Les pertes françaises du 11 novembre 1918

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Eric Mansuy
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Re: Les pertes françaises du 11 novembre 1918

Message par Eric Mansuy »

Bonjour à tous,

Un nom qui, sauf erreur de ma part, n'a pas été cité ici : celui de Joseph Alfred Delanne, du 333e RI, dont la fiche de décès indique "accident en service" aux "avant-postes devant Bonhomme - Alsace" le 11 novembre 1918.
Sa fiche matricule porte la mention : "Tué accidentellement aux avant-postes devant Bonhomme (Alsace) le 11 novembre 1918". Cet homme semble avoir été un brancardier.
Hélas, comme bien souvent sur des sites d'archives départementales, l'état civil de Villers Ecalles pour l'année 1919 est inaccessible en ligne. Nous n'en saurons pas plus de ce côté.

Ce même 11 novembre, une patrouille de la compagnie A du 372nd infantry a procédé à un coup de main aux premières heures du matin, ce que signale le JMO de la 157e DI. Delanne a-t-il été engagé dans une patrouille mixte (franco-américaine) et victime d'un tir fratricide ? Etait-ce réellement, simplement un accident (et de quel ordre ?) ? Si le JMO du 333e RI mentionne la blessure (mortelle) du soldat Détrie, le 10 novembre, il passe sous silence la mort de Delanne le 11.

Il est bien dommage de ne pouvoir aller plus loin, en l'état.

Bien cordialement,
Eric Mansuy
"Un pauvre diable a toujours eu pitié de son semblable, et rien ne ressemble plus à un soldat allemand dans sa tranchée que le soldat français dans la sienne. Ce sont deux pauvres bougres, voilà tout." Capitaine Paul Rimbault.
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Eric Mansuy
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Re: Les pertes françaises du 11 novembre 1918

Message par Eric Mansuy »

Bonjour à tous,

Un cas vient, tardivement, d'attirer mon attention dans les pertes du 415e RI. Sur la fiche de Mémoire des Hommes de Louis Charreton, tué le 10 novembre 1918, figurent un "jugement rendu par le tribunal de Vienne le 21 février 1921" et une transcription de ce jugement "le 10 mars 1920 [sic] à Moissieu (Isère)".

J'ai toujours pensé, à tort semble-t-il, que ce type de situation (celle du jugement rendu) ne concernait que des disparus. Pourtant, Charreton a été, dès l'armistice, inhumé à Dom-le-Mesnil (dans une tombe identifiée) puis restitué en octobre 1921.

Toute explication est la bienvenue, merci d'avance.

Bien cordialement,
Eric Mansuy
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jobdx
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Re: Les pertes françaises du 11 novembre 1918

Message par jobdx »

Eric Mansuy a écrit : dim. janv. 06, 2019 3:11 pm Bonjour à tous,

Mon intervention initiale de cette discussion (ou si peu), en juin 2016, contenait des erreurs ou des manques, qu'il m'est à présent possible de corriger ou de combler.
................................
A la IIIe Armée :
106e RIT : Michel ALLANDRIEU, tué à Belval-Givet. C'est une erreur, puisque sa fiche MdH le donne « mort pour la France / 11 novembre 1918 », son RM, « fait prisonnier à Malencourt le 20 mars 1916. Disparu depuis le 2 novembre 1918. N’a pas été rapatrié. Décès fixé au 11 novembre 1918 par jugement déclaratif » ; enfin, sa fiche du CICR indique : « prisonnier depuis le 20 mars 16. Interné à Friedrichsfeld, n°84604, baraque 22 B. Sans nouvelles depuis le 2 novembre 18. »

.....................................
Bien cordialement,
Eric Mansuy
Pour être plus précis concernant ce poilu sur lequel j'ai travaillé pour un membre de sa famille, il a fait l'objet d'un premier jugement déclaratif de décès fixé au 20 mars 1916. En fait il avait été fait prisonnier : ce que confirme la fiche CICR. Puis il a fait l'objet d'un jugement rectificatif de décès qui entérine sa mort le 11 novembre 1918 à Belval-Givet , parc de l'aviation allemande.
Reste que si le 02 novembre 1918 il est dans un camp de prisonnier en Allemagne...comment peut-il être à Belval-Givet (qui n'est pas en Belgique mais dans le département des Ardennes - 08)...pour y mourrir le 11 novembre 1918 ???
Un retour ? ...Un échange de prisonniers conformément aux dispositions de cet article ?
libération prisonnier.png
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Jo
loloastre
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Re: Les pertes françaises du 11 novembre 1918

