Réflexions d'un brancardier

Parcours individuels & récits de combattants
Avatar de l’utilisateur
pierret
Messages : 661
Inscription : jeu. févr. 03, 2005 1:00 am
Localisation : BOURG-EN-BRESSE

Re: Réflexions d'un brancardier

Message par pierret »

Bonsoir M. Mansuy.
Un grand merci à vous de parler du 133° RI.

Bien cordialement.

Jean-Louis
Avatar de l’utilisateur
Eric Mansuy
Messages : 4996
Inscription : mer. oct. 27, 2004 2:00 am

Re: Réflexions d'un brancardier

Message par Eric Mansuy »

Bonjour Stéphan,
Bonjour aux amoureux des "Lions du Bugey" (qui se reconnaîtront :) ),
Puisque Stéphan le demande si gentiment (et si avidement !), je vous livre le début du passage concernant la blessure et l'évacuation du brancardier C. (le 6 juin 1915). La suite ne tardera pas...

2 juin : préparation pour le départ.
A 2 h., on monte dans les fourgons automobiles qui sont venue nous chercher. Nous passons par St-Dié, Corcieux, Gérardmer et nous arrivons dans la nuit au Collet, puis nous allons coucher au col de la Schluch.

3 juin : départ et nous allons cantonner dans des bois entre la Schluch et l'Altenberg et nous y passons la nuit.

4 juin : nous remontons du coté de la Schluch, puis par des bois, des ravins, des précipices, des montées très raide, et après beaucoup de peines car il fait très chaud, nous arrivons près de Gachenet, Alsace.

5 juin : nous restons toute la journée dans le bois et nous couchons sous les sapins.

...

Amicalement,
Eric
"Un pauvre diable a toujours eu pitié de son semblable, et rien ne ressemble plus à un soldat allemand dans sa tranchée que le soldat français dans la sienne. Ce sont deux pauvres bougres, voilà tout." Capitaine Paul Rimbault.
Avatar de l’utilisateur
pierret
Messages : 661
Inscription : jeu. févr. 03, 2005 1:00 am
Localisation : BOURG-EN-BRESSE

Re: Réflexions d'un brancardier

Message par pierret »

Bonjour à vous tous, bonjour M MANSUY

Bien que cela n’ait pas de rapport direct avec le brancardier dont ce fil fait l’objet, mais puisqu’il s’agit du 133, je ne souhaite pas créer un nouveau fil pour vous faire partager les lettres d’un soldat du 133°, lettres écrites le 15 juin 1915, au moment de l’attaque sur la cote 830 de Metzeral, donc à la même époque que les notes du brancardier.

Les documents ci-après sont extraits d’un « tableau » commémorant les combats de Metzeral (15 - 22 juin 1915) et de La Fontenelle ( 8 – 16 juillet 1915). Ce tableau, qui est nominatif, a été remis aux soldats qui ont combattu sur ces deux champs de bataille ; il a été dessiné et écrit par un musicien du 133° . Ce tableau comporte également d’autres écrits tel que : les citations du Régiment, les Ordres du Régiment et de la Division, les Ordres d’Opérations.. …

« Le Moral des soldats du 133 – 2 lettres trouvées sur le corps du soldat Ch..... Auguste, matricule 8... de la 4ième Cie du 133 »

« Mardi 15 juin 1915 – Chers Parents – Puisque vous recevez cette lettre, c’est que je ne suis plus de ce monde. En effet, nous attaquons aujourd’hui et croyez, Chers Parents, que j’y vais avec courage. Je ne vous donne pas de détails car au moment où j’écris nous n’avons encore rien fait. D’ailleurs il y en aura assez pour vous dire ce qui s’est passé. Soyez persuadés, mes biens aimés Parents, que ma dernière pensée va à vous et celle que j’aime. Ne me pleurez pas, je n’en vaut pas la peine et je tombe en faisant mon devoir. Adieu et Vive la France. Auguste »

« Mardi 15 juin 1915 – Chère Yvonne – C’est fini pour moi si tu reçois cette lettre, c’est que je serai mort quand elle te parviendra. Ne me pleure pas Amie, j’ai fait mon devoir comme tous . je ne suis pas à plaindre. Tu te consoleras vite et tu seras heureuse, il le faut .... je le veux ! Mes dernières pensées vont à toi et à mes parents. Adieu, je tombe en t’aimant. Auguste »

Le soldat Ch..... Auguste décédait le 16 juin 1915.


