté et guéri, retournait aux tranchées, même avec trois doigts de moins, mais dans une autre unité. En conscience je croyais bien agir. Nul ne peut répondre de ce qu'il ferait dans les conditions, parfois atroces, dans lesquelles nos poilus vivaient. Et le plus souvent ces malheureux, fous de cafard, risquaient le poteau pour retourner auprès d'une femme qu'ils savaient infidèle.
Qu'on fusille un déserteur qui passe à l'ennemi, oui. Mais mettre au poteau un gosse qui a déjà combattu et que le désespoir d'une vie impossible abat momentanément, c'est une erreur. Le cafardeux est un malade et s'il a comparé sa vie avec celle des innombrables embusqués de Paris, sa maladie se conçoit et s'excuse." (docteur François Perrin (médecin militaire d'active), in Un Toubib sous l'uniforme)
Bien cordialement,
Eric Mansuy
"Un pauvre diable a toujours eu pitié de son semblable, et rien ne ressemble plus à un soldat allemand dans sa tranchée que le soldat français dans la sienne. Ce sont deux pauvres bougres, voilà tout." Capitaine Paul Rimbault.
Re: mutilations, hopitaux, soins
Je ravive un peu le sujet en y apportant ce nouveau post .
Lu recement dans le roman autobiographique de Chevallier : "La peur"
en parlant de Charlet alias "Caca" un infirmier blessé au front et affecté aux secours à l'arrière.
"
(...)
Je lui ai vu faire une chose terrible. C'était au moment où Diuré souffrait tant de la cuisse. Un jour, sous prétexte de le soulager, Charlet a insisté pour lui changer son pansement. (...)L'opération terminée, j'ai vu Charlet porter la cuvette dans l'angle des lavabos, en retirer une gaze souillée et l'enfermer avec précaution dans une boite en fer blanc qu'il a glissée dans sa poche. Intrigué, je l'ai appelé un moment plus tard, pour lui demander :
- Dis donc, tu fais de la bactériologie maintenant?
- Qu'est ce que tu veux dire ?
- Qu'est ce que tu as mis dans ta boîte, tout à l'heure ?
Il s'est troublé
- Je ne comprends pas.
Puis, après réflexion :
-(...) Tu te souviens de Richerand, qui était à l'école de chimie ?
-(...)
-(...) Je l'avais retrouvé au front. ( ...)Il vient de m'écrire ( il est à l'Hartmann) : " On ne fait qu'attaquer. Sauve-moi. " Ce qui veut dire, comme je le connais : Je suis à boit de force, j'ai perdu tout espoir.
- Et alors ?
- Alors... D'ici, comment veux-tu que lui vienne en aide ? Je cherche depuis hier, et ça presse ...
Il s'est penché et m'a glissé :
- Je vais lui envoyer ça ...
- Ça quoi ?
- Du pus de Phlegmon. En se piquant avec, il a des chances d'être évacué.
Nous nous sommes tus longtemps. je lui ai dit :
- Tu te rends compte de ce que tu vas faire ?
(...)
Lu recement dans le roman autobiographique de Chevallier : "La peur"
en parlant de Charlet alias "Caca" un infirmier blessé au front et affecté aux secours à l'arrière.
"
(...)
Je lui ai vu faire une chose terrible. C'était au moment où Diuré souffrait tant de la cuisse. Un jour, sous prétexte de le soulager, Charlet a insisté pour lui changer son pansement. (...)L'opération terminée, j'ai vu Charlet porter la cuvette dans l'angle des lavabos, en retirer une gaze souillée et l'enfermer avec précaution dans une boite en fer blanc qu'il a glissée dans sa poche. Intrigué, je l'ai appelé un moment plus tard, pour lui demander :
- Dis donc, tu fais de la bactériologie maintenant?
- Qu'est ce que tu veux dire ?
- Qu'est ce que tu as mis dans ta boîte, tout à l'heure ?
Il s'est troublé
- Je ne comprends pas.
Puis, après réflexion :
-(...) Tu te souviens de Richerand, qui était à l'école de chimie ?
-(...)
-(...) Je l'avais retrouvé au front. ( ...)Il vient de m'écrire ( il est à l'Hartmann) : " On ne fait qu'attaquer. Sauve-moi. " Ce qui veut dire, comme je le connais : Je suis à boit de force, j'ai perdu tout espoir.
- Et alors ?
- Alors... D'ici, comment veux-tu que lui vienne en aide ? Je cherche depuis hier, et ça presse ...
Il s'est penché et m'a glissé :
- Je vais lui envoyer ça ...
- Ça quoi ?
- Du pus de Phlegmon. En se piquant avec, il a des chances d'être évacué.
Nous nous sommes tus longtemps. je lui ai dit :
- Tu te rends compte de ce que tu vas faire ?
(...)
ce n'est pas à la taille du pinceau que l'on voit le talent de l'artiste
Re: mutilations, hopitaux, soins
Bonjour à tous,
■ Sur les procédés de mutilation volontaire ... et sur la relative clémence du juge militaire d’après-guerre.
● L’Ouest-Éclair – éd. de Caen –, n° 7.089, Lundi 30 décembre 1918, p. 3, en rubrique « Dans la région ~ Le Mans ~ Au Conseil de guerre ».

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Bien amicalement à vous,
Daniel.