Complément sur l’attaque du 28 Septembre 1918
Rapport du Lieutenant de Vaisseau DARDY, commandant ALOUETTE II. 3 Octobre 1918
Appareillé de Messine avec CARAIBE et MARGUERITE MARIE qui prend poste en avant. ALOUETTE II est sur l’arrière du cargo. Avant d’arriver à l’extrémité du chenal, je gagne sur l’avant de CARAIBE et stoppe pour faire de l’écoute Walser et microphone. Les appareils d’écoute sont sourds et c’est sans doute la raison pour laquelle ALOUETTE II faisant de l’écoute quelques instants avant l’attaque du sous-marin, n’a rien entendu. L’écoute était mauvaise ce jour-là, mais je ne puis déduire de ce cas particulier que l’écoute de nuit est des plus trompeuses. J’estime que de nuit, le contact à l’écoute ne peut être utilement recherché que par un seul bâtiment qui soit assez rapide pour donner la chasse à un sous-marin. Ces conditions excluent de l’écoute de nuit les chalutiers qui n’ont pas de vitesse et les torpilleurs qui n’ont pas de Walser. Ces derniers devraient au moins avoir des microphones plomb de sonde.
A 16h18, alors que CARAIBE vient de terminer une embardée sur la droite, une torpille frappe à tribord par le travers de la passerelle. L’explosion est très violente.
Mis à toute vitesse, à droite toute et passé sur l’arrière de CARAIBE. On distingue le sillage de la torpille jusqu’à son origine. Lancé 4 grenades réglées à 30 m. Toutes explosent. Stoppé pour écoute Walser et microphone.
CARAIBE stoppe et amène deux embarcations, mais reste parfaitement droit. Je lui fait signe : « Faites route sur Messine ».
MARGUERITE MARIE lance des grenades et hisse : « Sous-marin par tribord ». CARAIBE et une batterie côtière italienne tirent sur les points de chute de MARGUERITE MARIE qui a ouvert le feu. Fait route sur le chalutier et lui signale d’aller s’occuper du cargo stoppé. Un contre-torpilleur anglais tourne autour du vapeur.
Le Walser donne 50° bâbord et nous devons être très près du sous-marin. Les relevés d’écoute montrent que le sous-marin a d’abord fait route au NE vers la terre, puis vers Vaticano, et est enfin revenu vers le détroit.
Remorqué par MARGUERITE MARIE, le cargo est entré dans le détroit. Je n’ai plus à craindre un 2e torpillage et l’écoute indique que le sous-marin est à 1500 m et se déplace à grande vitesse.
Le PROTET me rallie à 18h35 et j’ai, peur que son arrivée n’égare mon écoute. Je lui signale au Colomb de se tenir à 1000 m derrière moi.
Le contact au microphone est conservé jusqu’à 20h30, sans que je puisse me rendre compte si je ne relève pas le gisement du PROTET, que je ne vois plus. Le contact est perdu à 20h30 et on me signale que RICHELIEU me rallie et que CARAIBE est entré dans le port de Messine. Le sous-marin a du fuir en surface.
A 09h30 le 29, ordre de rentrer à Messine. Amarré à quai à midi.
Au cours de cette rencontre, le Walser s’est montré très inférieur à ce qu’il avait été lors de notre poursuite du 5 et 6. Je ne sais à quoi attribuer ces mauvais résultats. (Température élevée de l’eau, proximité de la côte…) L‘arrivée du PROTET a été une gêne très sérieuse. Il est indispensable de prévoir qu’aucun bâtiment ne soit envoyé en renfort de nuit à un groupe d’écoute.
Extrait du rapport du 1er maitre PENNEC, commandant MARGUERITE MARIE
16h35 Pris CARAIBE en remorque.
16h40 Vitesse 3 nœuds. Manœuvre très délicate, CARAIBE ayant son gouvernail immobilisé et le courant étant très violent dans le détroit. Fait des embardées inquiétantes.
18h00 passé notre remorque de l’avant à un petit remorqueur italien qui nous prend en flèche.
19h30 Largué la remorque à l’entrée du port et venu en couple tribord de CARAIBE que l’italien prend en remorque. Le navire est échoué et le commandant me remercie.
23h00 Appareillé pour rejoindre ALOUETTE II.
Rapport de la commission d’enquête
Ce long rapport reprend tout le déroulement des faits tels que rapporté par le capitaine Dagorne. Il précise que 3 coups ont été tirés par la pièce de 90 mm avant et deux coups par la pièce de 140 mm arrière.
Le sous-marin devait se trouver à 800 ou 1000 m dans l’Est tandis que le vapeur filait 7,5 nœuds.
Machine et chaudières ont été envahies par l’eau. Le chargement a été en partie perdu.
Position des navires au moment de l’attaque

Note du CV VINDRY, Chef de Division, au Préfet Maritime de Bizerte. 7 Octobre 1918
CARAIBE a été torpillé le 28 Septembre à 3 milles au Nord du cap Peloro. Le bâtiment a pu être remorqué à Messine.
La surveillance du détroit de Messine par patrouilles de surface et patrouilles de l’air est – si elle existe - peu efficace.
Le Lieutenant de Vaisseau commandant ALOUETTE II signale la conduite digne d’éloges du 1er maître PENNEC, commandant MARGUERITE MARIE. J’adresse par ailleurs pour cet excellent gradé une demande e proposition extraordinaire pour le grade de maître principal.
Cdlt