Message par loloastre »

Bonjour,
Eric Mansuy a écrit :J'ai toujours pensé, à tort semble-t-il, que ce type de situation (celle du jugement rendu) ne concernait que des disparus.
De mémoire, j'ai déjà trouvé au moins deux autres cas de jugements pour valoir acte de décès :
- pour corriger un acte de décès qui comprenait une erreur de personne,
- pour établir le décès d'un militaire qui avait été identifié lors de son inhumation, mais qui n'avait pas eu d'acte de décès à ce moment-là.
Cordialement.
Laurence
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Eric Mansuy
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Re: Les pertes françaises du 11 novembre 1918

Message par Eric Mansuy »

Bonjour à tous,

Merci Jo pour ces développements, qui posent en effet question (et pour lesquels je n'ai pas de réponse).
Merci Laurence pour ces précisions ; bien des zones d'ombre restent à éclaircir...

Bien sincèrement,
Eric Mansuy
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Eric Mansuy
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Re: Les pertes françaises du 11 novembre 1918

Message par Eric Mansuy »

Bonjour à tous,

En reprenant les divers récits de la mort d’Augustin Trébuchon, publiés en 2018 dans la presse et sur divers sites institutionnels ou gouvernementaux - mort dont les circonstances ne sont le plus souvent jamais sourcées - je m’aperçois que la logique n’est pas poussée à son terme.
En effet, si je m’en tiens à ce qui figurait, entre autres, dans La Dépêche, "une chape de plomb et d’oubli volontaire va aussi s’abattre sur ces derniers morts, avec pour commencer la falsification de la date de décès sur les tombes puisqu’officiellement, Augustin Trébuchon et ses camarades sont tombés le… 10 novembre 1918."

Dans ce cas, pourquoi les défenseurs de la thèse de la falsification ne nomment-ils pas ceux qui, par leur vision des choses - qui n’est jusqu’à présent fondée sur aucun élément tangible et aucune source - sont tenus pour des parjures, et sont un objet d’opprobre, indirectement, depuis des années ?

Pierre Joseph Alexandre Berthet, né en 1883, et qui dresse le 12 novembre 1918 les actes de décès de tous les tués au feu, a une longue carrière militaire derrière lui : engagé volontaire pour 3 ans en 1901, il gravit tous les échelons et intègre la réserve comme sergent en novembre 1904 ; rappelé à l’activité à la mobilisation, il est sous-lieutenant en octobre 1914, étant alors au 299e RI. Sa fiche matricule ne porte pas mention d’une blessure, mais le JMO du 299e RI indique son entrée à l’hôpital le 17 février 1915. Qui nous prouvera que cet ancien "étudiant ecclésiastique" devenu industriel, chevalier de la Légion d’honneur, mort en décembre 1938, a, 20 ans plus tôt, manqué de probité, et a trahi sa parole tout en obligeant de nombreux autres combattants à faire de même ?

Les deux témoins de l’acte de décès de Trébuchon (sans compter TOUS les autres témoins de TOUS les autres actes de décès), qui auraient donc menti sous serment, si l'on s'en tient à la thèse de la falsification, étaient Charles Herbette et Emilien Vidal, tous deux sergents.
Charles Herbette, né en 1888, engagé volontaire en 1908, était un ancien Bat’ d’Af’ et avait fait campagne en Algérie et au Maroc entre 1908 et 1911. Cité à l’ordre de l’armée en août 1918, il était également titulaire de la Médaille militaire. Il s’est éteint en 1951.
Emilien Vidal, né en 1895, a été blessé trois fois (en 1916 par éclat d’obus, en 1917 par éclat de grenade, en 1918 par balle), cité une fois à l’ordre de la brigade, une fois à l’ordre de la division.
De bons soldats, mais des hommes dévoyés… ?

