Rech Medecin Aux. fait prisonnier début offensive Verdun

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vincentlelong
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Re: Rech Medecin Aux. fait prisonnier début offensive Verdun

Message par vincentlelong »

Remerciements particuliers à Jean-Claude pour ses indications,
j'ai fait une demande via le site du CICR à Genève, formulaire de recherche très clair...
Attendons la réponse...

Merci à tous !
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vincentlelong
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Re: Rech Medecin Aux. fait prisonnier début offensive Verdun

Message par vincentlelong »

Epilogue de 6 mois de recherches qui se sont avérées passionnantes et fructueuses.

Grande émotion en prenant connaissance d'un journal d'une trentaine de pages manuscrites, récit par mon Grand-père des terribles journées de l'Herbebois du 21 au 25 février 1916, suivies pour lui d'une captivité de 7 mois en Allemagne (Münster) puis jusqu'en Prusse Orientale (actuelle Biélorussie, environs de Grodno).

En voici un court extrait (22 février) :

"Toute la nuit debout. Je panse sans arrêt. Blessures affreuses. Amputations. Section de membres. Poitrines fracassées. Hernies cérébrales. Brûlures par liquide enflammé. Plaies de l’abdomen. Plaies des bourses. Hernies de l’épididyme. Plaies de l’abdomen avec hernie intestinale large, épiploses dehors… Souvenirs lugubres.

Lieutenant Schneider : séton du dos par balle, transversal et pariétal. Sortie très déchirée.
Adjudant Roussin : séton du bras
Beaucoup de blessures du bras gauche : cela me frappe.
Sous-Lieutenant Carrias : fracture de l’avant-bras gauche ouverte, plaie superficielle de la face… par 75 !!

La canonnade reprend avec le lever de la journée du 22. De plus en plus terrible. On se bat en plein bois, à 50 mètres. Nous n’avons pour abri que la haie artificielle masquant la lisière. Les allemands sont au réseau qui la borde. Défilé continu des blessés. J’ai les mains rouges de sang. Je suis pris d’une « grande pitié ». Mon ardeur est extrême. Nous avons 117 litres d’eau de vie que je distribue aux blessés. L’après-midi du 22 les allemands contre-attaquent. Nous répondons immédiatement du tac au tac. Le soir on couche sur les mêmes positions que la veille."


Ces pages sont aujourd'hui intégralement retranscites sur mon site perso :
Carnets de captivité : http://pagesperso-orange.fr/genealogie. ... sites2.htm
Biographie complète : http://pagesperso-orange.fr/genealogie. ... logie4.htm

Pèlerinage à Verdun au mois de mai et découverte de l'Herbebois en compagnie de Pierre L., précieux guide rencontré sur ce forum.

Nouvelle émotion à la lecture des Souvenirs de Verdun d'Eugène Carrias, sous-lieutenant du 164è RI blessé à la défense de l'Herbebois, qui évoque sa rencontre avec le "jeune médecin du bataillon" - mon grand-père :

"Nous atteignons la coupe aux abris que les obus ont fort malmenée. Les brancardiers se dirigent vers le poste de secours que j'ai visité quinze jours plus tôt alors qu'il venait d'être achevé ; ils me déposent à terre puis, lentement, deux d'entre eux me descendent dans l'abri d'où s'échappent de faibles plaintes, des gémissements et une odeur âcre et fade d'iodoforme et de sang.
Une bougie jette une lueur indécise sur un entassement d'uniformes sales d'où émergent des têtes hâves et hirsutes et que barrent des pansements d'une blancheur de neige.
Mon arrivée soulève un flot d'imprécations et de jurons, des blessés qui dorment par terre ayant été heurtés par les montants de mon brancard.
Le jeune médecin auxiliaire du bataillon s'approche de moi et me demande des nouvelles en me serrant la main.
Il chuchote quelques mots à l'oreille d'un infirmier et l'on coupe mes vêtements avec des ciseaux autour de mon bras gauche. Ma blessure est mise à nu, mais je ne peux pas la voir, étant allongé. le docteur la tamponne avec du coton humide, je tressaille plusieurs fois sous la douleur et je laisse échapper des plaintes. Après un long moment durant lequel on sonde ma plaie et on la lave, on empaquette mon avant-bras dans du coton et de la gaze, et on le place dans une gouttière en fil de fer. Finalement on me fait une piqûre au bas du ventre.
Les précautions prises par le docteur me font comprendre que je suis grièvement blessé. Je lui demande :
- Ne va-t-on pas me couper le bras ?
- Mais non, me répondit-il sans conviction, ce n'est rien, vous serez bientôt guéri.
On m'attache au brancard avec les courroies de mon équipement et on me sort du poste de secours."


Pour conclure et revenir au "jeune médecin" (24 ans), confronté au terrible choix de se replier avec les débris du régiment avant l'encerclement du Bois, ou de rester auprès de la cinquantaine de blessés intransportables qui le supplient de ne pas les abandonner, il reste, conscient de s'offrir à une captivité redoutable, et assure le transfert de ses blessés jusqu'au dernier, pour les confier à l'ambulance allemande.