Encore un amical bonjour à m MANSUY que j’espère retrouver bientôt soit à Bourg en Bresse (où est enterré le Lieutenant Chevier de Corcelles que vous mentionnez dans un message ci-dessus) ou dans les Vosges à Ban de Sapt où reposent tant de Lions du Bugey.

Bien cordialement à vous tous.

Jean-Louis PIERRET
Avatar de l’utilisateur
Eric Mansuy
Messages : 4996
Inscription : mer. oct. 27, 2004 2:00 am

Re: Réflexions d'un brancardier

Message par Eric Mansuy »

Bonsoir à tous,
Bonsoir M. Pierret,
Merci pour ces lettres, que vous avez très bien fait d'insérer "à la suite de ma suite", si j'ose dire. Philippe Crozet a dû apprécier tout autant que moi ! ;)

Très cordialement et à bientôt sur le terrain, en effet,
Eric Mansuy
"Un pauvre diable a toujours eu pitié de son semblable, et rien ne ressemble plus à un soldat allemand dans sa tranchée que le soldat français dans la sienne. Ce sont deux pauvres bougres, voilà tout." Capitaine Paul Rimbault.
Avatar de l’utilisateur
Eric Mansuy
Messages : 4996
Inscription : mer. oct. 27, 2004 2:00 am

Re: Réflexions d'un brancardier

Message par Eric Mansuy »

Bonsoir à tous,
Comme promis, voici la suite...
Bien cordialement,
Eric Mansuy


6 juin 1915 : Nous restons encore toute la journée a la même place, puis a la nuit nous allons en avant pour faire des tranchées après avoir suivie des boyaux pendant 2 h. La nuit et très noire, nous arrivons au premiere ligne ou nous avons travailler a placer des sacs a terre, puis nous nous sommes porter en avant pour commencer une nouvelles tranchées. A peine y sommes nous arriver que les Boches qui sont a peine a 50 metres lance des bombes lumineuse, puis nous ayant apperçus, dirige sur nous un feu nourie. Une balle éclate dans mon genou gauche et me broie la rotule.
Tous le monde c’est coucher mais les Boches continue a tirer, puis c’est les grosses marmites qui arrivent et nous ne pouvons pas bouger. Mon genou me fait bien souffrir, je pert beaucoup de sang. J’attend toujours une autre balle ou une bombe qui vat m’achever. Enfin, après une longue attente, mes camarades on pu se retirer en rampant puis deux sont venue et mon trainer jusqu’au boyau. De la, c’est sur leurs épaules, le boyau étant trop étroit, qu’il mon porter, ma jambe traine, balance, bute contre la tranchée, me fait tellement souffrir qua plusieurs reprise je pert connaissance.
Après beaucoup de peine on arrive au poste de secour. On coupe mon pantalon qui est plein de sang. Mon genou et affreu. On me fait un 1er pansement et on a beaucoup de peine a arreter le sang et l’on doit me refaire un autre pansement, puis après mêtre reposer 2 h., les brancardiers mon porter avec beaucoup de peine a l’ambulance divisionnaire ou j’y ai rester toute la journée.

7 juin 1915 : A la nuit, on pend mon brancard sous une voiture a deux roues et trainer par un mulet on me transporte par des mauvais chemins jusqu’au Collet. Vous dire ce que j’ai souffer en chemin, je suis arriver épuisé et l’on a du me laisser reposer plus de 2 h., et une voiture d’ambulance anglaise ma mener a Gerardmer. La route était tellement encombré par des ravitaillement et des fourgons automobiles qui amenait des troupes, que nous étions souvent arreter et ce n’est qu’a minuit et demi que je suis arriver a l’hopital d’évacuation ou l’on ma fait de suite une picure antitétanique puis un pansement et l’on ma placer la jambe dans une goutiere, puis coucher mais je n’ai pas pu dormir. Au matin, on ma transporter a l’hopital Hotel Terminus ou l’on ma fait une premiere opération. J’ai rester dans la goutiere jusqu’au 11 juin.