Comme cela a déjà été soulevé plusieurs fois dans cette discussion, aucun de ces hommes n’a donc révélé cette falsification entre le 12 novembre 1918 et le jour de sa mort ? Auraient ainsi également menti :
Paul Aussenac, une blessure, cité à l’ordre du régiment ?
Joseph Beauguitte, cité à l’ordre du régiment ?
Théophile Dalmas, une blessure, cité à l’ordre de la brigade ?
Georges Daval, cité à l’ordre de l’armée ?
Albert Davière, cité à l’ordre du régiment ?
Bamboula Demeter, cité à l’ordre du régiment ?
Charles Flaix, cité à l’ordre du régiment ?
Georges Gaillet, une blessure, cité à l’ordre du régiment ?
Louis Gouraud, cité à l’ordre de la division ?
Elisée Lecomte, trois blessures, cité à l’ordre du régiment et du corps d’armée, titulaire de la Médaille militaire ?
Arthur Naudin, une blessure, cité à l’ordre du régiment, titulaire de la Médaille militaire ?
Adolphe Nicolas, cité à l’ordre du régiment ?
Albert Paulhé, cité à l’ordre du régiment ?
Joseph Pietri, deux blessures, cité à l’ordre du régiment ?
Louis Pigeon, cité à l’ordre du corps d’armée ?
Lucien Vaslot, une blessure, cité à l’ordre du régiment ?
Georges Vaudrémont, une blessure, cité à l’ordre du régiment et de la division ?

Parmi bien d’autres…

Vraiment, que rien n’ait été su hors du 415e RI, des années durant, plus ou moins longtemps après l’armistice, me laisse dubitatif. A fortiori, tous ces hommes auraient-ils eu si peu de parole et d’honneur qu’ils les souillent en se rendant complices d’une telle manœuvre, et souillent par là même la mémoire de leurs camarades ? Et ce, non pas après la publication de la « Loi modifiant la législation des pensions des armées de terre et de mer en ce qui concerne les décès survenus, les blessures, reçues et les maladies contractées ou aggravées en service », en mars 1919, mais dès le 12 novembre 1918 ?

Je peine à y croire, surtout sans aucune preuve. Pour ne se focaliser, d'ailleurs, que sur le 415e RI, puisque dans d'autres unités (et même tout à côté, au 142e RI, avec Maurice Nicod), des décès au combat le 11 novembre ont été enregistrés sans "falsification" aucune.

Bien cordialement,
Eric Mansuy
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MonchyIR73
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Re: Les pertes françaises du 11 novembre 1918

Message par MonchyIR73 »

Intéressant!
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alain51
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Re: Les pertes françaises du 11 novembre 1918

Message par alain51 »

Bonjour,

Concernant Trébuchon, si j'ai bien compris le fil, il a ( ou aurait) été tué le 10 novembre, mais selon certaines sources il aurait été tué le 11 novembre. Et sa date de décès aurait été changée sur les documents officiels et sur la plaque nominative de sa tombe pour être le 10 novembre.



Du coup, ma question est simple : Qui, le premier, a lançé cette information comme quoi Trébuchon a été tué le 11 novembre ?
Question subsidiaire : Qui a ensuite repris cette information et l'a diffusée en de multiples lieux et à de multiples reprises ? Certains sites des plus crédibles.

Extrait 1 : site INFO.GOUV.FR :
Le 11 novembre 1918, la France et l’Allemagne signent l’armistice. Il est 5h15. Mais les hostilités ne cessent pas immédiatement. À 10h50, soit 10 minutes avant la fin des hostilités, le soldat de première classe Augustin Trébuchon tombe au combat à Vrigne-Meuse dans les Ardennes.
Extrait 2 : WIKIPEDIA :
Augustin Trébuchon, né le 30 mai 1878 au Malzieu-Forain (Lozère) et mort au combat le 11 novembre 1918 à Vrigne-Meuse (Ardennes), est considéré comme le dernier soldat français mort au combat de la Première Guerre mondiale sur le sol français. Il était âgé de 40 ans.
Extrait 3 : LEJDD :
11-Novembre : enquête sur le dernier poilu, mort quinze minutes avant le cessez-le-feu
Il y a cent ans, un quart d'heure avant le cessez-le-feu, Augustin Trébuchon fut l'ultime victime française de la Grande Guerre. Sa mort, survenue plus de cinq heures après la signature de l'armistice, était tellement absurde qu'elle a été antidatée par l'armée.
Extrait 4 : FRANCETVINFO
Ce soldat de première classe et agent de liaison au sein du 415e régiment d'infanterie a pris une balle en plein front, 10 minutes avant l'armistice du 11 novembre 1918
Et de très nombreux articles, tous plus ou moins similaires. Certains mentionnant que c'est l'armée qui a antidaté cette date de mort.