Sa déportation sur les bords du Niémen est un cauchemar dont il sort à la limite de l'épuisement physique et moral (rapatrié par un providentiel échange de médecins organisé par la Croix Rouge). La photo ci-dessous est prise à Paris quelques semaines après son retour (hiver 1916-17) et envoyée à travers les lignes ennemies (en "sollicitant la bienveillance de l'autorité allemande") à ses parents habitant Saint-Quentin ville occupée de l'Aisne.
Réaffecté en mars 1917 comme médecin du 86è/286è RAL dont il est auteur du JMO à partir de cette période et jusqu'à la fin du conflit.

Image

Croix de guerre et citation à l'ordre du 164ème RI :
"Sous un bombardement d'extrême violence de 3 jours et 2 nuits, a organisé le service médical du bataillon avec un dévouement et un calme hors pair. Resté avec son poste de secours aux mains de l'ennemi."
Médaille militaire :
"N'a cessé de montrer pendant les attaques devant VERDUN du 21 au 24 février 1916, le plus grand dévouement et le mépris du danger le plus complet. Fait prisonnier le 24 février, a continué à prodiguer ses soins à nos blessés dans les conditions les plus difficiles et les plus périlleuses, et est parvenu à en sauver un grand nombre."
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Achache
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Re: Rech Medecin Aux. fait prisonnier début offensive Verdun

Message par Achache »

Bonjour
Très heureux pour vous de cet aboutissment de vos recherches.
Merci de nous en avoir fait part car ces résultats ne manquent pas d'intérêt pour nous aussi.
Bien à vous,
Achache
Achache
Émouvante forêt, qu'avons-nous fait de toi ?
Un funèbre charnier, hanté par des fantômes.
M. BOIGEY/LAMBERT, La Forêt d'Argonne, 1915
FrOLIER
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Re: Rech Medecin Aux. fait prisonnier début offensive Verdun

Message par FrOLIER »

Bonjour

Dans mes notes relevées au centre d'archives du service de santé au Val de Grâce j'
FrOLIER
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Re: Rech Medecin Aux. fait prisonnier début offensive Verdun

Message par FrOLIER »

[quotemsg=6695,14,2347]Bonjour

J'ai été un peu rapide... je complète:

Dans mes notes relevées au centre d'archives du service de santé au Val de Grâce j'ai noté la trace (carton 637) d'un rapport autographe de 12pages du médecin auxiliaire Marcel Lelong transmis par la DSS du Gouvernement militaire de Paris en date du 20/10/16

Le médecin auxiliaire Marcel Lelong, de la 22ème section d'infirmiers militaires de Paris "rapport sur sa captivité (24/02 - 6/10/16) et plus particulièrement sur les camps de représailles de Russie occupée (Franzosen Kommando n° IV Etappen-Inspektion de la 12ème armée, régiment de Grodno, Pologne)", daté du 15/10/16.

Je pense que vous pourrez obtenir une photocopie du rapport en écrivant au Conservateur du Musée du service de santé des armées, 1 place Alphonse Laveran, 75230 PARIS CEDEX 05.

Pour mémoire et les chercheurs intéressés il est intéressant de signaler que chaque médecin prisonnier et libéré a établi un rapport de captivité... plusieurs centaines de ces rapports, classés par ordre alaphabétique sont disponibles au Val de Grâce. Une masse documentaire de première importance et bien souvent inédite.

Je suis sûr que ce rapport trouvera sa place sur votre site @ que j'ai parcouru avec beaucoup d'intérêt.

Bien cordialement
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vincentlelong
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Re: Rech Medecin Aux. fait prisonnier début offensive Verdun

Message par vincentlelong »

Bonsoir,

un très grand merci pour ce signalement précis, je vais bien évidemment faire la démarche pour essayer d'obtenir la copie de ce rapport, dont j'ignorais l'existence ; je ne manquerai pas de vous annoncer, si je l'obtiens, sa publication sur mon site.

Salutations,
Vincent
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vincentlelong
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Re: Rech Medecin Aux. fait prisonnier début offensive Verdun

Message par vincentlelong »

Bonsoir,

la réponse du Conservateur du Musée du Service de Santé des Armées n'a pas tardé, et comme pressenti, accompagnée d'une photocopie du précieux rapport. Qu'il en soit remercié s'il lit ce post..

Autant les notes personnelles, très complètes dans leur description des terribles journées de bataille du 21-24 février 1916 dans l'Herbebois, avaient pu sembler décevantes dans le récit de la période de captivité - autant il me semble que ce rapport officiel consacré aux conditions de détention en Allemagne et surtout dans les camps de représailles en Pologne (actuelle Biélorussie), devrait intéresser davantage les spécialistes - je pense notamment à Jean-Claude.

Le document complet est désormais en ligne sur mon site (rubrique Généalogie > Portraits > Marcel LELONG)
ou : http://pagesperso-orange.fr/genealogie. ... /m_l05.htm

En voici les premières lignes...