"Un pauvre diable a toujours eu pitié de son semblable, et rien ne ressemble plus à un soldat allemand dans sa tranchée que le soldat français dans la sienne. Ce sont deux pauvres bougres, voilà tout." Capitaine Paul Rimbault.
Avatar de l’utilisateur
alain chaupin
Messages : 1077
Inscription : lun. oct. 18, 2004 2:00 am

Re: Réflexions d'un brancardier

Message par alain chaupin »

Bonsoir à tous
Il m'est souvent arrivé de penser aux souffrances qu'ont pu endurer tous ces blessés laissés sur le terrain, ça devait être insupportable et leur agonie n'a fait qu'accentuer cette vision de la mort qu'ils cotoyaient tous les jours.
Combien ont souhaité mourir d'une balle dans la tête plutôt que d'agonir lentement ou d'être estopié pour le restant de leurs jours.
Je pense que l'on est loin de pouvoir s'imaginer ce qui a pu se passer dans leur tête, un film "Johnny s'en va-t-en guerre" traite de ce sujet pour ce que je m'en souvienne !!
En tout cas merci à Eric de nous rappeler cette triste réalité.
Bien cordialement
Alain
Ceux qui reviendront de cette guerre et qui auront comme moi passés par toutes les misères qu'un homme peut endurer avant de mourir, devra s'en souvenir, car chaque jour qu'il vivra sera pour lui un bonheur."
Gaston Olivier - mon Grand-Père
http://www.
Avatar de l’utilisateur
Eric Mansuy
Messages : 4996
Inscription : mer. oct. 27, 2004 2:00 am

Re: Réflexions d'un brancardier

Message par Eric Mansuy »

Bonjour à tous,
Bonjour Alain,
Je vous rejoins tout à fait : j'ai vu Johnny s'en va-t-en guerre à 20 ans et j'avoue en avoir gardé un souvenir douloureux. Dans un registre plus moderne, j'ai trouvé La Chambre des officiers assez pénible également ("pénible" dans le sens "qui ne fait pas de bien", si je puis dire).
J'espère pouvoir vous poster bientôt la suite.
Bien cordialement,
Eric Mansuy
"Un pauvre diable a toujours eu pitié de son semblable, et rien ne ressemble plus à un soldat allemand dans sa tranchée que le soldat français dans la sienne. Ce sont deux pauvres bougres, voilà tout." Capitaine Paul Rimbault.
Avatar de l’utilisateur
Le Gaillard
Messages : 129
Inscription : ven. nov. 25, 2005 1:00 am

Re: Réflexions d'un brancardier

Message par Le Gaillard »

«...Soyez persuadés, mes biens aimés Parents, que ma dernière pensée va à vous et celle que j’aime. Ne me pleurez pas, je n’en vaut pas la peine et je tombe en faisant mon devoir. Adieu et Vive la France...»

«...Ne me pleure pas Amie, j’ai fait mon devoir comme tous . je ne suis pas à plaindre. Tu te consoleras vite et tu seras heureuse, il le faut .... je le veux ! Mes dernières pensées vont à toi et à mes parents. Adieu, je tombe en t’aimant...»
==> Existe-t-il simplement plus beau message d'Amour en pleine guerre ?

Mais qu'est-ce qui peut bien pousser les Hommes à se faire la guerre ???

Ces 2 extraits sont pour moi sincèrement boulversants!!! :sweat: :sweat: :sweat:
Face à la mort, ces valeureux soldats ont bel et bien écrit les + belles pages de cette "Grande Guerre"!