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Ma vision de la grande guerre : https://lagrandeguerre.1fr1.net/t148513 ... nde-guerre
air339
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Re: Les pertes françaises du 11 novembre 1918

Message par air339 »

Bonjour,
Concernant Trébuchon, si j'ai bien compris le fil, il a ( ou aurait) été tué le 10 novembre

Sur ce sujet précis, voir l'intervention d'Eric à la page 7 de ce fil de discussion, qui explique la date de décès du 10 novembre.

Pour faire court, la 9e compagnie d'Augustin Trébuchon atteint, le 10 novembre au matin, la ligne A située sur cette carte (fond Géoportail - Cette position de la compagnie est reprise du livre du petit-fils du commandant du régiment, "Le vagabond de la Grande Guerre", Alain Fauveau, 2008, page 209).

415 RI 9e Cie.jpg
415 RI 9e Cie.jpg (47.02 Kio) Consulté 1591 fois
Une contre-attaque allemande, vers 11h ce 10 novembre, rejette la compagnie (et tout le régiment) derrière la voie de chemin de fer, ligne B de cette carte.
Du 10 novembre en début d'après-midi jusqu'au 11 novembre 11h, le 415e RI reste sur sa position, en B.
De A à B, il y 1 km.

Le 13 novembre, le corps d'Augustin Trébuchon est retrouvé dans les alentours de A, sur les positions perdues le 10. Le récit en est fait par l'aumonier de la division, dans l'ouvrage "La poursuite victorieuse", Georges Guitton, Payot, 1919, page 233.

Cordialement,

Régis R
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alain51
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Re: Les pertes françaises du 11 novembre 1918

Message par alain51 »

Bonjour.

Je comprends bien que Trébuchon a été tué le 10, lors d'une contre-attaque allemande à 11 heures, ce même jour.

Mais ma question était la suivante : Officiellement tué le 10 novembre, qui, le premier, a lançé l'information que Trébuchon a été tué le 11 (et non pas le 10) ? Et sur quelles bases ? Pourquoi quantité de médias ont suivi ?

Parce que tous les médias, site internet, etc, racontent la mort de Trébuchon le 11, parfois même 10 minutes avant 11 heures. Pour plaire au lecteur en lui racontant une belle histoire ?

Encore ces sites, par exemple et bien d'autres :
- site cité dans le corps de ce sujet : https://www.charleville-sedan-tourisme. ... trebuchon/
- une historienne citée : https://www.la-croix.com/France/Augusti ... 1300978806
- la date falsifiée : https://www.francebleu.fr/infos/educati ... 1541604236
Tombé au front 5 heures après la signature de l’armistice à Rethondes, il est tué 10 minutes avant l’entrée en vigueur du cessez-le-feu fixé à 11 heures.
Une balle dans le front, dix minutes avant le cessez-le-feu: Augustin Trébuchon est reconnu comme le dernier poilu mort au combat sur le sol français", affirme Carole Marquet-Morelle, historienne et directrice du Musée de l'Ardenne à Charleville-Mézières.
Augustin Trébuchon est le dernier Poilu mort au combat à Vrigne-Meuse, 10 minutes avant le cessez-le-feu. L'histoire d'Augustin Trébuchon est restée très longtemps ignorée. Ce n'est qu'en 2008 que le berger lozérien a été reconnu officiellement dernier mort français de la grande guerre. Saïd Makhloufi vous propose de revenir sur l’énigme du dernier tué de la Grande guerre. Pourquoi la date à laquelle il a été tué a été falsifiée ?
Je rajoute un élément : Le "mythe" de Trébuchon, tué le 11 novembre, est récent (qui l'a lançé ?). L'almanach du combattant de 1968, qui aborde longuement la période de l'armistice de 1918, ne parle jamais de cette histoire de Trébuchon.

Alain
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