« A Monsieur le Directeur du Service de Santé de la Place de Paris »

RAPPORT

Du Médecin-auxiliaire Marcel LELONG, rentré d’Allemagne, sur sa captivité (24 fév. – 8 oct. 1916) et, plus particulièrement, sur les camps de représailles de Russie occupée.
(Franzosen Kommando n°IV, Etappen-Inspektion de la 12è Armée, régiment de Grodno, Pologne)


J’ai l’honneur de porter à votre connaissance les faits suivants, que j’ai constatés pendant ma captivité (24 fév. à 8 oct. 1916), et dont je certifie l’absolue authenticité. Ayant surtout séjourné en Russie (région à l’Est de Grodno) j’insisterai particulièrement sur les camps de Pologne, dits de représailles.

Je ne suis resté que huit semaines en Allemagne, au camp d’officiers de Gütersloh [15 jours], puis au camp de troupes de Münster en Westphalie [camp n°2, - 6 semaines]. A ce dernier camp dirigé par le général STEINECKE, appartiennent environ 40.000 prisonniers ; 6.000 environ seulement ont le privilège de vivre dans le camp ; tous les autres sont dans les corvées de travail (« Kommandos »), dans les fermes, mais surtout dans les mines et dans les usines. Münster est le grand pourvoyeur de main d’œuvre pour l’extraction du charbon. Le camp lui-même n’est qu’une façade brillante, une « boutique » dont les Kommandos sont « l’arrière-boutique », arrière-boutique qui n’est jamais visitée par les délégués neutres, et où la condition du prisonnier est extrêmement misérable, où il mène purement et simplement la vie de l’esclavage antique, mal logé, très mal nourri, brutalisé, forcé au travail par des procédés barbares (privation de nourriture, chambres à l’ammoniaque). Je n’ai pas été personnellement témoin de ces faits, mais j’ai vu et interrogé de nombreux prisonniers revenant des mines ; tous ont été unanimes dans leurs affirmations. En général quand ils arrivent à rentrer au camp, ils ne sont plus que des loques humaines ; ils sont pâles, anémiés, d’aspect squelettique, sans forces et rongés par l’ankylostome duodénal ; s’ils ne sont pas devenus tuberculeux, ils sont condamnés fatalement à devenir la proie du bacille.

J’ai eu l’occasion, à Münster II, de panser un prisonnier anglais porteur dans la région fessière d’une large plaie causée par un coup de baïonnette donné par un soldat allemand. Ces faits sont assez fréquents.

Le 29 avril 1916, j’ai reçu l’ordre du général STEINECKE de partir en Russie. Avec trois autres médecins auxiliaires (Martin DE LAULERIE, 324è R.I., WILLOT, 233è R .I., ALBERTI, 114è Artillerie lourde) je fus affecté au Franzosen Kommando n°IV. Nous quittâmes le camp de Münster le 1er mai, obligés de porter nous-mêmes nos bagages, pour celui de Celle-en-Hanovre, où se faisait le rassemblement du détachement. Les 1.500 sous-officiers et hommes de troupe composant le Kommando étaient recrutés surtout parmi les intellectuels ; parmi eux se trouvaient, outre les médecins, une centaine au moins d’infirmiers. Tout le détachement fut entassé dans des wagons à bestiaux le 4 mai et débarqué le 7 à 8 heures du matin à Grodno. Là il fut fractionné en de nombreux sous-détachements de 50 à 100 hommes placés sous le commandement d’un Unteroffizier ou d’un simple Gefreiter.

Tous ces sous-groupes furent dispersés, très éloignés les uns des autres, dans le pays forestier et marécageux, qui s’étend à l’Est de Grodno, depuis 20 à 80 km de cette ville. Chaque sous-groupe eut rejoint son cantonnement le 11 mai, en moyenne par deux journées de marche très pénible, avec chargement plus que complet, dans le sable, sous le soleil, sans recevoir de nourriture, à peu près sans boire, - et enfin sous les coups de crosse des sentinelles.

Les principaux cantonnements étaient : Osjory, Lakna, Babino, Pod-Biloü, Pérekop, Sklensk, Zuckary, Dubinka, Sackrjenstschtschina, Eljentoschissna, Marzinckanzy, Waziliski, Lewaschoska, -etc.

Quand les sous-groupes furent installés aux points de travail, commença pour tous les prisonniers un régime implacablement dur. Méthodiquement les allemands s’attaquèrent :

1) aux corps :
a. d’une part en imposant aux prisonniers un travail extrêmement pénible
b. d’autre part, en les soumettant à un véritable régime de famine au sens littéral du mot
c. enfin, en les faisant séjourner dans une région malsaine, marécageuse, infestée par des légions de moustiques qui ne permettaient même pas aux malheureuses victimes de prendre, après leur rude journée, un repos bien gagné. L’impression de faim jamais assouvie et les douleurs dûes aux assauts continus, nuit et jour, des moustiques, - restent les deux souvenirs dominant dans la mémoire des prisonniers de Russie.

2) au moral, - par l’isolement systématique, absolu pendant les deux premiers mois : aucune lettre, aucun colis n’arrivèrent avant le début de juillet.



... lire la suite sur : http://pagesperso-orange.fr/genealogie. ... /m_l05.htm

Meilleures salutations et encore merci pour le signalement de cette nouvelle source.
Vincent
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