Merci Eric et merci PIERRET de nous faire partager tout cela.
Cela renforce mon admiration pour ces hommes de Valeur, et remplis de courage face à leur destin qui défilait et s'écrivait sous leurs propres yeux...
:sweat:

Ces hommes étaient à coup sûr bien plus que des Hommes!
Cordialement, Marc
«Souvenez-vous que vous êtes du 35e(...)descendants des vainqueurs de Wagram, de la Moskowa, d'Alger, de Sébastopol(...)Allez-y gaiement:ceux qui se trouveront en face(...)préféreront être ailleurs.» 1912-Colonel de MAUD'HUY
Avatar de l’utilisateur
mireille salvini
Messages : 1195
Inscription : jeu. déc. 15, 2005 1:00 am

Re: Réflexions d'un brancardier

Message par mireille salvini »

bonjour Eric

j'ai lu avec beaucoup d'intérêt ce témoignage surtout la partie relatant la blessure,non pas par esprit malsain,mais parce que s'il est une chose difficilement transcriptible,c'est bien tout ce qui relève de la souffrance: par définition, elle est personnelle,intime et donc subjective.
et il faut bien du talent pour arriver à faire ressentir à autrui un peu de sa douleur,de sa souffrance,et du cortège de sentiments qui l'accompagne:peur,détresse,courage et envie de vivre ou de mourir...etc.
pour le blessé qui a le temps de coucher par écrit ces souvenirs douloureux (dans tous les sens du terme),c'est aussi une manière de se les réapproprier pour en maîtriser l'impact et ainsi pouvoir les dépasser.
et si de tels récits révèlent un peu de la personnalité du blessé,ils témoignent aussi de sa capacité à surmonter l'épreuve,et quand le talent d'écriture s'y ajoute,l'émotion est au rendez-vous et on arrive presque à ressentir la souffrance décrite.

j'en viens à Johnny s'en va-t'en-guerre:
j'ai vu le film et j'ai lu le livre,ils sont tous deux dans ma bibliothèque.
si vous avez été bouleversé par le film,lisez plutôt le livre:il vous laissera K.O.
par son écriture singulière,il vous prend par la main et vous emmène au pays d'un grand blessé de guerre:son humanité (au sens 1er du terme),son courage,son immense détresse,son envie de vivre malgré tout,son combat,tout cela vous touche en plein coeur et vous brûle la tête (et vice-versa)..
le livre terminé,Johnny hante longtemps les pensées...
l'auteur,Dalton Trumbo,n'est pas un "témoin" (né en 1905),mais il a su capter toute l'âme des combattants blessés pour en faire un terrible réquisitoire contre la guerre.

amicalement...........mireille


Aucune justice n'est possible pour les morts… mais si nous ne pratiquons pas le devoir de mémoire, ils mourront une seconde fois.
(Elie Wiesel-prix Nobel de la Paix)
Avatar de l’utilisateur
Nico56
Messages : 253
Inscription : mer. nov. 16, 2005 1:00 am

Re: Réflexions d'un brancardier

Message par Nico56 »

Pour rester dans le domaine médical et plus précisément de la convalescence voici le témoignage d'un soldat justement convalescent.
Il semble être paradoxalement (et ça se comprend) heureux d'être blessé (ou malade)!!! :sweat:
Ce témoignage est intéressant car il montre le déroulement type des journées de ce soldat convalescent.
Il n'y a pas de mention de lieu mais la carte postale (en FM) est une carte de St Etienne.

Le 28/02/1917
" Encore une fois tranquillise toi sur mon sort. Je suis bien soigné. Nous avons un ordinaire substentiel, abondant et du vin, presqu'un demi litre par repas. Le matin café au lait ou chocolat. A 11h, 2 plats et déssert. A 15h goûter chocolat sec, pain et tisane. A 18h soupe et 2 plats et déssert. Nous sortons de 12h à 17h30. Tu vois qu'on est tout à fait bien.
Ce sont des infirmières bénévoles qui nous soignent. C'est l'association des dames de France. Il y a en plus 3 infirmières et 3 infirmiers laïques, plus 2 ou 3 soeur. Les dames de France servent à table et font quelques petits travaux d'intérieur.
Envoi moi ma tunique neuve dans un colis... Je t'embrasse très affectueusement. Vaisser
Répondre

Revenir à « Parcours & livres d'or »